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La Philharmonie des Vite-Contents.

Il y a de cela 16 ans, sous prétexte de lâcher les brides qui retenaient la liberté du commerce, l’Europe, bienveillante aux thèses de l’économie des marchés américains et anglais, convenait qu’une entreprise pouvait détacher des salariés dans un autre pays de l'UE pendant deux ans maximum. Un minimum de précautions était requis.
Depuis, cette permissivité revenait régulièrement dans le débat depuis le "non" au traité constitutionnel de 2005. C’est l’anecdote du fameux plombier polonais de la "directive Bolkenstein". Remis en question par les ministres du Travail européens ce 9 décembre, on a fini par déboucher sur des compromis, comme toujours.
Était-ce une raison pour en faire un grand succès ? Loin de reconnaître que cette directive a fait régresser les salaires et amoindri la couverture sociale des travailleurs de l’UE, la nouvelle mouture « aménage » la loi de 1996, mais sans réellement pouvoir stopper les abus et sans reconnaître l’erreur initiale.
Comme dans une Europe droitière, il faut parfois freiner les appétits des industriels si l’on veut que les travailleurs descendent au fond du trou sans se révolter, les gazettes applaudissent l’aménagement et notre ineffable ministre de l'Emploi, Monica De Coninck (sp.a), s'est montrée ravie de l'accord.
S’en suivent les motifs de ce ravissement.
Les abus liés au détachement de travailleurs européens dans un autre pays que le leur, cesseront, dit cette socialiste flamande. Sur le plan strictement salarial, ce sera le cas (1), mais les retenues concernant les assurances maladies, chômage (quand cela existe) et pension se poursuivront dans le pays d’origine. Autrement dit, le poids de la différence de traitement entre travailleurs issus des pays de l’UE, se fera sur les lois sociales des pays d’origine.
Le galimatias de l’équipe Di Rupo met en avant « Le principe de responsabilité solidaire pour les entreprises donneuses d'ordre comme des filiales », cette bonne blague. Cependant, on prévient tout de suite que dans le secteur de la construction, il ne sera pas obligatoire.
Étant donné que, selon la ministre, la responsabilité solidaire existe déjà en Belgique pour tous les secteurs, rien ou presque ne change.
Alors, si rien ne change, pourquoi s’emballer sur l’initiative nouvelle ?
Que Monica ne s’enthousiasme pas trop vite, son petit triomphe doit encore faire l'objet d'un accord au Parlement européen, ce consortium de tous les trusts et holdings du continent !
Il y a vraiment urgence de mettre fin aux combines des patrons et des agences de placement des 28, surtout celles des pays de l’Est les plus sollicitées. Le nombre de travailleurs détachés au sein de l'UE atteindrait 1,5 million aujourd'hui. Combien sont réellement déclarés ? On cite à peine 25 % !

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La Grande-Bretagne était évidemment hostile avec les pays de l’Est à tout renforcement des contrôles, dans les accords de couloir, c’est finalement la Pologne qui est sortie du camp britannique, plongeant les proaméricains de la City dans l’embarras. Ce qui fit passer le mini texte actuel.
Sept pays ont toutefois voté contre : le Royaume-Uni, allergique à toute nouvelle réglementation, ainsi que la Hongrie, la République tchèque, la Lettonie, l'Estonie, la Slovaquie et Malte. On voit le genre d’alliés des British pas gênés pour autant.
Le spectre du "plombier polonais", à quelques mois des élections européennes du printemps, a permis ce petit pas de l’Europe pour la stabilité des salaires.
Pourtant « le cimetière social » promis par les syndicats si l’Europe poursuit sa politique n’est pas pour tout autant écarté. On est loin d’avoir harmonisé les règles sociales européennes pour le bien-être de la population.
Comme en Belgique on entre en période préélectorale, les coalisés du gouvernement entendent bien unanimement dresser des arcs de triomphe à ce progrès.
On ne peut pas tous les jours enterrer Mandela.
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1. Si les pays mettent sur pied des organismes de contrôle efficaces et connectés entre eux.

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