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Ça vole bas chez Richard.

Cette époque est formidable, les libéraux ont bien raison de nous détester, si je n’étais pas obstinément de gauche, définitivement fauché, trop vieux, ayant trop étudié les philosophes de la raison pour me résoudre à dire qu’ils avaient tort, incurablement méfiant de ce duo adulé des mémères et des banquiers dont l’un porte un prénom (Michel) et l’autre une grande insignifiance sous l’apparence trompeuse des hyperboles d’Alain Gerlache et quarante ans de bonheur conjugal (Didjé), si enfin ma tante en avait, elle serait état-civilement mon oncle, je crois bien, oui, que j’irais me rafraîchir l’esprit en découvrant mille nouvelles manières de renouveler mon stock de sarcasmes, dans les miteuses réunions des partisans MR, fameusement enthousiastes de la société telle qu’elle est, c’est-à-dire une merde innommable !
N’en étant pas là, comme je m’enthousiasme pour un rien, qu’en plus j’en apprends un peu plus sur l’art de s’essuyer les pieds sur les pauvres pour accéder aux plus hautes fonctions de l’État et qu’en outre, tout en étant conscient que notre beau système économique est en train de faire en sorte que notre belle planète n’en a plus pour longtemps de nous héberger à titre gracieux, je constate avec la satisfaction égoïste du condamné à mort qui sait qu’il ne mourra pas seul, que les PIB de tous les pays « évolués » sont repartis à la hausse, hâtant la fermeture de l’établissement !
Acquise dans mon nouveau rang d’être bien éduqué et civilisé, une saine revue de l’actualité ne peut que passer par l’aviation. Je vous invite à vous émerveiller avec moi, de la science époustouflante de nos grands ingénieurs.
Plus vite, plus loin, plus cher: chaque patron veut son joujou volant, dont certains frôlent les 70 millions de dollars. Que les CPAS se réjouissent, ils trouveront de quoi se documenter dans les invendus de presse déversés par tombereaux entiers chez OXFAM, sous le titre « La révolution supersonique – Le projet de jet supersonique AS2, au-dessus de New York ». Cet appareil, dont le premier vol d’essai doit avoir lieu en 2023, pourrait voler à Mach 1,4 (1.700 km/h).
Vous vous rendez compte ? Non, vous ne vous en rendez pas compte, bande d’incrédules !
« Toujours plus grands, toujours plus chers. Dans le petit monde de l'aviation d'affaires, la guerre de l'ultra-haut de gamme fait rage. Bombardier a dévoilé le 28 mai au Salon EBACE de Genève deux nouveaux appareils, les Global 5500 et 6500, des avions à 46 et 56 millions de dollars pièce. Tout en haut du spectre, les prix vont jusqu'à tutoyer les 70 millions de dollars pour les Global 7500 de Bombardier et le G650 de Gulfstream, des joujoux de 14.000 kilomètres de rayon d'action. Ce segment ultra-premium est de loin le plus dynamique d'un secteur qui peine à se relever de la crise de 2009-2010. Le spécialiste des ventes d'avions Jetcraft estime le besoin à 1.775 avions, soit un marché de 115 milliards de dollars à se partager entre les trois leaders du segment, Gulfstream, Bombardier et Dassault Aviation. »
C’est fou ! En recopiant à la lettre près, cette nouvelle aéronautique du magazine Challenge de l’adorable Ghislaine Ottenheimer, je me suis persuadé que j’avais trouvé le plus merveilleux outil de propagande qu’une gauche cherche parfois désespérément. Celui qui consiste à recopier tel quel au sommet de l’ultra luxe, le gâchis que cela suppose et l’incroyable distance entre ceux qui voient la terre au plus mal, parce qu’ils ont les pieds dessus et ceux qui s’en foutent éperdument, parce qu’ils la voient depuis leur fauteuil plein cuir à plus de quarante mille pieds !

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La suite est tout aussi délicieuse, merci Ghislaine !
« Pourquoi cette frénésie d’achats d’avions ultra-luxe? «Un jet d’affaires ne vole en moyenne qu’une heure par jour, mais les clients achètent un avion en fonction des plus longues missions qu’ils ont à effectuer», explique Ernest Arvai, fondateur du cabinet Arvai Group. L’effet du «biggest toy on the tarmac» (le plus gros jouet sur le tarmac) joue également. «Beaucoup de clients veulent le dernier appareil sorti, la plus grande cabine, le plus grand rayon d’action, quel que soit leur besoin réel», résume Richard Aboulafia, vice-président du cabinet Teal Group. Ainsi, à peine le patron d’Amazon Jeff Bezos avait-il pris livraison de son G650ER, fleuron de la gamme Gulfstream, en 2015, qu’Elon Musk achetait le sien quelques mois plus tard. »
La suite serait tout aussi délectable, mais vous savez comme ces chroniques sont volontairement limitées à deux pages dactylographiées.
Voici quelques indices qui pourraient mettre un baume sur la disparition de votre Berlingo, victime de l’usure à ses deux cent mille kilomètres près…
Suignard/Dassault Aviation - Macdiarmid/Getty/AFP - Urman/Sipa. Rayon d’action : 11.000 km. PRIX : 53,8 millions de dollars. Ce best-seller a été adopté par le milliardaire russe Roman Abramovitch et le prince Albert de Monaco.
Farrell/BFA/SIPA - People Picture/Willi Sc/SIPAG650. Rayon d’action : 13.890 km. PRIX : 68,2 millions de dollars. C’est la référence des grands patrons américains, Elon Musk et Jeff Bezos en tête. Il a effectué en 2017 un vol New York-Paris en cinq heures et quarante-huit minutes.
Bombardier/SP - Meigneux/Sipa. Rayon d’action : 11.100 km. PRIX : 62,3 millions de dollars. De la gamme de l’avionneur canadien, le Global 6000, dont Bernard Arnault et Vincent Bolloré sont clients.
On en tellement heureux pour eux, vraiment, que toute chute, fût-elle grandiose, est superflue.

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