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Centrification.

Faut-il en rire ou en pleurer ? La société francophone de Belgique n’a ni extrême droite, ni extrême gauche. La diversité d’opinion, comme dans toute société ordinaire, ne s’y retrouve, que de manière résiduelle et anecdotique, à concurrence de quelques %.
Serait-ce que nous sommes la seule Région d’Europe viscéralement centriste, modérée, sans opinion bien définie, celle d’une vie réglée comme du papier à musique, une société qui serait vouée à un super Bayrou à tout jamais premier ministre, une société où seul le stationnement serait autorisé et le mouvement exclu ?
Une société enfin qui aurait peur de tout et surtout de perdre ce qu’elle n’a déjà plus : la perspective d’une Belgique unie selon son cœur, le drapeau, Eddy Merckx, le littoral, les frites, la reine et son délicieux accent italien, Di Rupo en maître Johannes Eckhart, et Salvatore Adamo chantant la Brabançonne, et à tout propos, des anecdotes sur le voisin, ce faux-frère qui veut nous assassiner !

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L’impression d’un endormissement pacifique dans un centre qui ferait l’effet d’un trou noir, est réductrice et trompeuse. La nostalgie n’est pas un mode de gouvernement.
Les politiques sensiblement les mêmes des partis dits traditionnels ne doivent leur différence qu’à d’infimes détails et surtout à la mémoire collective qui plaça pour des siècles le parti socialiste à gauche et le parti libéral à droite.
D’où une impression d’étouffement, puisqu’il n’existe pas de parti exutoire dans un consensus qui convient de moins en moins à l’ensemble de la population. Le consensus établi autour d’une situation économique mondialisée à laquelle « on ne peut rien changer » a définitivement plombé les initiatives en exaspérant les citoyens.
Or, les pays sous le joug des banques et de l’économie devraient réfléchir qu’il n’existe aucune fatalité qui vaille devant la volonté populaire, lorsque celle-ci s’affirme avec force.
Le sort de l’Islande et celui de la Grèce sont deux exemples à méditer.
Les Islandais refusent de rembourser les dépôts que des banques britanniques ont perdus lors de la crise de 2008. Cette rébellion devrait coûter à l’Islande au moins le même sort réservé à la Grèce. Ce n’est pas le cas. Les Islandais poursuivent leurs emprunts à un taux de 4,8 %. La Grèce dans la même situation de banqueroute est soumise à des plans d’austérité d’une rare violence pour les pauvres. La Grèce pour s’en sortir vend tous les biens nationaux qui peuvent l’être. Bientôt elle mettra en vente le Pirée et l’Acropole sur sa lancée.
Comme quoi, parfois dire « non » aux spéculateurs peut avoir de l’effet.
Retour en Belgique, le décalage entre le représentant et ses électeurs est fortement ressenti. De là à imaginer que l’indifférence s’est installée de façon permanente dans l’opinion avec comme première conséquence un dénigrement systématique englobant gouvernement et opposition, il n’y a qu’un pas.
Le peuple ne dénigre pas le système politique. Il dénigre la médiocrité des partis, la frilosité des dirigeants qui craignent les marchés, l’économie, la flamandisation de Bruxelles, Adolphe De Wever, etc. avec un seul objectif, durer encore un peu sans faire de vague !
C’est une société marais avec trois partis traditionnels, rejoints par Ecolo mais, toujours bien au centre d’une cible, visant la rose.
Par contre, la société flamande a une forte tendance à se déplacer à l’extrême droite avec le Vlaams Belang suivi de près par la N-VA.
La crise économique qui menace la Belgique devrait ouvrir les yeux. A partir des années 80 le taux d’endettement des ménages s’est emballé. L’insolvabilité des masses à produit aux USA la crise des subprimes. L’Europe en subit le contrecoup. Le remède est pire que le mal. On diminue les salaires, les avantages sociaux, donc les gens s’appauvrissent davantage. Cela profite à 1 % de la population qui se gave de nos dépouilles. Selon Piketty, prof à Normal Sup, « les 1 % des plus riches ont confisqué 60 % de la croissance de ces dernière années ».
On a beau voter au centre et vouer notre pacifisme à l’idéal d’un troupeau de bœufs qui regarde passer les trains, tout de même, il y a un moment où la bêtise collective a des limites.

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