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Fichu pour fichu…

Le système, qu’on le qualifie de ce que l’on veut (c’est encore « capitalisme » qui lui convient le mieux) n’est acceptable que dans la mesure où, à côté d’une minorité qui progresse beaucoup, la majorité progresse un peu.
Or, ce n’est plus le cas.
Ce constat est absent des discours des économistes ; tandis que les élus de la Nation ont d’autres contentieux que d’aborder les défauts de l’éthique du système. C’est comme s’il allait de soi que pour accroître la productivité et retrouver de la croissance, les sacrifices étaient seulement pour ceux qui travaillent.
La période qui va de la fin de la guerre à 1980 tombe dans les oubliettes de l’histoire de l’économie, faisant entrer les syndicats et le parti socialiste dans une sorte de musée que l’on pourrait appeler « Musée des Trente Glorieuses ».
Alors, les syndicats avaient pour tâche de faire progresser les rémunérations, conjointement aux avancées sociales, en matière de sécurité et de retraite. Et comment ne pas considérer la diminution du temps de travail comme un facteur important d’émancipation ?
Le système était déjà perçu comme générant des situations très inégalitaires, mais était toléré pour les retombées positives dans les domaines défendus par les syndicats et le parti socialiste.
Qu’est-ce qui fait qu’en pleine diffusion des découvertes appliquées dans la fabrication des biens de consommation, on est arrivé à payer le travail un moindre prix, alors que la productivité a été augmentée de façon prodigieuse ?
Le système s’est radicalisé. Les syndicats et le parti se sont pliés au climat nouveau, au point que les premiers négocient des diminutions de salaire et des augmentations du temps de travail, et le second avoue ouvertement qu’il est devenu pro-libéral ?
C’est qu’ils ont été convaincus que la mondialisation du capitalisme est incontournable et aussi par peur d’un affrontement qui n’aurait pas été entre le pouvoir en place et les grévistes, mais entre les travailleurs eux-mêmes. Et cela n’aurait pas été en faveur des forces d’émancipation des masses.
Après 1980, la percée consumériste dans les populations a été décisive.
On a pu passer sans protestation d’un syndicalisme de combat à un syndicalisme de repli, d’un parti de revendication à un parti de collaboration.
Si les salaires ont d’abord commencé par stagner, avant d’être rognés dans une deuxième phase de modification, sans qu’on s’en aperçoive vraiment, c’est que l’écran plat et le frigo sont passés en même temps de 40.000 francs, à moins de 500 euros aujourd’hui et que les gens n’ont vu que cela.
Personne n’a tiqué, à l’exception de quelques penseurs, parce que la majorité voulait qu’il en soit ainsi. C’est d’abord dans un environnement euphorique qu’a débuté l’étranglement post 1980.

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Si un homme peut avouer qu’il s’est trompé et passer à une réflexion opposée à celle qu’il avait le jour avant, l’opinion générale ne le peut. L’individu précède la foule et n’est pas intelligible par celle-ci parce qu’elle a besoin d’un temps plus long pour que naisse un consensus majoritaire, un courant assez fort pour l’entraîner vers un autre destin que celui qu’on lui propose.
Nous sommes toujours dans l’idée que le système ne peut avoir dérapé qu’accidentellement et qu’il faut patienter un temps pour qu’il reparte. Et pour ce faire, il est assez facile aux dirigeants de parler de sacrifice afin d’abréger cette attente.
Or, tout fait penser à deux probabilités, la première : la multitude descendra jusqu’aux salaires alloués aux travailleurs des pays émergeant à seule fin de pouvoir mettre à égalité de concurrence le travailleur occidental et le travailleur chinois ou indien ; la seconde, permet de faire monter par les profits ainsi dégager, quelques milliers de personnes vers une fortune jamais vue pour un tel nombre, à travers l’histoire de toute l’humanité.
Le raisonnement des économistes « modérés » tempérerait cette descente du prix du travail dangereuse pour le capitalisme, par l’espoir que les travailleurs chinois et indiens s’élèvent sur le même temps, de sorte qu’ils viendraient à la rencontre de leurs confrères, arrêtant du même coup l’hémorragie des salaires occidentaux.
Ceci n’est pas un plan, encore moins une prophétie, mais une grande probabilité basée sur l’étude de l’évolution de l’économie et des mentalités de ceux qui la subissent.
De ce qui précède, on conclura que les populations sont dans un état de grande faiblesse par rapport au pouvoir libéral. Elles n’ont plus ni parti, ni syndicat pour leur défense effective. Elles ne sont plus représentées que fictivement, dans une parodie de démocratie. Elles subissent le contrecoup d’un vide produit par l’absence de prise en compte des finalités capitalistes de leurs dirigeants.
L’espoir de changement ne renaîtra que le jour où elles s’en apercevront.
Sera-ce dans dix ou vingt ans, ou jamais ?
L’histoire nous montre qu’un grand état de pauvreté n’est pas propice à la fondation d’un ordre plus juste et plus équilibré. Espérons que le peuple ne sommeillera pas trop longtemps.

Commentaires

Trois réflexions:
1.- E n Europe, la variable d'ajustement à la quantité de travail est (encore) l'emploi. (on perd son emploi)
Ailleurs cette variable d'ajustement est aussi le salaire (on garde son emploi en perdant du salaire)
L'article de RIII ci-dessus montre que l'Europe est en train de changer.

2.- La première ligne de l'article me fait penser à un peloton du tour de France qui arrive dans la montagne :le peloton s'étire; il se produit un écart entre les coureurs.
Mais il faut remarquer que TOUS montent (non seulement la minorité de tête) .

3.- Nous sommes heureux ou malheureux par comparaison. Lorsque nous voyons d'immenses richesses se former, nous ne pouvons nous empêcher de comparer.

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