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À propos d’une botte d’oignons…

La Belgique se transforme à une vitesse que l’on ne pouvait concevoir avant la Covid-19.
Nous étions dans un autre monde. Nous nous étions résignés à ce que la nouvelle économie mette à bas les derniers bastions communs, les hôpitaux, les chemins de fer, la poste. Il n’est pas sûr que ces Messieurs de l’économie libérale osent aller jusqu’au bout du pillage aujourd’hui, avec une l’Europe qui vacille sous les coups du marché mondial.
S’adapter aux circonstances, la plupart des gens en prennent leur parti. Loin des élucubrations géopolitiques de nos hauts stratèges, encore plus éloignés des contingences du commerce et de l’industrie, à des années lumières du néolibéralisme, les Belges, pour la plupart, découvrent que l’inflation est supérieure à l’indexation de leurs salaires, retraites et indemnités.
Cela change tout.
Au lieu de progresser d’année en année, petitement mais régulièrement, les situations du bas de l’échelle passent de la préoccupation au tragique. Sans compter que la pauvreté s’accélère du renfort de l’artisanat et du moyen commerce qui lâchent la rampe et dévalent les échelons.
Les prix, de la botte d’oignon aux macaroni, suscitent plus d’inquiétude que la guerre en Ukraine soutenue de nos deniers par l’Union Européenne.
Le consommateur est conscient qu’on lui a menti sur tout, à commencer par l’histoire du progrès constant par la formule « plus je produis, plus je consomme, plus je m’enrichis ». Il ne lui a pas échappé que le système l’a poussé à la consommation de l’inutile et qu’il est plus pauvre qu’il ne l’était avant. La main invisible d’Adam Smith ne servait qu’à lui donner des gifles.
Il en arrive à considérer que la liberté d’entreprendre n’importe quoi, propre au libéralisme, grossit les rangs des mécontents que sont les pauvres qui réfléchissent. Les gens savent qu’en haut, les barreurs du navire se relaient pour suivre un mauvais cap. La difficulté à ce niveau, c’est d’en convenir.
C’est dur en effet, d’avoir fait tant d’études pour aboutir à n’être qu’un con !

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Nos ministres ne s’intéressent qu’aux choses immatérielles. Ils courent les spéculations et les plans sur la comète, comme nous, nous courons après les dentées alimentaires les moins chères.
Ces avocats reconvertis en Hommes et Femmes politiques sont de l’avis de Paul Valéry selon lequel l’idée fausse n’en est pas moins réelle que la vraie. On a des exemples depuis Maggie De Block. Ses idées fausses n’ont-elles pas conduit à des morts bien réelles ?
Le divorce est là : entre la tête pensante et le ventre qui réclame son plein.
Tandis que le ventre a conscience qu’il a aussi un cerveau, les élus de la Nation, pour la plupart, n’ont qu’un cerveau qui a oublié qu’il a un ventre. À 20.000 euros par mois, il est normal de se moquer du prix de l’entrecôte.
L’étonnant de la chose tient dans la vision de la devanture présentée au monde. La Belgique officielle est vaillante et soudée autour de ses chefs pour repartir plus que jamais dans le bon sens de l’Histoire, avec l’Europe bienveillante et son « frère » américain (authentique « frère » a été dit par Charles Michel).
Les studios sont pleins de journalistes enthousiastes pour un public sentimentalement libéral. Les émissions culinaires battent leur plein de ménagères qui prennent des notes à l’approche des Réveillons. Les variétés télés déversent de la paillette à gogo. Les studios bruissent de bons mots dont on a honte.
Derrière la façade Potemkine, la vie suit son cours, morne, étriquée, dans l’incapacité de réaliser ses rêves. Les gens, sauvés de la faim par des centres sociaux alimentaires, rendent grâce au quignon de pain. Les enfants iront à l’école rassasiés. Certains travaillent « par chance » avec des salaires insuffisants. D’autres s’inquiètent des nouvelles mesures qu’élucubre Georges-Louis Bouchez contre les chômeurs.
Ce n’est pas l’incompréhension totale. Il s’agit de deux mondes parallèles qui s’ignorent. L’un, parce que la pauvreté fait baisser la tête pour ménager ses forces, et que demain sera un jour hostile de plus, l’autre parce que la mauvaise foi finit par désigner leurs auteurs, ceux qui avaient mission de rendre heureux le peuple et qui se trouvent à chaque décision politique, dans la position de trahir.
Avec un furieux à la porte de l’Europe qui comptait sur notre bénignité pour grignoter l’Ukraine et la menace d’une guerre directe « comme un vol de gerfaut hors du charnier natal » du groupe Wagner au service du prédateur, on a fait le tour des chagrins. Le peuple qui a bon cœur, découvre plus malheureux que lui. Il fallait une nouvelle misère supérieure, pour diminuer l’amertume de la sienne !

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