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Je vote le 22

Au départ, j’étais contre.
Liège, capitale européenne de la culture en 2015, je n’en avais rien à foutre.
Un artiste qui est convié dans un cercle culturel proche de l’échevinat, c’est un fayot ou un magicien des-mots-qui-ne-froissent-personne, enculeur de mouche ou scieur de long en atticisme proustien (sans jamais égaler Proust, bien entendu).
Jacques Izoard inspirateur de « l'école de Liège » avait tellement tiré la couverture à lui, que les autres poètes étaient à poil ou morts de froid. La revue Odradek avait fini de nous les briser en 1980, remplacée par un concours de pétanque. Nys-Mazure n’était pas de Liège et ma poétesse préférée, ma bibiche bien liégeoise, ne savait pas y faire avec la rose locale. Ne frétille pas du derrière qui veut en chantant l’Internationale. Là encore, la disparition de Maggy Yerna, la divine toute en voix et en oeillades, pour une retraite anticipée, avait enrayé les canons de la beauté plastique et du contre-ut de la Cité ardente.
Alors, Liège, ville de référence ?… vraiment, on cherche ! Quant à Mons, hyper candidate branchée, lieu suprême de la culture, c’est la candidature surréaliste, le gag irrésistible !
Déjà, s’organise la vente des poils à gratter du Doudou par correspondance. C’est dire la quasi certitude de la capacité triomphante de l’humour montois pour le rire culturel. Une activité à base d’étrons saignants de la nouvelle revue « Gonocoques », le mot du Président, l’Aigle de Mons, en toute humilité, un concours de fléchettes au café des Etangs, et c’est dans la poche.
De toute façon en 2015, tout le monde sera rétamé ou presque. Mieux, y aurait-il encore une Ville de Mons ? Un concours ? Une Europe ? Une culture ? Une pissotière place Cathédrale ? Tant la crise pourrait faire le ménage et ramener la culture à une simple branlette entre débiles.
J’étais sur le coup d’un autre projet de référendum : « Rasons la nouvelle gare des Guillemins », l’argument était que si nous ne la rasons pas rapidement, c’est la Ville qui va raser ce qui reste du quartier. Un match de vitesse, en quelque sorte…
Puis, j’ai entendu dire que les picadors de la Violette traînaient les pieds, admiraient Mons et son Montois principal, se fouillaient le fond du pantalon, grattant le morpion en signe d’allégeance.
-Pensez, lutter contre Mons ! Que dirait Méga Elio !
L’échevinat lui-même de la culture semblait découragé. La perte du prince des poètes liégeois Jacques Izoard, la perte non moins cruelle d’Eugène Savitzkaya, éteint par le souffle de la grande disparition, la Ville ne savait plus à quel génie attribuer son prochain concours.
Il restait bien José Brouwers ! Mais, en 2015, notre Arlequin serait-il encore capable de sauter les haies, le flambeau des Arts et Lettres à la main ?... dumbfounded and tremulousness !
Quoi… quoi, pensé-je, voilà que les boulimiques des honneurs, les amoureux de la Médaille, les mirliflores de la commémo, eux qui montent trois fois par an des favelas en forme d’abri de jardin de la place cathédrale à la place Saint-Lambert, les rois du kitsch poétique orthopédique, les champions du douteux rondeau champêtre, voilà qu’ils deviendraient raisonnables, moins vicieux, plus discourant sphincters que pétomanes d’esprit !
Qui c’est-y que ça gênerait que Liège, admirable cathédrale de dossiers vides, posât sa candidature à la culture européenne, pour le bien des familles et la reconstruction en plus harmonieux du kiosque à musique du pont d’Avroy ?
Mais, c’est le gourou de Mons, évidemment, qui – en toute humilité, certes, je reconnais – allait quand même nous doubler avec des circonlocutions d’auxèse jusqu’à étendre ses anneaux sur le boulevard de l’Empereur, son repaire bruxellois.

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Du coup, me voilà pénétré de mon devoir, décidé d’assiéger le bureau 4 du Lycée Léonie de Waha, enthousiaste à cette idée de culture pour 2015, en pensant qu’on a encore presque six ans pour apprendre à lire dans les écoles, à se former la comprenette dans les Loges, à courir moins la gueuse dépouillée dans les couloirs de l’Académie, même si, d’ici là, certains auront fermé leur boîte à couleur.
C’est peu ?
Puisque les jeux du cirque vidéo ont remplacé le filet pur des belles tranches de style et que c’est partout en Europe, comment voulez-vous que les autres s’en aperçoivent de notre manque d’esprit pour les choses du même nom ?

Commentaires

Il n'y a pas de culture à Liège.
Si on en faisait déjà une ville PROPRE.

Admettons qu'il y en ait une, bien bourgeoise, bien moulée dans le discours officiel. Il aurait mieux valu qu'il n'y en ait point.

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