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Chichis et bondieuseries.

Le combat de la laïcité est loin d’être gagné. Non pas tant à la vue des énergumènes qui, de l’Afrique au Pakistan brûlent des drapeaux français et pillent des églises d’obédience chrétienne, mais à l’intérieur même des pays démocratiques. Le conflit, entre ceux qui défendent la laïcité et les excités mystiques, est dans une phase armée.
Un récent sondage en France confirme que la laïcité ne fait pas l’unanimité du vivre ensemble. Dans un État laïc, toutes les religions sont de l’ordre du privé. La foi relève de la chose intime et personnelle. Elle ne peut se propager par un prosélytisme racoleur, encore moins par l’intimidation. La laïcité seule garantit toutes les libertés, y compris celle de croire ou de ne pas croire.
Cette manière de penser que l’on imaginerait « aller de soi », justement ne l’est pas. Les fanatiques, les mystiques et les exaltés sont ses adversaires. Les intégristes se multiplient avec l’analphabétisme et la misère des États à haute tension religieuse. Ils contaminent les États vers lesquels ils émigrent, en transportant leurs querelles et l’habitude violente de régler leurs différends.
Cette intimidation des fanatiques indifférents à la mort saisit de frayeur les pleutres et les lâches si répandus dans nos délicieuses contrées, renommées pour ne pas forger des âmes d’airain.
Moralité : au pays de Voltaire et du libre examen, « quatre Français sur dix (42%) estiment qu’il faut éviter de publier des caricatures du prophète Mahomet, et la moitié (50%) sont favorables à une limitation de la liberté d’expression sur internet, ressort-il d’un sondage réalisé par téléphone auprès d’un échantillon de 1.003 personnes entre les 16 et 17 janvier ». (Le Journal du Dimanche)
Quoique faisant partie des pays les plus scolarisés au monde, donc ayant des citoyens évolués et capables de discernement, avec une proportion d’analphabètes sous les 10 %, « Cinquante pour cent des personnes interrogées se déclarent favorables à "une limitation de la liberté d’expression sur internet et les réseaux sociaux", contre 49% qui n’y sont pas favorables et 1% sans opinion. »
C’est que le principe absolu de la liberté d’expression indispensable à la laïcité a aussi des ennemis jurés parmi celles et ceux qu’il protège ! La liberté, quand on n’en a que faire, a quelque chose d’effrayant. Elle dérègle les automatismes et donne à chacun des pouvoirs que d’aucuns délèguent depuis toujours, cela va de l’État – notion vague – au flic de quartier.
Mais il n’y a pas que l’autonomie de pensée et les religions, capables de troubler la sérénité des débats, dans les sociétés démocratiques.

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En France, comme en Belgique, les lois contre le racisme et l’antisémitisme ont fait une brèche dans l’absolue liberté de tout dire, écrire ou dessiner, dans la mesure où cela ne crée aucun dommage particulier aux personnes.
Le jour où un ex de Laure Manaudou, la recordwoman de natation, a publié des photos la montrant dans le plus simple appareil, ce petit monsieur a commis un délit et doit être sanctionné. Mais que les Noirs et les Juifs aient le droit pour les uns de s’appeler « nègres » et les autres « youpins » dans des blagues touchant à leur communauté et pas les autres citoyens sous peine d’éventuelles sanctions, pour les mêmes vannes si elles sont publiques ou écrites, c’est déjà le commencement d’une dérive restrictive de la liberté d’expression.
Je l’ai déjà écrit cent fois. Les opinions pour qu’elles soient discutées doivent être connues.
Croire que le peuple n’est pas capable de jugement, revient à dire que nous sommes à jamais des immatures.
On peut critiquer les USA dans ce domaine : le président jure sur la bible. L’État reconnaît implicitement l’existence de dieu. Pour de nombreux journalistes et intellectuels américains, les discours de haine sont mieux régulés et combattus dans le débat public d'idées que dans les tribunaux. C’est ainsi que l'humoriste Jon Stewart, s’est dit « troublé » à l'arrestation et au renvoi en correctionnelle, pour «apologie du terrorisme», de Dieudonné pour «Je suis Charlie Coulibaly», sur son post Facebook. Et d’enchaîner : «Arrêter quelqu'un pour avoir dit quelque chose quelques jours après une manifestation de soutien à la liberté d'expression – c'est un peu bizarre.»
Pour une grande partie d’intellectuels américains républicains ou démocrates « les discours de haine sont mieux régulés et combattus dans le débat public d'idées que dans les tribunaux. Or, en France, plus de cinquante personnes ont été arrêtées pour apologie du terrorisme ces derniers jours, et certaines ont reçu des peines de prison ferme. » (Slate magazine)
Aux Etats-Unis, seul un discours qui incite directement à une action violente peut être puni par la loi (et il faut qu'il y ait une réelle probabilité que cette action violente se produise). En France et en Belgique, c'est simplement l'expression d'une opinion pro-terroriste qui est criminalisée.
En l’occurrence, les Américains ont raison et nous serions fort avisés à ne pas leur donner des leçons sur ce terrain là.

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