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Quelle galère !

La décision du Parlement européen d’entreprendre des négociations avec la Turquie pour son entrée dans l’UE pose à certains pays dont la France et la Belgique un problème éthique.
Il s’agit de définir dans quelle condition un porte-parole de la Nation peut prendre une position engageant celle-ci avant une quelconque forme de décision collective et démocratique.
En Belgique, on a vu le premier ministre Verhofstadt accueillir le premier ministre turc en se jetant littéralement dans ses bras.
En France, le président Chirac est allé d’un discours, véritable plaidoyer en faveur d’Ankara, malgré une opinion française assez incertaine, voire hostile et d’un UMP, plus favorable à une association qu’une entrée de la Turquie à l’UE.
Le problème ne porte pas sur la décision en elle-même, mais sur la manière dont elle a été souhaitée par nos dirigeants, sans aucun plébiscite, ni même aucun accord formel entre les partis. Personne n’a fixé une règle de conduite sur cette matière si délicate.
Les manifestations intempestives de nos dirigeants en faveur de la Turquie constitueraient-elles un abus de pouvoir ?
Si, évidemment, c’est ainsi qu’en Belgique, on entend exercer la démocratie, on peut s’attendre à tout, déjà à ce que nous nous habituons à ce que le pouvoir économique nous dicte notre manière de consommer, voilà que s’adjoint à cette pratique notre manière de penser !
On s’en rend compte tous les jours, des socialistes aux libéraux, beaucoup pensent qu’il y a des limites à l’extension de la démocratie politique. Ils sont persuadés que la volonté populaire est plus souvent une menace, qu’une volonté exprimée majoritairement donnant l’image claire d’une ligne de conduite.

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A les entendre, l’excès de démocratie tuerait la démocratie.
Cette conception se traduirait – se traduit peut-être déjà ? – par une évolution du régime démocratique, vers un fascisme bénin dont certains ministres semblent, malgré eux, avoir montré l’exemple, ces temps-ci.
Quand on est censé représenter le peuple, on a la décence de taire en attendant l’avis général ses sentiments particuliers. Ou alors, pour défendre ses convictions personnelles dans une matière qui ne touche pas au mandat que l’on exerce, il faut descendre de son piédestal et remiser le porte-voix de la fonction, afin de rentrer dans la peau d’un citoyen ordinaire.
Mais à force d’interpréter la pensée des autres, ces gens ont-ils encore la faculté de redevenir des citoyens ordinaires ?
On peut dire ce que l’on veut de la décision du Roi Baudouin de se mettre en congé pour ne pas signer la loi sur l’avortement, mais son geste avait le mérite de la clarté.
C’est quoi, pour nos gens de pouvoir, la démocratie en définitive ?
La question reste à poser.
S’il y a matière à débat sur l’adhésion de la Turquie, comme sur l’adoption de la Constitution européenne d’ailleurs, on peut s’étonner que des personnages de premier plan profitent de leur notoriété pour influencer l’opinion.
Une telle désinvolture, un tel mépris de ce que peuvent penser les électeurs, montre à quel point nous aurions raison de suspecter le pouvoir exécutif dans toutes les spéculations mettant en cause notre avenir.
Si nous nous laissions aller à leur faire confiance, nous nous trouverions un jour ou l’autre dans une Belgique où nous ne nous reconnaîtrions plus.

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