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Max Weber l’illusionniste.

S’intéressant aux religions, Max Weber publie deux articles « L’Ethique protestante » et « L’esprit du capitalisme » qui analyse la réforme protestante dans ses effets sur l’économie du capitalisme. Ces deux articles, parus en 1904 et en 1905, sont devenus un modèle classique d’analyse du social.
On ne dira jamais assez combien le monde occidental a subi l'influence des croyances religieuses chrétiennes dans la construction de son développement économique pour aboutir à l’obsolescence programmée que nous connaissons aujourd’hui, devenue incontrôlable, dépassant les projets les plus fous, faisant dire aux historiens et aux pouvoirs religieux « Non, les hommes du XXme siècle ne voulaient pas ça ! ».
Ce qui est frustrant, c’est que Weber ne tire aucune conclusion générale de ses observations. C’est regrettable, car cela aurait permis de les mettre en parallèle avec la finalité établie dans l’œuvre de Marx : la dictature du prolétariat, qui s’est révélée un autre bras monstrueux du capitalisme, comme l’ont fabriquée les dirigeants ayant confisqué la révolution de 17.
Weber agit comme si l’accablante formule ne découlait pas des formes anciennes de l'économie : le capitalisme ne serait plus contrôlable par les démocraties !
Pourtant la société industrielle de 1900 portait en elle les stratégies devant y conduire.
Weber n’a pas vu que le « sens des affaires » violerait les règles morales par un « oubli des devoirs » !

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Dans la logique de réduire les prix et d’augmenter le chiffre d’affaires, ne voyait-il pas les germes d’une compétition qui loin d’être bénéfique réduirait progressivement en esclavage l’ensemble des travailleurs ?
Comment peut-on imaginer qu’une spécialisation outrancière n’allait pas produire ce que nous observons en 2011 ?
Les Peuples ne sont pas plus bêtes aujourd’hui qu’ils ne l’étaient hier, au contraire, ils voient bien où se trouve le vrai pouvoir. Il est dans les mains d’un adversaire intouchable et invisible. Tout qui détient ce qui reste du pouvoir politique ne peut pas l’ignorer et donc en fait plus ou moins partie, et, en conséquence, en est singulièrement complice !
L’interprétation que le monde moderne fait de la Bible protestante : la glorification du travail et sa fin : l’enrichissement produit de ce travail, montre à satiété combien la naïveté des masses et la perversité des dirigeants ont engendré une économie radicale loin de ce qu’en pensait Alexis de Tocqueville… et les pasteurs anglicans.
Weber tisse des couronnes de laurier à la rationalisation qui faisait alors ses premiers pas
« La conséquence habituelle d’un tel processus de rationalisation n’a pas tardé à se manifester : ceux qui n’emboîtaient pas le pas étaient éliminés. L’idylle s’effondrait sous les premiers coups de la concurrence; des fortunes considérables s’édifiaient qui n’étaient pas placées à intérêt, mais réinvesties dans l’entreprise. L’ancien mode de vie, confortable et sans façons, lâchait pied devant la dure sobriété de quelques-uns. Ceux-ci s’élevaient aux premières places parce qu’ils ne voulaient pas consommer, mais gagner, tandis que ceux-là, qui désiraient perpétuer les anciennes mœurs, étaient obligés de réduire leurs dépenses. »
C’est beau comme l’antique, sauf que tout sonne faux. Ces clichés auront été véhiculés jusqu’en 2011. Ils font partie encore des livres de morales et sont à la base de la traque des chômeurs et des officines gérées par l’Etat, pour mettre les gens au pas !
Les conséquences du formidable aveuglement de Weber, nous les voyons à Detroit, capitale de l’automobile au sortir de la guerre de 14-18, chant de ruine aujourd’hui, patrie de Henry Ford et des premières chaînes de montage passant de la théorie à l’activité pratique.
C’est là que le capitalisme a touché son bâton de maréchal avant d’être son talon d’Achille.
Jamais le travail humain n’était arrivé à ce point d’intensité en faisant fi de la capacité de l’homme à subir pareil traitement, prisonnier de jour, libre de nuit, avec une réduction inquiétante des activités cérébrales dans le confinement d’une journée de travail orientée par d’autres, tout aussi affectés par leur dépendance, mais sur un autre plan.

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C’est Henry Ford lui-même qui montra le premier jusqu’où on irait dans ce domaine par la recherche qu’il faisait « d’esprits médiocres, propres à des tâches répétitives et qui ne montrent ni impatience, ni révolte », afin de peupler ses chaînes de montage.
Ce principe s’est étendu à tous en 2011. Sauf qu’il n’y a pas que des idiots contraints de gagner leur pain quotidien dans des conditions similaires. Comment penser sérieusement que l’on pourrait sans heurt impliquer les gens dans des actions qu’ils ne sont pas amenés d’imaginer ni disposés à accomplir et qu’on baptise encore du nom de travail, sur le temps qu’on formait des universitaires qui allaient se retrouver sans travail acceptable et qui feraient office « d’ouvriers à l’activité cérébrale réduite » ?
S’adapter à ça, ou mourir de faim, n’est-ce pas là une stratégie voulue par le mouvement libéral et les banques que l’on peut qualifier de militaire ?
Que ce soit en mettant en cause la religion bafouée ou l’homme dégradé, cette stratégie militaire ne justifiait-elle pas la réplique terroriste ? Ce que nos sociétés rejettent avec horreur n’est-il pas la conséquence de ce que l’on a fait du traitement de l’homme et du sacré ?
Peut-on résister au capitalisme autrement que par l’usage de la kalachnikov ?
C’est toute la portée de l’action politique et de son efficacité qui est en cause. Quand les sociétés occidentales abusées se réveilleront de leur long sommeil, sera-t-il encore temps aux forces de changement d’enrayer les processus d’avidité d’un côté et de contestation violente de l’autre ?
Y aura-t-il encore place pour une révolution intelligente et pacifique, respectant à la fois l’homme et le sacré, sans que celui-là soit assujetti par celle-ci ? Après avoir écarté de son chemin la folie capitaliste, cela serait désolant qu’il sortît d’un piège pour tomber dans un autre.

Commentaires

Aujourd'hui, les religions sont : l'écologie, le bio, sauver la planète...
Ce sont des croyances comme les autres et l'on voit bien que le capitalisme s'y engouffre aussi.
Aujourd'hui, il est devenu moral de faire n'importe quoi pourvu que ce soit "durable, vert, ..." etc

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