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La fin de l’Histoire.

L’évolution de la société serait-elle à mettre en parallèle avec l’organisation philosophique de celles-ci ?
Et cette évolution aurait-elle pris fin avec l’avènement du système capitaliste, ce dernier étant considéré comme indépassable, parce que le meilleur (1) ?
La théorie dite de « la fin de l’Histoire » fut longtemps reçue au premier degré par les disciples de Hegel (1770-1831). Selon Kojève, « le défilé des troupes de Napoléon Ier, sous les fenêtres de Georg Wilhelm Friedrich Hegel, au terme de la bataille d'Iéna, constitue le terme de l'histoire. »
Il faut redouter à la suite de ce génie précoce que fut Hegel, que d’autres philosophes soient tentés de replacer « la fin de l’histoire » lors d’un autre grand événement. C’est le cas de Francis Fukuyama qui relança l’hypothèse peu avant la chute du mur de Berlin.
Considérant la fin des dictatures dans la péninsule Ibérique (Salazar, Franquisme), en Grèce (dictature des colonels) ou en Amérique latine (juntes) puis l'éclatement de l'Union soviétique entre 1970 et 1980, ce philosophe japonais naturalisé américain conclut que la démocratie et le libéralisme n'auront désormais plus d'entraves et que la guerre devient impossible ! La démocratie libérale satisfait seule le désir de reconnaissance, qui serait l'essence absolue de l'homme.
Voilà une belle récupération de Hegel pour les besoins de la cause capitaliste « fondue à jamais dans la cause de la démocratie », comme si elle était la seule qui ne fut pas totalitaire !
Si, au moment du passage du « petit caporal » à Iéna, apparaît à Hegel la tâche des temps nouveaux « de rendre le monde extérieur partout conforme au concept de la liberté une fois reconnu » on se demande où Fukuyama a été puisé son idée que la liberté des hommes est indépassable dans la démocratie libérale ?
Dans la « Philosophie du droit » de Hegel, on voit apparaître une situation double et contradictoire chez l’individu qui s’affirme d’avantage en 2011, qu’en 1808. L’individu est citoyen, mais il ne l’est qu’au bout d’une longue période. Il y épuise sa citoyenneté en une seule fois par le vote. En dehors de cette unique activité, il appartient selon Hegel à « bürgerliche Gesellschafts » la société civile. Il y exerce un métier d’intégration. Cela l’enferme dans des obligations et des particularités qui le séparent de l’organisation collective.
Par conséquent, la société civile prive les individus d’exercer toute vocation d’universalité.
La démocratie formelle ne touche pas les conditions de travail et de vie de toutes les classes sociales confondues à l’exception de la classe politique, bien entendu (2). L’employé qui loue sa force de travail pour un salaire ne ressemble en rien au citoyen qui élit ses représentants. Pour que s’accomplisse une démocratie réelle, il faudrait que les libertés limitées à l’ordre politique soient transposées dans l’existence concrète quotidienne et qu’un cordonnier ou un maçon soit également citoyen quand il répare une chaussure ou monte un mur.

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Pour qu’il y ait démocratie réelle, il faudrait supprimer la propriété privée des instruments de production.
Quand l’homme travaille dans des conditions inhumaines, il est déshumanisé. Nous touchons à la notion d’aliénation profondément hégélienne avant d’être marxiste.
L’aliénation est une critique historique, morale et sociologique de l’ordre social actuel. Les entrepreneurs aussi sont aliénés, puisqu’ils sont les esclaves d’un marché invisible, soumis à la concurrence, quand il n’y a pas dumping et entente.
L’homme ne réaliserait son humanité que dans la mesure où serait réduite suffisamment la durée du travail due à la société, pour qu’il ait la possibilité de produire et créer à sa guise.
La morale artificielle de substitution à la vérité morale pour aborder les raisons profondes du travail, tient dans la volonté de « faire croire aux travailleurs à une religion parallèle non concurrente à une croyance en un dieu », celle du travail. Pour que naisse un espoir de créer une véritable société démocratique, il faudrait permettre aux Hommes de réaliser librement toutes leurs aptitudes, en se défaisant au moins de cette religion parallèle à l’autre, dont les prêtres sont les ingénieurs et les entrepreneurs, les chantres.
La société actuelle n’en a pas pris le chemin. Elle s’en éloigne même, consacrant l’essentiel de son intérêt à créer une artificialité qui tient lieu de réalité.
Dans sa tombe berlinoise, Hegel peut se demander si pour nous, être aliéné par l’obligation d’adhérer au système capitaliste, n’est pas synonyme d’être idiot ?
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1. Ou le moins mauvais… ce qui est la même chose.
2. C’est la seule classe sociale qui ne se plaint pas trop de son salaire, ni des conditions de travail.

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