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Ohé les 200.000 beaux !... le Forem recase.

Suite à la circulaire de Maria Arena, le FOREM en décentralisation à Hout-si-plout a le plaisir de réunir les soixante-deux ayants droit du dernier carré d’irréductibles du chômage longue durée du village qui ne compte pourtant que deux cents habitants. D’où l’inquiétant chiffre de 99 % de chômeurs complets. Vous totalisez 20.832 mois d’indemnités, un record ! Vous êtes donc prioritaires. Nous vous avions présenté, dans le cadre du plan Arena, d’anciens chômeurs qui ont trouvé du travail, d’autres qui ont monté leur entreprise.
Souvenez-vous du déménageur à la sauvette pour industriel en décentralisation, du serrurier d’huissier, du plafonneur en boîte de nuit, de la goutteuse en sperme, de l’avaleur de sable en Champagne, d’un salon-lavoir pour blanchiment d’argent et de la secrétaire en service de nuit, Edmonde Chéri, tirée à Liège puis retirée dans les Ardennes.
Aujourd’hui, voici Mac-le-Roumain au parcours étonnant et qui, Madame Arena et moi-même le souhaitons vivement, vous surprendra en vous parlant d’un métier peu connu.

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- Salut. J’irai pas par quatre chemins. J’ai jamais pu me lever avant midi. C’est ma nature. On se refait pas. Comme je dois bouffer comme tout le monde, j’ai fait un tour de chauffe dans les supers. Je m’attaquais en priorité aux boîtes de homard. Quand ça a mal tourné, j’ai fait un peu le guet pour des potes, bricolé des portables et chouravé des mobylettes. Bref, j’étais un minable parmi des minables.
Je vivotais comme ça. A mes 18 ans. Je m’suis dit : Antoine – oui, Mac-le-Roumain c’est mon blase de combat – Antoine, si tu tombes, pour le coup t’iras plus te branler chez les dames patronnesses. Ce sera Lantin. Avec ta belle gueule, je te vois mal au trou du cul chauffer les cadors en érection. Quand tu sentiras plus venir l’étron, c’est qu’i’ t’auront bousillé les hémorroïdes… Faut qu’tu montes ton affaire, mec !
J’ai rassemblé mes économies et je suis parti à la remonte en Roumanie instruire la minette au beau métier du sexe. Ainsi pendant quelques temps, j’ai vécu pépère. Quand une flanchait, je refaisais le voyage de Bucarest. Elles en raffolent d’histoires belges, les gamines. Elles croient que tous les vieux dégueulasses du Pont-d’Ile ont des couilles en or ! J’étais leur sauveur…
Seulement à la comptée du côté de la Batte, c’est là qu’elles déchantaient… Le salon moins grand qu’une carrée de mitard sentait le pauvre… Les persuader dans la dentelle de mon page suffisait plus. Mais ma réputation et ma belle gueule compensaient. Un seul inconvénient, fallait pas mettre Andréa, Vanessa et Cory en présence, jamais. (Oui, je les appelle toutes ainsi, question de pas s’embrouiller dans les blases). Elles pensaient chacune travailler en solo pour l’Antoine. Je leur baillais belle… que j’étais serré momentanément, mais que dès que possible… enfin, vous connaissez la chanson… surtout qu’en roumain, le boniment se traduit d’une claque sur les fesses et quand j’ai la tringle à la soirée, une petite gâterie pour détendre, après la comptabilité du jour…
Quand les Albanais sont venus me faire de l’ombre, j’ai vu ce que c’est d’être méchant. J’avais que deux perspectives, me reconvertir dans la rombière… mais l’aspirante à la retraite c’est pas du tout cuit. Ça rapporte pas derche et puis c’est vicieux comme un cheval de gendarmerie. Faire jouir madame, c’est battre le record d’apnée dans les grandes profondeurs et une fois qu’la tuyère est en feu, faut l’alimenter… Et ça consomme à enfiler des perles comme le Concorde en kérosène… Ou bien : tenir mes trois charmantes à la pogne, le pétard dans la poche, prêt à montrer mon bridge et faire du cinéma, comme Bogy, quand i’ sort d’un clandé, qu’i’ r’monte le col de son macfarlane, allume une clope et qu’on voit que sa gueule à la flamme du briquet.…

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J’suis pas un violent et puis j’suis mauvais tireur. J’peux pas dire que j’en aie étendu des masses… et encore sans le faire exprès. Je ferme les yeux quand je presse la détente…
Les Albanais attendaient l’occase, les affreux. Ils m’ont d’abord montré gentiment où étaient mes intérêts. Comme ça valait pas un pet leur proposition, ils m’ont cassé un bras, comme ça histoire de prendre les choses au sérieux. Ils ont fait la promotion de la fracture et le lendemain tout le milieu savait que je m’étais fait rétamé par les métèques.
C’est ainsi que Vanessa, Andréa et Cory ont appris qu’elles n’étaient pas sur le turf en solo du grand amour, mais qu’elles bossaient en consortium pour un toquard le bras dans le plâtre…
Et qu’est-ce qu’elles ont fait avant de se maquer aux Albanais ? Elles ont porté plainte, les fientes, contre moi, Mac-le-Roumain !
Quand la maison poulaga est venue me chercher, elles étaient-là. Les Albanais planqués dans les tinettes, la vaseline, les godes et les caoutchoucs se fendaient la gueule. Vu qu’ils étaient derrière le rideau de la réserve, ça leur faisait une protection. Les poulets, qu’étaient peut être les mêmes qu’à la cave à Dutroux, ne les ont pas vus ! Comme je partais, elles ont insisté pour qu’on aille sous l’oreiller saisir mon feu et quatre boîtes de 8,35 enterrées dans des paquets de sucre ! Dieu sait comme je les avais respectées mes marmites, du coup, j’ai pas pu m’empêcher, foi d’Antoine, de les traiter de putes !
Au poulailler, un mec crâne rasé, a étalé sa graisse sur la chaise d’en face pour mater mes ecchymoses.
J’étais pas beau à voir. Excités par la présence ignorée des Albanais, les poulets m’avaient truandé la gueule. Je voyais plus que d’un œil. Pourtant le mec d’en face me rappelait quelque chose… Je sais, on peut confondre, truand ou flic, on est de la maison… Nous sommes leur matière première qui les empêche d’aller bosser à l’usine. On s’attache…
- T’es parti en pole position, dis-donc toi, Mac-le-Roumain, qu’i’ m’ fait en se curant les ongles avec son eustache... En maison fermée avant tes 18 plombes, un recel, trois fois 15 de ballons, un pour coups et blessures, un autre pour vol à la roulotte… et maintenant maquereau de trois putes… tout ça avant tes 25 ans !... T’as d’jà ta deuxième prolonge au casier… faudra tantôt une main de 21-30 rien que pour ta gueule… Tu sais pas tenir tes femmes. C’est la déchéance du julot, une dame qui l’ouvre. Là, t’en as trois qui ont mangé le morceau dans la foulée, pour coups et blessures, viol, mauvais traitement ! Tu fais l’unanimité, ma couille ! C’est pas tout. On a trouvé un feu sous ta couette… Si au labo, sans r’monter au déluge, on t’associe à une affaire avec mort d’homme… Tu plonges pour au moins dix lignes. T’es un vrai multirécidiviste, bijou !... Tu vas avoir besoin d’une pointure du barreau. J’te signale, Maître Magnée est pris !...
Cette voix, ce petit nez fort… cet accent de Bassenge… cette haleine au roquefort… mais c’est Roland-le-Maestrichtois ! parole…
- T’as plus ton commerce de shit, que j’y fais soulagé ?
C’était bien lui. Il avait viré honnête rapport à la sécurité sociale, et la forte concurrence des Roms dans les trains, les courettes aux Guillemins et les misères qu’on fait aux fumeurs.
Il a plus roulé des mécaniques. On a sympathisé. J’avais un peu tiré sa sœur dans le temps. On était beaufs de la main gauche. Avait pas intérêt à l’ouvrir… Son parcours était pas triste. Pourtant, était jamais tombé… I’ m’a proposé un marché. On passait l’éponge, ça pouvait encore s’arranger, d’autant que mes gagneuses hors Schengen étaient sans papiers réguliers. On pouvait s’entendre avec les Albanais qu’étaient devenus propriétaires de ces dames… des gens raisonnables, en quelque sorte…
Alors, Roland-le-Maestrichtois m’a lâché le morceau.
- Tu sors dans une heure et on passe le mot que t’es en attente de Biribi. Tu rentres dans le milieu, t’évites tes tigresses et les Albanais. On te protège. Mieux, on te rend ton flingue et tes munitions. Tu pénètres les pourris d’en face, tu nous balances des renseignements.
- Quoi, mec, c’est ça être mon pote, que j’y fais ?… Tu veux que je balance ? Que je tourne viandard ? T’as vu la gueule à Nihoul… tu crois que j’y ressemble ? La tu me fais tort, mec…
- Non, c’est un métier, indicateur… C’est un job que je te propose.
Bref, j’ai beaucoup chipoté. Puis je me suis rendu. Fatalitas ! Sans nous, les cops, que peuvent-ils faire ? On les voit venir de loin. La police, c’est Michaux cloné… leur porte-drapeau… leur honte nationale. La véritable police, c’est nous les Julot au repentir… Et comme ils sont reconnaissants, que c’est grâce à nous qu’i’ sont pas pris pour des cons, on peut entreprendre sur le côté.
Quand on plonge… on est carême-prenant. Ce n’est jamais du grand tremplin. Même en forteresse, on peut encore se faire du blé. La prison, ça vous lessive moins que rien. Les durs à cuire se mettent à table… chialent comme des mômes. En cage, nous les saupicquets, on vaut encore par les graillons qui restent fond des dossiers. Voyez Nihoul, donneuse professionnelle, i’ revendique des égards, le fion, et i’ cause aux plantons d’égal à égal… Les autres son bonards au gnouf, lui est peinard à l’hôtel…
Je vous le dis, les mecs, indic c’est un métier d’avenir. On forme une grande famille : les flics au centre et pendus à leurs mamelles, nous et les journalistes… C’est dire l’arche de Noé !
On rentre par des petites portes… On infiltre des coups. On rafle des mises au passage… Au 421 chez les voyous, on joue les indignés, comme au théâtre, quand le poissard a pas le temps de jeter les dés qu’on l’embarque ! On voit tomber les grandes gueules qu’ont fait du tort aux réputations, c’est jouissif… Je vous donne un scoop, je sais que mes Albanais touchent à l’intégrisme. Ils attendent des bazookas. A la première livraison, i’ vont se faire gauler. C’est ça qu’est beau dans le métier : la vengeance…
On recrute, les mecs… Rien qu’un problème. Vous êtes que chômeurs… Faut goupiner son casier un minimum… Une fois cannibales et inscrits, allez pas plus loin, rejoignez nous. A Lantin comme ailleurs, i’a que des malchanceux… Vous valez quand même plus que des innocents au Golgotha… merde !...
Et puis, avec de la chance, s’y a une promo, p’t’être que vous ferez comme Arena, votre ministre : de la politique ?

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