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Innocent comme Innocent III !

On a oublié les fautes politiques des papes dans leur obsession de mêler la religion à tout sous leur haute direction.
La quatrième croisade fut une campagne militaire des plus funestes. Les chevaliers à la croix bloqués à Venise faute de pouvoir payer leur transport sur les galères du doge, promirent de solder leur dette au retour en partageant avec la République les fruit des pillages et des rapines qu’ils comptaient bien faire à Jérusalem.
Levée à l'origine par Innocent III en vue de reconquérir les lieux saints sous domination musulmane, la quatrième croisade n’alla pas plus loin que la ville chrétienne de Constantinople, qu’elle mit à sac en 1203, égorgeant tout qui était à portée, violant les femmes qui n’avaient pas pu fuir, brisant les statues qu’ils ne purent emporter, détruisant les palais et les maisons.
L’Empire byzantin ne put jamais se rétablir de ce désastre qui lui valut deux siècles et demi plus tard, le 29 mai 1453, d’être anéanti par les troupes ottomanes conduites par Mehmed II, lors d’un siège mémorable.
1453 marque la disparition de l’Empire romain d'Orient, aussi qualifié d'Empire byzantin, et sa fin définitive en tant qu’entité politique et juridique.
Bravo Innocent III !
Depuis, Recep Tayyip Erdoğan le nouveau Mehmed II rêve d’agrandir ses terres conquises, absolument et irrémédiablement turques par la loi du plus fort aux noms des tribus primitives venues
d'Asie centrale, dans un état de dénuement tel que seules les lois de la guerre tournant à leur avantage pouvaient les en sortir. En Anatolie depuis le XIme siècle à travers les conquêtes seldjoukides, ils firent progressivement basculer la région d'une terre grecque et chrétienne à une terre turque et musulmane, anéantissant sur leur passage le rêve d’un Kurdistan et, cerise sur le gâteau, auteurs du génocide arménien.
Cette imbécillité des Croisés jointe à la sottise d’un pape vaut à l’Europe de 2023 d’être le témoin d’une guerre en Ukraine fomentée par Poutine au nom de la Russie, un peu comme à la fin du Crétacé, les vélociraptors attaquaient en bande les dinosaures mangeurs d’herbe, par nature inoffensifs et pacifiques.
Jamais la Russie n’eût osé s’attaquer à l’Ukraine si Byzance avait, tout au moins, conservé son hégémonie sur les Dardanelles reliant la mer Egée à la mer de Marmara.
À quoi ça tient quand même un conflit majeur comme celui-là.

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Il faut chercher dans ces lointaines origines les raisons de la décadence de l’Europe moderne.
Si l’on veut une consolation dans l’imbroglio actuel d’une Europe coincée entre la Russie, une puissance cependant de deuxième ordre et notre grand allié Américain, championne du monde en armement et en nombre de militaires aguerris, c’est dans le péché mignon du dictateur qui fait penser que sa guerre chez son voisin pourrait ressembler à la quatrième croisade, l’œuvre imbécile d’Innocent III.
Même scénario, Kiev, sa Jérusalem, semble pour lui hors de portée. Et que font ses troupes, elles tuent et martyrisent surtout des civils, mais ce qui fait surtout penser à la quatrième croisade, ce sont les mercenaires du groupe Wagner, véritable armée dans l’armée du tsar, menant une guerre apparemment indépendante de l’État-major russe. A-t-on déjà vu cela dans une armée régulière au monde ? De l’inédit, cette manière de s’acoquiner de la part d’un État avec la lie des prisons et des bas-fonds, une sorte de corps-franc, armés de bric et de broc de matériel russe. Ils pourraient passer pour des francs-tireurs, fusillés sur place quand ils sont pris.
Wagner est non seulement en Ukraine, mais aussi en Afrique où ses combattants mènent une lutte acharnée contre les derniers soldats réguliers français sensés protéger les populations contre les djihadistes de toutes les obédiences. Une fois installé, Wagner pille et se renforce des richesses des mines d’or et de diamants.
Après cela, tous les discours destinés au peuple russe de pure propagande devraient quand même ouvrir à la raison les populations de Moscou et de Saint-Pétersbourg pour mettre fin à cette « opération spéciale » qui n’est qu’une sale guerre surgie de l’imaginaire d’un malade mental.
Pour ceux que cela intéresse, le dernier ouvrage de Jean-François Colosimo retrace le parcours de cette Europe jusqu’à la guerre en Ukraine dans un excellent ouvrage de vulgarisation « La crucifixion de l’Ukraine – Mille ans de guerre de religion en Europe », chez Albin Michel.

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