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Une réunion importante.

On a beau se dire que le pays est dirigé par des gens comme nous, plus on y pense moins on s’en persuade.
On dit que la fonction doit être respectée et qu’en respectant l’homme qui l’assume on agit dans ce sens. Ce qui choque c’est ce qu’il y a autour, c’est-à-dire le cadre dans lequel tous sont imbriqués, qui nous appartient puisqu’on prélève sur le travail de millions de Belges de quoi acheter, entretenir, rénover le patrimoine national, mais dans lequel nous n’évoluerons jamais. Parce que nous n'y avons droit que de loin et pour seulement la vue.
Dans ces milieux où les décisions sont prises nous concernant nos représentants sont comme poissons dans l’eau. Ils sont si peu nos représentants dans les faits qu’on se demande s’ils savent vraiment qui nous sommes ?
Pour garder le contact, on les prend au sortir d’une réunion importante, ils stationnent dans un endroit choisi comme un grand hall, tel celui de ce soir avec le premier ministre français venus pour prendre des mesures de la plus haute importance. Un grand escalier prolonge le symbole du long chemin à parcourir, mais directement dans l’espace filmé après leurs personnes, des drapeaux, l’européen, le français et le belge leur font comme un décor patriotique. Ils y sont à l’aise… ils nous incarnent !...
On les sent préoccupés. La préoccupation est le signe visible qu’ils s’inquiètent de notre avenir. Qu’en savent-ils ? L’environnement montre la richesse de l’État et leur opulence en témoigne. Il fait chaud, les lustres brillent, les portraits d’hommes aussi importants qu’eux mais morts, témoignent de la légitimité en même temps de la solennité de l’événement. Le personnel de maison est attentif. La porte à double battants s’est refermée sur la grande salle de la réunion. Ils y ont bu du café dans des tasses aux armes de la Belgique et un buffet discret leur a permis une sustentation légère mais roborative. Les journalistes se placent, eux aussi avec un sentiment de hiérarchie. Ils viennent du dehors. Les plus dépenaillés sont les perchmen et les porteurs de caméras. Ils apportent du dehors la froidure d’un premier de février. Ils y retourneront pour verser dans nos grandes oreilles stupides les paroles ciselées par des années de modélisation universitaire du parcours impeccable de ceux qui n’ont rien de neuf à dire, mais qui le disent si bien.
Michel et Valls souffrent en notre nom d’une grande inconnue : le terrorisme, quand va-t-il à nouveau frapper ? Pourtant, ils sont au courant, même si nos craintes rejoignent les leurs sur certains points. Quelqu’un leur a bien dit ce qu’on gagne à l’usine, comment on se fait virer, ce qu’un pensionné a pour boucler un mois de rhumatisme de plus.
Il faut croire que non. Quand ils abordent ces sujets préoccupants venant d’une autre inquiétude, ils sont tout différents.
Ils abandonnent le lyrisme patriotique de la Nation en danger, pour nous donner une leçon d’économie. Ils savent que c’est inutile, que nous ne comprendrons pas, mais ils s’obstinent quand même, par devoir.

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Pour l’heure, Valls a très bien résumé la situation de ce soir : le terrorisme frappera encore, on ne sait pas où et on ne sait pas quand. En somme, ils ne savent pas plus que nous. Sauf qu’ils disent cela d’un ton tellement supérieur qu’on se dit qu’ils en savent plus que ce qu’ils nous en disent, mais qu’ils se taisent pour ne pas gêner les opérations en cours.
Moyennant quelques libertés en moins qui tiendront en plus des contrôles renforcés, quelques caméras supplémentaires aux points stratégiques, des investissements en modernisations diverses et en embrigadement de nouveaux policiers, tout n’ira pas plus mal qu’avant, mais malheureusement pas mieux non plus.
Tout cela, évidemment, coûtera quelques millions d’euros en plus. Ils balaient les chiffres d’un revers de main. Est-ce que cela compte en comparaison des vies protégées ?
D’aucuns regarderont ces magnifiques personnes, intelligentes, bien habillées si humaines puisqu’elles ont parlé toute la journée de nous, comme des espèces d’ovnis dans un aquarium aux parois de verre en feuillets sécurisés.
La démocratie se faisant, la plupart seront au contraire convaincus d’avoir vus des surhommes dévoués à leur service.
Voilà le malheur du peuple.
Quoiqu’on fasse, il voit toujours les choses de multiples manières.
C’est une souffrance pour lui.
S’il y avait unanimité dans un sens comme dans l’autre, il serait asservi ou bien complètement libéré de ses marionnettes.
C’est fini. Ils n’ont plus à nous parler. La presse est évacuée. RTL restera. Trois fauteuils ont été disposés. Ils n’ont pas dit un mot sur la religion musulmane. Dieu, c’est un terrain mouvant. On ne sait jamais dans ce qu’il fait si c’est lui ou le diable.

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