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L’info nimportaouak

Les poids moyens : TF1, le 20 heures : 8,7 millions de téléspectateurs ; RTL, le 7/9 : 3.531.000 auditeurs.
Les poids plumes : Ouest-France : 762.822 exemplaires ; presse gratuite : « 20 minutes », Paris ; RTBF et RTL, ainsi que tous les journaux belges.
Le poids lourd : Internet, novembre 2004 : 15.880.324 visiteurs sites francophones.
C’est évident que d’ici le quart de siècle, la plupart des journaux belges et français auront disparu. Les deux télévisions belges auront fusionné ou auront été « ravalées » au goût dominant. La presse gratuite sera au maximum de sa capacité et Internet dépassera les 50 millions/mois de recherches d’informations.
Avec la gratuité des services : Yahoo, Wanadoo et Google seront les maîtres de l’information.
Cohabiteront différents types d’information. Les mutations prévisibles à court terme sont plus difficiles à discerner, en raison des soubresauts des médias moribonds qui font illusion.
Première tendance, l’information en continu qui est dans l’air n’est pas la meilleure manière d’informer. C’est pourtant celle-là qui supplantera toutes les autres. Depuis le 11 septembre, le besoin grandit d’être tenu au courant d’heure en heure, mais dans la mesure où les informations sont récoltées dans la crainte d’un deuxième attentat de grande ampleur, c’est tout l’équilibre de l’information qui est en jeu. Le tsunami expliqué de long en large depuis dix jours et ce au détriment des autres événements et notamment locaux, coupe le public de la réalité de son quotidien et montre, s’il en était encore besoin, le pouvoir exorbitant que peut avoir une concentration d’informations de tous les médias sur un sujet unique.
Deuxième tendance, le zappeur n’aime pas entrer dans le détail des choses, il est pressé. Les images lui suffisent. Les commentaires l’insupportent. Il ne dispose plus des moyens intellectuels à se forger une opinion autre que celle du plus grand nombre. Trop d’infos sur des sujets variés le bloquent. Il disjoncte et ne comprend plus rien. Les subtilités du langage lui échappent. Il paie cash la façon dont on arme les jeunes pour se défendre dans la vie : l’apprentissage d’un métier, un programme centré sur les maths et un abandon de la sémantique d’une langue française malmenée.

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Ce qui fait que le citoyen, n’est plus à même de jouer son rôle de gardien des valeurs.
Certains disent ne pas pouvoir se coucher sans leur content d’infos. Cependant, lorsqu’on leur demande de faire la synthèse de ce qu’ils viennent de voir, 80 % de ce qu’ils ont retenu, ne sont que des faits-divers ou des images de la guerre d’Irak, sans oublier le tsunami en vedette incontournable.
Si la formation de l’opinion publique est fortement déterminée par les médias, au vu de ce qu’ils donnent à lire et à voir, étonnons-nous que l’exercice du droit de contrôle du citoyen de la démocratie soit pratiquement abandonné.
Une lecture bricolée de la réalité conduit à un désintérêt pour la chose publique.
Le divorce avec la politique est apparu avec tous ses effets dans la façon actuelle de s’informer.
Reste que l’enjeu majeur est de sauver ce qui peut l’être afin de préserver autant que possible la pluralité de l’information.
Bien des éléments nous font craindre que la page est déjà tournée de la pluralité et que, dorénavant, seuls les pouvoirs publics par de judicieuses dotations pourraient encore arrêter l’hallali final. Le temps n’est pas trop éloigné où nous serons manipulés sans que nous ne nous en apercevions.
Les journaux gratuits reproduisent les mêmes admirations que les instances officielles.
Même s’ils existent au service d’un capitalisme militant, comme les industriels qui y promeuvent leurs produits, ces journaux-prospectus pourraient jouer le rôle que ne joue plus la presse, par des ouvertures sur des milieux plus critiques en abondance sur le NET. Mais qui oserait faire preuve d’originalité là où les recettes publicitaires sont en cause ?
L’espoir est bien mince. Heureusement que le passé nous incite à être prudents. Les régimes totalitaires qui n’ont que faire d’une opinion qui n’est pas la leur, déclenchent par leurs outrances des vocations parmi leurs opposants. Il n’est pas dit que cette réaction ne pourrait pas avoir lieu en démocratie. Le discours de la pensée unique peut réunir les conditions d’une fronde de l’opinion.
Alors, les esprits libres se réfugieront sur Internet. Les blogs feront office de contre-pouvoir.
Richard III aura abattu sa part de l’ouvrage. Tout sera bien ainsi.

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