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La démocratie en héritage.

En écrivant la pochade sur Nicolas hier soir, j’ai écrit que les fils de… manquaient d’imagination. En effet, d’habitude la jeunesse a des idées nouvelles, se rebelle contre les anciennes, se cabre même au point qu’on a vu souvent un fils d’un papa ordinaire virer à l’extrême gauche, parce que papa était à l’extrême droite.
Eh bien ! pas au MR.
On sait pourquoi ce parti reste approximativement dans les mêmes eaux. Ils se perpétuent entre eux ! Les chefs engendrent des chefs, comme les cocus perpétuent des cocus.
Ils épousent exactement le point de vue de leurs vieux. Vision à l’identique, au point qu’ils osent à peine l’agrémenter d’une petite nouveauté. Les jeunes reprennent les discours et les anathèmes des vieux. Ils vont jusqu’à copier les tics, les anaphores et les soupirs variés.
Ils ne perdent des voix que lorsqu’une dynastie s’éteint par sang bleu accumulé.
Les futurs visionnaires sont formatés sur la vision des pères remise à neuf.
On le voit bien avec Charles imitant sans qu’il le veuille Louis Michel. C’est le vieux qui parle quand le fils ouvre la bouche ! C’est le discours qui habille le moine, et celui que l’on entend de Charles est à la virgule près, celui de l’illustre ancêtre.
Vous me direz, si Nicolas ne le faisait pas en imitation à son père Didier Reynders, il n’aurait pas droit aux articles extasiés des gazettes locales ! On ne parlerait pas de lui. Il finirait has been à DéFI pour ranger les chaises après le meeting. Il jouerait de la musique en hobby, dans un petit orchestre de quartier, où sa future compagne serait chanteuse, au lieu de l’avoir pêchée dans un ministère ou sur les bancs de l’Alma Mater, lieux bien plus utiles pour y assembler un douillet parcours que risquer un rendez-vous sur Internet. Il conduirait les enfants à l’école, jusqu’à ce qu’ils puissent y aller seuls. On ne se retournerait pas sur son passage en disant d’un air entendu à la cantonade « Vous savez qui c’est ? C’est Nicolas Reynders, vous savez le fils de Didier. », quelqu’un répondrait invariablement « Il n’est pas fier, hein, de conduire son fils à l’école comme tout le monde » !
Donc, le petit Nicolas a son destin tout tracé. Il sera MR, un point c’est tout !
Si la perspective n’offre rien d’aventureux, de bien exaltant, le bien public sans cesse ressassé, Didier a une réserve inépuisable de bons mots (1). Il y a des compensations. Il sera aux yeux de Didier et Bernadette un bon fils obéissant, formé à l’université des parents, comme le veau nourrit aux mamelles de sa mère intellectuelle. Sa vie sera douce et confortable.

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On se demande parfois pourquoi il y a si peu d’artistes et d’intellectuels connus parmi le peuple. Cela tient à une raison bien simple : le peuple n’a pas le temps. Il ne peut pas se former, il doit travailler pour justement que se forment les petits Nicolas.
Comment voulez-vous qu’il se cultive, alors que sa mission impérative est des bosser, sinon il se marginalise et crime inexpiable, il se « dérentabilise », un peu comme le mercure, quand la découverte de la pénicilline a rendu la syphilis bénigne !
Le petit Nicolas a évité ce piège mortel. Il n’est pas né pauvre. Il n’en a pas conscience, sauf par les quelques anecdotes de son vieux qui dit souvent « à la maison nous n’étions pas riches », ce qui pour lui est une médaille ajoutée à sa brochette de décorations, entendez par là qu’il s’est fait tout seul et que son mérite est immense.
Les Fils de… n’ont évidemment pas cet argument à faire valoir. Ils doivent avant tout se défendre de la facilité avec laquelle la démocratie les nourrit, en oubliant de décrire le cocon familial aux intervieweurs trop curieux. Ils se trouvent des mérites inexistants. Ce n’est pas trop grave, papa est là derrière qui tient le cap à la barre.
Le petit Nicolas a bien quelques petits dons à faire valoir ? La clarinette et le solfège à l’âge de sept ans ? Le football avec une science innée du ballon ? Il a de qui tenir, papa est un grand supporter du Standard. Encore qu’habitant Uccle, il aurait intérêt à se faire voir dans les tribunes d’Anderlecht. Les trains miniatures que Nicolas construit avec du matériel de chez Märklin ? Papa a été grand chef à la SNCB en début de carrière, ondoyé par un baptême aux affaires par un Jean Gol qui lui tint lieu de père.
Si le rejeton ne se fait pas trop remarquer, s’il ne rue pas dans les brancards et est le premier supporter de son vieux, les gazettes ne tariront pas d’éloges. Il y sera regardé comme le digne fils de son père. S’il ne fait pas de vagues, ne prend aucune initiative hasardeuse, son avenir est assuré. Il n’a plus besoin de penser. On pensera pour lui au bon moment. Les journalistes locaux excellent dans ce qui arrange le patronat.
Allons, ne vous tracassez pas, Didier trouvera bien quelque chose de bon aloi, une juste cause qui veut dire avant tout « cause toujours ». Le thème de l’enfance en détresse jumelée à la construction de l’Europe évite les sujets scabreux comme la dérive du « juste » commerce de Trump et le racisme à fleur de peau de ceux qui veulent construire des barrières pour casser le flux de réfugiés.
Quand on s’élève un peu au-dessus des appétits des hommes, on s’aperçoit que la démocratie en Belgique est un grand champ après moisson livrant à la fringale des oiseaux, des insectes et des hommes, ce qui a échappé à la machine agricole.
Une nouvelle machine agricole est née.
Saluons le petit Nicolas, héritier du glorieux Didier Reynders.
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1. En réalité, comment ose-t-on parler du bien public au MR, alors qu’il y a tant de pauvres, que le travail n’est plus qu’une immonde corvée et qu’ils sont parmi les plus grands responsables de la monstrueuse inégalité entre les hommes ?

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