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Catharsis

-Tu montes ?
-Pardon ?
-Tu montes, chéri ?
-Comment ça, je monte chéri ?
-C’est pas possible ! D’où tu sors ?
-Je sors de chez moi et je m’apprêtais à y rentrer.
-Tu plaisantes ?
-On ne plaisante pas quand on rentre chez soi.
-Seul ?
-Seul !
-Tu veux que je t’accompagne ?
-C’est gentil, ça.
-Seulement ce sera un peu plus cher.
-Vous faites taxi ?
-Non, je veux dire la passe.
-Pourquoi on doit passer quelque part avant ?
-Une façon de parler, pour ce que tu sais.
-Je dois savoir quelque chose ?
-Ah ! tu es drôle. C’est pas tous les jours dans le métier qu’on tombe sur un type comme toi.
-Je fais ce que je peux pour ne pas froisser.
-Alors pourquoi tu n’es pas monté quand je te l’ai demandé ?
-Monté où ? On est dans la rue, je ne vois pas d’escalier…
-Ecoute, si tu le fais exprès, je n’ai pas que ça à faire. Je dois prendre le bus à 15 heures pour Boncelles. Oui, dans le quartier Cathédrale, les volantes sont toutes de Boncelles… Comme qui dirait la commune des vocations… les hauteurs solitaires… Et je ne m’en suis fait que deux, à cinquante, c’est pas lourd…
-Ça vous fait quand même cent…
-Et mon Angelo qui m’en prendra quatre-vingts, qu’est-ce que t’en fais ?
-Qu’en ferais-je ? Angelo monte aussi ?
-Mais qu’est-ce qui m’a pris de te demander si tu montais !
-Il est passé de cinq minutes…
-Quoi ?
-Le temps de prendre le bus.

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-T’es tellement… Je t’explique, on dit toutes ça pour presser la manœuvre. Autrement, l’autre chipote et pour cinquante seulement on passerait la journée.
-C’est un métier, si j’ai saisi, où l’on passe son temps à dire des choses que l’on ne fait pas et à faire des choses que l’on ne dit pas.
-Répète… j’ai rien compris… Et puis non, tu me prends la tête. T’es du genre raisonneur. Je préfère ceux que ça travaille et qui y vont au coup de sang. C’est les meilleurs, les plus vite au pétillant. Je ne sais pas pourquoi je te dis ça. Peut-être bien parce que ma journée est de toute façon fichue. Alors, décide on va chez toi, ou bien basta…
-Et les pires, c’est qui ?
-Les évangélistes ! Ceux qui consomment en s’accusant de la faute, puis qui veulent vous convertir, des fois que converties, on leur ferait du plaisir pour rien. Les vicieux, c’est plutôt des rigolos. J’en ai eu un qui a sorti d’une valise un costume de mickey. On se serait cru à Disney land. J’étais pliée en deux de rire. C’est alors qu’il en a profité pour me prendre par derrière. Je te jure… on en voit des loustics !
-On est arrivés ?
-Oui.
- C’est chez toi, là ?
-Oui.
-Mais, c’est chez les flics !
-Plutôt. Racolage sur la voie publique. Tu connais le tarif…
-Fais pas ça, quoi, je suis une pauvre fille…
-Elles disent toutes ça…
-Ecoute, je suis bien roulée, pour toi, ce sera pour rien.
-D’accord.

Après une heure passée au Onze.
-T’as eu du bonheur, poulet ?
-Je veux pas que tu retournes à Boncelles avec la peur d’être tombée sur un des mœurs… Je viens d’être viré de chez SACILOR… un coup de blues… envie de rire… je suis soudeur…
-Salaud !
-J’ai horreur des cafards qui emmerdent les filles…
-Pauvre con ! Tu m’as emmerdée plus que si t’avais été un poulet.
-J’avais pas l’intention de baiser à l’œil. Tiens voilà un billet de cent…
-J’en veux deux comme lui…
-Tu plaisantes ?
-Hein ! C’est toi qui dis que je plaisante à c’t’heure…
-T’auras pas un cent de plus.
-Tu crois ?
-Oui. Je crois !
-Angelo, t’es en bas ? Tu veux bien monter chéri, y a un con qui veut pas payer ses extras !

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