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Quand l’esclave se fait la malle.

– Ah ! mon Dieu…
– Quoi !... Quoi !... Ah ! mon Dieu ?
– …la grève !… on inonde le marché avec des articles fabriqués en Asie, et on ne trouverait pas des travailleurs chinois à petit prix pour remplacer des travailleurs en grève !
– Vous voyez mes valises manipulées par des porteurs chinois ?
– Vos bagages le sont déjà à leur fabrication, pourquoi ceux qui les fabriquent ne viendraient-ils pas chez nous les manipuler dans les aéroports ?

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Débats vaudevillesques à la téloche ce dimanche, sur une éventuelle législation afin de limiter le droit de grève.
Vaudevillesque parce que, même le sycophante de service, rôle tenu par Charles Michel et le matamore convenu, Melchior Wathelet, sont persuadés – sans l’oser pouvoir dire – que, sur un projet de loi pareil, le débat n’aura jamais lieu à la Chambre.
Qu’est-ce qu’ils en ont à foutre, ces gens-là, des porteurs de valises qui ne vont pas en Suisse, mais bossent chez Swissport, sans double-fonds dans le caddie ?
Ils se profilaient seulement tous les deux en défenseur du commerce et de l’industrie et se faisaient, à peu de frais, les porte-paroles des râleurs.
Wathelet les a eus au culot avec sa menace de réquisition. Il a joué gros. Avec une paire de sept dans son jeu, on ne relance pas le pot. Heureusement que les chefs des deux syndicats étaient d’accord avec Swissport et Wathelet, sans quoi ce dernier l’aurait eu dans l’os.
Les gens sont bizarres. Ils aimeraient limiter le droit de grève, quand ils doivent emprunter le bus ou attendre des valises à Zaventem, mais ils sont pour la grève pure et dure, quand l’entreprise dans laquelle ils travaillent va fermer ou liquider une partie de son personnel et qu’on ne sait pas qui sera dans la charrette.
Cette démocratie qui, en réalité, n’en est pas une, attendu que la volonté du plus grand nombre n’est jamais respectée par ceux qui sont mandatés pour le faire, ne peut pas trop taper sur l’esclave, sans courir le risque de périr elle-même, en s’exposant à l’explosion de colère d’un personnel qui ne supporte plus ses conditions de travail. Vous me direz « c’est pas ça qui va faire péter le bazar », bien sûr que non ; mais vous connaissez les propriétés de la mèche d’artificier ? Sait-on jamais ? Un loubard qui casse une vitre d’un bus de la STIB et Mittal qui ferme plus tôt que prévu. Tout ça en même temps ! Vous voyez d’ici les effets d’une grève générale en basse conjoncture ? La pétoche de Di Rupo, Wathelet et les Michel…
Les sanctions qui normalement tomberaient sur des grévistes partis dans une grève illégitime aux yeux de la loi, seraient trop vivement contestées dans une période de crise aussi tendue. Avec la population dans l’état de misère que nous connaissons, tout peut arriver.
Ensuite, ce serait une faute qui gênerait les dirigeants syndicaux qui gagnent leur fric en poussant à des accords qui empêchent les conflits de tourner vinaigre. Autrement dit, ce serait mettre en porte-à-faux les directions syndicales qui aident surtout les patrons pour un règlement à l’amiable, contre l’avis des travailleurs.
On voit bien que cela, c’est de la gesticulation et une vaste comédie.
En réalité, la situation est déjà suffisamment compliquée pour le plouc et le délégué syndical de base, qui doivent lutter contre de nouvelles conditions de travail, contre les patrons et les chefs des centrales syndicales, sans avoir besoin d’en rajouter une couche de la part de la droite dans la lutte de sa classe-moyenâgeuse et d’un parti socialiste qui a opté pour le libéralisme triomphant.

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