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Rédemption.

-Voilà une heure qu’on parle. On dirait que je ne m’adresse plus au même bonhomme !
-Que veux-tu dire ?
-Je veux dire que tu n’es plus Richard.
-Pourtant, c’est bien moi.
-Ça fait soixante minutes que tu n’as dit du mal de personne.
-Je n’en ai pas l’intention.
-Tu es malade ?
-Non. Je tiens la forme.
-Alors je ne comprends plus. Tu ne railles sur rien. Tu ne persifles pas. Tu es amoureux ?
-Je lis « Comment réussir son casting » de Jasmine Roy.
-C’est à cause de ça que tu la mets en veilleuse ?
-Pas du tout. Mais elle a raison. Si tu veux t’insérer dans la société, il faut positiver.
-Tu cours les castings maintenant ?
-Je suis branché sur celui de TF1. Je n’ai pas encore tous les conseil de Jasmine en tête, les erreurs à éviter, un truc, une astuce, un secret. Elle connaît tout, cette femme.
-Quel casting ?
-Un genre Star Academy, le casting de la vie, tiens !...
-C’est quoi cette connerie ?
-Je raillais aisément, je dénigrais tout, dans le fond j’étais malheureux de déplaire.
-Maintenant tu plais ?
- Pas encore. Je suis seulement au début. J’apprends à aimer la société. Le roi, l’Haut-lieu, les ministres… Delperée… Mené… Maurine Door… Davignon… En ai-je dénigré des hommes de bonne volonté qui se tuent à des tâches de direction pour nous aider à surmonter les difficultés !
-Le capitalisme ?
-C’est tout bonnement scandaleux ce que j’en ai dit. J’ai traîné des industriels dans la boue. Je veux quitter la cohorte des prophètes maudits qui décrivent de façon jubilatoire l’écroulement définitif du capitalisme, dès le lendemain… J’ai sali des gens honorables, dévoués… Tiens, les Frères Happart à propos de Francorchamps…
-Tu étais loin de la vérité !
-Oui. Mais pas dans le sens du mauvais rôle. Lorsque José au cours d’un « Faire le point » a remis un journaliste à sa place en lui réclamant du respect pour le travail des parlementaires, il avait raison. On ne les respecte pas assez…
-Ah ! bien toi, alors…
-Dorénavant, je ne médirai plus de la démocratie. Je faisais du populisme sans le savoir. J’imitais Jean-marie Le Pen, Poujade, alors que j’ai ces gens en horreur… On aurait pu me croire du Front ou du Vlaams belang.
-C’est Frileux qui va être heureux !
-Pas que lui. Tous ceux que j’ai déçu par mon constant persiflage, je leur demande d’être indulgents pour le nouveau Richard qui est en train de naître. Pardon, mes chers bienfaiteurs.
-Tu vas perdre tes lecteurs.
-Je n’ai plus rien à voir avec les aigris qui lisaient des textes qui les confortaient dans leur misanthropie.

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-Tu es un homme nouveau, en quelque sorte.
-Oui. Un homme qui s’inscrit carrément dans une démocratie de progrès. La preuve, personne ne m’a jamais coupé le sifflet quand j‘étais malade de haine et de dérision. Ils étaient indulgents. Moi pas !...
-Tu es certain que tu n’es pas malade ?
-Je ne me suis jamais senti aussi libéré, aérien. Jamais plus, on ne me verra railler les efforts des partis politiques pour rendre la société meilleure.
-Tu as fait ton choix, pour les élections communales d’octobre ? Tu vas voter socialiste ?
-Oui. Frileux a raison. C’est le parti qui nous représente le mieux, au plus près des gens. Ce sont des hommes et des femmes simples et qui nous aiment sincèrement. Sauf…
-Sauf ?
-Non. C’est personnel.
-Pourquoi ne le dirais-tu pas ?
-Parce que c’est à cause de lui que j’ai perdu la foi et que je lutte pour la retrouver.
-Explique ?
-A y penser, mon persiflage me remonte comme des relents d’estomac. Ah ! le salaud… la fine ordure. J’ai perdu le sens du devoir à cause de cette crapule, de cet immonde seau à merde…
-Là, je te retrouve. Parle-moi encore de lui. Tu ne veux pas me dire qui c’est ?
-Jamais. Ce seul mec a trahi les idéaux les plus nobles, les plus sacrés. C’est à cause de lui que je suis devenu l’être vil et bas que tout le monde connaît… Merde !... J’aurais tort de me gêner dans le fond, quand je compare mon modeste persiflage au sien… Mes dénigrements sont anodins à côté de cet escroc. Ah ! putain… je n’ai plus envie du coup de rentrer la queue basse dans le bourgeoisisme apeuré d’un Di Rupo qui me la joue avec ses bons yeux d’épagneul…. Ah ! ces porcs poursuivent leur collaboration… l’Haut-lieu en redemande… mais, nom de dieu, au nom de la morale, ils me trouveront sur leur chemin. C’est que je les emmerde, moi, ces ganaches du système, ces nécrophages de la condition ouvrière.
-Je te retrouve. Tu m’as fait peur et à tes lecteurs aussi.
-Quand je pense que j’ai failli entrer dans les ordres comme propagandiste et curé de leur système… que j’étais à deux doigts de voter PS, ou pire CDh… le MR ayant chié dans mes bottes définitivement…
-Tu l’as échappé belle…
-Tu peux le dire.
-Tu ne veux pas me dire le nom du type qui a accompli cet heureux rétablissement dans lequel je te retrouve ?
-Nicolas Pélacy.
-C’est quoi ce mec ?
-Le type de TF1 du casting qui m’a dit que je ne convenais pas.

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