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Les grands chefs

On les regarde depuis trop longtemps à la télé, sur les magazines et à la veille des élections sur les murs des pissotières.
Ils sont partout.
Ils font semblant que tout les intéresse. Alors qu’on sait bien que c’est impossible. Pas pour eux. Ils passent d’un ministère à l’autre, avec la même passion, la même apparente compétence. D’ailleurs, ils savent tout et nous assènent le savoir que leur distillent au coup par coup leur attaché de cabinet, qu’ils nous balancent comme si cela venait d’eux.
Ce sont nos grands spécialistes…
Ils vieillissent mal.
Alors qu’on décramponne à 55 ans, eux s’accrochent, se teignent les cheveux, gomment leurs rides, quand le retoucheur vidéo ne les leur gomme pas. Faut-il qu’ils y tiennent à leurs 45 mandats, à la bonne soupe pas populaire pour un sou qui les fait vivre, comme s’ils valaient à eux seuls 36 chômeurs !
Et on applaudit au spectacle de leurs pauvres gueules…
Certains ont été des cibles dans ces carnets qui « débloguent ».
Surtout un, dit de « gauche ». Tour à tour, Pie XII, Louis le quatorzième ou Marco Polo du plan Marshall. Voilà qu’il se met à ressembler à Cocheese sortant de son tipi.
Entouré de laudateurs, il est aux dithyrambes le front ceint de laurier.
Il a été si bon élève ! Sa thèse aurait fait le sujet de dix livres. Rien qu’à l’énoncé des chapitres, cent fois aurait-il mérité le prix de la physique et de la chimie réunis en un super-Nobel. Un si gros cerveau, que même les avocats qui sont la crème de la démocratie active comme chacun sait, se prosternent devant lui. C’est quasiment poussé par les autres qu’il est arrivé au poste élevé qu’il occupe. Il nous l’a dit. Il s’est sacrifié pour nous. L’âme wallonne était en danger. C‘est notre héros !
Je ne peux pas le voir en effigie sans me demander s’il a chaussé ses mocassins, s’il va sortir ses plumes et faire mouche de ses flèches ? Quand il fustige ses adversaires du haut des tribunes où rougeoie son gonfalon, on s’attend à ce que ses squaws le décorent de ses peintures de guerre…
Ses guerriers alanguis dont il fustige la paresse fument le calumet de la paix avec les tribus de la rive droite, lui, toujours très rive gauche, fait mine de ne pas les voir, alors qu’on sait, dans les rendez-vous de chasse, qu’il les fréquente. Entre eux, ils se touchent le front avec des « hugh » sonores. Mais que voulez-vous, il faut bien en conter au peuple…

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Sitting Bull Ratio, l’autre chef, celui de la rive droite où campe la tribu MR, l’invective d’une rive à l’autre, parfois il fait mine de traverser à la nage, son tomahawk entre les dents. Quand il le défie devant les foules, on voit qu’il a été beau jadis. Aujourd’hui, son visage poupin s’est alourdi. C’est qu’il plie sous les banquets, les tournées générales et cette facilité de vivre sans compter avec l’argent d’un Eldorado qu’il est seul à apercevoir, et qui n’est autre que ce qu’il prend dans nos poches.
Sitting Bull Ratio nous montre sa voie, le fleuve Ockham’s razor. Il n’émet des hypothèses qu’au compte goutte, selon le grand principe que moins on en fait, plus on évite les gaffes. Il apparut un soir d’automne et prit la place du grand Manitou. Celui-ci, l’œil cerné des veilles à notre service, le teint jauni des vins riches et des viandes sauvages, s’en était allé vers des dimensions grandioses au bleu étoilé des fédérés de l’Europe .
Grossir au service de la nation est le sort dur, mais nécessaire de l’édilité.
Enfin, autre adversaire de Cocheese, une belle chrétienne destinée aux lions et qu’un bon ange sauva. Hélas ! elle aussi ravagée par les macérations et le travail de nuit, pourtant prémunie du destin par la vocation qui conserve : celle du barreau. Tremplin magnifique à tout envol démocratique, sa plaidoirie la vouait au peuple. C’est ce qu’elle fit, malgré les avatars et les perfidies des machos qui n’admettaient pas qu’un sang impur abreuvât leurs sillons à uriner dans l’accroupissement de la fange du ruisseau.
Elle osa arborer ses peintures de guerre en temps de paix. Signe qu’elle était prête pour les scalps de la tribu d’en face.
Cocheese est sous le charme. Sa nature indistincte le rapproche et l’éloigne. Ils cohabitent, elle et lui, sur la rive gauche. Leurs nuits au tam-tam, tels Georges et Musset, assourdissent du bruit de leurs amours les montagnes de schistes et les laminoirs vides. Des hauts-fourneaux lugubres montent des plaintes qu’ils confondent avec les cris de joie des fidèles assemblés à leur messe noire et rose. Ce serait divin, si sous nos climats, cela le pouvait être.
Aussi attendront-ils qu’un passage à vide succède au passage à plein. Ils patientent et guettent, le moment de l’envol vers des territoires de chasse après la vie publique.
Je parie qu’ils n’auront même pas la décence de nous dire merci…

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