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Les experts à marée basse.

Comment nommer un raisonnement qui conduit à une aporie dont on ne démord pas ? Ipséité ? Entêtement ? Calcul ? Intérêt secret ? Connerie ?
C’est l’histoire d’un verger dont on récolte les fruits en famille, puis avec des saisonniers, enfin avec une machine qui abîme l’arbre en le secouant. En suivant la tendance, on arrête la production pour planter et poursuivre là où la main-d’œuvre est peu chère. Résultat, les fruits ne sont pas meilleurs marchés, la production déplacée ne bénéficie à aucun travailleur. Une production non renouvelable par extraction, comme le pétrole, les minerais, c’est pire… la terre s’appauvrit.
Tout ça pourquoi ?... La croissance continue ! Belle foutaise insoutenable, pourtant la bible du système capitaliste. Le public devrait détester une économie aussi absurde. Eh bien ! c’est le contraire, tout le monde l’adore…
Voilà les principes selon lesquels on travaille aujourd’hui. Jusqu’où ira-t-on? L’officiel s’en fout… le monde s’en fout…
On sait bien qu’à la longue, chaque esprit sérieux en convient, on aura des bricoles un jour. Qu’importe. C’est ce monde-là qu’on veut. Certains jurent qu’il n’y a pas d’autre alternative.
On nous vend ça du matin au soir…
La preuve de la collusion des radios et télévisions privées ou publiques avec le système économique est très vite faite. La liste des politologues et des économistes de métier à laquelle les diffuseurs de l’information font appel, est à elle seule fort éloquente !
Il est facile de coller aux « valeurs » de l’économie libérale, lorsqu’elles sont partagées avec le personnel politique majoritaire et de gouvernement. C’est le cas en Belgique.
Economistes de banque, licenciés des universités croupionnes, quand ils ne sont pas carrément venus des Instituts à vocation partisane, flirtant avec les Bourses et avec le Change, les rédacteurs de revues spécialisées, chroniqueurs médiatisés, tous enfin « experts » de l’économie ne nous délivrent jamais qu’un seul message : celui de la pérennité d’une économie sans rivale. Celle-ci n’a jamais été autant critiquée par un tas de gens tout aussi « experts », mais dont on ne demande jamais l’avis.
Pourquoi ai-je une opinion aussi négative des émissions politiques et économiques des télévisions et radios ? Parce qu’elles ne nous délivrent qu’une seule version de l’actualité politico-économique à peine controversée par des « opposants » soigneusement choisis parmi ceux qui subissent, mais qui ne sont pas en mesure de lutter argument contre argument, avec les tenants du système.
Le jour où Messieurs Maroy et Guadisseux, Madame Dominique Demoulin et les deux directions feront le dimanche midi un débat équilibré entre les partisans et les adversaires du système économique en vigueur, je serai le premier à les féliciter.
Je doute que cela arrive un jour, sauf plus tard, à un moment de grande débâcle ressenti au souffle court d’une aventure capitaliste qui arrive à son terme.
En attendant, une poignée d’économistes verrouillent l’espace médiatique et bornent celui-ci à des possibles. Annoncés comme de brillants universitaires, on voit bien les limites de leur brillance et leur incapacité à projeter par imagination d’autres formulations. Ils incarneraient la rigueur et leurs détracteurs l’illusion !
Si on commençait par avertir le public que ces experts sont avant tout des gens enterrés jusqu’au cou dans des intérêts particuliers, des organisations financières et politiques ? La compatibilité entre leurs compétences et leurs arrangements professionnels ne résisterait pas une seconde à l’examen du public.

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N’est-ce pas le cas de Martine Maelschalck, la rédactrice en chef du journal L'Echo (Blog du 1er avril), Etienne de Callataÿ, « chief economist » de la Banque Degroof, Pierre Vercauteren, prof d’univ, Pascal Delwit, Politologue à l’ULB et en général tout qui s’épanche dans les colonnes du Soir, de la Dernière Heure et de la Libre, sans parler des journaux spécialisés et les télévisions ?
La controverse a trait à la collusion entre économistes et institutions financières. Certains universitaires délégués par les médias pour ‘nourrir’ le débat public, mais aussi des chercheurs appointés comme conseillers par les gouvernements, sont rétribués par des banques ou de grandes entreprises. Un expert qui se dit indépendant peut-il appuyer d’un avis favorable la dérégulation financière, quand il est, par ailleurs, administrateur d’un fonds d’investissement?
Evidemment, tout le monde ne peut pas être chômeur pour défendre le droit à l’allocation de chômage, mais tout de même, ne conviendrait-il pas d’énoncer clairement la façon dont les gens qui disposent d’un temps de télévision pour nous éclairer, gagnent leur vie et gèrent leur patrimoine, quand les sujets traités concernent justement les hiérarchies sociales par rapport à l’argent ?
Les accointances entre les revenus et leurs origines ne sont pas toujours secrètes. Mais leurs bénéficiaires se gardent bien d’envisager la fragilité de leurs propos, à travers eux. Avant 2008, on faisait comme si… Il n’y avait pas une urgence de clarté et chacun pensait que l’économie pouvait se redresser. L’équivoque arrangeait tout le monde, partis et syndicats. Les sources dans lesquelles nous puisions des informations avaient leurs experts. On ne pensait pas encore que le capitalisme mondialisé était à bout de course et qu’il fallait d’urgence trouver autre chose.
Nous n’en sommes plus là.
Nos prévisionnistes en matière d’économie sont davantage aujourd’hui des historiens du système que des gens qui établissent l’état des lieux avant d’explorer le futur.

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