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RUPTURE

C’est assez surprenant ce désir soudain du monde du dessus de s’occuper de celui du dessous en cherchant à mettre le nez dans les blogues des simples citoyens?
Jusqu’alors, chacun des deux camps s’occupait de sa petite cuisine sans s’occuper de l’autre.
Il y avait ainsi un cercle d’amis, de journalistes, de relations d’affaires, de personnages de renoms, d’universitaires toujours les mêmes, présents partout avec des avis sur tout qui s’auto encensaient, se félicitaient, se jalousaient mais ne s’encanaillaient jamais avec nous.
Cela marchait bien.
Les journaux faisaient leurs manchettes et tandis que nous avions inventé le fil à couper le beurre bien avant qu’ils ne le découvrent, leurs encyclopédies étaient autant de « prodigieux bonds » vers une efficacité et une modernité dont ils étaient les seuls à s’ébaubir.
Nous avions beaux parfois émettre des sons articulés qu’ils ne pouvaient confondre avec ceux des primates qui passeraient pour des raisonnements soutenus, peine perdue, nous souffrions trop de cet a priori d’a priori comme le dit si bien Bourdieu pour que leur vive intelligence s’abaissât jusqu’à nous.
Nous en avions tous pris notre parti.
Nous ferions de l’écriture quand même à notre niveau, avec nos moyens, avec le secret espoir que l’un d’entre nous devînt en partant de son obscurité native, un astre bien plus éclairant qu’eux et qui succéderait à des poètes bien plus évidents que les lauréats de la langue de bois.
Pendant nos élucubrations, les autres capitonnaient leurs certitudes dans le confort de la pensée officielle. Ils se congratulaient, s’envoyaient des médailles et s’illustraient par des titres ronflants de chevalier des choses ou de docteur émérite des trucs.

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Eh bien ! c’est fini. La paix est rompue.
Même notre insignifiance est de trop. La nullité de nos propos finit par inquiéter. Nos pitreries les scandalisent au plus haut point. Il va falloir que nous leur rendions des comptes, alors qu’au grand jamais nous ne leur en avons demandé. Les sources de leur gloire, leurs nominations merveilleuses, leurs carrières exemplaires, leurs filiations, cousins, belles sœurs, amants, maîtresses, si on couche plus au PS qu’au MR… Rien, jamais. Nous étions là-dessus d’une grande discrétion, imité en cela par le clergé des Lettres et l’élite de nos folliculaires.
Les accords tacites entre ceux qui dirigent et ceux qui sont dirigés sont devenus caducs !
On ne peut croire que l’évanescente Marie bat le rappel de la bien pensante société contre la plèbe sous prétexte que s’y cachent quelques SS revenus d’un nouveau Munich de la bêtise, ou l’un ou l’autre malodorant négationniste, deux paires de Palestiniens survivants de Sabra et Chatila, quelques libertaires attardés et un vieux trotskiste, ancien collectionneur de pics à glace, qu’enfin tout ce monde là serait capable de déstabiliser un Etat fort de sa vérité sur ses bases centristes et bourgeoises ?

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Car, s’il est vrai qu’il y a tout cela sur Internet, qui nous dit qu’il n’y a pas bien pire dans le monde du dessus ? Dans, par exemple, un racisme au quotidien de cette société discriminante qui est avant tout la leur, avant d’être modestement, un peu la nôtre ?
Qui nous dit que dans les quelques idiots du ras des pâquerettes qui s’entêtent à découvrir des différences entre les hommes, il n’y a pas de leurs créatures, ceux que « ces beaux messieurs » n’ont malheureusement pas pu éduquer ?

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