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Un samedi à la campagne.

Les Gilets Jaunes ont réussi le tour de force de braquer les regards d’une société qui s’enfonçait dans l’égoïsme pur, sur la misère et la paupérisation d’une grande partie du peuple. Ce n’était pas évident, puisque naturellement l’économie néolibérale n’y voit qu’un gisement exploitable de travailleurs pauvres et de concurrence féroce. De même les médias restaient le nez sur une société « en progrès » qui n’existe qu’aux fins de propagande.
Une meilleure réussite est possible dans le sens du collectif, plutôt que dans la lutte permanente d’une compétition pour vivre mieux que les autres. La première fait de son mieux pour allier morale et différence, la seconde fait tout le contraire.
Ce n’est pas moi qui le prétends, c’est Aristote qui l’affirme.
Si les Gilets Jaunes ont démasqué les imposteurs qui voulaient faire de cette société un stade olympique des performances, étant entendu qu’il n’y a que trois élus qui montent sur le podium à chaque fois et que les autres sont renvoyés à de nouvelles compétitions, ils ne sont pas les seuls à avoir souffert de cette lutte de classe déguisée.
Par la signification de leur mouvement spontané, ils sont devenus de fait les porte-paroles des habitants des banlieues les plus défavorisées qui souffrent des mêmes maux que les “gilets jaunes”, mais qui éprouvent encore plus de difficultés à se faire entendre par le gouvernement français. Celui-ci, bien involontairement, est devenu le symbole d’une démocratie par délégation qui ne fonctionne plus. Les autres gouvernements de l’UE qui pratiquent une politique aussi funeste, parmi lesquels la Belgique, bien entendu, ont les yeux braqués sur la France.
Il est opportun de rappeler qu’en 2005, trois semaines durant, des émeutiers ont enflammé les banlieues parisiennes en réaction à la mort de deux adolescents fuyant la police. Des milliers de voitures ont été brûlées et des commerces saccagés. Longtemps ignorée des autorités, une frange de la population, essentiellement composée de familles pauvres et immigrées, laissait libre cours à sa colère. Pour mettre fin aux violences, le président de l’époque, Jacques Chirac, avait déclaré l’état d’urgence.
Les diagnostics officiels de l’époque étaient bidons. Ils consistaient à faire l’amalgame de pauvreté et violence, sous-entendant par là que sous la violence sommeille un délinquant.
Des observateurs plus sérieux, comme le couple Pinçon-Charlot, avaient perçu autre chose qui s’apparentait déjà à l’espèce de révolte des Gilets Jaunes.
Bien entendu ces observateurs n’étant pas écoutés en 2005, ceux d’aujourd’hui ne le sont pas davantage. Un pouvoir se met rarement en question.

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Macron a cru bon rompre avec les pourfendeurs habituels des causes sociales en imaginant un contrefeu avec le Grand débat. Mais sa personnalité a fait pire. Par son omniprésence dans les marathons des débats, on a vu émerger une chose qui était cachée de sa personnalité : son incapacité à comprendre les Gilets Jaunes par sa foi aveugle en un système économique et social qui conduit toute la société française et pas qu’elle, dans le mur. Les contradictions : l’incompatibilité d’une croissance continue avec l’environnement et l’épuisement des réserves naturelles, bref en un mot l’écologie ne sont pas prises en compte par un esprit qui ne se remet jamais en question. Macron n’accepte les contradictions que pour les réfuter avec la condescendance de celui qui sait et parfois, avec l’arrogance de celui qui méprise.
Ce qui a commencé comme un mouvement de protestation contre la hausse des taxes sur les carburants est devenu le symbole d’une crise de la démocratie représentative. Et pour cause, puisque les GJ ont devant un eux un exécutif qui ne les comprend pas !
Macron s’appuyant sur un groupe parlementaires surreprésenté à cause de deux événements : la loi Jospin et le repoussoir qu’est Marine Le Pen, n’a jamais été en phase avec l’ensemble de la population. Celle-ci s’en prend ainsi en toute logique à la bizarrerie d’une représentativité qui ne reflète pas le peuple, dans une vraie majorité.
L’absence des banlieues parisiennes, lilloises, lyonnaises et bordelaises dans cet affrontement en dit long sur la façon dont est tombé le Brexit sur la tête des citoyens européens et l’élection d’un Donald Trump, milliardaire inculte mais retors ! L’Hexagone ne perdant rien pour attendre, les sondages montrent à suffisance que la seule qui tire un profit électoral du conflit actuel est Marine Le Pen.
Les fractures sociales s’aggravent de semaine en semaine sous Macron : entre citadins et ruraux, entre locuteurs français et allochtones globalement bilingues, entre riches et pauvres, entre ceux dont on écoute les doléances et ceux dont on nie l’existence, sous prétexte qu’ils sont une menace pour l’ordre public.
La France a toujours eu un homme « providentiel » dans les grands moments de son existence tumultueuse, pour son bonheur quelques fois, pour son malheur le plus souvent. Celui-ci n’est ni l’un, ni l’autre. C’est un employé de banque qui croit réussir son pari de faire de la France une startup. C’est probablement le pire de tous. Bouvard un jour, Pécuchet le lendemain, comme dans le roman de Flaubert, on a hâte qu’il retourne aux écritures.

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