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Les ordures n’étaient pas ménagères

Ce vendredi 29 juin, le tribunal correctionnel de Liège a rendu son jugement des faits de corruption commis dans l’attribution du marché de la construction de l’incinérateur d’Herstal.
Le texte précise que le bourgmestre de Seraing, Alain Mathot, a bien touché au moins 200.000 euros de Philippe Leroy, l’ex-directeur d’Inova (affirmation du substitut Laurent De Smedt).
Alain Mathot n’était pas présent à ce procès, son immunité parlementaire n’ayant pas été levée. Les prévenus poursuivis pour ces faits ont été condamnés à des peines allant de la suspension du prononcé, à trois ans de prison avec sursis.
Ce qui par rapport à un voleur de bicyclette est très clément, puisque pour bien moins que cela, le voleur de bas-étage est bon pour la prison. On oublie trop souvent qu’outre le préjudice plus important, les élus concussionnaires trompent l’électeur.
La première partie de l'intervention du ministère public a été axée sur les faits de corruption et sur Alain Mathot, pourtant absent du procès. Alain Mathot était principalement accusé par Philippe Leroy, ex-patron d'Inova, qui affirmait qu'il avait touché 700.000 euros de pots-de-vin. Selon le parquet, les déclarations de ce prévenu ne doivent pas être écartées. "Je pense que Philippe Leroy ne dit pas la vérité sur l'ensemble du dossier. Mais ce n'est pas pour cela qu'il faut rejeter l'ensemble de ses déclarations. Alain Mathot n'a peut-être pas reçu 700.000 euros. Mais je pense qu'il a reçu 200.000 euros dans le cadre de la corruption", a soutenu le substitut. Le calcul du parquet s'appuie sur des dépenses qui auraient été effectuées en liquide par Alain Mathot.
On a tous les éléments pour poser plusieurs questions, dont la première concerne l’immunité parlementaire
Pourquoi ses collègues parlementaires, et surtout les membres de la N-VA, refusent-ils qu’un socialiste wallon soit traduit devant un tribunal correctionnel ?
Les prochaines élections communales auront lieu le 14 octobre 2018. Alain Mathot fait partie du bureau du PS liégeois. C’est un personnage de premier plan sur lequel pèsent quand même les conclusions d’un procès.

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Les observateurs en sont réduits à des hypothèses sur une protection qui fit du bruit à l’époque. Certains ont même évoqué une connexion immobilière entre le PS liégeois et la N-VA anversoise ! Le lien serait un fonds de pensions, OGEO, qui récolte les cotisations de plusieurs intercommunales liégeoises, et qui investit dans la brique, notamment dans la métropole anversoise.
C’est assez rocambolesque, mais c’est un fait, si Mathot est passé entre les gouttes, il le doit à cette bizarre alliance entre le PS et la N-VA. Ce n’est pas du pipo, c’est la réalité !
Des proches de Mathot ont une autre version. Les parlementaires ont voulu éviter une erreur judiciaire, l’accusation n’étant pas en béton.
Dans Intradel, qui gère les déchets de l’agglomération liégeoise, on tombe à chaque couloir sur l'un ou l'autre ex-collaborateur de Guy Mathot. Et puis, deus ex-machina, l’homme d’affaires Léon Deferm, déjà cité comme intermédiaire douteux dans le scandale des hélicoptères Agusta, parrain d’Alain Mathot, est convaincu d’avoir reçu des fonds, non déclarés, de la part du directeur du groupe français qui a construit l’incinérateur. Ce dont le filleul a largement profité lors de sa tournée princière sur la côte d’Azur, payant tout en cash !
En d’autres pays, il y aurait suffisamment de coïncidences fâcheuses qui rendent les accusations de la Justice crédibles, pour que le parti écarte momentanément le personnage controversé, le temps nécessaire pour mettre cette affaire au clair.
Nous sommes en Belgique, la démocratie ne va pas bien et le PS n’a pas que cette affaire sur les bras. Liège craint de tomber dans le collimateur de Di Rupo qui, jusqu’à présent, n’ose pas grand-chose contre la section la plus importante du PS en Wallonie.
Chez les Mathot, le fils a hérité de la faconde et du sang-froid du père. Comme dans beaucoup de cas, l’art de la politique poussé à l’extrême a toujours privilégié les dissimulations et les mensonges, sous le sourire et l’air confiant de l’homme sûr de son fait et de son bon droit. Des liens de famille existent entre le bourgmestre Demeyer et Alain Mathot, il peut donc être assuré de la bienveillance sinon de la neutralité du bourgmestre qui souhaite rempiler en octobre et qui n’a pas besoin de sortir du placard les tribulations de la famille.
Les autres partis à Liège n’ont garde de trop remuer les dossiers socialistes. Ils savent bien que lorsqu’un d’entre eux est en délicatesse avec la Justice, c’est l’ensemble des électeurs qui ressort le vieux slogan de « tous pourris ».
Dommage. S’il y avait une plus grande sévérité à l’égard de la délinquance en col blanc, comme on disait il y a 25 ans, l’électeur aurait un meilleur moral.
Relevons pour l’anecdote : certains hommes politiques ont souvent leur nom mêlé à des affaires louches. Cette malchance insigne, cet extraordinaire concours de circonstance sont tels que l’on tombe dans le domaine de la suspicion et du probable, tant les coïncidences accumulées pourraient convaincre un jury d’Assise, mieux qu’une Cours correctionnelle.
Mais voilà, l’assassinat d’André Cools n’a pas lieu tous les jours. Et on est bien content ainsi.

DERNIÈRE MINUTE

Ce samedi, le député-bourgmestre Alain Mathot a annoncé sa décision d’abandonner la politique pour se consacrer à sa défense dans le procès Intradel.
Cette information est tombée après que l'article ci-dessus avait été publié. La disparition momentanée d'Alain Mathot sur la scène politique est tout à son honneur. Elle est logique et justifie toujours la question restée sans réponse : pour quelle véritable raison, les parlementaires ont-ils refusé de lui retirer son immunité parlementaire ?
Reste un petit bémol, Alain Mathot restera bourgmestre jusque décembre et député jusque la fin de la législature en 2019. Autrement dit, le grand lavage est différé. Peut-être même n'aura-t-il jamais lieu, puisqu'il faudra attendre que les condamnés fassent appel et qu'un autre procès en cassation soit monté, encore faudrait-il que Monsieur Mathot y soit cité à comparaître, ce qui juridiquement n'est possible que si une nouvelle instruction avait lieu. Si d'aventure, Alain Mathot était cité par une des parties de la cassation, ce serait en qualité de témoin. Je me demandais aussi où était l'astuce.

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