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La nouvelle bourgeoisie (suite)

La classe émergente (voir 17 sept.) n’est pas rien puisqu’elle est une classe dirigeante sur le plan politique qui vit financièrement des citoyens, moyennant quoi elle organise la société à leur place.
Aux tables des négociations, ses influences sont grandes avec les autres classes dirigeantes. Si bien qu’elle est incontournable et omniprésente dans les médias, dans l’industrie et dans le mécénat. Les négociateurs issus de la nouvelle bourgeoisie incorporent naturellement leurs soucis personnels aux intérêts collectifs sans critique apparente.
Cette façon de faire réjouit les grands patrons qui trouvent dans leur cohabitation avec la nouvelle bourgeoisie une ambiance propice aux affaires.
On voit bien par les comportements de ses différents acteurs, que la nouvelle bourgeoise entend à ce que ses membres aient le sens de la solidarité de classe.
Si bien que les étiquettes PS, MR, CDh ou Ecolo masquent à peine un seul programme pour tous.
Cette solidarité prend la forme d’une collaboration entre partis dans les composantes nationales ou locales. Ces chers collègues résident dans les mêmes cadres de vie, roulent dans des voitures aux performances identiques, séjournent dans les mêmes palaces, rencontrent les mêmes délégations, se fournissent chez les mêmes traiteurs, s’habillent et se chaussent dans les mêmes maisons. Ils ont étudié dans les mêmes écoles, surtout le droit.
Dans ces conditions, les mêmes goûts et les mêmes habitudes paraissent une chose évidente. Il ne faut pas s’étonner que les raisonnements soient identiques. Les différences sont souvent artificielles. Une trop grande conformité pourrait s’avérer dangereuse pour la démocratie.
Comme toute classe nouvelle qui monte en force, la classe bourgeoise politique protège et dissimule ses membres qui ont failli, dans l’espoir de sauvegarder une réputation collective qui, mise en doute, conduirait à l’antiparlementarisme. Selon une morale bourgeoise qui prétend comme Tartufe que « ce n’est pas péché que pécher en silence. », la classe émergente absout les adroits ; mais quid des maladroits ?
Autant les canailleries dont les anecdotes circulent sous le boisseau réjouissent les membres de la bourgeoisie politique, autant celles, qui tombent dans la ligne de tir de la justice, réunissent toute la classe politique dans la même réprobation indignée.
C’est donc tout à fait unanimement que Milquet, Di Rupo, Durand et Reynders condamnent les magouilleurs de Charleroi, quitte à ce que l’opinion moins remontée, ils réintègrent en sous-main les fautifs dans le cocooning bourgeois.
Il y a un paradoxe dans l’absolution du défaillant par le peuple lui-même. Parfois, certains repris de justice, après avoir purgé leur peine, redeviennent plus populaires que jamais. La bourgeoisie nouvelle le sait. Et comme elle a dans sa gibecière quelques emplois de remplacement en réserve, le fautif ne perdra rien de ses émoluments avant de réintégrer son corps.

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Nous ne casserons pas de sitôt le moule à faire des députés. Les promus se trouvent immédiatement solidaires de leurs aînés. Ils sont l’avenir de la profession, sinon de la Nation.
Ils revendiquent d’une élection, qu’elle soit libre d’émettre une opinion contradictoire ; mais en même temps, ils mettent en quarantaine toute opinion qui n’est pas conforme à leur point de vue.
Cette classe, comme celle dont elle a pris la place, privilégie ses propres enfants.
Comme au temps du patronat de l’âge classique, les membres actifs de la nouvelle classe bourgeoise couvent leurs progénitures avec amour, et les préparent à diriger le pays, par droit naturel de succession.
Il est facile à un ministre ou à tout autre mandataire bien placé de pousser et de faire accepter sont petit dernier dans le Parti. Il est difficile à un militant de base sans appui de se faire connaître. Les places sont de toute manière dévolues à l’avance.
Il y a une autoprotection qui fait merveille dans le milieu. Elle rassemble les familles de pouvoir et les exonère du déclassement, dans une profession qui n’égale pas celle du père.
Les compétences se transmettent avec les places comme un patrimoine le plus précieux.
Le système fabrique une démocratie confisquée.
Nous n’avons plus qu’à la boucler.

Commentaires

Bien vu, Richard III!C'est très vrai. Il y a même la haute bourgeoisie des fonctionnaires européens (pour ne pas parler de celle des élus européens qui sont dans une classe encore supérieure). Dans ces milieux politiques belges ou internationaux, l'ascenseur social de caste fonctionne encore alors qu'il est en panne dans le reste de la société.
Ceci dit, il faut reconnaître que l'on demande énormément à un homme politique: se tenir au courant des subtilités de notre usine à gaz institutionnelle, être à l'écoute des gens, faire preuve de probité et d'abnégation dans une société où ces mots mêmes font rire,...! Et on a fixé le barême des émoluments en considérant que ces fonctions étaient effectivement remplies (comme on a fixé le traitement des fonctionnaires en considérant qu'ils travaillent tous réellement et efficacement pendant 38 heures par semaine)! J'ai la faiblesse de croire qu'une minorité d'hommes politiques (et de fonctionnaires) mérite réellement ce salaire car la fonction à remplir est vraiment lourde et exigeante si on a à coeur de bien la remplir. Les autres pas (ce n'est certainement pas mieux dans le privé)!Bref, c'est bien d'un défaut d'éthique que notre société du roi-pognon souffre!

C'est encore mieux en France.
Ils sortent tous de l'ENA :
Ecole Nationale des Autistes

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