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L’Agoracritos.

Cette société est triste parce qu’on ne lui donne à penser que des histoires de fric. De la politique qui devrait faire rêver à un monde meilleur, aux acteurs eux-mêmes dont on voit bien qu’ils se sont engagés au service du peuple pour ne servir qu’eux-mêmes, c’est partout pareil : l’art de tirer à soi la couverture.
Des Juges de la Cour Suprême aux Etats-Unis qui viennent de condamner l’avortement, on ne peut dire qu’ils poursuivaient la mission d’écouter les Américains, ce pourquoi ils existent, mais pour satisfaire une idéologie qui est loin d’être partagée par une majorité.
Quelle folie aussi de considérer que neuf personnes savent mieux que 350 millions d’autres ce qui est bon pour eux !
Mais ce n’est pas tout. Voilà qu’ils s’attaquent à présent aux efforts des collectivités pour réduire les gaz à effet de serre en estimant que les industriels ont le droit d’utiliser librement les ressources naturelles, dont le charbon.
On a compris que l’idéologie par l’entremise des Églises réformées conservatrices qui animent ces redoutables personnages cache en réalité des intérêts personnels. En réaffirmant que le citoyen américain avait le droit de porter une arme, c’est toute l’industrie armurière qui les remercie. C’est aussi l’étalage au grand jour de l’esprit de lucre qui est en réalité bien supérieur au respect dû à la vie, dont il est le paravent.

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Élus par la grâce de ce gros truqueur de Trump, dont la fortune est le résultat d’une suite de compromissions et d’indélicatesses, il ne pouvait en être autrement.
De ces neuf juges de la cour Suprême, on ne pourrait en déduire que cinq seulement trahiraient la volonté du peuple. Il est quasiment certain que si la situation se fût inversée, que les juges n’eussent rien changé aux dispositions d’un avortement légal, mais qu’ils se fussent tournés vers d’autres lobby dans d’autres magouilles, pour de grandes satisfactions personnelles, qu’une autre indignation se fût emparée des gens.
La trahison chez les êtres tout d’instinct, éveille la colère. Chez les êtres de raison, elle éveille le vice.
Oui, ces neuf personnages, rien que pour avoir accepté de planer au-dessus de la mêlée en tranchant de tout, transformant ainsi leurs mensonges en vérités, sont des êtres rongés par les vices.
Il n’est même pas sûr que les majorités tirent profit des sources différentes, selon que l’on soit démocrate ou républicain, dans la tête de l’électeur américain. L’esprit capitaliste qui anime l’un et l’autre camp, n’est pas une question de niveau de vie. On n’a pas besoin d’être riche pour souhaiter que rien ne bouge et pour craindre le désordre.
La seule chose inexplicable tient dans l’appel au désordre d’un Trump solidaire des insurgés, alors que toute prospérité dans le système américain se construit dans le silence des officines et loin des turbulences populaires.
C’est peut-être unique dans l’histoire d’un parti républicain, un président qui pousse au crime contre l’État et qui flatte dans ses discours en salle, les sentiments pervers des racistes et des névrosés de la gâchette.
L’actuel président ne vaut guère mieux. Sa poursuite en Europe de la politique des blocs, le fait que nous sommes ses sujets plus que ceux de l’UE, correspond peu ou prou à la politique de son prédécesseur.
Le monde s’indigne des prises de décisions de cette Cour Suprême ; ses membres s’en fichent, ils sont nommés à vie.
A noter que quel que soit le président des USA, les décisions de la Cour des Neuf, les soubresauts de Wal Street et la vente des avions Lockheed-Martin à l’Europe, nos américanolâtres adorent avec autant de chaleur, d’un président à l’autre, cette liberté d’entreprendre qu’ils voient partout dans ce pays et qui les fascine.
Cet amour inconsidéré mais constant est la seule attitude intemporelle qu’ils aient jamais eue, sans en retrancher une partie, eux si girouettes et primesautiers partout ailleurs.
Un Agoracritos nous manque, grande gueule populaire et même marchand de saucisses (dans l’œuvre d’Aristophane), pour nous sauver par la fantaisie et l’imprévisible de ce monde américain dont on nous prédit depuis longtemps qu’il sera le nôtre, mieux, qui est déjà le nôtre !
Il n’entre pas dans la psychologie de la foule américaine de s’insurger contre le despotisme des puissants. Elle ne s’est insurgée l’année dernière que pour rétablir un président dans des fonctions qu’il avait démocratiquement perdues. Ce n’est pas la même chose. La foule américaine ne s’insurge que lorsqu’une idée est tellement fausse qu’elle mérite d’en faire une vérité.
Dans cette optique, les neuf Juges de la Cour Suprême ont du pain sur la planche.

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