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Comme le temps passe !...

Jonathan Swift dans « Prédictions pour l'année 1786 » tourne en dérision les augures et les pythonisses, sur ce que l’année sera. Les esprits sérieux s’accordent à dire pareil pour 2007.
Je suis perplexe, car n’étant pas un esprit sérieux, j’ai cependant tendance à penser la même chose ?
Avec de bonnes raisons et une aptitude au scepticisme, on peut penser sans honte que demain ne sera pas différent d'aujourd'hui. L’accélération des techniques, bon, cela va-t-il se poursuivre au même rythme ? L’échéance encore lointaine de la fin du pétrole ne perturbera pas trop la course à la nouveauté. Ce qui est gênant, ce sont les échéances pour certains progrès dans la connaissance de nos voisines les planètes du système solaire. Pensez, sur mars dans 35 ans ! Il y en a combien qui lisent ce blog qui iront jusque là ?
L’homme s’habitue à tout. Quand on sait d’où on vient, ce ne sera pas pire où on va !
Il n'y aura jamais de progrès dans certains domaines. L'homme ne sera immortel que dans ses histoires de science fiction. Pourquoi faire bon sang ! Un quart d’heure d’attente chez le dentiste est proprement insupportable.
Les virus sont plus anciens que nous sur cette terre. Ils nous aiment pour nous grignoter. Nous serons toujours soumis à la maladie et à leurs caprices. On les extermine quelque part, ils renaissent ailleurs plus fort. Ils mutent plus rapidement que nous et ils s’inventent sur tant de formes qu’avons-nous à peine fini de les combattre sous une forme, qu’ils apparaissent sous une autre. Notre tas de viande les intéresse. Je n’ai jamais su pourquoi il leur faut tout et tout de suite, si bien que leur garde-manger disparaît avec nous, de sorte qu’en nous condamnant à mort, ils passent l’arme à gauche aussi. Ces kamikazes nous haïssent donc tant que cela, ou sont-ils stupides ? Alors qu’ils devraient nous ménager pour durer avec nous le plus longtemps possible. Il est vrai qu’ils prolifèrent et que leur méconnaissance du malthusianisme interdit le contrôle des naissances.
Progrès technique, certes, mais pas à l’infini. Ce qui étonne, c’est le peu de progrès de ce qui devrait accompagner la technique : la morale ! Rousseau était un utopiste, avec son Emile et son éducation bucolique et à haute valeur éthique ajoutée. La croyance de l’homme bon a produit des générations d’idiots et en produit encore.
L'appareil juridique n’apparaît pas plus efficace, mais est moins barbare que lorsque les bois de justice étaient tenus par des barons médiévaux, quoique l’on pende et l’on massacre toujours un peu partout allègrement. Personne n’a jamais répondu par des actes à la réflexion de Renan : « Il n’y a pire injustice que celle qui consiste à traiter également de choses inégales. » Et ce n’est pas en 2007 qu’on le fera.

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Il n’y a rien de plus réjouissant que le pessimisme noir. Croire que tout va aller mieux, que les situations de famine cesseront et que les guerres s’arrêteront d’elles-mêmes par excès d’absurdité est d’un optimisme béat qui désole l’esprit et sape le moral plus que le pessimiste le plus engagé dans la noirceur. L’optimisme moyen est un acte de foi sans l’être, une sorte de bourgeoisisme qui consiste à prétendre que tout fini par s’arranger par une paresse intellectuelle qui trouve vain de réfléchir à ce qui finira par trouver son ordre naturel.
Le pessimiste ne peut être la dupe des événements, ni du progrès, ni de la morale, ni de ce qui est officiel, le dupera qui le pourra, c’est-à-dire pas grand monde. C’est sa force.
La conception tragique de la vie peut nourrir le pessimisme mais peut aussi attiser la joie de vivre, en ce que celle-ci entend dans les raisons de condamner la vie, de maudire toutes les tristesses et les misères qui lui sont attachées, et cependant résister aux raisons contraires. C’est le monde du paradoxe, cette joie de vivre… C’est le pied, en un mot.
On se demande parfois si en développant son intelligence par la nécessité de se défendre des autres espèces, l’homme n’a pas mis le doigt dans un engrenage dont il n’est pas à la hauteur de percer les secrets du mécanisme. Nos frères, les grands singes qui ont tant de nous, se sont arrêtés à un niveau de développement qui leur fait la vie belle. Ils ignorent le temps, et par conséquent leur condition éphémère. L’homme voit au contraire le temps s’accélérer de façon prodigieuse de sorte que sa vie tout en s’allongeant mathématiquement, se rétrécit en réalité. Il lutte contre le temps, s’invente des techniques pour s’y adapter, devient ergonome, behavioriste, parce qu’il veut en savoir trop, et n’aura jamais assez de temps pour tout savoir et entreprendre. La vie est la plus difficile des tâches, et l'amour de la vie le plus vrai des besoins. Si elle défile comme un film, nous ne savons même plus quel rôle nous interprétons, ni même si nous sommes dans le générique. Nous ne sommes plus nécessaires. Nous perdons la satisfaction du singe de vivre dans la joie simple d’un quotidien qui s’arrête au coucher du soleil pour reprendre à son rythme au lever du jour.
Enfin, 2007 s’arrêtera bien un 31 décembre, sans quoi, que ferait-on de 2008 ?

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