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Les Lois et le citoyen.

Voilà plus de trente ans qu’on promène la population à travers le lacis des Lois nouvelles, à défaut d’avoir une politique économique convenable.
On légifère sur tout et sur rien avec ardeur et persévérance. Les loustics du porte-plume législatif atteignent à des sommets quand ils peuvent laisser leur nom à une Loi. C’est une consécration, un peu comme on appelle un nouveau square Jacques Brel ou Machin Chose.
Il y a la Loi Moureaux à propos du racisme, comme il doit bien y avoir la Loi Onkelinx à propos des dimensions des pâtés de sable que font les enfants sur la plage.
Les Institutions européennes ne sont pas en reste. Elles sont productrices d’une quantité non négligeable de textes juridiques qui, eux-mêmes, procurent un sacré boulot aux personnels des Etats membres.
C’est si abondant, complexe et sort de sources si diverses que plus personne ne maîtrise l’ensemble.
Quand on pense qu’un sentencieux imbécile avait écrit à l’orée de la forêt « Nul n’est censé ignorer la Loi. », à croire qu’à cause de cette injonction, nous sommes dix millions d’ignorants.
Car nous ignorons les Lois et comment faire autrement ? Même les avocats se spécialisent. Parfois Delpérée en perd son râtelier le dimanche matin à la RTBf.
Car, en plus d’être pléthoriques, les Lois sont complexes.
Elles poussent comme des champignons dans le rapport de force des groupes de pression auprès des parlementaires, relayées aux échelons inférieurs par des Arrêtés régionaux et communaux.
Les Lois se superposent, les strates anciens recevant des couches plus modernes, les modifiant au point que la lecture du Moniteur passe par la pierre de Rosette et les hiéroglyphes de Champollion, du genre Loi du 6 vendémiaire, remplacée par celle du 12 avril 1884, en son alinéa quatre ter paragraphe 2, concernant la Répression de l’Ivresse, parue au Moniteur le 27 avril 1936, lire « sur les trottoirs à plus de 40 centimètres de l’établissement au lieu de 17 centimètres et demi. »
L’apparition d’un magma informe des Lois et modifications n’en restera pas là. Les papiers bouillonnent, les écrits s’amoncellent, l’avocat exulte et le justiciable n’y comprend plus rien.
Le tout apparaît dans un jargon judiciaire qui servit à Racine dans sa pièce les plaideurs au 17me siècle.
Si on ajoute que les dizaines de modifications pour un seul article n’apparaissent nulle part coordonnées, expliquées dans des textes débarrassés de ce qui a été supprimé, on se rend tout de suite compte que là aussi, le législateur se moque du monde.
On pourrait écrire un fort volume des erreurs que cette complexité perpétue d’une législation à l’autre.
La sécurité juridique est mise à mal, l’institution judiciaire est en péril et le citoyen qui est sensible au problème voit les libertés qui fichent le camp à cadence accélérée.
Bien entendu, tout profite. Des mariolles se frottent les mains. Plus c’est difficile d‘accès, plus les orfèvres du non-dit et du non-droit tirent leur épingle du jeu. Croit alors une clientèle de fraudeurs et de magouilleurs que c’en est une bénédiction pour la gent avocatière et procédurière.
Les juges eux-mêmes transpirent sous leurs robes. Leur honnêteté et leur scrupule font la joie des crapules. Les erreurs de procédure lorsqu’elles libèrent des endurcis du crime font le régal des gazettes.
Les jugements sont imprévisibles. Une même affaire plaidée à Dinant ou à Liège peut avoir des conclusions différentes.
C’est à la sensibilité et au bon sens que la plupart des juges fonctionnent à défaut d’un socle de Lois clair et sans ambiguïté.
Enfin, les Lois lorsqu’elles sont abondantes, confuses, contradictoires, produisent un effet de mépris, plutôt qu’un effet de dissuasion.

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La difficulté allonge les débats et augmente l’arriéré judiciaire. Comme on flanque en tôle assez facilement en préventive dans ce fichu pays (enfin les petites gens et les immatures, les gens à influence et les riches étant plutôt épargnés) la Belgique se fait régulièrement attrapé par les Droits de l’Homme pour procédure trop longue entre les faits et les jugements.
Je n’en jette plus pour ce soir, la coupe est pleine.

Commentaires

Les hommes politiques ne disposent que d'un seul outil : faire des lois.

C'est comme quand je donne un marteau à mon petit-fils, il prend tout pour un clou.

Le bon outil n'est pas toujours de faire une loi. Par exemple si on veut un parlement plus représentatif de la population (même proportion de femmes, de chauves, de moustachus ou de condamnés), le bon outil est le tirage au sort (pour une législature ou juste pour une loi ...)
Or nous voyons qu'il a fallut plier le système démocratique (par des lois) pour essayer d'avoir un certain nombre de femmes au parlement.

Parce qu'on fait une confusion entre "élection démocratique" et "représentativité"

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