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Qu’est-ce qui fait encore rêver ?

Faut se rendre à l’évidence… chaque jour est une déchéance… un petit pas de plus vers… rien !
Les débordements métaphysiques sont les soupirs de l’excès et de la débauche et lorsqu’ils sont inexplicables, de la bêtise…
On est là à s’échauffer les sangs… Pourquoi il ne l’a pas mis en dernière minute, le gros saligaud, qu’était tout seul devant le but… qu’avait qu’à pousser le ballon ?
Tonton se regarde tout con dans la glace du troquet. Il en revient pas. Son équipe aurait pu gagner facile. De pas l’avoir poussé ce ballon, la vie s’arrête… Il tient plus à rien, Tonton. Qu’est-ce qu’il en a à foutre de son petit ménage… de l’autre qui l’attend en scrutant la tocante dans la cuisine, le plat qui mijote à graillons… maintenant que le match est fini depuis une plombe… Il en louche de désillusion que demain il affrontera tout l’atelier, juste parce qu’il a pas poussé le ballon fond des filets, le numéro onze !… Ça lui remonte dans la tronche comme la dernière queue de sardine du repas de midi qu’il va pas digérer, c’est sûr. Alors pourquoi, il en reprendrait un autre, et encore un autre… de repas sur la nappe à fleurs à écouter les plaintes d’Armande. D’où tu viens ? T’es saoul !... Jusqu’à quand les plaintes ? Cinquante ? Soixante ? Nom de Dieu !... crever avant… oui… pour plus repenser à la cage vide et le ballon qui passe à côté !...

Le père Bixiou, l’épicier à la retraite, c’est pas que pour lui qu’il se sent partir. Il s’en foutrait du cancer, de la fatigue des cent mètres qui le séparent du boulanger. Il a toujours été plus que dur envers lui-même, impitoyable... L’hiver, il se les gelait volontaire par peur de tourner la vanne du chauffage. Après qu’il eût remis son fonds, recta vers les six heures il rôdait dans les allées à choisir les produits « vente rapide », ceux qu’il repérait de loin avec l’étiquette orange « 40 % ». La seule fois qu’il s’est tapé des choux à la crème, c’était l’été dernier – un caprice – 50 % de gratte… faut dire que la vente devait être super rapide… Enfin, le goût du luxe lui est passé. Et maintenant… il va laisser ses économies à ses enfants… qu’attendent que ça pour évaluer… Question mobilier, ils vont être déçus… Mais question de flouze… ils vont pas en revenir, eux qui voient leur vieux avec le même paletot depuis dix ans… Ils se montraient jamais plus, les deux chez le père… pas question… Aux façons économes, ils avaient battu en retraite.
C’était presque l’heure de claboter. Le vieux en avait fait des gorges chaudes du quartier qui se vidait de ses fantômes… et des vieux plus jeunes que lui qu’on embarquait. Il se mêlait aux gens attroupés autour des ambulances pour les commentaires… Il avait quel âge l’Eustache ? Soixante-six !... paraissait quatre-vingts… J’en ai septante-six et je l’emmerde là où il est…
C’était son tour… Des vrais dialogues entre son argent et lui le prenait des après-midi durant… Son corps réclamait un médecin, son pactole lui disait le contraire… C’est tous charlatans et compagnie, les docteurs… Ils savent rien. Ils friment… Et puis quand c’est l’heure, deux ou trois jours de plus, c’est pas ça qui va changer le monde.
Il croyait que l’argent conserve… Chaque mois la moitié de sa retraite sur les livrets… et les petits qui faisaient des petits… C’est ça qu’est beau dans l’oseille… On sème pas… on garde tout… ça vient quand même !... ça pousse dans les banques où les machines ajoutent les zéros…

C’est l’histoire de deux tapettes qui s’enculent plus comme avant ! L’amour s’est brisé, fond du vase… dégoût brutal… L’homme à trente deux ans veut faire au moins une fois dans sa vie l’expérience d’une femme. Il s’en est ouvert à l’autre, celui qu’est plus féminin… C’est la crise dans le ménage, le féminin pleure tous les soirs au lit. L’homme le touche plus… ça sent la merde, on pourrait dire pour rien, ça excite plus… ça sent plus que ce que ça veut sentir. C’est ainsi la passion, quand le champagne tourne vinaigre, on trouve tout dégueulasse… Le féminin est à bout de nerfs. Après tout, il s’est peut-être trompé sur la nature de son compagnon. A force de tirer sur le cabestan, il lui est remonté une scissure qu’a viré fistule… Le repos du guerrier permet la réflexion. Il donne carte blanche, mais il veut voir la dame…
L’homme trouve facile une paumée qui sait pas lire les troubles de l’âme. Penser qu’un homme peut l’aimer la rend dingue…

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Elle a beau savoir que deux brosses à dents dans le même verre, des calbars des deux mecs mêlés dans le même panier à linge, ça fait pas que rapprocher les effluves… Un plumard pour deux pour un type qu’on ne fait qu’héberger et qui n’est là que pour la semaine, c’est pas suffisant comme excuse… Comme elle croit qu’on l’aime, elle aime… C’est son tort.
L’homme savait pas comment c’est fait une bonne femme. Il en a plein son petit Jésus du programme. La tarte aux poils, sans la complicité, le goût sûr du féminin à couilles et cette passion de l’architecture qui les rassemblait à la planche devant l’épure, le féminin et lui, trois années enfin d’entubage, ça marque un couple. La pauvre chérie, sur son nuage, se mettait sur le dos et fermait les yeux.
Le féminin la trouve horrible, avec des seins monstrueux… Il assiste aux ébats dans la cuisine juste à côté du plumard... Son zobe se trémousse au plaisir à la moue de dégoût de son amant qui ahane sur la créature…
C’était mieux avant finit par lui dire l’homme, deux jours plus tard. On avait des élans et on revenait enlacés d’une expo… d’avoir communié saoulés d’art et d’amour…
Alors ils conviennent, les pédés entre eux sont bien plus fins, plus délicats, plus tout…
L’homme a largué la naïve. Elle était de trop. La découverte n’en était pas une. Ces secrets de femme, c’était comme s’il les avait toujours connus…
Ils en rigolent de la déconvenue. Ils s’en aiment davantage… Le feu reprend… les miches au four…
Comme dans les décors de Fritz Lang, il y a ainsi de ces existences qu’on voudrait pas connaître et qui finissent par vous en mettre plein la gueule… effets de lampe…

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