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La loi au pas de l’oie.

Depuis que nos gouvernants se sont aperçus que l’économie leur échappait, et qu’elle avait plus d’emprise qu’eux sur les citoyens, ils se sont intéressés de plus près aux particuliers.
Ainsi, ils les submergent d’un tas de lois souvent en doublon restreignant les libertés sous prétexte que ces dernières sont menacées.
Ça tombe bien. Les citoyens pensent que l’abondance des lois est nécessaire, face au terrorisme, à la montée de la délinquance et au manque d’éducation des foules.
Philippe Muray est un philosophe dont on a répandu le bruit depuis sa mort qu’il était d’extrême droite et qu’en conséquence toute sa philosophie était bonne à mettre au panier.
Il suffit de faire l’effort d’ouvrir un de ses derniers ouvrages pour le réhabiliter dans la catégorie « anarchiste jubilatoire ». Ce qu’il écrit souligne mon propos. C’est même à l’occasion d’une lecture de l’écrivain-philosophe que j’ai eu l’idée de cette chronique.
Philippe Muray a inventé le concept d’envie du pénal d’une société qui n’a de repères que ceux que lui donnent les gens de pouvoir. Murray stigmatise la volonté déterminante de créer des lois pour combler le vide juridique qui aboutit, selon lui, à supprimer toute forme de liberté et de responsabilité chez les citoyens.
Ainsi, placé dans ce qu’il croit être un cocon bienveillant dans lequel il croit pouvoir vivre tranquille, le citoyen est en train de perdre l’essentiel de ce qui fait la démocratie : la liberté de mouvement et d’expression !

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Cette envie du pénal s’épanouit dans la judiciarisation de la vie quotidienne, au recours permanent des tribunaux pour régler les problèmes auxquels les individus sont confrontés. L’exemple qui me vient à l’esprit est américain. Dans les grandes villes, les hommes se méfient de prendre l’ascenseur en compagnie d’une inconnue. Un procès a été intenté contre le propriétaire d’un canari. L’oiseau, échappé de sa cage, avait osé violer la propriété du voisin.
Cette envie du pénal l’est aussi pour la grande criminalité : délinquances et terrorismes. Les lois anciennes prévoient ce genre de criminalité. Elles étaient en général plus sévères que celles que l’on met hâtivement en place afin de rassurer le public qui en est friand. Les nouvelles lois se distinguent des anciennes par un amenuisement des libertés qui restent. C’est d’autant plus vrai que l’on a fait d’immenses progrès dans la surveillance à distance et dans les programmes de recherche de la criminalité, jusqu’à l’imparable comparaison d’ADN.
Daech nous aura fait perdre des pans entiers de nos libertés conquises sur l’État dans la façon de vivre ensemble, sans que nous sachions si elles sont réellement efficaces, malgré les discours officiels qui prétendent qu’elles ont empêché tel ou tel attentat, sans que personne ne voie au juste ce à quoi on a échappé.
Là-dessus s’ajoutent les discours opportunément étalés dans les gazettes des citoyens « qui n’ont rien à cacher » et qui se réjouissent de se voir contrôler plus souvent, voire suspecter au passage des portiques par des yeux invisibles planqués derrière les glaces sans tain.
C’est d’autant plus ridicule que le plus grand tueur qui ne se vît jamais rode partout sans désemparer depuis cinquante ans : plus de mille tués et 36.000 blessé l’année dernière dans les accidents de la route impliquant des véhicules à moteur. N’est-ce pas inquiétant, malgré les lois nouvelles en pagaille, même si l’on constate une légère amélioration.
Cette hécatombe n’est pas prête à s’arrêter. Elle est le résultat de l’échec de l’avalanche des lois et des efforts consentis.
Tout se tient et les millions dépensés feraient mieux de l’être là où ils s’avéreraient plus utiles.
Ce fléau fait toujours plus de dégâts que Daech en Belgique.
L’opinion ne s’en émeut pas. Certaines morts violentes sont moins « graves » que d’autres. Il faut croire que le tribut payé à la société de consommation est un mal nécessaire.
Curieuse époque.

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