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Le boomerang.

Si l’on veut essayer de trouver une réponse dans le comportement des Communautés en Belgique et donc faire un effort dans la mise à plat des dysfonctionnements de l’Etat par rapport aux groupes le constituant, en laissant de côté les prurits majoritaires des Flamands par rapport aux Wallons, force est de constater au premier chef que les réalités concernant l’agression et la territorialité dans les groupes humains sont bien plus complexes que ce qu’il apparaît à la sortie des réunions de Val Duchesse.
Les êtres humains doivent avant tout s’intégrer à leur élément naturel comme n’importe quelle espèce. Cette intégration se fait au travers de la création de systèmes culturels. Ce n’est pas depuis quelques années seulement que l’Etat belge est menacé, mais dès avant la guerre de 40 où le problème des langues et des cultures pouvaient être résolus par un comportement moins impérial des manipulateurs de la langue française qui n’ont pas accordé l’attention que méritait le parler flamand. Et cela s’est fait de la même manière que la langue parlée aujourd’hui dans le Sud du pays s’était débarrassée aux alentours de 1900 des langues romanes rassemblées sous le nom de dialectes wallons.
On ne peut donc en toute logique incriminer les Flamands d’un type de comportement qui a été le nôtre vis-à-vis d’eux quand la frontière linguistique n’existant pas, le recensement n’avait pour but que d’affirmer la supériorité francophone par le constat d’une emprise de la langue latine sur les territoire traditionnellement de langue germanique, et qui se poursuit toujours à l’heure actuelle sans aucun recensement et aussi sans aucune règle.
L’asservissement du Wallon à la langue française ne s’est pas passé aussi facilement qu’il y paraît avec le recul du temps. Pendant longtemps le français a été une langue de contre-culture agressant la culture d’origine.
Cette mise à mort fut faite systématiquement et sans remord, au nom de l’efficacité et du rayonnement de la langue qui étaient réels, mais aussi suivant des arguments spécieux ou faux comme la fameuse antériorité du français. Le Wallon que l’on parlait dans le Pays de Liège, par exemple, a une origine plus ancienne que le français. En s’attachant exclusivement au parler français, on a systématiquement coupé le wallon de son adaptation au siècle. Si bien qu’aujourd’hui, il n’est plus parlé que dans les campagnes, rarement en ville et par des personnes âgées. Et pour cause, amputée des mots techniques, puisque plus rien n’a été « wallonisé » la langue ne pouvait que dépérir. Elle est en voie d’extinction de nos jours.
Les Flamands ne possédaient, comme nous, que quelques dialectes dont certains avaient peu à voir avec le néerlandais. Ils ont fait l’effort que nous n’avons pas été capables de faire avec le wallon et cet effort a coïncidé avec la prise de conscience flamande en réaction à l’impérialisme français.

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Aujourd’hui, cela est clair, les Flamands ont trouvé leur unité dans la langue qu’ils ont « inventée » et qui en vaut bien une autre, même si elle est moins chargée de sens et de subtilités que la langue française, sans doute parce que le flamand est mieux adapté aux populations du Nord, comme le français est mieux adapté au Sud, quoique l’appauvrissement culturel constaté en Wallonie rejaillit directement sur la langue. Afin de conserver à la mémoire des mots, notre culture ancienne, nous aurions dû préserver notre langue d’origine. Nous ne l’avons pas fait. Nous avons même aidé le français à s’implanter dans nos régions par la trahison de notre patrimoine en le ravalant à un dialecte, à un patois… Nous n’avons pas eu la force morale d’en préserver l’essentiel en créant une grammaire, en adoptant des règles unificatrices.
Cette paresse intellectuelle à un prix, de posséder le wallon en une ou deuxième langue, nous aurait aidé à acquérir les rudiments d’une troisième, celle de nos voisins.
Si aujourd’hui les Flamands ont tort dans leur systématisation du droit du sol, nous avons eu tort avant eux pour notre aveuglement à ne pas respecter le droit des gens à s’exprimer dans la langue de leur choix. Certes, c’est ce que nous revendiquons aujourd’hui pour des populations francophones en zone linguistique flamande, il faut avouer que c’est là un beau retournement de l’histoire. Une sorte de boomerang que nous avons lancé il y a très longtemps et qui nous revient en pleine figure.

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