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Nomisma et Nomos (Argent et Loi)

Il n’y a pas pire tentation que celle de l’argent.
Et c’est au bas de l’échelle sociale que cette tentation est la plus prégnante.
Pourquoi la gauche y est-elle plus sensible que la droite ?
Parce que certains dirigeants issus de milieux modestes, convaincus au départ de lutter honnêtement et de bonne foi pour l’émancipation des petites gens, s’aperçoivent que leur motivation était beaucoup moins altruiste devant le tiroir-caisse. Ils se découvrent avec les goûts de luxe, un appétit bourgeois qu’ils ignoraient.
Les histoires de syndicalistes qui craquent et brusquement puisent dans la caisse « sacrée » des travailleurs, sont suffisamment fréquentes pour que chacun d’entre nous se souvienne de l’un ou l’autre fait « regrettable ».
Dans les Services publics, le défit n’est pas moindre.
En politique, la lutte pour la direction des affaires ne vient pas tant de la volonté d’œuvrer pour une société plus juste, que d’une ambition personnelle.
C’est facile pour les riches de mettre le doigt sur les malhonnêtetés des gens du peuple, eux qui n’ont jamais fait que cela, sinon pire, sans oublier leurs ancêtres qui ont souvent démarré sur « un coup » dont on parle encore des générations plus tard, soit avec gêne, soit avec admiration. Combien de vieilles crapules ont « sacrifié » leur « honneur » pour mettre à l’abri du besoin les générations suivantes ?
Avec l’évolution des mœurs - cette frilosité qui s’est emparée du monde moderne qui restreint les libertés au nom de la liberté, au point que l’on se demande si nous ne finirons pas par une schizophrénie collective – il n’y a plus guère que les friponneries légalisées du commerce et des affaires qui soient permises. Là, le gredin y est honoré comme bon commerçant. Le père de famille transmet à ses descendants ses courtages, ses actions et ses royalties non pas comme autant de hold-up, mais comme le fruit de son travail.

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Enfin, une bourgeoisie d’Administration a vu le jour depuis la fin de la dernière guerre. Elle prend le relais de la bourgeoisie du petit commerce qui tend à rejoindre le prolétariat. Cette bourgeoisie d’Administration ne fait rien d’autre que gérer l’Etat en prélevant un coquet pourcentage au passage. C’est une bourgeoisie d’un caractère spécial puisque l’argent qui y circule n’est le fruit d’aucun travail créatif ou productif. C’est un argent « facile », c’est-à-dire une sorte de rente, un viager venu du fonds collectif dont l’origine s’est diluée dans l’abstrait et qui ne touche pas au sens moral. (Voler l’Etat, c’est ne voler personne.)
On y a le sentiment d’accomplir un travail plus ou moins bien rémunéré selon les grades et les niveaux, avec ceci de particulier que ce n’est pas l’employeur – c’est-à-dire le peuple – qui fixe le juste pris de ce travail, mais les plus hauts placés de cette Administration, c’est-à-dire les Parlementaires. Ce qui, évidemment, est une façon désinvolte de nous dire d’aller nous faire foutre.

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Le travailleur honnête, lui, n’a rien à transmettre que sa peine, sa misère et le sentiment confus d’avoir été baisé par le fait d’appartenir à une classe, dont on dit qu’elle n’existe plus afin d’éviter d’en parler. Etonnons-nous que certains se rebellent !
Restent deux voies possibles.
La, plus classique consiste à faire le plus d’études que l’on peut et, bourré de diplômes, prétendre passer des deuxièmes classes en première. En général ceux qui y parviennent ont horreur qu’on leur rappelle le pain dur et le grand-père illettré. Sauf, si leur réussite est éclatante. Ils font alors un triomphe pour eux-mêmes de la modestie de leur départ. Les gens en place aiment les contes de fée. Cela leur rappelle le leur. Le merveilleux apaise les foules et leur donne l’illusion que leur tour viendra et qu’au moins leurs filles chausseront la pantoufle de vair. Ils ignorent superbement qu’il n’y a qu’une princesse Mathilde par génération.
C’est le cas de Marie Arena.
L’autre voie, plus réaliste, consiste à vivre sa vie sans illusion sur soi-même et les autres et n’accorder aucun crédit à ce qui est publiquement révéré, en se disant qu’au petit jeu des contraires, on est toujours l’imbécile de quelqu’un. C’est une voie difficile, mais qui procure des satisfactions ne serait-ce que celle de ne pas se fier aux apparences, aux lieux communs et à la pensée majoritaire, de faire la part des choses, des paillettes et des strass, des courants et des bonimenteurs d’estrade.
C’est la voie du sage et du philosophe.
Peut-être y aurait-il une troisième voie qui consiste à balayer le monde d’un revers de main, afin d’en mettre sur pied un autre que l’on veut évidemment adapter à soi. On ne peut raisonnablement chasser les gens en place que par le meurtre et l’émeute. Ce qui est la contradiction majeure, car on ne peut annuler la violence des puissants qui nous exploitent et nous écrasent par une violence qui serait sacrée, parce qu’aucune violence n’est bénigne. Ce ne serait qu’une juxtaposition de violences donc cela conduirait à un monde pire encore que celui que nous condamnerions.
On en est là.

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