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Sur ma bosse, Monseigneur !

La population laborieuse est syndiquée en plus grand nombre en Belgique, qu’en France. Comment se fait-il que la situation est bien plus explosive chez nos voisins, que chez nous, avec moins de syndiqués, alors que la crise frappe à peu près de la même manière les deux pays ?
Certes, ils ont leur Nicolas ; mais nous, nous avons notre Reynders.
Loin d’être le catalyseur des mécontentements, les syndicats belges jouent à la courroie de transmission. Comme le parti socialiste, les syndicats ont abandonné leur interprétation radicale et revendicative de jadis pour celle de modérateurs des tensions, afin d’argumenter sur le sauvetage de quelques emplois supplémentaires. Les syndicats ne négocient plus pour réussir, mais pour ne pas trop échouer. Avec les voyous qui sont au pouvoir, quémander n’est pas la bonne manière.
L’expérience tout au long d’un siècle de lutte syndicale a démontré que c’est en montrant sa force et en l’utilisant à bon escient, avec l’arme absolue : le spectre de la grève générale, que les résultats de la confrontation sont les plus payants.
Plus personne ne connaît les leaders syndicaux. Ce sont des bureaucrates anonymes qui ne précèdent pas la grogne, mais lui succèdent. Ils voltigent d’un notable à l’autre comme rue Quincampoix au temps de la banque de Law, dans la fiction de Dumas, qui faisait dire à Lagardère déguisé en bossu « sur ma bosse, monseigneur » celle-ci servant de bureau aux spéculateurs pressés.
Les syndicats ne précèdent plus les mouvements de grève. Ils instillent au contraire dans les assemblées ouvrières, le sentiment diffus que les combats sont perdus d’avance. Au lieu de montrer le scandale de la situation sans issue où nous entraîne la crise, ils semblent s’être ralliés à l’idée de la droite que le capitalisme va s’en sortir plus rapidement que prévu et moins aura-t-on eu de conflits, plus vite serons-nous rétablis dans la prospérité.
Plus grave encore, ils cassent toute velléité d’affrontement par des capitulations indignes sur des chantages comme l’alternative de licencier ou de fermer l’entreprise, de réduire les prétentions salariales sans garantie que ce sacrifice garantira l’emploi.
Ils cèdent à tout, au nom d’une paix sociale qu’il n’y a plus qu’eux et le parti socialiste à croire possible.
Depuis septembre dernier, ils se sont rangés derrière le parti socialiste plongé jusqu’au cou dans la collaboration libérale. Si bien qu’on a pu distribuer des centaines de millions d’euros à ceux qui ont entraîné le pays dans la crise, sans demander des contreparties qui vont de soi, comme la modération des salaires de direction, les exigences des actionnaires mises en veilleuse, la fin des parachutes dorés et la non utilisation des sommes versées de la collectivité à des restructurations sous la forme de licenciements.
C’était indigne et pitoyable de voir les syndicats et le personnel de FORTIS quasiment supplier les petits actionnaires de laisser en l’état le bradage des actifs de la banque à l’étranger.
Les syndicats ont bien vu que l’argent de la collectivité tombait en de bien méchantes mains ; mais qu’en plus, le gouvernement socialo-libéral n’entendait pas stopper la pauvreté montante.
Le silence des Instituts, des économistes de gauche, des leaders politico-syndicaux sur la nécessité de la réforme du système capitaliste est proprement scandaleux, d’autant que des voix critiques s’élèvent à droite, reprenant les réserves des spécialistes sur la mondialisation de l’économie libérale, si bien que même en Grande-Bretagne, pays archi libéral, des entreprises sont nationalisées et que Barak Obama, aux USA, accompagne son plan de soutien de quelques conditions dont un plafond des rémunérations les plus élevées.
Le gouvernement français s’apprête à faire une concession sur les salaires en Martinique, en prenant à sa charge une partie des augmentations prévues.

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Qu’est-ce qu’on attend pour relever de la même manière les bas salaires en Belgique ?
Cela pourrait même ne pas coûter un sou à l’Etat, en relevant, par exemple, un certain pourcentage des taxes patronales pour relancer le pouvoir d’achat de la population.
Ces mesures qui tombent sous le sens d’une situation de crise passent au-dessus de la compréhension du monde syndical et politique.
Elles sont jugées inopportunes sous le prétexte de ne pas « indisposer » le patronat qui serait prêt à montrer de la « compréhension » et qui le cas échéant reverrait sa politique de décentralisation.
Il y a de quoi faire retourner dans leur tombe Renard, De Boë, Jacquemotte, Lahaut et consort, ceux qui ont combattu la bourgeoisie libérale et rapace, même si les pouvoirs ne sont plus dans les mêmes mains que jadis.
Le silence des syndicats en Belgique est accablant. Le futur en sera lourd de conséquences.

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