« Un dimanche paisible. | Accueil | L’université se réveille ? »

Quand le four crématoire cuit de la brioche !

Le Front National, malgré un scrutin à deux tours défavorable aux petits partis, envoie deux des siens à l’Assemblée nationale.
Pour quoi y faire ?
Gilbert Collard est une grande gueule, mais il aura un temps de parole proportionné à l’importance de la représentation du Front au parlement. Il devra résumer sa glose. C'est dur pour un avocat ! La petite fille Le Pen a 22 ans et termine des études d’avocate. Entre la Fac et le parlement, il faudra choisir.
Ce que Marine Le Pen souhaite : passer pour l’alternative à droite après la défaite de l’UMP n’est pas prêt à se réaliser tout de suite. Il faudra revoir l’UMP après son congrès de novembre qui verra la bataille des chefs.
A moins de sombrer sous la coupe d’un nouveau leader interne, Sarkozy en était un, la droite française n’est pas prête à se donner aux Le Pen, malgré la bonne volonté d'une Nadine Morano, par exemple.
Il ne faut pas minoriser le succès de Marine Le Pen, même si elle n’est pas élue à Hénin-Beaumont. Mélanchon, un brillant orateur qui n’a pas su utiliser ses atouts auprès des électeurs, a été défait. Il aura difficile de s’en remettre. En tous cas, il n’est plus en mesure d’influencer le PS. Marine Le Pen peut s’enorgueillir de l’avoir battu.
Mais, d’un autre côté, Marine Le Pen qui se disait "antisystème" et "anticonformiste", est toute heureuse de résultats électoraux qui montrent qu’elle fait aussi partie du système.
Bien au-delà de ses électeurs traditionnels, le Front National semble moins représenter un vote d'adhésion à un programme radical, qui pénètre toutes les classes de la population, qu’un vote de ras-le-bol politiquement flou. Il fait tout de suite penser au Tea Party américain. Durant son voyage aux Etats-Unis en novembre 2011, Marine Le Pen avait espéré rencontrer le libertarien Ron Paul, L’inspirateur du Tea Party. Hélas ! pour elle, l’entrevue n’eut pas lieu.
Comme le Tea Party, le Front National est un mouvement qui se nourrit de multiples griefs, plutôt qu’un parti d’opposition faisant des propositions.
Il a besoin de l’UMP, voire d’une partie de l’UMP qui ferait dissidence et se jetterait dans le Front, pour exister.
Dans l’état actuel, même si le Front apparaît plus vivant que jamais, l’histoire de la politique en France est jalonnée du parcours de partis d’extrême-droite de la même espèce, qui finissent par disparaître tant ils ne reposaient que sur des noms de la droite, et sur des circonstances.
Le souci de l'indépendance nationale, l'insécurité économique, la réduction de la dette, l'immigration, le renouveau du patriotisme, le refus du rapprochement du pays avec les pays musulmans, le retour à la peine de mort, le sentiment d’insécurité, le retour du franc, des convictions anti-gays, le maintien d’un capitalisme « social » de façade accouplé bizarrement à une lutte contre l'assistanat, tour à tour exaltés et proclamés comme les axes du Front, puis atténués, voire passés au crible de référendums, comme la peine de mort, font des programmes du Front, un fourre-tout peu crédible qui, devrait faire réfléchir les électeurs sans être économistes, ni vaguement issus des sciences-politiques,

175mm00.jpg

Marine Le Pen a tiré les enseignements de la politique du parapluie menée par le Tea Party. Elle accueille le plus de personnes possibles sous une même appellation, crée un mouvement diffus plutôt que mettre en avant un parti avec un programme, en appelle aux "invisibles" plutôt qu'aux encartés, tient un cahier de doléances et forme un réseau autour de notions 'anti' - antiélitisme, anticonformisme, antisystème, après les élections, de l’anti Hollande et plus encore de l’anti Copé. Elle fait de l’œcuménisme une règle d’or de tous les électeurs antipartis qu’elle fédère.
Ses adhérents forment un échantillon représentatif de la population en général. De même, il n'y a pas un type d'électeur du FN. On ne vote pas forcément Marine Le Pen parce qu'on est souverainiste à tendance xénophobe, antieuropéen, catholique conservateur, poujadiste, qu'on a peur des Roms à la campagne et des musulmans en ville ; on vote contre quelque chose. C’est un vote négatif dont il s’agit majoritairement.
Il n’est pas dit que parvenant à coopté une partie de l’UMP, ses adhérents du Nord ne la quittent pas en masse ?
Jusqu’à présent, Marine Le Pen a été fort incapable de se faire rencontrer l’ensemble des électeurs du FN. Les militants que l’on voit dans les salles, sont ceux des anciennes listes de Le Pen, auxquels s’agrègent quelques nouveaux attirés pour les mêmes raisons que leurs prédécesseurs. La moyenne d’âge reste élevée, même si par l’effet de la propagande, le service d’ordre place en priorité les jeunes dans les premiers rangs. Aucun lien social ne s’est jamais créé. Autrement, cela se saurait.
C’est même tout l’enjeu et l’avenir du FN, avec l’entrée au parlement d’une Le Pen âgée de 22 ans. Avec quelques slogans propres à enthousiasmer la jeunesse, si Marine parvenait à « juvéniliser » son mouvement, et que cela coïnciderait avec la disparition de Jean-Marie, elle pourrait créer une menace bien réelle pour la démocratie, déjà si aléatoire et si fragile…

Poster un commentaire