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Des fins et des débuts.

Je trouve assez juste la thèse qu’une civilisation « chasse » l’autre. C’est ce que tente de nous faire savoir Michel Onfray dans son livre « Décadence ».
La civilisation judéo-chrétienne aurait fait son temps. Le philosophe nous donne la recette de ce qu’il ne faut pas faire à plus ou moins longs termes pour qu’un modèle résiste à l’usure des siècles. J’en prends acte. Mais comme Nietzsche (1) disait à peu près la même chose il y a cent trente ans, l’actuelle descente aux enfers ne se fera pas tout de suite.
L’auteur prévoit une lente agonie « comme un médecin le ferait d'une desquamation ou d'une fracture, d'un infarctus ou d'un cancer ». En somme, le docteur Michel Cymes fait de la philosophie et le philosophe Onfray de la médecine.
Les symptômes : a) le nihilisme, autrement dit ‘tout vaut tout’, donc ‘rien ne vaut plus rien’ ; b) un égocentrisme forcené ; c) une incapacité à penser en termes de grande communauté ouverte avec un repli sur des communautés tribales fermées ; d) une domination des passions tristes en général, et plus particulièrement du ressentiment et de l’envie ; e) un triomphe de la négativité.
Si nous sommes d’accord sur la décadence et la fin d’une civilisation, on ne peut l’être sur les symptômes décrits ci-dessus qui sont en réalité ceux d’un portrait type de citoyen. C’est celui ambivalent de l’homme éternel. Cet homme-là est antérieur aux civilisations plus anciennes, déjà probablement égyptiennes et mésopotamiennes.
Je ne dis pas que ce caractère ne s’est pas accentué au cours des âges et qu’il n’est pas en partie la cause de notre futur effondrement, je prétends que le facteur déterminant soit plutôt l’incroyable réussite des techniques et des méthodes poussées à des accroissements sans limite, par une économie limitée – elle - aux ressources naturelles non renouvelables.
Autrement dit notre réussite nous pousse dans une impasse. Que fait un flux qui envahit un lieu fermé ? Il reflue par sa propre force et se trouve en confrontation avec le flux suivant qui lui n’a pas encore fini sa course jusqu’au mur infranchissable. C’est de cette confrontation intérieure que profite la religion musulmane pour détrôner la judéo-chrétienne.
Onfray fait coïncider la fin de la civilisation occidentale avec la fatwa lancée par l'Iran contre l'écrivain britannique Salman Rushdie. « Le 23 février 2016, la prime pour qui tuerait Salman Rushdie a été augmentée par l'Iran de 600.000 dollars. Que fait l'Occident? Rien. Que peut-il faire? Rien”, explique Michel Onfray, affirmant par ailleurs que “le Dieu du Vatican est mort sous les coups du Dieu de La Mecque”. »

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Les débuts de la fin sont bien plus anciens que cela. Ils datent de la commercialisation du long courrier à réaction, le Boeing 707, dans les débuts des années soixante, raccourcissant les distances par l’économie de temps, diffusant des magazines de la vie « rêvée » des Occidentaux chez eux, par comparaison à la vie des autochtones, sous la colonisation par les mêmes. C’est le Maghreb qui réagit le premier à la guerre d’Algérie et le ressentiment grandissant du monde arabe, soutenu par une religion politique comme le fut la chrétienne au Moyen-âge, jusqu’à Napoléon III.
Les grandes transhumances qui suivirent vers l’Europe le furent non pas dans un but d’assimilation, mais de conquête, quoique cette différence ne soit pas encore bien comprise de l’Occident, ni bien admise de l’Orient et de l’Afrique.
Tout s’accélère depuis les attaques menées par des pays comme la France et les États-Unis contre des pays musulmans qui “ne nous menaçaient pas”, comme l'Irak, la Libye ou le Mali. Tandis qu’en politique intérieure deux thèses s’affrontent sur l’installation des peuples aux origines différentes, la gauche se voyant traitée d’islamo-gauchiste et la droite de nationaliste, individualiste et raciste.
Je rejoins Onfray sur l'effondrement du judéo-christianisme en Europe par la baisse du taux de fécondité de sa population couplée à la Résurgence de l'Islam et à son taux de fécondité,
Le bateau coule : il nous reste à sombrer avec élégance, dit le philosophe, sans dire un mot de l’économie de marché et des accords internationaux dont on a vu la nuisance lors de la pandémie. Raison pour laquelle, je dirai que nous ne sombrerons pas avec élégance et quand arrivera le moment, ce ne sera pas l’Islam qui fera tomber les Occidentaux, mais notre propre système, parce que nous aurons été incapables d’en proposer un autre qui aurait pu prolonger cette civilisation.
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1. Nietzsche : « Ma mission : comprendre la cohésion interne et la nécessité de toute civilisation véritable. »

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