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Une impuissance.

-Réfléchissez-y !... Entre l’amour physique et le ridicule, il n’y a qu’un pas.
-Que voulez-vous dire, Sigebert ?
-…Vous me dites que je ne suis pas assez romantique, que je ne suis pas assez délicat… et brusquement, vous sortez de votre salle de bain dépoitraillée et offerte…
-Je n’ose comprendre.
-Si, si… comprenez. Je ne peux pas ronsardiser puis ex-abrupto me souvenir si je me suis parfumé les parties à la violette, ce musc que vous aimez tant… exceller en raffinement, puis me rappeler que je suis aussi un animal et tressauter en manipulant vos charmantes fesses… Vous me demandez de passer sans transition d’une page de Musset, à l’attitude de l’inculte Bonobo qui ne pense qu’à ça…
-Mais, je ne suis pas dépoitraillée, comme vous dites, j’ai seulement tenu compte de la venue du printemps et je me suis habillée en conséquence. Vous vous méprenez sur mes intentions, mon cher…
-Admettons et vous me soulagez. Comment peut-on parler d’amour à une femme raffinée et puis le faire, c’est-à-dire passer sans transition de la contemplation des roses à la fonction de gynécologue ?
-Qui vous dit que nous aurions couché ensemble ? Vous voilà bien présomptueux ! Ignorez-vous que je suis mariée et que ce n’est pas parce que mon époux est absent cette semaine que son meilleur ami doit en profiter.
- C’est ce qui m’avait semblé aussi. Je ne vois pas pourquoi, après trois soirées intenses aiguillées par la perspective du retour prochain de ce pauvre Edmond, pressés par le temps, alors que je ne vous ai pris un baiser qu’à l’heure de mon départ, nous conclurions par l’exposition de nos derrières … Il faut que nous nous croyions mûrs à voir et à entendre ce que nous cachons à tout le monde, pour passer à des activités physiques qui ne se comprennent bien que par l’échange de détails intimes… et si vous pétiez ou pire si vous me pissiez dessus dans les moments paroxysmiques, si moi-même je transpirais de la mauvaise odeur de poisson bouilli qu’on certains amants poursuivi par leurs muqueuses et leur sécrétion sui generis ?
-Sigebert, vous me dites des horreurs, et je ne sais si je dois écouter…
- Cependant, très chère Violaine, je vous aime et je vous désire…
-Vous me désirez, mais vous appréhendez la chose. Et pire, vous me la décrivez comme si vous en étiez l’ennemi. Que devrais-je penser par là ?

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-Par là, on ne pense rien, hélas !... C’est bien tout le drame de cette chose simple qu’on appelle l’acte sexuel. On ne pense rien, enfin rien qui ne soit adapté à la chose. C’est-à-dire les images qui défilent à ce moment précis dans notre cerveau et qui ne sont à proprement parlé que des images… de comics, mais un comics hard dépourvu de toute intellectualité, chacun s’essayant à éprouver du plaisir, parfois au détriment de l’autre. Le cerf brame et la biche halète, mais jamais en même temps.
-Eh bien ! soit, je me rhabille. Et après le dernier verre, respectant le vœu de fidélité que je fis un jour à ce pauvre Edmond, je vous prierai de rejoindre, comment s’appelle-t-elle encore ?
-Philomène…
-Je parie que ce n’est qu’un nom d’emprunt. Comme je parierais que vous ne lui dites pas les choses que vous me dites, lorsque vous lui faites l’amour…
-Certes, mais c’est parce que je vous aime trop et que l’on n’a pas encore trouvé autre chose que de le faire, ce qui navre toujours, quand le piédestal élève la déesse bien au-dessus du sol .
-Puisqu’il faut passer par là pour le prouver ? Est-ce un mal ? Et dans la perspective que cela se fera, n’est-ce pas une erreur de décrire la chose comme une horreur… C’est comme si Villepin crachait dans la soupe du CPE après qu’il eût adoré son projet !
-Il est vrai qu’on peut voir cela autrement et qu’il est fort agréable après les conventions d’une société attentive à la bienséance et dès que le mari a le dos tourné, de soulever les jupes de sa femme pour voir et sentir ce qu’il y a en dessous.
-Que faites-vous, Sigebert, vous perdez la tête ?
-Vous savez bien que la tête ne commande pas à tout.
-Et si je vous disais que votre préambule m’a ouvert les yeux et m’a complètement guérie du peu de faiblesse que j’eus pour vous ?
-Je me voulais seulement spirituel.
-Vous l’avez été, mais à vos dépens mon cher. Et puis…
-Dites donc…
-Comment appelez-vous ce discours démobilisateur, au moment où, près du but, les sens appellent à la mobilisation générale ?
- Une réflexion.
-Non monsieur, une impuissance…

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