« Monsieur Teste : « La bêtise n’est pas mon fort » ; | Accueil | Le scandaleux 11 février 2022. »

La diPSarition.

Julien Drey ancienne figure du PS français a collaboré à un film qui retrace, depuis Mitterrand, à pas lents mais inexorables, la descente du parti socialiste français dans l’enfer de l’oubli.
La déculottée promise d’Anne Hidalgo à l’élection présidentielle et la dernière trahison de Christiane Taubira (Jospin fut la première) à la même confrontation, clôtureront la saga de ce parti, jadis irremplaçable et aujourd’hui inexistant.
Comment est-ce possible ?
Coincé entre les promoteurs du néolibéralisme, centre et droite confondus, le PS français paie son double jeu en tentant d’intéresser les classes moyennes, tout en gardant un œil sur le monde du travail. Le renoncement à la lutte des classes et son intégration au libéralisme politique n’ont finalement pas produit un effet heureux de « progrès ». Cela se solde aujourd’hui par des bas salaires et l’augmentation de la pauvreté.
Le processus français pourrait-il devenir belge ? Tous les ingrédients mortifères du parti français se retrouvent dans le PS belge, une identique dérive libérale et un désintérêt pour la classe ouvrière.
Paul Magnette semble s’être défait de la politique précautionneuse de Di Rupo et navigue désormais seul à la barre. Il sent qu’il lui faut se démarquer du MR et montrer sa différence au sein de la coalition Vivaldi, sous peine de se retrouver un jour sous les scores du PTB.
La double interview de Paul Magnette et de son fidèle lieutenant, Thomas Dermine, secrétaire d’État à la Relance, aura fait l’unanimité contre elle. Partenaires de la majorité, opposition, économistes, patronat et sans doute un certain nombre d’employés et d’indépendants issus de l’e-commerce, s’étonnent d’un discours qu’on n’avait plus entendu depuis des dizaines d’année au PS. Mais c’était son but, un coup de barre à gauche pour que cela se sache.
Magnette est bel et bien coincé dans le libéralisme conformiste du parti et ne pourra pas s’en dépêtrer vite fait. Ses prédécesseurs ont cru que le monde du travail allait rejoindre la classe moyenne. Ils se sont trompés. Sa sortie contre le e-commerce est assez surprenante. Une réunion doit se tenir vendredi au sein du kern sur la réforme du marché du travail. Il se fait des illusions sur la nature de ce dont on va parler, certainement pas de l’e-commerce, mais de la flexibilité du travail. Il y a seulement deux ans, Elio Di Rupo n’était pas contre un aménagement que Magnette semble ne plus vouloir. Il est vrai qu’avant le Covid-19, le PS était tout feu tout flamme pour une flexibilité des horaires et du temps de travail à la découpe, à condition de revaloriser les salaires et sans tenir compte de la vie privée des travailleurs qui allait s’en trouver bouleversée.
La formule trouvée par Paul Magnette « Après la sortie du nucléaire, la sortie de l’e-commerce » le voit partir en guerre contre Amazon. Il reproche à Amazon, Zalando et consorts de dégrader les conditions de travail et d’environnement. L’annonce d’Amazon selon laquelle les salaires des personnels ont été fortement augmentés, tombe à propos. Voilà Magnette malgré tout, son libéralisme et son abjuration de la lutte des classes, qui s’en prend à la tendance mondiale, sans un programme révolutionnaire et dans la confusion complète de ses intentions. Mine de rien, cela s’appelle la double trahison, celle qui concerne l’histoire du PS attaché à la cause ouvrière qu’il abandonne et la cause libérale si l’on en croit son nouveau crédo « Je pense que l’e-commerce n’est pas un progrès, mais une régression sociale et écologique. Pourquoi acceptons-nous de faire travailler des ouvriers de nuit dans des centres de conditionnement ? Parce que les gens veulent acheter 24 heures sur 24 et recevoir leur colis à domicile dans les 24 heures. Ne peut-on vraiment pas attendre deux jours pour un livre ? ».

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Bien entendu, il a raison sur le principe, mais dans sa bouche, n’est-ce pas un peu tard ? Il aura difficile d’effacer l’étiquette de boutiquier à la petite semaine que Di Rupo cultive depuis dix ans.
La condition libérale du PS, lui revient comme un boomerang, celle de vouloir défendre « les petits indépendants », « dynamiser les petits commerçants et les centres-villes ». Il fustige un secteur où l’on retrouve « le nouveau prolétariat ». Ah ! bon, parce que l’ancien avait disparu ?
Quand un partenaire se sent mal à l’aise dans le camp libéral, le MR prend tout de suite la mouche. Le despotisme sournois décrit par Alexis de Tocqueville joue à plein chez Bouchez. Quoi !... à l’intérieur du camp de la liberté d’entreprendre, on ose émettre des objections ! Georges-Louis Bouchez attend les défaitistes au tournant « Le 19e siècle ne peut être un projet de société. Le progrès est une chance. Il faut avoir l’esprit ouvert et la capacité d’adapter la société pour plus de bien-être. L’e-commerce ne doit pas être laissé aux pays étrangers. On perdrait des centaines de millions et des emplois. »
Le Vélociraptor à la Toison d’Or a raison du point de vue stricte de la règle libérale de faire du pognon à tout prix. C’est le camp choisi par le PS faut-il le rappeler. Du point de vue social et humain, il a tort. Mais ça, c’est le camp du socialisme à la Jaurès. C’est en l’oubliant, sans le savoir à l’époque, que le PS signa son arrêt de mort.

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