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Compromis = compromission.

La politique du compromis à la belge a-t-elle atteint ses limites ou vient-elle de démontrer que tout compromis est aussi quelque part une compromission ?
Les deux mon général.
Les tractations, d’aucuns diront les marchandages, qui ont prévalu jusqu’à présent dans les accords de gouvernement entre partis et aussi entre Régions ont toujours été vantées comme le sommet de la diplomatie et les mélanges des possibles. Di Rupo, intarissable sur les vertus des compromis nous a abondamment fait savoir que la sagesse avait toujours compté dans ses choix et qu’une revendication satisfaite à 50 %, en tenant compte de l’avis des autres, était quand même un progrès.
On veut bien admettre ce raisonnement dans le cas d’une revendication qui porte ordinairement sur une meilleure situation sociale, une adaptation à la loi ou une quelconque « petite » victoire, plutôt qu’une grande.
Personne n’a, jusqu’à présent, vu l’autre aspect du compromis, à savoir celui d’une proposition dans le sens contraire d’une revendication de progrès, qui réclame des sacrifices, voire des renoncements à des situations plus favorables. Cela concerne aussi bien la vie du citoyen en général que l’aspect des relations avec les donneurs d’emplois et les fonds du chômage et des pensions.
Peut-on, dès lors, parler de l’art du compromis ?
L’honneur, la parole donnée et la conviction dans tout cela ?
L’honneur va au-delà des questions de régime, sinon plus que la conviction.
Ce sentiment n’est ni de droite, ni de gauche. Quand on s’y laisse prendre, il n’est plus question que de déshonneur. Il est impossible de dire, j’ai gardé mon honneur, et dû abandonner 50 % de mes convictions.

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Jacques Julliard dans « L’argent, dieu et le diable » rapporte les propos tenus dans « les cahiers du témoignage chrétien » par Bernanos « Nous croyons qu’il y a un honneur de la politique, nous croyons non moins fermement qu’il y a une politique de l’honneur et que cette politique vaut politiquement mieux que l’autre ».
Dans le summum du compromis qu’est la Belgique, on se demande si de compromission en compromission tout l’appareil politique belge n’est pas gangrené par un manque de conviction qui n’est en réalité qu’un déshonneur inavoué parce qu’inavouable.
Etrange alliage que celui qui consiste à mélanger honneur et politique ! Bien des personnages au premier rang de la vie politique n’ont jamais compris quel sens il fallait attacher à leur désir d’y faire carrière.
Ou plutôt, ils l’ont bien compris même avant de s’y engager, mais ils se sont toujours bien gardés de laisser paraître derrière les raisons sentimentales du bien général, des sentiments plus troubles et plus confus dont ils ne veulent rien voir eux-mêmes, et qui percent parfois, malgré eux, dans la vanité de se laisser interviewer à domicile, dans leur parc ou dans leur bibliothèque tapissée de livres de prix, ou dans le confort des grosses berlines sorties dans les grandes occasions.
Hé non ! la politique ne mène pas à l’honneur dans nos démocratie. Elle ne le peut pas par défaut de caractère de celui qui se fait mandater justement pour en avoir ! Le héros ne fréquente pas la rue de la Loi. Il n’est en général reconnu qu’en temps de guerre. Or, nous ne sommes pas en guerre. Nous sommes dans une démocratie de compromis.
Et pourtant, si c’était à refaire ? Si Daladier avait eu l’âme d’un héros en 38 devant Adolphe Hitler, peut-être eussions-nous évité la deuxième guerre mondiale ? Si Léopold III, au lieu de se souvenir qu’il était de Saxe, avait été avant tout de Belgique, peut-être y aurait-il eu à son retour triomphal de Londres, au lieu de celui moins glorieux du IIIme Reich via la Suisse, moins de tension entre les Communautés qui se sont déchirées, justement, parce que Léopold III n’était pas un héros.
Le citoyen n’élit pas des héros ; tout au moins espère-t-il, qu’ils aient de l’honneur.

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