« Une catastrophe annoncée. | Accueil | Les inhibiteurs contre la crise. »

Quel bilan ?

Ce gouvernement s'efforce de ne pas trop attirer l’attention.
Tout est inscrit dans la nature même de son premier ministre.
Di Rupo est fort proche de la personnalité de François Hollande : celui-ci tourne sept fois sa langue dans la bouche… pour se souvenir qu’il n’a pas fait l’ENA pour des prunes.
La Belgique se débat entre deux crises, alors que les pays voisins n’en ont qu’une.
Il y a celle de tout le monde : économique. Pourquoi est-elle si profonde (elle passera sa quatrième année au mois de décembre) ? Parce qu’elle est structurelle plus que conjoncturelle. Personne n’ose l’appréhender ainsi, même pas la gauche, à part quelques économistes. Prendre le système économique pour ce qu’il est, c’est dénoncer un avatar catastrophique du système capitaliste, dont on ne peut sortir qu’en le réformant ou en l’abandonnant.
Enfin, la crise propre à la Belgique entre les communautés, la flamande majoritaire et la communauté francophone minoritaire.
Voilà quarante ans que cette seconde crise perdure.
Si les Wallons n’ont pas résisté à la francisation, c’est parce que leurs langues, les parlers wallons divers, n’étaient que les fusions des racines germaniques et latines avec une prédominance de ces dernières. Le basculement dans la langue française était inévitable. Elle se fit brutalement entre 1880 et 1920, puisque le wallon fut interdit dans pratiquement toutes les écoles et exclu des études supérieures et peu à peu abandonné sans trop de soubresauts et de colères des populations. Pourtant, la perte d’une langue est toujours un appauvrissement. Avec un peu d’intelligence et d’humanité, les ministres de la Belle Epoque eussent pu la sauver.
Ce qui subsiste perdure dans les campagnes, grâce aux efforts de quelques folkloristes. Dans les villes, l’afflux des cultures étrangères accélère l’extinction du wallon, contredisant ainsi complètement les sociologues socialisants qui voient dans les mélanges culturels un enrichissement.

07cc000.jpg

Le flamand s’est renforcé selon les mêmes principes, sauf que les racines germaniques y étaient dominantes. Si le pays avait été partagé entre une forte minorité parlant allemand et une majorité parlant flamand, il ne fait aucun doute que le phénomène d’aspiration eût été en faveur de l’allemand et que tous les Flamands auraient été germanisés.
Dans le rapport de force actuel, lorsque la population a le libre choix entre le flamand et le français, Bruxelles en est l’exemple type, le français gagne à tous les coups. Voilà pourquoi les Flamands entendent bien se barricader et prétendent expulser de leur Communauté les têtes de pont francophones.
Le problème est donc inextricable et ne sera abordé sereinement que par une scission du pays.
Si Di Rupo est partisan de la politique des petits pas, c’est parce que la question flamande ne lui permet pas de frapper de grands coups, et aussi, parce que c’est dans sa nature de travailler sous le boisseau et avec discrétion.
Revenons à la crise économique.
Di Rupo s’est mis dans la position de quelqu’un qui s’est ficelé lui-même autour de ses certitudes. Franchement libéral, il ne croit pas à une économie mixte de nationalisation partielle de l’industrie et des banques, encore moins à un socialisme autogestionnaire. Là aussi, ça tombe bien pour le bourgeoisisme ambiant. La Belgique est le parfait satellite industriel de la puissante Allemagne. Notre sort économique y est lié.
Voilà qui pousse l’homme à ne prendre aucune initiative innovante en matière économique.
Ainsi, parfaitement adapté à ce pays englué dans les deux crises, Di Rupo est l’homme providentiel des différents pouvoirs qui convergent vers une seule chose « la durée du statu quo ». Des riches Flamands et Wallons, à la dynastie, tous trouvent, dans le fond conservateur d’une partie de la population, les assises nécessaires pour durer le plus longtemps possible.
Du point de vue strictement progressiste, c’est le plus mauvais premier ministre que nous puissions avoir.
Une partie des forces wallonnes se perdent dans une impossible collaboration avec les Flamands. La facture des efforts d’immersion des jeunes wallons dans la langue flamande, les facilités administratives des Flamands dans la capitale manifestement disproportionnées, la prédominance dans les nominations des secteurs fédérés des personnels administratifs flamands, coûtent énormément d’efforts et d’argent à la Communauté wallonne, quoique en puisse dire Rudy Demotte, sans compter les vaines études d’une langue abrupte, sans éclat et sans aucune résonance à l’étranger.
A ce bilan désastreux, se superpose celui de l’économie : le coût pharaonique d’une organisation fédérale avec ses cinq gouvernements et son armée en doublon, sinon en triplette, de nos représentations et administrations nationales et communautaires.
Enfin, pour couronner le tout, une gauche représentée presque exclusivement par les socialistes du Bd de l’Empereur, donne à la Wallonie, l’air d’être plus libérale que le MR confinant le peuple de gauche au rôle de gardien de phare.
La donne pourrait changer le 14 octobre. Il suffirait que De Wever rebatte les cartes en Flandre pour que, comme la cigale, Di Rupo se trouve fort dépourvu, lorsque la bise sera venue en Wallonie.

Poster un commentaire