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Un homme heureux

-Ça y est. Je la prends !
-Tu prends quoi ?
-Ma carte.
-Comment ça se fait, si tard ? Tu n’es pas un perdreau de l’année !
-J’ai hésité. C’est toi qui m’en as donné l’idée. J’ai envie d’être un membre actif.
-Moi, je t’en ai donné l’idée ?
- Tu ne te relis pas ? Toujours négatif, critiquant tout. Alors…
-Alors ?
- On n’est pas si mal mon vieux, dans ce pays. Il y a beaucoup plus de gens honnêtes que tu ne crois… La situation n’est pas mauvaise… Le capitalisme que tu critiques tant, depuis que je te lis, tu n’as rien proposé de mieux. Je prends ma carte parce qu’il y a des gens comme toi, si négatifs ! On dirait que tu as peur du progrès. Positive, nom de dieu !
- Ma foi…
- La misère, tu n’as que ce mot à la bouche. T’es misérable, toi ? Tu serais pas plutôt jaloux ?
-Bien, non…
-En plus, je te connais, fourré chez tes intellos d’amis qui sont plus à gauche que leur chauffeur, en compagnie de jolies femmes qui parlent du Che en buvant du don Pérignon… Personne travaille où tu fréquentes et personne s’en plaint… D’où ils sortent l’argent pour leurs faux frais ?
-Il faut faire abstraction de sa situation personnelle pour…
- Et vas-y de tes phrases tiroirs qu’au milieu on sait plus ce que tu veux dire…
-Bref, c’est ma « gauche-attitude » qui t’a décidé ?
- Oui. Je veux militer pour la joie, le bonheur et le progrès social, mais dans l’ordre et la discipline. Tradition ! Tradition ! Tout est là. Chacun son tour. Respect des Institutions.
-Beau programme !
-Rigole pas. Si je suivais tes informations, pas toujours exactes je te signale, j’irais me pendre dans la cabane au fond du jardin avant l’apocalypse, le tsunami général, la vague monstrueuse qui effacerait d’un coup l’humanité !
-Tu as de bonnes nouvelles pour remplacer les miennes?
-Absolument. Les partis sont honnêtes. Les syndicats défendent bien les travailleurs. La Belgique est un pays d’avenir. On y gagne bien sa vie et personne ne meurt de faim.
- Dis donc ! Si c’est à cause de moi que tu causes ainsi, on va me demander de tenir la chronique des désespérés dans le Journal La Meuse, pour rendre le moral aux lecteurs.
-C’est la façon dont tu conçois le métier de journaliste qui me déçoit le plus. A t’entendre, nous sommes tous vendus au pouvoir. C’est cela qui m’a incité à prendre ma carte, par défi !
-On peut dire que tu es déterminé !
- Si tu décourages les patrons, que tu critiques les institutions, la justice et le gouvernement, je ne vois pas bien ce que tu fais en Belgique.
-Tu veux expulser pour incivisme un type qui est né place Del’Cour?
-Je n’irai pas jusque là. A la différence de toi, je n’ai pas de haine. J’aime tout le monde.
-Je parie que c’est à cause de ce que j’ai écrit sur Jean-Marie Leblanc et Paul Bolland qui te mets dans tous tes états ?
-Pas seulement. Des si braves gens, quand même, et Lance, un si grand sportif ! C’est ignoble ! Je te le dis, Richard, tu files un mauvais coton. Pourquoi tant de haine ?
-Que veux-tu que je fasse ? C’est dans ma nature. Je fais ce que je sais le mieux…
-Et bien, c’est pas grand-chose, tandis que moi, je positive. Les gens sont heureux quand ils me lisent
-C’est ton choix, vieux. Mais m’emmerde pas avec ta chanson du bonheur.
- Aha ! ça te gêne de me voir en pleine certitude, prêt à prendre ma carte…
-Au fait tu t’affilies à quel parti ?
-Je ne sais pas encore.

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-Non ?
-C’est comme ça !
-Tu aurais un doute ?
-Non, aucun. Mais ils sont tous tellement intéressants que je ne sais quel choisir.
- Affilie-toi à tous les partis.
-Ce n’est pas possible. Ce ne serait pas honnête.
-Pourquoi, si tu les aimes tous ?
-Je me demande si je ne vais pas d’abord m’affilier à un homme !
-Comprends pas !
-Oui, j’ai suivi la carrière extraordinaire de Paul Bolland, mais notre gouverneur étant pensionné, je me demande si je ne vais pas m’affilier à Michel Foret !
- En voilà une idée !
-J’ai envie de créer un fan-club, les amis de Michel Foret ! Il est dynamique, talentueux… enfin tout, simple, bon Liégeois…
-Vas-y reprends ton souffle… Tu fais une fixette sur les gouverneurs, alors qu’on parle de les supprimer ? Fais une fancy-fair, avec lâché de ballonnets et concours de pétanque ?
-Pourquoi pas, on pourrait faire ça en été à côté du village gaulois.
-Et le bourgmestre ? Tu oublies le bourgmestre, ce n’est pas bien !
-J’y ai pensé. Il est très sympathique. Il est parmi ceux que j’admire le plus. Il faudrait faire le tri, et je ne peux pas. Je les aime tous.
-Tu pleures ?
-Oui. C’est de joie d’être Belge, Wallon, Liégeois, marié et père, de rassembler dans un même amour le Bourgmestre, Michel Foret, Daerden, les frères Taloches et l’incomparable Julien Lepers !
-Lepers est Français !
-Il mériterait d’être Belge.
-Et bien, au revoir. Je te laisse. Voilà les infirmiers. Ne t’en fais pas. Sois heureux…
- Oui, il n’y a qu’une ombre à mon bonheur, c’est la douche. J’y entre gai, « pour le plaisir » comme Julien… et j’en sors triste !
-Faudra le dire au psychiatre.

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