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Liège renoue avec son plus lointain passé.

L’archéoforum sous la place Saint-Lambert a ouvert ses portes ce troisième week-end de novembre 2003.
C’est l’avant-dernier maillon d’une chaîne de musées, l’ultime étant le Grand Curtius accessible seulement en 2006, qui fera de Liège la première ville de Wallonie en ce domaine.
Grâce en soit rendue à l’obstination des Liégeois, aux membres des sociétés archéologiques et à l’Université de Liège qui ont arraché l’espace Saint-Lambert à l’appétit des promoteurs.
Enfin, abandonnés les projets mégalomanes, il a pu être trouvé des accords conciliant parking et musée. Et tout est bien ainsi.
Des premiers Liégeois aux commères du XVIIIme siècle qui y ont tenu marché, cela fait plusieurs millénaires qu’expliquent, d’une trace à l’autre, des guides compétents.
Ainsi, nous y verrons des vestiges de la villa gallo-romaine, des murailles impressionnantes sur lesquelles fut fondée une des plus grandes églises de la chrétienté, jusqu’à la conservation d’une cave d’une maison particulière jouxtant la cathédrale, tout un passé qui dorénavant s’apprendra sur les bancs d’école et in situ.
Cet endroit préservé d’aucuns ont voulu le rendre magique avec éclairage parcimonieux et jaunâtre comme celui du Colysée de Rome. Des fils de lumière rouge délimitent le gallo-romain du reste de la visite. Un fond sonore se module au fil du dédale d’un étroit chemin un peu comme celui d’une grotte. Du reste, cette atmosphère de caverne est soulignée par le maintien d’une grande humidité afin de préserver les vestiges qui sans cela pourraient se détériorer.
C’est un musée vivant. Il existe des parties du sous-sol non fouillées et sous plastique, qui permettront des campagnes de fouilles ultérieures et peut-être d’autres découvertes.
Cette belle réalisation se perfectionnera sans doute à l’avenir.

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C’est pourquoi, les quelques critiques qui vont suivre se veulent constructives.
Le son est-il approprié aux périodes parcourues ? Est-il nécessaire d’entendre un grand vent soutenu comme celui d’un ventilateur pour sonoriser la partie préhistorique ? La jeune fille qui nous servait de guide devait donner de la voix et il n’est pas sûr que les derniers visiteurs du groupe aient pu en entendre quelque chose.
L’éclairage parcimonieux a été choisi pour l’effet de mystère. C’est entendu. Il serait alors nécessaire d’équiper les guides de lampes à faisceaux lumineux concentrés afin d’aider le public à regarder ce de quoi on parle.
L’idéal serait d’établir un renforcement de l’éclairage qui serait commandé par le guide de façon à mettre en évidence les pièces décrites, comme cela se fait dans les grottes de Han.
Le parcours peut être dangereux pour des personnes peu valides. Certains vestiges coupent les allées, d’imperceptibles dénivellations se terminent par des marches d’à peine quelques centimètres. Ne pourrait-on étudier un éclairage au sol dans ces endroits ?
Enfin, les toilettes n’ont que deux wc, celui réservé aux hommes tenant lieu d’espace pour handicapés.
A moins de pouvoir entrer par la porte donnant sur le tunnel des bus, pour assister dans la grande salle à des conférences, je ne vois pas comment un handicapé sur un siège roulant pourrait faire le parcours, tant celui-ci est hérissé de difficultés.
Le film de fin de visite sacrifie la précision à l’esthétique, avec des effets appuyés sur des visions qui mêlent à la fois histoire et fantasmagorie.
Il y manque une séquence importante, celle du dernier quart de siècle passé qui déboucherait sur l’aboutissement inespéré actuel après les tribulations, les projets, les plans et les maquettes qui n’ont cessé de nous prendre la tête pour faire de Liège une mégapole à l’américaine, toute en hauteur. Nous l’avons échappé belle !
Un regret enfin, on sait que c’est l’ingénieur Lohest qui le premier ouvrit la place Saint-Lambert aux alentours du début du siècle dernier pour nous montrer les vestiges gallo-romain. Il y avait aussi dans cette visite un fond de cabane néolithique, sorte de petit quadrilatère de terre noire. Qu’est-il devenu ? L’a-t-on détruit lors des travaux ? Ou bien n’était-ce qu’une mystification ?
Le personnel interrogé et par ailleurs si compétent n’a pas répondu à cette question.
Peut-être que de vieux liégeois pourront donner la réponse ?
En résumé, une réalisation remarquable, bien équilibrée pour des vestiges importants mis en valeur.
Pour les visiteurs, ce fut un plaisir.
D’après le groupe suivant et le nôtre, cette première journée est déjà un succès de foule.
Il faut craindre cependant qu’une fois la curiosité des débuts éteinte, les 5,5 euros d’entrée aient un effet dissuasif permanent.
La Ville devrait prendre exemple sur les musées nationaux de France qui organisent des visites gratuites pendant certaines périodes de l’année.
Je sais bien que l’entretien et le personnel ont un coût, mais l’accès à la culture pour tous passe par l’ouverture des musées au plus bas prix possible à des Liégeois en situation précaire que la politique actuelle risque d’écarter.

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