Une affaire de famille
En principe, dans une démocratie, tout le monde a les mêmes chances… On ne peut pas pénaliser lenfant de la célébrité du père.
Cest le raisonnement de celui qui a un fils à placer et qui use dun passe-droit. Dans la Belgique den bas, cela sappelle un piston et dans celle den haut une recommandation.
Certains réussissent mieux que leurs pères. Charlemagne était le fils de Pépin le Bref.
Mais Charlemagne aurait-il fait carrière sil avait été le fils dun manant ? Idem pour Pépin le Bref, sil navait été le fils de Charles Martel ?
Avec un petit talent un écrivain, un chanteur, un musicien, fils ou fille de star a beaucoup plus datouts que Mario, né dans un coron à Glain ou DuponT-D qui envoie un manuscrit à Gallimard.
Bref, légalité des chances nexiste pas.
Le baratin sur légalité des chances est à lusage des foules ébaubies de la réussite.
Tous les fils à papa le savent, la liberté dentreprendre passe par le tiroir caisse familial. Le baron Antoine Seillière, né à Lille sous le nom de ben quelque Chose, ne serait pas le patron des patrons français. Il serait probablement au « chômedu » avec les flics au cul pour avoir fumé du shit dans une cage descalier de son HLM.
Sil y a un domaine où la poussette ne devrait pas jouer, cest bien en politique. On ne peut pas prôner légalité des chances dans des discours enflammés, sur le temps que lon impose aux électeurs le fiston en position favorable.
On aura beau revenir au début de cette réflexion à savoir que le fils talentueux ne peut pas souffrir de la notoriété du père, sans trouver suspectes des carrières fulgurantes.
On comprend la rage sourde du MR lorsquil était dans lopposition. Les bonnes planques passer sous le nez des fistons bleus devaient faire mal. Il y a tant de gens à pourvoir et tant de fidélités à récompenser dans un parti !
Le désespoir des pères, des gendres et des maris dans lopposition sentend dans les discours de Joëlle Milquet. Cest le drame dAntigone. Enterrer les faux-frères Deprez et Fournaux est son job actuel. Si elle échoue, les Créon du CDh lenseveliront vive.
Quand on ne sait que faire du fiston qui termine péniblement des études davocat, cest un drame humain ! Cest le même que celui dun ouvrier de Cuivre et Zinc qui voit son usine fermer au moment où il espérait y faire entrer son fils, sauf que quatre ans plus tard lavocat au chômage a des chances de refaire surface, tandis que lusine a mis la clé sous le paillasson.
A suivre la dialectique des tôliers du gouvernement, ce qui sépare lallocation du « mal vivre » à lallocation du « bien vivre », cest entre dix et vingt euros par mois. (Ce nest pas moi qui le dis. Ils lont proclamé haut et fort dimanche dernier à Ostende.)
Eux se votent des augmentations qui nont rien de comparable. Cest comme si on laissait au Conseil dentreprise de votre boîte le soin de rémunérer le personnel.
Il serait drôle de voir un sage imposer un « bien vivre » pour tout le monde de dix euros par mois maximum ! Vous verriez soudain les vocations politiques sarrêter, les pères décourager les fils… On se draperait dun honneur aussitôt ressurgit !
Un homme est capable du meilleur et du pire. Cest humain de pousser le fiston, daider lami, de privilégier la maîtresse… mais à dix euros, ça change tout !
Les francs-maçons nont jamais fait que du copinage actif. Cest connu, presque tous les hommes publics « en sont ». Du reste, cette grande famille artificielle, nest là aujourdhui quafin de pourvoir les siens et plus rarement réfléchir sur la démocratie et la laïcité. La cause est devenue prétexte. Un peu comme dans la vie dune démocratie, par glissement, vieillissement, puis pourrissement.
Ce qui ne va pas, cest que tous ceux qui ont privilégié le fiston, le cousin ou la belle-sœur nen conviennent jamais.
Ils nous servent le minimum de raisonnement. Ils parlent la langue de bois.
Sils ne peuvent pas plus, cest quils manquent dargument.
Lhypocrisie de situation, sport national en démocratie héréditaire ?