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Baudouin post-mortem !

Cette chronique devait être un credo à la laïcité. Par scrupule, je me suis demandé si je connaissais bien mon affaire ? Se perdre dans le fatras des lois et des philosophies de Victor Hugo à Renan, n’était pas difficile. Je m’y suis perdu. Ce n’est donc plus un hymne au triomphe de croire ou ne pas croire, sous la protection de l’État laïc dont il sera question ; mais de l’art d’avaler des couleuvres ce que je fis toute ma vie, « à l’insu de mon plein gré » pour paraphraser Virenque. La réalité objective était dans les livres et les tables de la loi, mon solipsisme m’a été fatal !
La laïcité est partie intégrante de l’État de droit me semblait-il. À partir de cela, il était facile de redéfinir de façon personnelle, ce que chacun entend par laïcité et de faire éventuellement des remarques sur les faiblesses de l’État belge en faveur des religions.
Erreur ! La Belgique n’est pas un État laïc comme l’établit la Loi de 1905 en France sur la séparation des cultes et de l’État, ce qui permet de ne pas rémunérer les prêtres.
La Belgique est un Etat neutre et non laïc. Cette neutralité de l’Etat belge lui interdit d’intervenir dans la nomination des ministres d’un culte quelconque, mais lui permet, dans le même temps, de financer les cultes reconnus. Il n’est pas non plus d’usage de joindre à ses activités, une réglementation sur la manière de s’habiller de façon ostentatoire, afin de faire du mannequinat à titre gracieux à la religion pratiquée.
Je savais que les prêtres catholiques étaient rémunérés depuis les débuts de l’État, puisque cette religion fut dominante pendant une bonne centaine d’années. Je me disais : c’est une entourloupette en faveur d’une coterie, écornant par son anomalie la suprématie de la laïcité comme principe d’État sur les cultes pratiqués en Belgique. La reconnaissance des cultes catholique, protestant et israélite découle d’actes antérieurs à l’indépendance de l’Etat belge et respectés au moment de la promulgation de la nouvelle Constitution.
J’avais tout faux !
Outre l’entretient des Églises souvent monuments classés, les Provinces en Flandre et en Wallonie et la région bruxelloise financent l’entretien et le fonctionnement de 82 « mosquées reconnues » parmi les quelque 300 recensées sur le territoire.
Le salaire annuel brut de l’archevêque Joseph De Kesel est fixé à 112.170 euros et celui des évêques à 90.442 euros. Les vicaires généraux d’archevêchés ou d’évêchés touchent 33.498 euros brut par an, tandis que les chanoines (ecclésiastiques membres du chapitre d’une église cathédrale, d’une collégiale ou d’une basilique) gagnent 34.331 euros brut par an. Les curés, vicaires, chapelains et assistants paroissiaux touchent quant à eux 21.998 euros par an.

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En ce qui regarde les musulmans, les salaires les plus élevés sont inférieurs à ceux en vigueur dans l'Eglise catholique. Imam premier en rang : 18.653 euros, deuxième en rang : 15.841 euros, troisième en rang :13.409 euros. Quelques dizaines sont payées directement par l’Algérie, le Maroc ou la Turquie.
Dans les années soixante, le roi Baudouin avait confié la gestion de la mosquée du Cinquantenaire (la Grande Mosquée) dans un bâtiment propriété de l’État belge, à l’Arabie saoudite. L’avait-il fait d’autorité ou était-ce avec la complicité du gouvernement de l’époque ? Je n’ai pas la réponse.
Perçue comme un centre de diffusion de la pensée wahhabite, cette mosquée est influente par son offre d’activités cultuelles et culturelles.
Qu’avais-je à dire, sinon quelques réflexions convenues.
N’importe quelle société ne peut rester à l'état de théocratie pure, la nôtre le fut indirectement jusqu’au début de la guerre de 14. Après, la société avait changé. Sous la pression des poilus revenus du front, des syndicats et du POB (parti ouvrier belge), le parti chrétien fut bien obligé de réformer l’État et le constituer comme une force distincte de l’Église, dans trois pouvoirs législatif, exécutif, judiciaire.
La Révolution française avait fait apparaître pour la première fois l'idée de l’État laïc, de l’État neutre entre tous les cultes, indépendant de tous les clergés, dégagé de toute conception théologique. L’œuvre de sécularisation ne fut pas complète, à l’instar de la France.
La notion fondamentale de l’État laïc, c'est-à-dire la délimitation profonde entre le temporel et le spirituel ne s’est pas faite en Belgique. Nous jetons toujours de l’argent par les fenêtres en subventionnant deux écoles et maintenant trois, avec la coranique. Les inconséquences dans la pratique, les concessions de détail, les hypocrisies masquées sous le nom de respect des traditions, ont joué à plein.
Nous ne sommes pas les citoyens d’un État laïc. Qu’on se le tienne pour dit.

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