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Reynders à reculons

Tout de suite relayé par « Le Soir », Charles Michel - candidat à la présidence du MR - a écrit un programme pour le jour où il sera élu. Si Daniel Bacquelaine avait écrit le sien, « Le Soir » l’aurait-il montré à ses lecteurs ?
Essayez donc d’avoir dix lignes, candidat d’un parti, pour voir ?
Le cher enfant prévient « J’ai rédigé un programme précis, d’une trentaine de pages, C’est un projet libéral engagé. Les dernières années, on a un peu trop fait de libéralisme à reculons. Je veux faire du libéralisme en marche avant. (…) Il n’y a pas de prospérité s’il n’y a pas d’innovation et de travail. C’est le message le plus net et le plus fort que nous, libéraux, devons porter. » (Interview par Martine Dubuisson, « Le Soir »)
Ce fils prodige est prodigue en allusions insidieuses et désobligeantes pour l’actuel président. C’est, croit-il, qu’il a quelque chose de « fort » à dire. L’avocat est en plaidoirie. Il s’insurge, s’énerve, le public croit qu’il a effectivement des révélations importantes dans la manche. Enfin un casse-cou qui n’hésitera pas une seconde de passer la troisième dans une côte, au risque de casser la mécanique, comme Alexandre De Croo, le libéral flamand.
Mais qu’ose-t-il donc ? « Il faut passer moins de temps à nous défendre de ce que nous ne sommes pas et davantage à dire ce que sont nos propositions. », suit un couplet sur le travail gage de la prospérité, et voilà le tout emballé pour Martine Dubuisson.
J’ai eu un moment d’égarement en lisant ce texte de refondation : c’est bien d’un avocat, le remue ménage pour rien ! Avec Charles, les libéraux vont pouvoir prolonger leur sieste. C’est bien ce qu’ils attendaient de lui, non ?
Voyons « le projet politique le plus susceptible de créer de la prospérité » :
D’abord étonnons-nous que cela aille si mal puisque « La Constitution belge est libérale dans le sens authentique du terme, le projet européen aussi. », on ne le lui fait pas dire !
Mais le cher petit, déjà ébloui de lui-même par ses 30 pages de programme, peaufine un document supplémentaire que Madame Dubuisson n’a pas et ne sera donc pas en mesure de relayer, chiffres à l’appui, aux 30 pages « michellesques ».
Il s’agit dès lors, ni plus ni moins, de 30 pages de propagande que « Le Soir » livre à l’attention de ses lecteurs.

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Je me suis désintéressé du programme pour me consacrer aux superlatifs que Charles décoche à lui-même et que Martine relaie avec une certaine complaisance. On est loin d’une interview à l’américaine.
Le damoiseau est fier – évidemment – du projet libéral ; mais, il nous prévient nous n’en avons pas fini avec ses pensums, il reste encore beaucoup à écrire.
Sur la dérive de la mondialisation ? Sur l’enrichissement éhonté des uns grâce à la misère des autres ? Sur l’immoralité foncière du capitalisme ? Sur l’aspect amoral de la spéculation ? Non, vous n’y êtes pas. Ce qui tient lieu de tout, c’est le libéralisme de proximité. Autrement dit, il veut démarcher ceux qui souffrent le plus de la gestion libérale de la crise, afin que ceux-ci votent libéral, c’est-à-dire contre leurs intérêts ! S’il y arrive, c’est qu’il est vraiment fort le fils « du père Michel ».
Sur le blog de Charles Michel, le programme et sa suite sont absents.
C’est une tactique qui en vaut une autre. On dit « j’ai un programme », on en parle avec des adjectifs le glorifiant. L’autre répond « Ah ! oui, bien sûr, étonnant, cela va changer tout. » Et le tour est joué. Michel a un programme, Bacquelaine n’en a pas. Celui de Michel est magnifique. Bacquelaine est un peu plat, en plus il n’a pas de programme !...
La définition de la classe moyenne vu par Michel-le-Jeune est assez surprenante «
« …ces gens pas assez riches pour être tout à fait à l’aise pour l’avenir, et pas assez pauvres pour avoir accès à des aides spécifiques, et qui ont le sentiment de porter l’essentiel des charges. » La classe moyenne engloberait donc les trois quarts de la population ! Elle irait même jusqu’aux pré-indigents !
Plus sérieusement, la classe moyenne est formée en partie des commerçants et artisans enrichis, de la classe politique montante et de quelques hauts salaires et cadres moyens, soit moins d’un million de personnes au grand maximum. Il est vrai que cette classe moyenne est en pleine mutation et que la plupart de ceux qui s’en réclamaient il y a vingt ans, sont plus bas que terre aujourd’hui. Enfin, à l’issue des Trente Glorieuses, beaucoup de travailleurs du rang avaient cette prétention également. Ils en ont beaucoup rabattu depuis.
Dernière remarque – les socialistes ne me contrediront pas – on en aurait fini des classes sociales. Parler des classes ouvrières à Di Rupo, il pousserait une crise de nerfs. Alors, pourquoi parler de « classes moyennes » ? Si elles sont les seules, c’est absurde ! A moins qu’avec Sabine Laruelle, Charles soit marxiste et réinvente la lutte des classes ?
Si, si… mille pardons, sur la fin de l’interview, Charles y va de son programme en extrayant quelques bonnes feuilles : « zéro cotisations patronales », son crédo, puis les 50.000 emplois « pas occupés », sa marotte. Il veut aussi qu’on exécute les courtes peines sans se soucier du nombre de places disponibles dans les prisons ; qu’on augmente les procédures par rapport au flux des étrangers, c’est-à-dire embaucher des fonctionnaires avec des tracasseries supplémentaires, pour emmerder tout le monde et aggraver le déficit de l’Etat. Et enfin, qu’on en revienne à la capitalisation des retraites. Ce qui ne manquera pas d’élargir le fossé entre les bonnes retraites et celles de la multitude, de plus en plus basses. Lui s’en fout. La sienne sera aux petits oignons, grâce à notre générosité.
Avec ça un vrai culot libéral : le fiston réclame plus d’éthique dans la vie politique !

Commentaires

Le culot, il n'est pas que libéral. En son temps, Verhoofstad a barèmisé, toujours vers le haut tous les ministres, secrétaires d'état, présidents de commissions et parlementaires, bourgemestres et échevins. Toute la "classe politique" et l'armée de l'Administration à son service se défendent bien et refuse absolument toute atteinte à l'indexation de leur barèmes.
Sous prétexte que cela risquerait de mettre en péril les "acquis sociaux".
Comment "faire payer les riches" pour protéger les pauvres si l'on continue à défendre les plus riches, malgré leurs échecs.
Les syndicats défendent tous les "travailleurs", sans distinction, même ceux qui gagnent plus de 5000 € par mois. Même ceux qui ne fautent rien.
Alors que sous d'autres cieux, certains n'ont rien et que d'autres seraient bien heureux de recevoir quelques dizaines d'euros par mois.

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