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Faut-il arrêter le progrès ?

La résistance au changement technique n’est souvent qu’une manifestation de fermeture à l’innovation, disent les économistes.
Par exemple un type à qui on supprime son emploi à cause d’un changement technique et qui va au chômage parce qu’il n’y en a pas d’autres, s’il rouspète c’est qu’il est fermé à l’innovation.
Dans cet esprit d’ouverture et de progrès, les députés européens et les fonctionnaires des pays anciennement affiliés devraient céder leurs places aux nouveaux députés et aux fonctionnaires des pays récemment introduits à l’Europe, puisque ces derniers sont payés beaucoup moins chers et que ce serait plus rentable. Si les anciens font de la résistance au changement technique, ce ne pourrait être que dans un mauvais esprit peu dynamique et européen.
Certaines organisations se prêtent d’autant moins au changement qu’elles sont plus grandes et plus centralisées. Prenons notre Parlement, on a beau leur faire savoir qu’un changement technique tous les quatre ans, ce n’est pas du superflu, que se passe-t-il ? Mais, ils se ferment tous à l’innovation puisqu’ils s’accrochent à leurs emplois, empêchant ainsi tout changement technique en fermant la porte à la jeunesse de la base.
Ce qui est vrai des administrations géantes des pays planifiés ne l’est pas moins des entreprises privées que leur croissance même conduit à la bureaucratisation.
Mieux, les grosses fortunes dont nécessairement les heureux successeurs héritent, n’est-ce pas une manifestation de fermeture à l’innovation, si l’on considère qu’il devrait y avoir une tournante dans les successions, afin que ceux qui n’héritent jamais, héritent enfin ? Il conviendrait d’établir de nouvelles règles pour un changement technique. Or, que se passe-t-il, les notaires et les banquiers font de la résistance, complètement fermés à l‘innovation. Allez demander à Frère ou Davignon de donner une pincée de leur magot à leurs femmes d’ouvrage, pour voir la gueule de ceux qui attendent les fruits de l’épargne des autres ?
La crainte de l’innovation est le fléau, comme dirait Tocqueville, qui accable le plus les libéraux. Comme les corporations ont inventé le corporatisme, les libéraux d’ici ont inventé le libéralisme à la belge. Le libéralisme à la belge consacre à l’immobilisme l’entièreté de ses études. C’est normal, puisque tout qui a un acquis – peu importe la façon dont il l’a obtenu – vote libéral parce qu’il ne tient pas à s’en séparer. Et il le retient donc. Vous avez déjà vu avancer quelqu’un qui retient ? Or, tout changement technique suggère un mouvement.
Inutile dans ce cas de parler d’angoisse de mort devant un modèle de société autre que celui auquel on tient ; c‘est de repli sur soi, de sclérose, d’obsolescence qu’il s’agit.
Ainsi ARCELOR qui passait pour une industrie novatrice et pour le symbole même de la rénovation du bassin liégeois, s’est déclaré adepte de l’inertie et adversaire de l’innovation en signant des accords avec la région wallonne qu’il savait ne pas tenir pour la reprise des installations de Seraing et d’Ougrée, idem de la région wallonne qui a signé les mêmes accords en sachant que son partenaire ne les tiendrait pas.

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N’aurait-il pas mieux valu pour éviter une fermeture à l’innovation de n’opposer aucune résistance au changement technique, en vendant les installations pour un franc symbolique à un ferrailleur liégeois et que celui-ci se débrouille avec le personnel ?
Pour les institutions, ainsi que pour les individus, la maturité dans les « étapes de la croissance » n’est en réalité qu’une transition vers la sénilité.
Il n’est pas normal que des dirigeants très âgés et séniles n’aient à leur disposition que des travailleurs qui ne dépassent pas 55 ans ! La résistance au changement technique est ici accablante et n’est qu’une manifestation de fermeture à l’innovation. Puisque la sénilité est l’âge idéal pour les grandes décisions, le pape, Sharon, Louis Michel, Moubarak, etc. il est tout à fait naturel que les subalternes atteignent la belle maturité sénile au travail. Les syndicats sont donc fermés à l’innovation au même titre que les libéraux, les parlementaires et les riches, puisqu’ils empêchent le progrès technique.
Bref, la résistance au changement technique est générale. Tout changement perturbe et donc inquiète. Le changement technique inquiète d’autant qu’il est fondé sur les certitudes des techniciens. La transition est donc d’incertitudes. Et plus l’on dépend des experts, plus les incertitudes grandissent. Jusqu’à quel point peut-on leur faire confiance, puisqu’on n’est expert que sur une petite parcelle de savoir et donc hostile à tout progrès technique et à l’innovation sur les autres ?
Ne conviendrait-il pas dès lors de ne pas naître et de rester dans le ventre de sa mère toute sa vie durant ? C’est une hypothèse de travail. Ainsi, pourrait-on contrer l’imparable raisonnement que si l’on mourrait avant de naître, on ne connaîtrait rien de la vie, ce qui mettrait fin à la polémique.

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