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Soutenir Siné.

Alors que l’on croyait l’affaire de Charlie hebdo terminée, opposant son rédacteur en chef, Paul Val, à Siné, pour des propos qualifiés par le premier d’antisémites, Bernard-Henry Lévy en ajoute une couche. D’autres enfin ont repris qui pour Val, qui pour Siné, si bien qu’un incident de rédaction d’un journal satirique est devenu une affaire nationale qui porte sur la liberté d’expression.
C’est toute la problématique des lois contre le racisme et l’antisémitisme qui fait polémique. Ne sont-elles pas à la fois le bien et le mal associés ? Doit-on sous des prétextes divers empêcher de s’exprimer ceux qui ne pensent pas comme la majorité ?
Dans le procès fait à Siné par le bouillant B.-H. Lévy, on ressent un certain malaise de la manière, avec laquelle le philosophe évoque des « mots qui comptent » ; en commençant par oublier ceux qui ont été écrits par Siné, pour s’étaler avec la complaisance de l’artiste qui se sait du génie, sur les siens.
A la citation, c’est B.-H. Lévy qui passerait pour intransigeant dans sa façon sommaire de cataloguer l’antisémitisme. Pour lui l’antisémitisme commence là où on ne célèbre pas avec dévotion le « martyr » des Juifs dans leur histoire en général et celui de la 2me guerre mondiale en particulier, là où l’on reste circonspect en ne prenant pas parti dans la guerre israélo-palestinienne, bref, quand on ne professe pas une admiration sans borne pour « le peuple martyr ».
L’avocate Gisèle Halimi reprenant le texte litigieux de Siné l’a décortiqué en professionnelle du droit et elle est formelle : « …dans un procès en justice, il n'y aurait strictement aucune chance pour que Siné, sur la base de ces lignes, soit condamné pour antisémitisme. »
La position adoptée par B.-H. Lévy, comme celle de beaucoup de coreligionnaires et d’assimilés est à l’opposé d’un apaisement en ce domaine. Elle est au contraire fortement attentatoire à la liberté tout court et de la sorte, elle pousse justement ceux qui ne sont pas racistes vers des conclusions d’affrontement et d’excès.
Le cas Dieudonné est à ce titre exemplaire.
D’une blague de potache chez Ardisson, voilà l’humoriste sommé de se dédire. Il n’entend pas plier. Il le dit et s’explique. Une polémique à la Siné s’installe avec les mêmes accusateurs ou à peu près. Dieudonné se voit endéans la quinzaine conspué, et interdit d’antenne. Il résiste, se défend – mais comment se défendre devant des juges qui ne vous entendent pas ? –
Enfin Dieudonné s’entêtant, donne raison à ses adversaires en dérapant de phrases équivoques, en provocations. Il finit par demander à J.-M. Le Pen d’être le parrain de sa petite dernière. Ce que celui-ci accepte avec jubilation, on s’en doute.
S’il n’y avait pas eu cette effervescente meute devant le gag de l’humoriste déguisé en intégriste juif et cet hallali à son encontre, y aurait-il eu de sa part une réelle poussée antisémite ?

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Les philosophes médiatisés n'en sont pas à une gymnastique dialectique près pour frapper l'opinion et mettre « les légalistes » de leur côté.
On ne peut pas émettre un avis dubitatif sur Israël sans contrarier des intellectuels des milieux les plus divers qui, de près ou de loin, se sentent concernés dès que des sujets touchant à cette nation ou à sa diaspora sont abordés.
L’audacieux qui s’y frotte sans l’aval de ces milieux est tout de suite suspecté d’être un nazi rentré. Des accusateurs surgissant de partout sentent monter du malheureux les senteurs nidoreuses de Josef Mengele et de Robert Faurisson.
Pour l’opinion, l’amalgame est aussitôt fait : racisme, négation de l’holocauste, imprécation injurieuse et diffamatoire sont intimement liés.
Un journaliste (qu’il me pardonne, je n’ai pas retenu son nom) exprime très bien ce que les amoureux de la liberté ressentent :
« Il était prévisible que cette affaire suscite les récurrents effets de manche et sonneries de tocsin. Il n'y a là qu'un symptôme supplémentaire d'un triste état de fait : on ne respire plus, dans ce pays. La France pète de trouille, et ça ne sent pas bon. La poltronnerie de la plupart favorise l'autoritarisme de quelques-uns. Toute pensée, toute parole libres sont immédiatement soumises à un feu roulant d'intimidations, de condamnations ronflantes et sans appel. Comme le dit un proverbe japonais : "Le clou qui dépasse appelle le marteau." Malheur à celui qui critique les replis communautaristes, l'invasion massive du religieux dans l'espace public, la défaite annoncée de la laïcité dont le discours de Latran était un avant-goût, les clés des banlieues remises aux barbus par une république capitularde, l'arrogance grandissante des imams et des rabbins, la montée des intégrismes sous couvert de quête légitime d'identité, la politique israélienne ou palestinienne. Antisémite ! Islamophobe ! ».
« La rhétorique victimaire, chère à nos dirigeants, est omniprésente. Philippe Val n'est plus un patron de journal qui a licencié arbitrairement un collaborateur : il devient la victime d'une horde déchaînée dont l'oeil perçant du philosophe a saisi les motivations racistes. Ainsi Jean Sarkozy, bien fils de son père en matière d'arrogance, d'opportunisme et de grossièreté, est transformé en victime d'attaques honteuses dignes du Pilori (un journal antisémite sous l'Occupation) ou de la Milice. »
En Belgique comme en France, nous devrions prendre très au sérieux la généralisation peureuse de l’opinion, relayée par la Loi.
La simplification des choses apporte de la confusion.
Il y aurait les bons citoyens, bien libéraux et démocrates et les autres, les racistes et les totalitaires dont il faut clouer le bec. Il n’y a plus de presse libre, plus d’opposition, plus rien qui ne contredise une vérité rédhibitoire.
Bientôt nous aurons une police à laquelle se confieront les bien-pensants, une police du bien dire et du bien penser, une police si délicate que nous la consommerons comme le sucre dans le café sans le savoir. Et pour cause, cette police est parmi nous. Les « bons » citoyens auront un carnet en poche, le crayon derrière l’oreille, et seront prêts à relever les propos « inadaptés », à y inscrire les plaques minéralogiques suspectes. Ce sera une police auxiliaire et supplétive parfaite, de la délation et de la lettre anonyme.
Et ces chers imbéciles jubileront quand ils auront eu la peau de ceux qui ne pensent pas comme eux, sans savoir qu’ils auront, eux aussi, la tête près du billot.

Commentaires

Nous disions « FAITES L'AMOUR, PAS LA GUERRE ». Certains anti-capitalistes pourraient dire « L'AMOUR, PAS L'ARGENT ».
Encore faudrait-il que ceux-ci ne pratiquent pas la HAINE (de l'argent et des riches qu'ils sont de toute façon).
On dirait aussi, "L'AMOUR, PAS LE POUVOIR".
Pour le sujet du jour, nous dirons simplement, même si c'est une lapalissade, "FAITES L'AMOUR, PAS LA HAINE".
S'il vous plaît, aimons-nous, respectons-nous et écoutons-nous, les uns les autres.

Cher Richard, je ne peux malheureusement pas intervenir ici, c'est avec ta dernière phrase que je suis d'accord. STP, ne pourrais-tu pas nous faire une rubrique sur le film de "Françoise Sagan" que nous avons vu au "Sauvenière" mardi. Si tu l'as vu aussi, dis-nous un peu ce que tu penses de cette écrivain. Bises Dorebul.

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