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Une passe de trop.

Dans le micmac de toutes nos misères, corona, communauté, économie, néolibéralisme, on oublie celle qui s’est installée en belle-mère : l’Europe.
Par commodité on y envoie nos bélîtres, Chastel, Lutgen, Tarabella, ainsi ils dégraissent un peu l’usine à Gaz. D’autres y pantouflent jusqu’à leur dernier souffle, secrétaires sur le retour, syndicalistes pensionnés. Enfin, nos deux marlous nationaux, Charles Michel et Didier Reynders y ont trouvé refuge, comme des voyous planquent à l’année sous les tropiques.
C’est dire le dépotoir !
On se pose dorénavant la question « à quoi ce machin peut servir ? » sinon héberger des planqués, des filous et nourrir une armée de fonctionnaires.
La guerre entre pays européens ? Même Adolphe aurait hésité à lancer ses panzers dans l’aventure, si en 39 la France avait eu l’arme atomique avec la Russie. Erdogan, grâce au parapluie français n’a plus du tout envie de grignoter la Grèce d’île en île, les Kurdes suffisent au jeu du punching-ball.
Macron a trop les mouillettes pour envoyer un ultimatum aux Turcs au nom de l’Europe pour qu’ils rembarquent leurs troupes massées à Chypre, pays de la Communauté, sous peine de raser Ankara.
Donc l’Europe de ce point de vue ne sert absolument à rien.
Restent donc le côté social et l’économie sans frontière.
Là, on a tout de suite compris que l’économie sans frontière a bouffé le social et que l’Europe n’est plus qu’une succursale des banques et des holdings.
Sans grand changement, de la création en 1950 de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) à celle de l’Union européenne, en passant par le traité de Rome et le Marché commun, on s’est « Jacques-delorisé » en pensant qu’on allait réglé le social dès qu’on aurait mis de l’ordre dans l’économie. On n’a rien vu du tout, sinon qu’après s’être goinfrées, les multinationales s’apprêtent à nous faire payer la récession avec à la cabine d’essayage, Ursula von Der Leyen, championne du prêt-à-porter du côté de la machine-outil allemande.
On ne s’étonne plus qu’au moment où l’économie internationale périclite et où le chômage s’envole, l’Union gamberge, imperturbable, de nouveaux élargissements (Albanie, Macédoine du Nord), elle négocie des accords de libre-échange (Mexique, Vietnam). Bojo l’anglais a claqué la porte ? Eh bien, les Balkans complètent. Ce sera l’Ukraine, s’il le faut !
L’Europe est juste à l’image du capitalisme. Elle fait de la bicyclette. Dès qu’elle arrête de pédaler, le monde se fiche par terre.

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C’est son destin, et nous qui ne demandions rien de tel, par entraînement, c’est le nôtre aussi !
Bruxelles-Europe veut une surface lisse qui couvrirait la mappemonde sur laquelle glisserait, sur la musique de l’Hymne à la joie, tout ce qui ressemble à de la marchandise transportée, classée, expédiée par Alibaba-Amazon, suprêmes dirigeants de toutes terres émergées.
Quatremer, dans son amour du productivisme, s’est bien gardé de parler de Phil Hogan, commissaire européen au commerce. Alors que la plupart des habitants de l’Union vivaient confinés, que les tensions sino-américaines s’envenimaient et que Washington se moquait de la plupart des « règles » du commerce auxquelles les États-Unis avaient souscrites, l’attitude du collègue de Reynders se résumait ainsi : on ne change rien, on accélère. Quelques entreprises sanitaires seront relocalisées sur le Vieux Continent, comment faire autrement ? « Mais il s’agit là d’une exception ». Et, s’adressant à ceux qui parlent de circuits courts, de décroissance, il prévenait : « En 2040, 50 % de la population mondiale vivra à moins de cinq heures de la Birmanie. (…) Il me semble évident que les entreprises européennes ne voudront pas se priver de cette manne d’activité. Ce serait complètement idiot. » Programme des prochains mois : « Nous devons approfondir nos accords de libre-échange existants — on en a avec quelque soixante-dix pays — et chercher à en contracter d’autres. » (Les propos de Hogan sont repris du Monde Diplomatique).
Je l’ai écrit dans d’autres chroniques, alors que les confinés juraient bien que le monde avant le Covid-19, c’était fini ; le monde d’après restera de la fiction pure tant que l’estrade ne sera pas débarrassée des incrustés qui s’y accrochent comme des moules sous un wharf.
La gadoue sera permanente avec une Union européenne capitaliste et productiviste. Si le seul idéal, c’est faire du porte à porte pour caser des Audi et liquider des visseuses électriques de la Ruhr, autant dire que ce n’est pas demain que s’amorcera l’Europe sociale, qui seule fera revenir les Européens sur leur désamour.

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