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La fête à neuneu, le 21 du chose…

Si le 21 est un jour férié, nous le devons au serment prêté à la Constitution ce jour-là, par le premier des Léopold.
Une sacrée fournée que ces Léopold !
Le fondateur de la dynastie ne voulait pas d’un pays riquiqui fait de toute pièces et sur mesure pour que les relations entre la France et l’Allemagne demeurassent mauvaises. L’ancien prince consort de Grande-Bretagne accepta sur pression anglaise, de fonder une dynastie constitutionnelle sur le modèle anglais. Surnommé le Nestor de l’Europe, il se remaria pour nous faire don d’un autre Léopold.
Ce dernier, noceur invétéré laissa une partie de sa fortune faite sur l’ivoire et le caoutchouc, dans les bordels parisiens. Prince-propriétaire du Congo, il dirigea ce pays d’une main de fer en utilisant les mercenaires de la Force publique. Bien avant Adolf, il inventa le travail forcé de la population indigène, avec la brutalité que l’on sait.
Sautant un règne, le troisième du genre fut le plus fameux des Léopold, tant du point de vue de la trahison que du sens de la diplomatie.
Certes, il n’inventa pas la chaise des plaisirs comme son grand-oncle, mais sa politique à l’image de sa vie privée fit vaciller le trône, quand de retour d’Allemagne avec une nouvelle femme, sa captivité dorée devint un secret d’État mal gardé, suite à ses entrevues avec Adolf, et sa fuite en Suisse après la défaite de l’Allemagne.
Tous ces Léopold sont lourds à porter sur les épaules de l’actuel Saxe-Cobourg, successeur.
Reste à fêter l’Armée, comme il se doit, par un défilé devant les généraux derrière Philippe à la tribune d’honneur.
Chef des armées, quoique on dise d’un monarque constitutionnel, cela fait penser, quelque part, à l’exercice d’un pouvoir absolu et la certitude de passer pour des ploucs le restant de nos jours. Nos conditions d’inférieurs ne nous gratifient d’aucun confort, ni d’aucune garantie, même en qualité de souillons de la démocratie.
Naturellement les porteurs de médailles sur estrade, les gradés avec sabre et gants blancs de ce 21, de retour dans les casernes ont tendance à forcer le trait et la distance entre leur commandement et nous.
Mes hommes, c’est ainsi qu’ils nous appellent, illustrent la domesticité en uniforme.
Le rapport de subordination que la discipline institue en vue de la guerre se transforme en temps de paix en corvées et servitudes.

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Une caserne, c’est comme une entreprise avec des patrons qui décident et des employés qui exécutent. C’est une féodalité partagée entre le système libéral et le Régime militaire.
Le rôle des petits gradés, courroie de transmission entre les ordres des généraux et nous, futurs militaires depuis que la guerre n’est plus impensable en Europe, devient un jeu particulier de compensation et de revanches sociales de l’adjudant-chef aux troufions.
Ce militaire qui n’a peut-être rien été de relevé dans sa vie civile se voit donnant le « la » à des plus diplômés que lui. En temps de mobilisation, ce qui nous pend sous le nez, il pourrait demander à un médecin ou à un avocat de balayer sa chambre.
Vu ainsi de l’armée et par une personne qui ne se le permet que parce que l’Armée l’y autorise, cela n’est pas jubilatoire, mais tout bonnement odieux.
Autre chose serait, qu’enfin reconnu dans ses qualités d’être humains, n’importe qui fût en droit de le faire au nom de l’utilité sociale et de l’égalité des droits.
Mais on n’en est pas là en ce 21. L’estrade est bien telle que la Belgique attendait.
Il ne manquera aucun bouton aux vestes d’apparat. La musique militaire sera censée enthousiasmer les foules. Le couple royal se portera au centre de l’estrade en guettant le ciel, redoutant qu’il pleuve et qu’accessoirement les avions jutent les trois couleurs au bon moment.
Il y a ainsi une continuité dans la tradition qui rassure le Belge moyen et qui exaspère les autres.
D’un côté des moralistes détendus et de l’autre les inquiets aux croyances délétères.
La fête pour tous reste un terrain d’activités politiques intenses, une satisfaction du pouvoir de s’exhiber dans ses fastes et atours, sur un terrain propice à l’admiration des foules de leurs personnes de carte-postale.
Chacun en a ainsi sa part, comme toujours inégalement répartie, mais tous ne l’ont pas en entier
Pour les éreintés et les assujettis au travail forcé, un jour à ne rien faire, c’est toujours ça de pris.

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