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Le progrès est un fourre-tout dans lequel s’entassent mille raisons et leurs contraires.
Bien tendu le socialisme-libéral est pour le progrès. Qui serait contre ? Oui, mais lequel ?
Si nous suivions le philosophe très controversé Pierre-André Taguieff, il se pourrait que l’expropriation du socialisme ouvrier, qui désire la justice, par le socialisme intellectuel (social-démocrate) qui désire le pouvoir, convainque d’accorder un sursis au libéralisme.
Cette idée, Taguieff la résume de la façon suivante : « La démocratie libérale n'est certes pas parfaite, mais elle est perfectible, elle est même le seul système politique à l'être. Elle doit être défendue parce qu'elle est le seul type d'organisation politique garantissant aux individus leur liberté d'agir et de penser. »
Cette idée de « méliorisme » suppose qu’on travaille à la perfectibilité du système. Sans quoi, laisser en l’état une chose qui nous apporte de tels malheurs serait de nature à nous faire croire que la démocratie se résume à un conservatisme malheureux.
Et c’est là qu’éclate la supercherie.
Toutes les crises du système libéral ne se sont pas soldées par une perfectibilité « naturelle » ou « suggérée » par les protagonistes de la crise.

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Bien au contraire.
Les journaux relatent quotidiennement les méfaits de la crise, sans qu’apparaissent les moyens de perfectibilité du système qui l’a créée, sinon de relativiser les dégâts par les partis de gauche au pouvoir ou, lorsqu’ils sont dans l’opposition, de proposer des programmes alternatifs de changement.
Qui ne voit dans le parti socialiste français le plus bel exemple de ce qui précède !
Le socialisme-libéral ne propose pas d’alternative. Il ne suggère que des moyens de protection des pertes subies par les plus démunis. Cette protection sociale n’est efficace qu’en fonction inverse de l’ampleur de la crise. Quand cette dernière augmente, la protection sociale diminue par l’effet du manque de moyens.
A la limite, le système libéral serait mieux à même de limiter ses archaïsmes économiques que le socialisme de collaboration et d’arriver à améliorer l’usine à gaz de cent cinquante années de libéralisme.
C’est sans doute la raison de fond du dépérissement dans l’opinion publique de la social-démocratie.
Les transferts des membres du PS à l’UMP de Sarkozy témoignent de la fragilité des différences entre cette gauche-là et la droite. L’expert qu’est Nicolas Sarkozy en matière de désagrégation des forces de gauche par des ouvertures à des personnalités socialistes, montre le président très au courant de la situation mauvaise de la gauche libérale.
En Belgique, la différence droite-gauche n’est qu’apparente. Le problème est le même, sauf que c’est la social-démocratie de Di Rupo qui est en place avec deux autres formations aux idéaux proches, pour une gestion pratiquement à l’identique de la crise que celle de la France de l’UMP.
Pour se sauver des honteuses collaborations, le seul recours est le renoncement au socialisme de culture libérale. Ce qui suppose un retour à ce socialisme des débuts ayant davantage le besoin de justice, plutôt que de pouvoir.
L’intellectualisation des niveaux de pouvoir pouvait être une bonne chose, à condition que le bourgeoisisme et l’élitisme universitaire ne formatent pas les socialistes de direction dans les stéréotypes bourgeois.
Cette condition n’ayant pas été remplie, c’est l’effondrement d’une doctrine et le ridicule de l’intelligentsia de gauche. Il suffit de penser à une connerie et de dire l’inverse, disait Coluche, pour obtenir l’accord des foules.
Encore un petit effort et le socialisme sera mûr pour la mondialisation « heureuse » version d’Alain Minc !
Comment revenir en arrière pour se ressaisir en plongeant dans ses racines ?
Lire le premier paragraphe de la Charte de Quaregnon me paraît un bon exercice. « Les richesses, en général, et spécifiquement les moyens de production, sont ou des agents naturels ou le fruit du travail - manuel et cérébral - des générations antérieures, aussi bien que de la génération actuelle ; elles doivent, par conséquent, être considérées comme le patrimoine commun de l’humanité ».
Ce texte cite à la fois les agents naturels et le fruit du travail, reconnaît l’héritage des générations antérieures, et admet comme acquis l’existence d’un « patrimoine commun de l’humanité ». Reste à gérer pour les générations futures dans les limites des agents naturels, le travail de l’homme.
Comme rien n’existe des nouvelles techniques de gestion que suppose cette profession de foi, les socialistes ont du boulot.
Ce n’est pas pour les siècles prochains que nous travaillons mais pour les années prochaines. Les générations futures sont déjà nées.
Si très vite la social-démocratie ne prend pas conscience des événements qui se précipitent, elle sera balayée par une nouvelle gauche.

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