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31 mai 2004

Forza aujourd’hui, forçat demain ?

Peu d’hommes politiques européens font l’objet de jugements aussi extrêmes que Silvio Berlusconi. Pour les uns, il incarne le "self-made man" à qui la jalousie des médiocres, dès qu’il s’est mêlé de politique, lui vaut d’être la cible des fonctionnaires et des juges de l’Etat italien. Pour les autres Silvio Berlusconi est l’homme le plus corrompu d’Europe. Son empire ne serait qu’une construction maffieuse.
C’est le premier Président du Conseil italien depuis Mussolini à valoir 6 milliards d’euros, à posséder 3 chaînes de télévision (Mediaset) sur 7 en Italie, à grignoter peu à peu des influences dans des journaux concurrents quand il en possède déjà 3. A ce seul titre, ce personnage trouble peut inquiéter non seulement l’Italie, mais aussi l’Europe, même si l’ultralibéralisme dont nos MR font partie applaudit à cette réussite financière et politique.

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Berlusconi a commencé sa carrière modestement. Il ne vendait pas des cigarettes de contrebande comme l’autre self-made-man, Aristote Onassis à ses débuts, mais était modeste garçon de cabine sur des paquebots en croisière d’agrément, pour devenir animateur de soirée sur ces mêmes bateaux.
Dans un pays où le crime organisé était le plus puissant d’Europe dans les années septante, il a sans doute côtoyé le demi-monde à l’argent facile et s’est établi d’excellentes relations. Quoique ses débuts, par la force des choses, soient plutôt obscurs.
Aujourd’hui, il gère l’Italie comme une société anonyme, emploie 800 avocats dans ses différentes affaires et il vient de faire voter une loi par sa majorité mettant fin à des poursuites judiciaires dans le cadre de sa gestion de ses société, un peu comme Chirac a eu la sienne pour arrêter les poursuites sur sa gestion lorsqu’il était maire de Paris.
Son parcours est truffé d’anomalies, d’actions inexplicables. On cite la constitution de son holding la Finvest. Des crises à propos d’Ariosto, Mondadori, All Iberian, plus tout ce que les journalistes d’investigations ont pu découvrir, malgré la chape de plomb qui s’est abattue sur l’Italie depuis son règne…
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Avec ses sitcoms achetés aux USA, ses films porno la nuit, ses jeux aussi débiles que ceux que nous regardons sur nos chaînes françaises, le Citizen Kane de la péninsule a su envelopper l’information et les plaisirs dans le superficiel et le sensationnel. Ainsi rendus passifs par tant de sollicitudes, les citoyens italiens sont, à une majorité relative, pour lui.
Résultat : un kilomètre de métro à Hambourg coûte 45 milliards et en Italie 180 !
Le discours politique du « cavaliere » est simple, pour ne pas dire simpliste, il colle l’étiquette de communiste à tous ses détracteurs, selon la technique éprouvée de Mussolini. Ça marche, même si les communistes n’agitent plus que les fantômes du passé. Il faut croire qu’à l’ombre du dôme de Saint-Pierre cela soit encore grandement suffisant.
Il a compris qu’il fallait être souriant et décontracté, comme la dernière des figurantes dans ses films pornos. Au sommet de la communication médiatisée avec ses intervieweurs à sa botte, il licencie des journalistes de la RAI en jouant de son influence, tandis que sa police ferme les portes des studios à ses opposants.
Par bien des aspects, cet homme est inquiétant. Davantage que notre extrême droite flamingante, il est capable de faire des ravages en Europe en y faisant des petits. On connaît la logique des gens de cette sorte. C’est une fuite en avant perpétuelle, une boulimie de tous les instants. C’est que souvent, comme Icare, leurs ailes fondent au soleil, entraînant dans leur chute des désastres financiers en cascade. A côté des catastrophes qui pendent sous le nez des trop crédules Italiens, les déboires de nos Ducarme et Fournaux réunis ne sont que d’aimables plaisanteries de petits fraudeurs.
Sa passion des médias révèle son besoin d’universalité : s’intéresser à tout ou à défaut périr. Le choix qu’il a fait du pouvoir politique correspond à sa personnalité ultralibérale. Standardisation et conservatisme sont ses maîtres mots.
La saga de Silvio le Superbe prouve que les démocraties sont bien fragiles et que leur sort est tout aussi aléatoire dans les mains de pareils capitalistes qu’elles le sont dans celles des nationalistes d’extrême droite. A ce sujet, les discours du MR paraissent bien fades pour dénoncer ce danger, bien moins en tout cas que sur les « dangers » de la gauche où là le tandem Duquesne-Michel retrouve brusquement du souffle. On a encore en mémoire « l’embarras » du gouvernement à propos d’une appréciation peu flatteuse de Louis Michel à l’égard du nouveau César, les pantalonnades qui ont suivi et la marche arrière de notre Ministre des Affaires étrangères qui n’est pas à une contradiction près.

30 mai 2004

Europe : le civil toujours en première ligne.

On a morflé pendant la guerre 40-45. Les Anciens se souviennent. Les jeunes se sont pas mal renseignés.
Les films où les shrapnells pleuvent du ciel, les Américains en ont plein les caves à Hollywood. Quand Mitchum débarque à Arromanches-les-Bains au milieu des morts, si c’est en décors, on doit bien se dire que c’est copier de quelque chose.
Comment se fait-il ayant vécu et assumé toutes ces horreurs que la droite soit encore si chaude, plus chaude que la gauche en tous cas, pour en découdre ?
Car enfin, on n’a pas la berlue, quand Louis Michel serre la main de Colin Powell, même si ce Conseiller de Bush est réputé pour être une colombe, c’est quand même lui qui a présenté les tubes de virus bidons aux Nations Unies pour entraîner des pays derrière son président et guerroyer en Irak sous un faux prétexte ! Michel le sait. Il devrait trouver répugnant de serrer la main d’un tel homme et que fait-il ? Il plastronne au nom de l’amitié indéfectible entre les deux pays et propose notre aide pour la rédaction de la future Constitution irakienne !
Si ce n’est pas ridicule, ça ? Notre Constitution, un modèle pour les Irakiens, on croit rêver ! Comment ça se dit « Mouvement réformateur » en arabe !...
Pour revenir sur le Pentagone fictif de la Metro Goldwyn Mayer, c’est vrai que tous les films à l’exception de quelques-uns sur le Vietnam, ont marqué les esprits insidieusement. Nous n’avons vu les guerres de ces cinquante dernières années que sous la loupe déformante américaine. Si bien que nous nous sommes imbibés de cette culture tape à l’œil de la bravoure du GI et de son immense désir de sauver la démocratie.
En Belgique, les traces de cette propagande massive à travers les échos, les films, les magazines et aujourd’hui encore tous ces jeux importés d’Outre-atlantique sont si prégnants qu’on peut suivre leurs effets jusque dans les vêtements et la nourriture de la jeunesse.
Quoique nous nous en défendions, même si nous sommes contre l’intervention américaine en Irak, une majorité de la population adhère à la vision de la guerre totale contre le terrorisme.

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Sous le prétexte de cette lutte sans merci, nous voyons fondre nos libertés. Les mesures de sécurité nous assimilent aux suspects dans les endroits stratégiques. On invente des pièges à la délinquance intégriste comme l’installation de caméras, de fichages et d’écoutes téléphoniques qui sont aussi bien opérationnels pour les criminels que pour les citoyens ordinaires.
L’armée, surtout l’armée, et les polices font de moins en moins la distinction entre civils désarmés et dangereux malfaiteurs.
On s’exclame que 800 Américains morts en Irak, c’est beaucoup. On oublie que le plus lourd tribut payé cash à la guerre a de tous temps été les civils. Combien d’innocents tués en Irak à côté des 800 soldats ? Personne n’en a fait le compte. Peut-être faudrait-il multiplier par dix les pertes américaines pour avoir un chiffre approximatif des civils tués.
Si la comptabilité des pertes en vies humaines parmi les populations occupées n’existe nulle part, c’est que tout le monde s’en fout en haut lieu et dans les médias.
Quand Sharon parle de civils tués dans le camp d’en face, à peine présente-t-il ses excuses. Excuses qui, aussitôt dites, sont oubliées par ses hommes sur le terrain.
Nous nous sommes accoutumés à trouver « regrettable » ce que l’armée israélienne fait subir aux Palestiniens. Les Résolutions des Nations Unies qui condamnent les agressions se suivent et se ressemblent dans l’indifférence.
Si nous restons modérés dans nos propos, c’est parce que nous subissons la propagande quotidienne de Sharon en personne, à la tête de ce système meurtrier et parfaitement inique d’un Etat qui ose encore s’appeler une démocratie.
Si je suis le raisonnement actuel, ce seraient bel et bien quelques intégristes musulmans insaisissables qui, au nom d’un mythique Al Qaida, menaceraient la liberté dans le monde ?

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Mais alors, pourquoi ce formidable armement, ces masses de militaires en mouvement, ces crimes perpétrés contre des innocents, pour une poignée de dangereux criminels ?
N’y aurait-il pas mieux à faire plutôt que d’employer des tanks et des hélicoptères, mettre sur pied une police bien spécialisée ?
Ces crimes d’Etat au grand jour, ne sont-ils pas le meilleur atout de recrutement du terrorisme mondial ?
N’est-ce pas à cause de l’escalade de la violence qu’organisent des Etats pseudo-démocratiques, qu’Al Qaïda n’a aucune peine à se fondre dans les populations ?
Voilà la messe est dite. Nous sommes victimes non seulement des terroristes, mais encore des forces chargées de les éliminer.
Le comble, c’est que ces forces si meurtrières, si incapables de couper le terrorisme à sa racine, agissent en notre nom !
Ce débat-là, ni la gauche, ni la droite n’a envie de le mener à l’occasion des élections européennes du 13 juin.
Que l’essentiel ainsi escamoté laisse les électeurs indifférents aux élections européennes, le contraire aurait été étonnant.

29 mai 2004

La mouche en pension chez une tarentule


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Je viens de relire Andromaque de Jean Racine. Comment ai-je pu passer à côté d’un chef-d’œuvre pareil sans le comprendre ? Mes professeurs y ont mis du leur. Je les rends responsables de mon endormissement pendant de longues années. Je me suis réveillé sans eux.

J’étais un abruti, un veau, je m’en explique
Quand âgé de seize ans, j’étais en rhétorique
Et qu’un cuistre assassin, Racine, pervertit,
Jetant sur Andromaque un grave discrédit.

M’ayant gâché la perception de la beauté classique, ces rustauds règnent encore et font de la même manière autant de tort aujourd’hui.

Leur académisme désigne l’art à la consécration bourgeoise. Reste à la partie officielle le soin d’achever leur ouvrage.
Ce qu’elle fait sans vergogne avec l’argent public.
Ainsi abandonné, le créateur qui n’a pas eu la perception de la beauté classique, s’en détourne et vit sa création dans la clandestinité
L’art instinctif, qu’il produit, inquiète parce qu’il ne répond pas à l’orthodoxie, qu’il récuse l’art officiel et qu’il remet en cause l’appréciation bourgeoise.
Car si le bourgeois aime Andromaque aussi, ce ne sont pas pour les mêmes raisons que les nôtres.
« L’intérêt de la classe dominante est de gérer l’image qu’elle se fait de soi. » (Pierre Bourdieu)
On dénie aux marginaux le droit de produire.
Vous n’êtes pas sans avoir remarqué le coût élevé du matériel, de la moindre brosse de martre à la feuille d’aquarelle ; comme est inaccessible l’éditeur-mécène et hors de question un orchestre à la disposition d’un compositeur.
L’appropriation de la mémoire populaire des Universités, par la modification et la codification du langage, rend leur propre savoir inaccessible aux créateurs,..
« Le discours dominant se ramifie en se faisant confirmer par les voix d’en bas et en faisant dire la même chose par d’autres personnes » (J. Rancière)
Inconsciemment le langage consacré vise le conditionnement de l’art dans sa vision bourgeoise. Seuls les artistes qui adhèrent aux valeurs dominantes auront une chance d’être reconnus.

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Les techniques d’inculcation du pouvoir sont suffisamment au point pour masquer la manipulation dont les artistes sont les premières victimes, les secondes étant le public.
Ainsi les gens finissent par se convaincre qu’ils ont pensé ce qu’ils défendent !
L. V. Thomas parle à ce propos des « appareils idéologiques d’Etat. »
La mise en actes de l’idéologie selon Althusser, c’est celui du système institutionnel : famille, patrie, école. Ces institutions relais sont là pour transmettre dans les moules sociaux les grandes évidences, à commencer par les buts à atteindre : l’industrialisation = l’amélioration du niveau de vie.
Pour la bourgeoisie l’idéal absolu, n’est rien d’autre que le sien. Elle nous convie à le partager, en feignant d’ignorer que cela nous est impossible.
L’illusionnisme bourgeois s’étend évidemment à d’autres catégories que celle de l’artiste-créateur. L’artiste-interprète en est victime aussi.
La technique d’appropriation est la même. La presse et les syndicats s’y sont laissé prendre. La sélection des informations, les priorités des titres jouent sur les regards d’un engagement au quotidien.
Par ses artifices de langage, ses partis pris hautement manipulateur, le pouvoir légitime ses choix en matière d’art, comme en tout autre domaine de la vie sociale.
Le paradoxe de l’artiste est qu’il ne crée pas seulement pour lui seul. Il a besoin de communiquer son art aux autres, d’où cet amour-répulsion de la consécration que l’atonie de la pauvreté rend si cruel.
Il serait temps de réhabiliter le mépris de la classe dominante, de s’en parer comme une qualité essentielle de l’art populaire.
Et, de ce point de vue, les artistes d’en bas ont encore tant de gens à décevoir !

28 mai 2004

Une situation délicate...

- On te voit plus. Louise me le disait au lit hier soir en revenant de Belle-Ile « Qu’est-ce qu’on lui a fait ? »
- J’ai fait la connaissance d’Anna dans un « chat ». Tu sais ce que c’est, ta femme pourrait la trouver mauvaise.
- Je ne vois pas pourquoi ? T’es libre, non ?
- J’étais chez vous deux ou trois jours de la semaine, même quand tu n’étais pas là. J’ai pensé que ça n’était pas convenable d’arriver à l’improviste en vous disant « Je vous présente Anna Nysse, je l’ai rencontrée dans un « chat ».
- Tu ne t’es pas disputé avec Louise au moins ?
- Non. Penses-tu. Ça aurait pu continuer avec vous deux. Louise est parfaite, vraiment, et toi très sympa…
- Je sais qu’à la maison, tu n’avais pas ton nécessaire…
- Mais si, j’avais tout…Que veux-tu dire par là ?
- Il y a autre chose que l’amitié. Il te manquait l’amour. Tu l’as cherché ailleurs, sans te soucier de Louise et de moi… Je te comprends.
- Que vas-tu chercher ? J’étais bien chez toi. On n’est jamais content de son sort, voilà tout. C’est pour ne rien gâcher que j’ai préféré ne pas présenter Anna Nysse.
- Tu l’as connue dans un « chat », tu m’as dit… Puis après ?
- On s’est filé un rancard dans un cybercafé. Elle m’a raconté pourquoi ça ne marchait plus avec Roland.
- Roland ?
- Oui. Roland, c’est l’ami de son mari qui s’était incrusté chez eux. Au début, il n’y avait rien entre eux. Puis, comme son mari était souvent absent, elle s’est laissée séduire, par désoeuvrement.
- Ça arrive, ces choses là.

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- Un jour qu’ils étaient seuls, il a avoué qu’il avait fait connaissance d’une certaine Louise à Belle-Ile. Anna n’a pas aimé sa façon. Ils se sont disputés. Pour ne pas éveiller les soupçons du mari, Roland a préféré ne plus venir. Anna demande parfois des nouvelles de Roland à son mari, en jouant l’étonnée.
- C’est un drôle de mic mac que tu racontes-là.
- Anna m’a présenté son mari, comme si j’étais un petit cousin. On a sympathisé. J’ai pris la place de Roland, en quelque sorte.
- Je comprends que tu sois occupé.
- La semaine dernière, comme Anna me faisait quelques downloads avec mon memory stick et que j’étais prêt de l’uploader, on sonne en bas. Elle regarde par la fenêtre. C’était Roland avec Louise.
- Il voulait quoi ?
- Une explication !
- Ils ont parlementé. Roland a dit qu’il repasserait avec Louise.
- Et alors ?
- Elle a accepté.
- Quel mal y a-t-il ?
- Je crois qu’elle ne l’a pas oublié.
- Tu n’as qu’à être là avec le mari. Si Louise est de la partie, ce sera encore mieux…
- Justement, je la connais.
- Cette fameuse Louise ?
- Ouais. Et il ne faut absolument pas qu’elle me voie avec Anna Nysse.
- Et pourquoi, s’il te plaît ?
- Eh bien ! Louise…
- Je t’arrête. Depuis le début de ton histoire, il y a quelque chose qui me gêne. A propos de Louise…
- Ah ! tu commences à comprendre !
- Oui. Cela est équivoque…
- A qui le dis-tu !...
- Que tu parles d’Anna Nysse et de son ancien amant Roland, c’est pas grave ; mais que Roland ait une nouvelle maîtresse qui porte le même nom que ma femme prête à confusion… Pour qu’on soit plus à l’aise, appelons la autrement que Louise ? Qu’est-ce que tu penses de Lucienne ?
- …… !!!

27 mai 2004

Servitude et grandeur militaire.

- Qui va là ?
- Jemappes.
- Non.
- Quoi, non ?
- C’est pas Jemappes, le mot.
- C’est pas le nom d’une bataille célèbre ?
- Je vais pas quand même te dire oui…
- Pourquoi ?
- Mais parce que si tu n’as pas le mot, tu peux pas passer.
- C’est pour te relever, même que c’est le juteux qui m’a dit le mot.
- Je veux pas savoir…
- Enfin, Gaston, tu me reconnais pas, Première classe Edouard ?
- Est-ce qu’on est militaire ou merde ? Celui qu’à pas le mot peut pas passer.
- Comment je vais faire pour te remplacer, alors ?
- J’ai une consigne, non ?
- Bon. Et alors ?
- Même que je devrais tirer si t’as pas le mot !
- Attends… Fleurus ?
- Avance pas où je tire !
- T’es sûr que c’est pas Fleurus ?
- Tiens, si je suis sûr.
- Je t’assure que c’est le juteux qui m’a dit Fleurus.
- Retourne-z-y et redemande…
- I’ va me foutre au trou.
- Oui, si c’est pas Fleurus…
- Si c’est Fleurus, c’est le bidasse Gaston qu’est mûr pour le gnouf !
- I’ a pas de danger. Je l’ai inscrit à l’aniline sur la paume de ma main !
- Tu me connais. On va au manège ensemble. On boit des bières à la cantine. On a…

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- C’est encore une jonglerie du maréchal des logis pour m’emmerder…
- Qu’est-ce que tu racontes ?
- Il est caché dans les buissons et si je te laisse passer avec Fleurus, alors que c’est pas Fleurus, j’y coupe pas…
- Je t’assure. I’ a personne dans les troènes…
- J’ai vu les feuilles frémir…
- J’ai été à la feuillée. C’est les branches qui se redressent. Tu peux y voir ma sentinelle, même que t’as pas besoin du mot pour la sentir… J’y suis : Milmort !
- Quoi Milmort ? C’est une bataille ?
- Ans ? Remouchamps ? Seraing-haut ?
- T’as pas bientôt fini ? Et qui te dit que c’est une bataille ?
- Aha ! c’est un nom de fleur ?
- Oui et non. C’est un nom comme ça en deux mots avec une couleur de fleur, si tu veux.
- Y a pas de bataille en deux mots.
- Je suis bien d’accord avec toi.
- Rose !
- C’est pas en deux mots, Rose !
- Lilas blanc ?
- T’as pas bientôt fini ? C’est un ustensile avec une couleur, si tu veux savoir.
- Boîte à merde ?
- C’est une couleur, la merde ?… quoique dans un certain sens…
- J’te donne ma paire d’éperons d’ordinaire, si tu me le dis.
- Tu vois que tu l’savais !
- Moi ?
- T’as dit « éperons d’or ». T’as dit le mot…
- C’est pas une bataille « les éperons d’or » ! C’est pas de jeu !
- Je t’avais prévenu. Lui dit que si !...
- Le juteux, c’est un vicieux, quand même…
- Ouais. S’i’ va chercher dans les dictionnaires !

26 mai 2004

Au trocsbar

- T’as l’air complètement schlasse !
- A partir de trente ans, ça vaut plus la peine…
- De quoi ?
- De vivre tiens !
- Quel âge t’as ?
- Vingt-huit !
- T’as encore deux ans devant toi…
- Vu comme ça... Toi qu’en as quarante-trois…
- C’est une tare ?
- Tu dois savoir…qu’on tourne en rond… qu’on refait les mêmes conneries !
- Y a des conneries qu’on refait et qu’on ne regrette pas d’avoir faites !
- Parce que toi, t’es pédé et qu’un pédé ça vieillit mieux.
- Qu’est-ce que t’attends pour bien vieillir ?
- Quand tu dragues un gars, tu fais pas tes quarante-trois ans… Tu plais, quoi !...
- T’as qu’à devenir pédé !
- Enlever sa capote en pétant ? Merci bien. Moi, mon truc, c’est les gonzesses…
- Personne n’est parfait…
- Pourtant j’ai du mérite… avec ce qu’elle m’a fait, Angelina !...

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- Quoi ? Qu’est-ce qu’elle t’a fait ?
- Elle broute la pelouse d’une copine !
- Non !
- Si !
- Toutes des tapettasses…
- J’te le fais pas dire. Toi qu’es d’la maison…
- Qu’est-ce que tu veux, la jaquette c’est l’avenir…
- La tourista sans poser le cul aux Baléares… se ravaler la gueule comme Boy Georges… gazouiller de la chorale à Obispo quand on est né baryton… c’est l’avenir ?
- On mélange plus les sexes.
- Et pour cause, y a plus de sexe !

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- Toutes les histoires viennent de ce qu’on raisonne en hétéro…
- Mais où on va comme ça ? J’suis pour le naturel.
- Explique ?
- Qu’on bande chacun dans son camp, c’est épouvantable !
- Pourquoi ?
- Comment qu’on aurait des enfants ?
- Ah ! Parce que quand tu sors avec une fille c’est pour avoir un enfant ?
- Non, pas vraiment. C’est même pour pas en avoir…
- Tu vois !
- Tout de même, je nous vois mal, toi et moi…
- Ce serait très bien tu sais… Attends que j’te montre…
- Mais arrête… je vais t’en mettre une !
- T’es pas encore mûr. Dans deux ans peut-être, quand t’en auras trente ?
- Avant de me faire friser aux bigoudis, j’vais encore tenter ma chance de l’autre côté…
- T’es casse-cou !
- C’est mieux que casse-cul.
- Nous, on n’écrase pas les tomates, mon p’tit vieux…
- Question fruits et légumes… t’es plutôt l’épicier Côte d’Or. T’as la barre fourrée pralinée !
- J’ai pas le bigarreau sensible, moi ? Dis, j’ai pas le bigarreau…
- Prends pas ça mal. J’fais un compromis… J’vais tâter d’la gouine. P’t être qu’elle connaît Amélie Moresmo ?

25 mai 2004

Mickey contre Michael

Michael Moore, pour Fahrenheit 9/11, a obtenu la Palme d’Or au festival de Cannes 2004 .
Je n’ai pas vu le film. C’est un documentaire.
En principe, les documentaires en 35mm dans une salle obscure grand format m’emmerdent prodigieusement. Le Commandant Cousteau et Francis Perrin n’y ont rien changé.
Bowling for Columbine du même Michael Moore m’a tenu éveillé jusqu’au trois quarts de sa projection. Pourtant, il dénonce l’amour trop intempestif de l’Américain moyen pour les armes à feu et méritait toute mon attention. Mais, c’est ainsi.
Je trouve que le documentaire n’est pas fait pour le grand écran.
La télévision est son domaine et encore, par petites doses ou alors appuyé par des spécialistes dont il souligne le débat.
Le cinéma est fait pour raconter une histoire, pour faire rêver. Certes la vie de la crevette grise en mer du Nord a son intérêt, mais qu’on ne me vienne pas dire que cet intérêt passe par une grosse heure d’images de fonds marins et de commentaires sous-titrés.
A lire les commentaires, Michael Moore s’en prend cette fois à Bush junior.
Bon sujet. Ce président, est sans doute, parmi les plus néfastes qu’aient eu les Etats-Unis.
Là-dessus nous sommes d’accord.
Ce que je reproche au film – sans l’avoir vu, je précise – c’est l’accumulation de bandes anciennes d’actualité que nous avons tous – plus ou moins – regardées quelque part qui, collées bout à bout, font un documentaire-réquisitoire, du genre Columbine.
Je sais : j’irai voir ce film. Je sais que j’en sortirai somnolent tout en applaudissant Michael Moore pour son œuvre courageuse et en félicitant le festival qui a osé le récompenser.
Si ces documentaires ont une utilité, c’est en regardant ce qui se passe autour : les réactions des intéressés, la machine d’Etat, les intérêts financiers et les réactions de l’audio-visuel.

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La société Miramax de distribution de films et filiale de Walt Disney a refusé la distribution Fahrenheit 9/11 parce que les passages dirigés contre la famille Bush risquaient de compromettre les exemptions d’impôts de l’Etat de Floride où cette entreprise à ses bureaux.
Pour la petite histoire, c’est le frère du président, Jeb Bush, qui est le gouverneur de cet Etat.
Les intentions du Jury et de son président Tarantino ne sont pas nettes, non plus.. Personne n’est dupe quant aux intentions purement esthétiques qui auraient prévalu à ce choix. On l’a bien vu comme ce président du Jury – dont je ne critique pas les choix – a propulsé au premier rang des acteurs et des films que l’on n’a pas l’habitude de voir à Cannes.
Mais, encore une fois, c’est très bien ainsi.
Nul ne s’en plaindra.

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D’autant que Moore est un bon gros sympa. Il était avec les intermittents du spectacle qui protestaient sur la Croisette. Il soutenait le personnel du Majestic en grève pour un salaire décent et l’engagement ferme des femmes de chambre temporaires. Il a cassé la graine avec José Bové sur la plage municipale avec les « ignorés » du cinéma.
Il est bien Michael Moore. Il est bien.
Dommage qu’il ne se résolve pas à faire un vrai film du genre « Les temps modernes ». Il a tous les ingrédients qu’il faut. Le scénar, s’il en veut un, il trouvera dix scénaristes prêts à travailler pour rien. Les vedettes, avec un type qui vient d’avoir la Palme d’Or, elles se rueraient au casting. Les décors, l’Amérique profonde lui tend les bras, même s’il y était reçu à coups de revolver.
Je parie qu’avec les recettes escomptées, Mickey lui-même, ferait taire son patriotisme bushien pour plaire à l’Oncle Picsou.
Ah oui ! Evidemment, pour raconter une histoire avec des personnages qui se tiennent, il faut du talent. Peut-être, que Michael Moore en a aussi ?
Ce serait alors la véritable révélation, celle du festival en 2005, peut-être ?

24 mai 2004

La justice en question.

Il est bien révolu le temps où les magistrats condamnaient ou, plus rarement, absolvaient de manière souveraine et sans contestation possible.
Jadis se retrouvaient en cage innocents et coupables, les premiers, même absolument innocentés, restaient leur vie durant suspects par une justice qui ne reconnaissait pas ses erreurs et par le public qui pensait qu’il n’y a pas de fumée sans feu.
Le malheureux mourait dans l’opprobre générale sans que son innocence fût autre chose dans l’effort des Magistrats en sa faveur qu’une remise de peine ou une levée d’écrou à la sauvette.
Aujourd’hui encore, la Justice ne répare jamais, ou très mal, les dégâts accomplis par des mauvais jugements.
Le pourrait-elle, quand elle a détruit une vie ?
On prend conscience que la vérité judiciaire est, loin s’en faut, d’être la vérité tout court.
La justice prompte à condamner, ne l’est pas autant à réparer les préjudices qu’elle crée par ses erreurs. Si parfois elle en a l’apparence, la justice n’est le plus souvent qu’une caricature dans laquelle la confusion, le hasard et la mauvaise foi jouent les grands rôles.
On nous dit que les prisons sont pleines de gens qui sont en attente de leur procès.
Des recommandations du monde politique et des ministres de la Justice soulignent que la prison préventive doit être l’exception, qu’elle ne se justifie qu’en cas de dangerosité du prévenu, de sa possible disparition ou de la nécessité pour les besoins de l’enquête de le mettre à l’écart d’autres prévenus libres, de complices ou de témoins éventuels.
Il suffit de jeter un rapide coup d’œil sur les statistiques pour voir comme les magistrats instructeurs se moquent des recommandations sous le prétexte de l’indépendance de leur fonction. De sorte que de libre arbitre, on en arrive à l’arbitraire.
C’est cet arbitraire qui fait penser à la justice à deux vitesses, l’une pour les riches et les politiques, rarement en tôle et pour les autres, toujours en tôle.
L’affaire de mœurs d’Outreau, en France, où la mère violeuse de ses enfants a accusé de nombreuses personnes de la Commune de complicité de viols et de réseau pédophile, s’est avérée un sac d’embrouilles. Procureur et magistrats instructeurs sont tombés dans le panneau et ont accusés à tort des innocents.
Cela remet en question la fragilité des témoignages et le manichéisme de l’opinion publique
auxquels le juge d’instruction sait difficilement résister. Il y a pourtant des règles comme instruire à charge et à décharge. Ce sont les enquêteurs, entraînés eux-mêmes par leur conviction profonde qui par leurs rapports et les aveux qu’ils arrachent – souvent de manière tout à fait illégale et arbitraire – influencent et orientent le juge d’instruction.

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On a vu en Belgique avec le procès Dutroux ressortir la grande faiblesse de la justice au niveau de la qualité des hommes qu’elle emploie.
La Commission parlementaire qu’a provoqué cette affaire, a souligné ce que le public savait déjà : incompétence quasiment générale des services de police et de gendarmerie à l’époque rivaux, incompétence à force de secrets et d’entêtements imbéciles et incompétence au niveau des hommes. On pourrait presque en dire autant des magistrats, sauf qu’à leur décharge, les procédures en Belgique sont telles qu’ils sont accablés de travail et qu’il conviendrait d’en augmenter le nombre, en même temps qu’alléger les procédures.
Le public n’est pas là pour faire le boulot des politiques. Hélas ! le public n’est là que pour fournir le gibier de potence. Ce qu’il prend de plus en plus mal.
Aujourd’hui, à tous les niveaux, la machine judiciaire est débordée. La religion de l’aveu est battue en brèche. La magistrature redescendue de son piédestal qu’on lui construisait jadis dans des palais imités de l’antique, est vue telle qu’elle est : des fonctionnaires comme les autres avec le pouvoir de nuire ou de bien juger, des fonctionnaires avec leur plan de carrière, les intrigues et les convictions politiques.
Le public en a assez de gravir les marches interminables des hauts repères, non pas comme on gravit les marches à Cannes pour le festival, plein d’espoir et de séduction, mais accablé à l’avance, coupable ou innocent, happé par la machine.
Au lieu d’offrir des promotions aux magistrats et aux policiers qui ont commis de lourdes fautes, on devrait instaurer une Cour spéciale comme il y a une police des polices, afin d’éliminer les incapables et de faire voir ce qu’est la tôle aux corrompus.

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L’Ancien Régime est mort en 1789. Pas pour tout le monde.
Il serait temps de faire le ménage.
Là où l’Autorité n’est pas digne, juste et honnête, conduite par des gens intègres. Elle n’est plus qu’un simulacre.

23 mai 2004

Soir d’eurovision

Après La ferme, les Colocataires, le Chantier, d’une débilité profonde, après être descendus si bas, qu’y a-t-il à l’identique qui nous revienne chaque année avec la régularité d’une crise d’urticaire au moment des fraises ?
Le Concours de l’Eurovision, pardi !
C’était il y a une semaine. On dirait presque un siècle !
Classée en duo avec les Hollandais, la Flamande Xandee, a passé le tour éliminatoire, là où la Suisse, le Portugal et Israël, entre autres, ont été priés de chanter ailleurs… pour finir avant-dernière avec 7 points.

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Outre l’envie qu’on a de se flinguer après un quart d’heure d’insupportables flonflons, de déhanchements suggestifs et de vocalises dignes des premières leçons de l’Académie de Musique de Montegnée, il y a du ragoût au constat du décès de la chanson française.
Depuis 1999, les moutonnantes apparitions se font dans la langue que l’on veut. Si bien que l’anglais est quasiment obligatoire. L’Ukrainienne Ruslana Lyzichko n’y a pas coupé avec sa danse des Carpates en mini-jupe, cuissarde et bustier en cuir, la nouvelle tenue du folklore de là-bas à ce qu’on suppose. Sa danse sauvage « Wild dance » était interprétée dans un anglo-américain tellement bien imité des studios d’enregistrement de Liverpool qu’on se demande s’il y a encore une autre langue que celle de Shakespeare/Chandler en Ukraine ?
Devant l’anglomanie déferlante que peuvent faire les nouveaux Indiens d’Europe que sont les Français, les Allemands, les Italiens, les Espagnols et les Bataves ? A peine de la figuration. Je n’ose employer « intelligente », le qualificatif en serait surfait.
Comment arrêter la connerie militante qui submergera tôt ou tard l’audiovisuel laissant au spectateur d’eurovision un magma de fesses, de nichons et de cris progressivement incompréhensibles, même pour un habitant du Devon ?
Lui tourner le dos ?
Aller voir où souffle l’intelligence ?
Ce serait parfait, si l’intelligence soufflait encore quelque part.
Réformer l’usine à gaz de l’intérieur ?
C’est impossible.

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Les adolescents eux au moins ont compris la leçon.
Pendant que la ménagère de moins de cinquante ans plie sa colonne vertébrale aux courbures du canapé et que son « rude » compagnon s’entend ronfler (un bruit infernal dans l’oreille interne qui le réveille toutes les trente secondes), l’adolescent anémié et que l’on a perdu de vue depuis les débuts du désastre, se tape un rassis dans les cabinets en louchant sur Star Magazine qui détaille la frêle silhouette du prodige vocal ukrainien.
Comme quoi, dans l’éventail des plaisirs variés de notre civilisation chrétienne, on peut dire que cet ultime et antique délassement est encore le plus apprécié de la jeunesse.

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Lorsque, passés onze heures, le dernier résultat tombe et que Ruslana triomphe enfin, la ménagère de moins de cinquante ans et son « rude » compagnon se déplient non sans douleur et craquement des membres. Le fils est derrière eux depuis dix secondes, sur la chaise « tête de lion » la moins branlante de la salle à manger.
Croyant qu’il a vu la chose, la mère y va de son petit commentaire.
-… J’ai trouvé ça poignant – Mathurin tu m’écoutes ? – Ruslana est poignante…
C’est exactement ce que le jeune gaillard trouve aussi.

22 mai 2004

Transport en commun.

On n’a jamais vu autant de déséquilibrés qui courent les rues.
C’est la faute à personne ?
Si un peu : grande précarité sociale, déséquilibre et disparité des ressources, modification du mode de vie, emballement du « progrès » ?
Il se pourrait que les villes soient peu propices à stabiliser les bredins ? Quand on sait jadis, qu’il n’en existait pas plus d’un par village ! La ruralité avait du bon.
C’est fou les gens qui parlent sans interlocuteur dans la rue. Les logorrhées touchent une personne sur dix. C’est inquiétant !

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Fin d’après-midi dans le bus 21.
En face sur la banquette, une jeune femme dans les 35 ans. A ses côtés, un jeune homme victime d’un chromosome aléatoire.
Pas de sa faute, le pauvre.
Après deux tours de roue, notre jeune homme s’aperçoit qu’il est assis à côté d’une représentante du sexe.
On a beau être différent, on n’en est pas moins homme…
Envahi d’une soudaine pulsion, notre jeune homme se met à gagner du terrain sur la portion de territoire de sa compagne occasionnelle. C’est tellement gros et naïf que les habiles frôleurs habituels se seront bien marrés.
Une femme aujourd’hui ne s’en laisse plus compter. Oui, mais aller rabrouer un débile léger ?
Dans un premier temps, elle foudroie l’indélicat du regard. Puis, elle prend son parti et se tasse contre la vitre, les jambes repliées, les genoux au menton, dans la position du fœtus.
L’irresponsabilité exonère de la culpabilité. Tous ceux qui ont d’excellents avocats vous le diront.
Est-elle sortie prématurément de ce bus bondé ? Je l’ignore.
Aussitôt descendue, notre jeune homme se pousse à la place libérée. Libérant la sienne pour un homme dans la cinquantaine, barbu, en short et encombré de paquets informes. A première vue, il a basculé aussi de l’autre côté du miroir, tant il paraît inquiet, du genre scrutateur, l’œil mobile, tournant la tête d’un côté puis de l’autre sans rime ni raison, l’air furieux, farouche, disant à voix basse des mots dont nous ne percevons que des bribes.
Le jeune homme s’apaise dans une probable pollution du fondement, qui lui fait pousser des petits soupirs d’aise : « Oh oui ! Oh là là, c’est bon !... ». Soudain, son portable retentit. Il s’en saisit et illustre son incohérence de grands gestes qui contrarient son voisin. Celui-ci lui lance des regards furieux dans lesquels on devine sa pensée. « Qu’est-ce que c’est que ce fou ? » semble-t-il dire.
Le téléphoniste conclut en tirant une langue à son lointain interlocuteur qui n’en peut. Puis, il pousse sur l’arrêt du portable, comme une caissière débutante le ferait de la touche « à rembourser » qu’elle utiliserait pour la première fois..
La langue n’a pas plu et est perçue comme une injure par le type en short qui devient agressif. Il rumine une riposte et on ne sait pas ce qu’il en adviendrait, quand une dispute éclate à l’avant entre deux passagères sur une question de préséance pour une place.
Les deux s’intéressent. Qu’il existât plus insolites qu’eux leur tire des larmes de bonheur.
Celle qui pousse une gueulante est une dame corpulente dans la cinquantaine. L’autre est minuscule et est à l’âge où les bus sont gratuits.
N’étant pas à proximité, je suppose que le feu devait couver depuis la place Cathédrale.
On ne dirait pas comme ça, mais les fous n’arborent pas nécessairement leur différence sur leur chapeau.
La corpulente s’avère être une dépressive, n’ont pas que le diagnostic se fasse à distance, mais parce qu’elle le dit haut et fort.
En quelques arrêts, nul n’ignore ses maladies, ses tourments et ses mérites d’y résister.
On en est au détail de sa ménopause, quand elle descend à la Clinique Saint-Joseph.
Il était temps.
C’est le moment que choisit les Trompettes d’Aïda du téléphone du jeune homme pour retentir.
Le type en short du coup adopte le balancement du grizzli en cage.
Je me vois mal barré pour un arbitrage.
Je descends au premier arrêt au moment où les « Ça va ! Où que t’es ? » de l’un se couvrent progressivement des borborygmes de l’autre.
C’est lâche. Je sais.
Et si les gens sensés n’étaient plus majoritaires ?
Comment le savoir ?
On manque de statistiques.
Peut-être que les politiques attendent l’après élection de juin pour nous dire la mauvaise nouvelle ?
Le parti européen des débiles légers ?
On y arrive… J’adhère.

21 mai 2004

L’arthrite à soixante ans !

- C’est quoi l’attroupement ?
- C’est un congrès.
- Le congrès de quoi ?
- Le congrès des vieux !
- Tiens, i’ font un congrès, eux aussi… Pourquoi ?
- Pour faire avancer leurs idées. Parler entre vieux.
- I’-z-ont attendu 50 ans pour avoir des idées ?
- Non. Mais avant, au boulot, ils faisaient un travail con. Alors, fallait qu’ils soient cons pour réussir.
- C’est un point de vue… J vais y aller voir.
- T’as l’âge !

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- Il ne faut pas être membre ?
- Non. Il faut juste l’âge que tu as.
- Tu participes activement ?
- Je suis dans une commission.
- Quelle commission ?
- La petite.
- Tu vas faire ta petite commission ?
- Oui, plusieurs fois. Comme tout le monde.
- On fait la file aux toilettes ?
- Justement. On voudrait comme la caisse rapide du Delhaize, des WC à un colis par personne.
- Il y a un bureau ? Comment ça marche ?
- L’Assemblée délibère sur le temps que le bureau s’autoproclame.
- Si bien que ceux qui siègent ne sont pas élus…
- Exactement comme au MR et au PS.
- C’est vraiment moderne, dis donc.
- Evidemment pour être autoproclamé, il faut coucher ?
- C’est possible, mais alors sur option et sur rendez-vous.
- L’attente est longue ?
- Oui. Très longue. Parfois on attend pour rien.
- L’autre jour, une présidente de Commission a attendu huit heures à côté de celui qui couchait pour la place de vice-président.
- Et alors ?
- Au bout de huit heures, elle sent quelque chose de raide.
- Ils l’ont fait ? Il a eu la place ?
- Non, il était mort !

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- A part les WC, vous avez des revendications ?
- Oui. Nous voudrions aider les jeunes gens à la pension.
- Les prendre en charge jusqu’à la pension ?
- Non. Les aider à passer le cap quand ils ne travaillent plus…
- C’est pour dans vingt ou trente ans, ce que tu dis là !
- Non. C’est aujourd’hui. Un jeune chômeur, pour nous c’est un pensionné qui s’ignore.
- Préparer la retraite des jeunes…
- Exactement.
- Et vos rapports avec les partis ?
- Ils sont imaginaires comme le reste. Sauf pour deux vieilles qui en pincent pour Di Rupo.

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- Vous êtes jaloux ?
- Au contraire. Nous avons même trouvé un slogan pour leur Commission. C’est la Commission « gonflée à l’Elio » !
- Qu’est-ce qu’elles y font ?
- Ce qu’on fait place Sainte-Véronique. Une qui le tient, l’autre qui le…
- Après le congrès vous retournerez dans vos clubs pour jouer aux dames et à la pétanque ?
- Notre souhait serait de faire le syndicat des vieux.
- Pourquoi ne le faites-vous pas maintenant ?
- Nous avons demandé à la FGTB.
- Qu’ont-ils répondu ?
- Qu’il faudrait augmenter les cotisations.
- C’est tout ?
- Non. Ils ont dit qu’ils structureraient les chômeurs d’abord !
- C’est prévu pour quand ?
- Quand ARSELOR aura tenu ses promesses dans le bassin liégeois.
- Ah ! ils sont forts place Saint-Paul !

20 mai 2004

S’amuser où d’autres s’emmerdent...

On pousse au progrès là où à défaut d’en être un vraiment, ça épate.
Tel le mariage des gays.
Qu’est-ce que « cette avancée des mœurs » aura comme influence bénéfique sur le comportement citoyen ?
Déjà que le mariage entre hétéros était devenu passablement ringard !
Peur de la solitude, d’être sans enfant, de la précarité, de cette absence de cœur d’une société ultralibérale ? Les hommes qui préfèrent les hommes et les femmes qui préfèrent les femmes désirent que cela se sache et qu’on trouve des formules de célébration.
Admettons.
A part les gens des campagnes, plus personne ne fait attention à deux hommes qui se tiennent par le bras, ou deux femmes qui s’embrassent.
Et c’est bien ainsi.
Faut-il pour autant aller crier sur tous les toits qu’on est un peu ou beaucoup tapette ? Qu’on bande pour une copine et que la vue du sexe opposé fait vomir ?
Ne serait-ce pas plutôt qu’on est frustré de la plus grande liberté qui soit, à savoir celle de bien gagner sa vie dans un travail qu’on aime, à cause d’une société qui s’autodétruit par amour du profit. Alors, on s’invente des libertés accessoires de compensation comme le mariage homo.
On a assez ri du travail de gynécologue de l’amant classique, pour voir si du côté pénétration par l’anus, c’est tout aussi poilant ?
Pour ce cas d’homosexualité, c’est l’écrivain-philosophe Alain Soral qui a la parole, parce que, ce qu’il dit est non seulement marrant, mais juste. Et je ne vois pas pourquoi je me priverais du plaisir de vous le faire savoir :

« Ça me rappelle ce petit matin où, avec Vincent Dieutre, nous avions ramené une fille et un garçon dans son petit studio de la rue d’Ormesson… Alors que je prenais ma partenaire à l’ancienne, par les voies génitales mon vieux copain - qui n’était pas encore le Garrel des pousse-crottes – entreprit systématiquement d’enculer le sien.
« Et comme l’autre avait visiblement du mal à se détendre, il saisit, impatient, le premier lubrifiant qui lui tomba sous la main : un flacon de Mixa bébé ! Touillage, taraudage… le shampoing doux fit son office mais bientôt, à force d’aller et venir, une abondante mousse jaune se mit comme à fumer de l’orifice. Une mousse jaune à la merde tandis qu’à chaque sortie, son gland champignonnesque (tu étais bien monté Vincent) extrayait comme une excavatrice, quelques petits grumeaux…
« C’était déjà peu ragoûtant mais quand, après la petite fête, l’enculé se remit sur le dos pour récupérer, un demi-litre de jus d’étron liquéfié par le sperme lui dégorgea du cul pour s’incruster dans le matelas.
« Ça, plus la mousse et les boulettes, ça puait fort dans la chambrette, et je fus bien heureux de pouvoir vite rentrer chez moi pour dormir au sec ».

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A côté des lois, de l’égalité des genres et tout le galimatias qui glorifie la reconnaissance des différences, c’est aussi cela que l’on s’apprête à sacraliser. Il faut bien qu’on le sache. Les personnels politiques sont bien embarrassés. La seule perspective de passer pour être sans ouverture et sans largesse d’esprit, mais d’autre part comme trop laxiste et permissif, les condamnent à patauger dans la langue de bois, sauf quand on est pédé pur et qu’on s’assume où qu’on se veut révolutionnaire et qu’à défaut de rejouer la scène du Potemkine, on s’enveloppe dans les plis de la bannière – résolument au vent – de la gay pride… Je savais qu’on était dans une société de merde. Je ne le savais pas à ce point-là ! Ceci dit, cela m’arrange. Scatologiquement, personne ne pourra désormais me faire le reproche du mot vif, du blasphème gratuit, de tous ces petits guignons de la chair, comme disait Rabelais, que les gens vite effarouchés jettent à la figure des autres. Au moins, les mots, braves gens, ne sentent pas !

19 mai 2004

Responsables ou coupables ?

Les temps n’ont jamais été aussi vulgaires et ceux qui ont la parole, jamais tant eu la bouche en cul de poule, avec cet air effaré du type qui se fait entuber par surprise !
Alors qu’au moindre mot de travers, la moindre critique d’Israël, la quatrième génération après l’holocauste vous saute sur le paletot et vous traînerait devant les tribunaux pour antisémitisme.
C’est ce qui est arrivé à trois malheureux qui s’étaient permis la critique de Sharon et les sharonniards qui poursuivent la destruction d’habitations de Palestiniens.
Les ligues, Avocats sans frontières et France-Israël, pour une fois, sont rentrés bredouilles, le tribunal de Nanterre les ayant même condamnés à payer les dépens et les dommages et intérêts à la partie adverse.
Interdire aux gens d’aller au fond de leur pensée, c’est s’arrêter à des convictions « généralement admises », c’est-à-dire conventionnelles. C’est le résultat des « Lois » restreignant le pouvoir de dire, rapetissant aux normes, castrant l’imagination.
Il ne suffit plus de dire à l’antisémite qu’il à tort – là-dessus nous sommes tous d’accord - il faudra encore que le « bon » citoyen soit pro Israël !
C’est une attitude suicidaire. On voit le résultat en Belgique avec les progrès de l’extrême droite.
On en est à la publicité maladroite du genre « Ils ne passeront pas » en pensant au Vlaamse Blok.
Mais si, ils passeront à cause de vous, parce que vous êtes stupides et qu’en croyant bien agir vous empêchez vos adversaires de s’exprimer, comme je ne sais plus quel énergumène qui voulait interdire les partis d’extrême droite !
C’est qu’au nom de la liberté, ces maladroits supprimeraient la liberté !
Mais, il n’y a pas que sur les mots que l’on dérape.
D’une extrême rigueur quand il s’agit de la présomption d’antisémitisme, l’Autorité semble moins à cheval pour sanctionner le racisme, celui de tous les jours, sournois, rampant, celui qui touche les gens de couleurs, venus d’Afrique, du Maghreb ou d’ailleurs, qui vivent ici, dont certains sont citoyens belges et qu’on traite si souvent avec tant de désinvolture et de mépris, qu’il ne s’agit plus de mots, mais de faits au quotidien.
Difficultés à l’embauche, au logement, moqueries sous cape, plaisanteries qu’on n’ose plus faire sur les Juifs, discrimination grossière dans la vie de tous les jours.

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Là, pas de LICRA, d’Avocats sans frontière, de Belgique-Israël, rien que du vrai, sans faux semblant, ni rappel à l’holocauste pour un oui, pour un non.
Il ne s’agit plus ici des horreurs débitées par quelques nostalgiques du IIIme Reich, des rodomontades d’immatures collectionneurs des photos d’Adolphe ou de voyous dégradant des sépultures, mais d’un racisme ancré depuis toujours chez certains vieux « Belges » qui date du temps des Colonies, quand le colonial bottait le cul des « nègres ».
De celui-là, beaucoup plus important que l’autre, personne n’en parle et pour cause, les gens qu’on discrimine ne sont présents en rien, n’ont aucune influence dans la presse et à la télé et n’ont pas cette persuasion influente qu’a depuis toujours la diaspora des autres. La semaine dernière, sur Europe n°1 à l’occasion de la manifestation contre l’antisémitisme à Paris, un organisateur a même été jusqu’à minimiser le racisme par rapport à l’antisémitisme qu’il lui paraissait plus urgent à traiter que l’autre !!!
Alors ?
On voit très bien où veulent en venir les ligues et les organisations qui s’agitent à chaque fois qu’un voyou ou un branque commet un acte répréhensible à l’encontre des Juifs, agitations qui va au-delà de la sanction justement méritée.
Ils voudraient tout simplement que nous accréditions la thèse de Tel-Aviv du bien fondé de la guerre qu’ils mènent contre les Palestiniens.
A défaut de quoi, certains n’hésiteraient pas à nous dire antisémites !
Ils voudraient nous faire croire que cette guerre, c’est celle de l’Occident contre les infidèles.
Bref, ils voudraient que nous prenions fait et cause pour ce massacreur qu’est leur premier ministre Sharon.
Je ne crois pas qu’en travaillant aussi grossièrement sur les consciences libres qu’ils y parviennent. A leur place, je me méfierais des excès. A force d’en remettre, ils vont perdre toute crédibilité. Ils risquent que nous les abandonnions empêtrés dans leurs problèmes, alors qu’ils ont besoin de nous, comme les palestiniens, pour les aider à faire la paix dans l’honneur et la dignité pour tous.
Le demi-succès de Paris est à la mesure de l’exaspération qui gagne les foules aux battages médiatiques de cette cause, pourtant si élémentaire, si juste et à présent si maladroitement défendue. Cela ne sert à rien de culpabiliser les gens. Les Français, comme les Belges - dans leur grande majorité - ne sont pas antisémites. Ils sont simplement irrités de l’insistance et de la suspicion des Associations.
Ils n’ont pas à s’excuser d’une situation dont ils ne sont nullement responsables.

18 mai 2004

Des nus et des morts !


C’est une époque assez leste.
Malgré une chape de plomb sur les mœurs des petites gens (si la vertu fout le camp dans le peuple… où on va ?). Ailleurs, c’est plutôt la java.
Mais tout de même ! Trimballer les prisonniers à poil d’une cellule à l’autre, même à Bagdad, choque encore…
Des geôlières de la Police US les promènent dans les couloirs un collier autour du cou. Kiki fait ses besoins devant les caméras avant de rentrer au chenil. L’album des photos souvenirs de famille s’épaissit.
Ils avaient déjà des problèmes avec Allah, ces enfoirés de sudistes, la nouvelle réputation de la prison d’Abou Ghraïb, où, il y a un peu plus d’un an, Saddam torturait encore, ne va pas arranger les choses entre occupant et occupés… Sharon en sait quelque chose à quelques centaines de kilomètres de là, lui qui s’est mis à démolir les maisons de Gaza pour faire le mur.
Si les stratèges US croient qu’avec des raisonnements du genre : « On leur en foutra des tapis de prière à ces snippers ! » - dit avec cet accent traînant du sud que détestent tant les Juifs new-yorkais dans les revues de Broadway – l’état-major d’Irak va trouver l’ouverture !
Le bruit court à présent, contrairement aux déclarations présidentielles, qu’un repli accéléré d’Irak est possible ?
Franchement, le guignolo de Rome, Berlusconnerie et les autres alliés moralisateurs de l’Europe américaine se trouvent dans de beaux draps, depuis cette politique insensée et incompréhensible !

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Il a fallu que ces passionnés de l’Amérique s’engagent au moment où le plus délabré des Présidents de la Maison Blanche tenait la queue de la poêle à nous frire de la démocratie !
On comprend les socialistes espagnols qui se tirent sur la pointe des pieds.
C’est la poisse pour ceux qui restent.
Ce qui manquait pour faire « complet » en Irak pend sous le nez de Bush junior : le départ précipité des personnels de la reconstruction, les « altruistes » qui ont signé des contrats juteux . Même les triples salaires ont des doutes… On a beau aimer l’argent, si c’est pour que la veuve prenne un amant le jour de l’enterrement avec le cash-flow rapatrié avec le corps… L’Amérique profonde préfère le Bayou et la caravane en unique résidence…
Reste plus que le combat économique interne de Bush pour sauver la mise aux élections prochaines.
Nos ébaubis s’exclament ! Le MR n’en revient pas ! L’Amérique repart au PNB avec une croissance inégalée en Europe depuis dix ans. 5 % de chômeurs seulement aux States, alors qu’en Europe, la moyenne est de 10 % !
Même ça, c’est du pipo.
Les cadres de notre économie ne comprennent rien de rien. Pour le coup, ils ont oublié que ce redémarrage est le produit des dépenses militaires, du formidable effort de guerre… le PNB est gonflé par les rallonges du cow-boy de Washington pour sa guéguerre. (30 milliards de $ encore la semaine dernière), le dernier déficit n’en finit plus d’être le record du précédent, en attendant d’être supplanté par le suivant : 46 milliards de déficit en mars, ce qui porte à 131,5 milliards de $ le déficit depuis le début de l’année.
Cette activité pour la guerre engendre une demande accrue de pétrole. Les spéculateurs en profitent pour faire grimper les prix du brut partout dans le monde.
Si on en arrive chez les économistes de haut vol à confondre économie de guerre et prospérité !
C’est un couplet qu’ils devraient tenir devant les mères et veuves de guerre, pour voir s’ils seraient aussi bien accueillis que dans nos gazettes libérales.
Au moins, puisque on galope vers le trou noir – ce n’est pas moi qui le dis mais Michel Barnier le ministre des Affaires étrangères de Chirac – ce sera dans la prospérité et la bonne humeur.
C’est comment un mort prospère ?

17 mai 2004

Célibataire et pas fier pour autant.

Ce pourrait être un petit catalogue de toutes les vannes qui attendent le dragueur. C’est devenu a contrario un hymne au célibat.
Tous les mâles le savent bien, chez les grands fauves, c’est à l’heure du crépuscule au bord du marigot qu’ils ont des chances de trouver la femelle de leurs rêves.
L’abreuvoir a toujours été le lieu de rassemblement pour les accouplements futurs.
Déjà s’accommoder pour la discothèque, plus crado que d’habitude ou sapé adjoint de direction, la corvée commence.
On n’y est pas encore, que se joue déjà la comédie.
Et ça ne fait que commencer.
Dans le combat sans pitié pour la conquête d’une femme, on va en baver.
On le sait. Ce n’est plus la tête qui commande. Le PC est descendu d’un étage. Elles nous tiennent déjà par les couilles. Elles le savent. Elles ne les lâcheront plus.
Dans le camp d’en face, séduire quand on fait sept ou même six et demi sur l’échelle du désir, il n’y a pas d’investissement, ni préparation, contrairement à ce qu’on raconte.
Pour les malheureuses qui sont en dessous de la moyenne, c’est plus dur. C’est déjà un métier.
La discothèque c’est l’endroit parfait pour les belles gueules sans cervelle. Le bruit couvre tout. On peut dire les pires conneries, tant qu’on a le sourire « cheese », ça passe.
Le physique est donc d’une extrême importance.
De toute manière, il va falloir chloroformer le papillon qu’on a coincé dans ses filets.
Admettons qu’à la discothèque, il ne se soit rien passé.
Pour le premier rendez-vous, on choisit un endroit plus calme, une cafétéria, un bar discret.
Le mec arrive ému, stressé et le cœur battant.
Surtout, il ne doit pas montrer d’angoisse, être à l’aise… trop, cela ferait le fat rompu aux aventures. C’est un rôle de composition.

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Au moment où il serre la main de la jeune personne, c’est la première fois qu’il la voit au grand jour.
Le mec redoute trop un regard moqueur qui veut dire « non », pour ne pas avoir brusquement l’envie de foutre le camp.
Certains le font, pour se traiter de « pauvre con » chez eux, à refaire la soirée.
La fille est sur le velours. Elle n’a rien demandé. Elle n’attend rien apparemment. C’est à elle de décider si elle veut bien qu’il lui touche le bras, l’embrasse ou passe la main sous la table.
Maîtresse du jeu, elle est la souveraine qui reçoit un vassal. Elle peut aussi bien le jeter, que l’amener chez elle, le faire prince ou clochard.
Au premier rancard, la fille montre, en général, qu’elle n’est pas « facile ».
Elle repousse les premières tentatives, regarde sa montre, feint la distraction. Elle ne parle pas trop. Elle craint de passer pour une gourde ou une bavarde. Pourtant, l’entendre parler soulagerait notre homme. Une fille qui vous étourdit de paroles, c’est une bénédiction, quitte après, à trouver cela insupportable.
C’est au gars à meubler.
C’est alors qu’intervient la culture.
Pourquoi les dragueurs imbéciles ne quittent-ils jamais les discothèques ou leurs bagnoles aux baffles supergonflés ? Parce qu’ils savent que pour sortir du silence, il faut avoir autre chose qu’une belle gueule. Ce qu’ils n’ont assurément pas.
Les cloches qui ont cru le contraire, en ont été pour leurs frais.
Idiots, mais pas trop, ils se sentent largués ou alors la fille est conne.
Ceux qui ne veulent pas se « prendre la tête », navigueront dans le vacarme protecteur, moteur ronflant, musique en tête… si possible jusqu’au lit, où il faudra quand même l’ouvrir, ne serait-ce que pour dire « contente ? », si ce sont vraiment des imbéciles.
Bien sûr, le but reste toujours le même, arriver au lit le plus vite possible. Certains doivent investir lourdement : restaurant, spectacles. Ah ! les silences des entre deux plats… Elle vous attend au tournant. La faire rire devient un objectif premier. Pendant qu’elle minaude, c’est de l’esprit qu’elle attend de vous. Est-elle pour la plaisanterie au premier, second degré ? Est-elle charitable ? Féroce ? Se méfier des propos salaces qui même s’ils rencontrent chez elle un écho, ne sera qu’intérieur et restera inexprimé. Vous en serez pour vos frais, et vous vous demanderez si vous n’avez pas été trop loin.
Vous montez enfin pour un dernier verre. C’est dans l’intention de baiser.
Au moment de monter, sans qu’elle le dise, elle en a envie aussi.
Seulement voilà, tout reste à faire. La situation est des plus incertaines. Votre sort ne sera définitivement fixé que s’il y a pénétration. Un rien peut faire capoter l’entreprise.
Qui n’a pas vécu le changement d’avis en dernière minute… remord soudain, alors qu’elle aurait pu l’avoir après… brusque souvenir qu’elle a un slip de trois jours… confession difficile, comme un enfant caché… en instance de divorce… parents qui dorment dans la chambre à côté, celui-là n’a rien vu !
Au bord du lit, on est encore gentleman. Repoussé, l’amant potentiel doit se rhabiller et montrer un air détaché, comme s’il n’était pas venu pour faire l’amour.
Bref, on en connaît qui se sont retrouvés en chaussettes sur le palier avec Popaul en bandoulière !
Pourquoi hésitent-elles tant avant de passer à la casserole ?
C’est que l’acte accompli, elles perdent leur pouvoir.
Le mec tremblant l’instant avant, se transforme en maître. C’est si souvent un désastre, pour la femme, que la plupart d’entre elles ne couche jamais ou le plus tard possible, en se méfiant d’une installation définitive de l’intrus trop conquérant.
Les femmes d’aujourd’hui réussissent très bien leur vie sans nous. Nous avons plus difficile qu’elles à en faire autant. Notre maladresse à faire le ménage et nos besoins sexuels tyranniques, nous handicapent.
Chaque célibataire sait cela.
Les années rendent difficile la chasse aux filles. Si après quarante ans, vous ne savez toujours pas vous en passer, alors mariez-vous.
Ce n’est pas toujours pire que le célibat.

16 mai 2004

On les a assez vus !

Comme l’opinion se lasse !
On est toujours en pleine affaire Dutroux et, cependant, dans la salle d’audience que l’on disait trop petite, chacun à présent y tient à l’aise.
Les journalistes se sont égayés, quitte à revenir pour l’heure des verdicts.
Le festival de Cannes, la récente décapitation d’un Américain en Irak, l’ouverture fin du mois des internationaux de Roland Garros, les Jeux d’Athènes qui se profilent…
Les télés belges, prises au piège, ne peuvent plus se défiler. On sent pourtant la perte de vitesse, ne serait-ce que dans les temps consacrés.
S’il traînaille, ce procès, il faut en attribuer la lenteur à l’hésitation encore perceptible entre deux opinions, si, oui, ou non, Langlois est passé à côté du réseau… si oui, ou non, les journalistes, chauds partisans de l’acte isolé d’un psychopathe, sont tous, ou presque, à côté de la vérité.

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Sans attendre le verdict, on pense que le groupe des trois sera condamné à de lourdes peines. Malgré les témoins de moralité, Lelièvre, le bon petit jeune homme, le condisciple modèle, Martin, la virago repentie et impassible, quoique bonne élève, gentille et douce, friseront le maximum. Quant au triste héros d’une pièce qui commence à être longue, Dutroux écopera de ce que les Lois ont fait de mieux en matière de répression du crime.
Ce ne seront pas les plaidoiries qui changeront grand-chose à son sort.
En se penchant sur le cas Nihoul, la Cour arrive au nœud non tranché de l’affaire.
Est-il complice, ou pire, commanditaire de Dutroux ?
Contrairement à Lelièvre, Nihoul est un noceur répugnant. Son casier atteste de la persévérance de ses vices et de son désir de remplir son compte en banque par tous les moyens.
On a assez dit le jouisseur, le partouzeur, la balance, le collectionneur de femmes, le petit délinquant, puis l’escroc.
Comme je cite beaucoup Musset ces temps-ci, passez-moi la fantaisie de cet épigramme :

Par propreté, laissez à l’aise
Mordre cet animal rampant ;
En croyant frapper un serpent
N’écrasez pas une punaise.

C’est là toute la difficulté à juger cet homme.
« Le bon jeune homme » a aidé Dutroux dans ses entreprises criminelles. Quelle qu’ait été sa jeunesse sans problème, à l’âge d’homme, cette petite tête d’ange a commis d’horribles forfaits. A l’inverse, Nihoul est un dévoyé incorrigible. Sa gueule de face et de profil, mal rasée à la judiciaire est la parfaite caricature du coupable type.
Mais est-il pour autant le dégoûtant violeur que Dutroux prétend qu’il est, ce chef au nom duquel, Dutroux a subjugué les enfants, noyés leur conscience débutante dans ses mensonges pervers ?
Cette dernière affaire dans l’affaire, résolue, il ne restera plus qu’à renvoyer à l’obscurité pour toujours, le trio ou le quatuor si, vraiment, Nihoul s’est mouillé et que Dandoy n’y aurait rien vu.
Qu’on n’en parle jamais plus, sinon dans la nécrologie des prisons.
A moins que, dans dix ou quinze ans, un nouveau Melchior Wathelet à la mémoire courte, ne vienne remettre en selle ces incomparables assassins !
Les hommes politiques sont si faibles… si plein de pardon…

15 mai 2004

Quand popaul pioche guimauve

- Ce type, auquel tu me compares, que t’as rencontré en ville et qui t’a fait d’ l’œil, c’est qui ?
- Je devrais pas le dire, toi qu’es jaloux, qui te crois tellement supérieur, tu tomberais de haut… ton amour-propre.
- Attends, tu me dis qu’il t’avait refilé sa carte de visite… que je me souvienne…
- Oui. C’était pour venir voir ce que je fais…
- Laisse-moi deviner ? Parmi les phénix qui matent ton cul et qu’on connaît… les Montgolfier de la quéquette… ceux qui viennent bouffer à l’œil… ruinent la carpette et oublient de tirer la chasse du WC… enfin nos amis… C’est l’un d’eux ?
- Ne compte pas sur moi pour te renseigner. Je te signale que ceux que tu n’apprécies pas, d’après ce que je viens d’entendre, ne sont pas mes amis, mais les tiens…
- Dis au moins, je le connais ? …après je ne te demanderai plus rien. Parole !
- Oui.
- Je l’ai vu souvent ?
- Tu me dis que tu ne me demanderas plus rien et voilà la deuxième question…
- Donc, je le connais.
- On peut le dire comme ça…
- Je vois qui c’est. L’autre soir, on a croisé devant la banque, le barbouilleur d’académie. Tu te rappelles son vernissage ? Comment tu l’appelles encore… Grolink… Grommelink
- Vlaamink
- Voilà. Vlaamink… Il t’a dit bonjour, pas à moi, un parfait goujat. Je te regardais du coin de l’œil. Tu as rougi jusqu’à la racine des cheveux. C’est lui ? Hein ! c’est lui ?
- Non. Voyons…
- Si c’est lui. D’ailleurs il a le profil. Il joue aux cartes du matin au soir, boit comme un trou et sa femme a l’air d’une clocharde…
- Puisque je te dis…
- Je le savais. Je ne sais pas pourquoi, mais quand j’ai vu que tu piquais un fard…Ça a été le déclic. On peut dire que, comme épave, tu as touché le gros lot… Comment a-t-il fait pour te séduire, accroché du matin au soir au comptoir ? Il doit avoir une de ces dégaines au lit ! Je parie que ses caleçons sont pas propres… qu’il pue des pieds !
- Non, mais, t’as fini ? Puisque je te dis que c’est pas lui.
- T’as quand même eu une aventure, dis, on rougit pas pour rien.
- Puisque tu parles du jour où l’on s’est croisé… oui, avant, j’avais eu un moment de faiblesse…
- Je l’aurais parié ! Une liaison ! Tu as eu une liaison avec ce type… Toi qui me disais que sa femme te faisait pitié !... Ça continue, hein, avoue..
- C’était juste une fois… il avait insisté…
- Toi, on insiste crac, c’est fait. On ne dirait pas à te voir… tu sais pas dire non !... T’es salope rien que pour faire plaisir, en somme ?
- Tu vois comme tu es ? On est sincère avec toi… Tu vois comme tu me traites pour un moment d’égarement !

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- Comment c’est tout ? Tu m’avoues avoir une liaison avec ce type et t’as eu qu’un moment d’égarement ! Mais pour coucher, rien qu’une fois, t’as eu le temps d’y penser, de te saper bandante avant de répondre que tu serais à l’heure dite à l’hôtel… T’as eu le temps de réfléchir pendant le trajet… Où il est le moment d’égarement ?
- Non, je ne mets pas cela à rien. Je dis que c’était une erreur de ma part. Qu’on s’est vu une fois. C’est tout, point.
- Mais alors, si c’est pas lui, c’est quelqu’un d’autre ? Pourquoi tu ris ?
- Je ris parce que tu me fais rire. C’est presque « si ce n’est toi, c’est donc ton frère ».
- Il a un frère ? Tu couches avec son frère !
- Il ne doit pas avoir de frère…
- Mais alors, c’est quelqu’un d’autre ? T’as une liaison avec un type que je connais et ce n’est pas cet abscon pseudo réaliste…
- Oui.
- Quoi oui ? T’as une liaison ?
- Je dis oui, ce n’est pas ce peintre abscon.
- C’est qui alors ?
- Tu ne vas pas recommencer ?
- Ne viens pas me dire que c’est… Non ! Ce n’est pas lui, ce serait énorme… Serait-ce possible !
- De qui veux-tu parler ?
- Mais, celui qui pue de la gueule… Jean-Pierre, le maquereau des pensionnées de la maison de quartier !
- Tu avais dit une question, une seule !
- Cet enfoiré qui copie les mots du dictionnaire, qui se fait la raie au milieu et qui s’est laissé pousser la barbe ! Ce salaud s’était pas gêné devant moi... i’ t’matait comme si j’étais pas là !
- Ne compte pas sur moi pour dire oui ou non.
- C’est un ancien indicateur, une balance… Ce mec est pourri…
- Et alors ?
- Il a au moins dix ans de plus que toi !
- Parlons-en, toi tu en as vingt !
- …Il rentre plus que dans une bétaillère… les bus le prennent plus…
- T’as pas regardé ton ventre ?
- Quand on vous saura ensemble, quelqu’un pourra dire de ta liaison avec ce pachyderme :
« Comment s’appelle-t-elle encore celle-là… tu vois qui je veux dire, la barbouilleuse ? La Pouffe du patapouf ! »
- Tiens tu me fais pitié. Tu t’es trompé avec Jean-Pierre exactement comme avec Vlaamink. Si tu veux le savoir, voilà six mois que c’est fini.
- Quoi avec Jean-Pierre ?
- Oui, même que ça a fini trois fois et que ça a repris à cause de toi !
- A cause de moi !
- Oui. Avec ta jalousie, tu me suivais partout, pour me venger, ça a repris…
- On peut savoir pourquoi tu rompais ?
- La première fois, c’était à cause de cette ancienne commerçante qui faisait son linge et pas que son linge… la deuxième, je te sentais sur mes talons et je me suis dite que fatalement, tu allais nous surprendre et ça m’angoissait… la troisième, parce qu’il fumait trop, que ça empestait le tabac, même au lit et qu’il revenait sur des histoires comiques que tu avais racontées la veille. J’ai pas résisté. Je l’ai plaqué.
- Sur nos quinze ans de mariage, combien diable as-tu eu de liaisons ?
- Non. Tu vas pas poursuivre sur le sujet !...
- Pourquoi, il est trop vaste ? Il faudrait lui consacrer un cycle ? plusieurs tomes ?...
- Je te signale que c’est au moins la vingtième question que tu poses, alors qu’il ne devait y en avoir qu’une seule.
- Attends. Je ne te pose plus de question. J’ai trouvé ! C’est ce type qui se teint en blond et qui laisse tomber ses cheveux sur les épaules comme une gonzesse ?... qui se promène avec des pantalons de terrassier et les ongles sales ?… qui vit d’expédients et qui touche à la mutuelle et au chômage en même temps ?… qu’on a vu une fois et que tu m’as présenté comme un ami d’enfance, un ancien footballeur d’Ougrée-Attraction ! Est-ce qu’il n’a pas été plaqué tout de suite après son mariage, alors qu’elle avait un polichinelle dans le tiroir ?
- Et alors ? Tu es bien cocu pareil ! T’as un enfant pareil…
- Donc, c’est lui. J’en suis sûr !
- A quoi t’en es sûr ?
- Il a encore une plus sale gueule que les deux autres ! Où tu vas les chercher, parole ? aux alcooliques anonymes ? à l’asile de nuit ? Fais attention aux morpions ! Et puis, c’est un con… oui, drôlement con…
- C’est un comble ! J’hésitais avant de te le dire, mon pauvre Fernand…
- Dis-le, nom de dieu ! dis-le !
- Quand on bande plus, on ferme sa gueule, mon pauvre vieux. C’est la loi du genre. Capito ?

14 mai 2004

Les Tontons tontine

- Les Tontons tontine m’font marrer. …ont bossé comme des sourds jusqu’à quarante balais. …ont mis à gauche tout ce qu’ils ont pu. …ont un appart avenue de Beco, derrière Flagey… et quand sonne l’heure, se tapent un rassis au lieu de baiser !
Ah ! ces poires blettes… ça voudrait signer d’l’onzième doigt et ça sait même plus comment c’est la crampe ! …s’i’ pourront dégainer façon John Wayne. …ça les burine de l’intérieur… les repousse en plateau ciselé marocco... les rétame !
L’autr’ jour, j’en rencontre un. …une de ces gueules estampillée 1962, plein sur le retour. Lui, on est sûr, à 20 mois déjà, faisait fuir sa mère… pouvait sortir qu’le soir sous un grand chapeau… sans quoi les gniards lui balançaient des pierres.
V’là que le démon fatal le prend. Frémissant du grelot, c’est son popaul qu’exige.
J’veux d’l’amour qui dit en duo avec Charlebois ! Son désir le rend moite… I’ pisse ses suints de partout.
V’là Tonton tontine qui tapote ses désirs sur la Toile. Une hors Schengen, instruite, belle, élégante et tout, lui répond… C’est inespéré qu’elle veuille bien du sagouin.
Le mec s’emballe. Comme i’ croit savoir mieux écrire que baiser, il lui envoie de ces lettres enflammées à faire reliure Loanna, pourtant qu’est difficile sur les troubadours qui montrent pas leur chtibre. I’ peut plus dormir… Arrête plus d’se poigner !… L’allure à laquelle la pauvre mère à Tonton change les draps… rapport à l’amidonnage intempestif…
Il délire, s’estomaque, s’essouffle. Sa mère qui l’a toujours connu albinos s’inquiète de sa pâleur ! Les yeux passent à rouge rubis. Sa peau pèle plein décembre. La douleur le rend si laid, qu’au bureau on l’isole, derrière les chiottes…
La hors Schengen qu’est déjà en bout de piste, qui voit plus que le hublot du retour au pays et qui s’accroche aux treillis, voit en cette flaque à pu son bienfaiteur. Elle surmonte son dégoût et accepte de se vendre au bosseur acharné, au grippe-sous de la délivrance.
…du donnant donnant, honnête, non ?
Du coup v’là les valeurs anciennes de l’Etrusque qui r’montent… Le fruit de son travail lui plombent la joie. Comment qu’il a souffert pendant vingt ans pour acheter ces quatre murs, retrousser ses pantalons bord de plage à La panne, et l’hésitation chaque année pour un tour de pédalo quand ses collègue s’envoyaient des nymphettes à Majorque !
Sa vie merdique lui vient dans la gueule comme une merde de pigeon… Ce à quoi il n’attachait plus d’importance quand la quéquette le tiraillait, reprend d’la vigueur !

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Quasimodo court à la confrérie des aspics de la quarantaine, chaussée d’Ixelles, dans un bistrot où les glaces reflètent pas d’image. Un club de baiseurs sur plan mensuel, des phalènes nocturnes qui sortent pas la nuit… ça se comprend, ça s’ausculte… on se demande même pourquoi ça s’encule pas ? Ça ficherait la paix aux dames…
Un dit ceci, un autre cela. Certains ont de l’expérience. Un affreux s’est fait dépuceler par une sœur de sa mère, qu’avait cinquante ans à l’époque où il en avait trente.
C’est un altruiste… I’ fait profiter de l’expérience…. Comme elle l’avait bien profond et charnu… et comme sur son lit de mort, après une dernière passe, comme elle lui a fait promettre en famille « Te marie jamais, bijou… jamais ! ».
Après ce témoignage, vingt fois entendu, pourquoi Tonton pourrait pas baiser gratos ?
Alors, les stratèges évoquent : concubinage, expérience en couple, jusqu’à l’arme suprême : la tontine…
Tonton, tontine qu’i’chantent tous les brèche-dents de la nouba des rances.

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Ce bidule, cette tontine à la con, qu’est plutôt faite pour garantir leurs nougats, mettrait la fille à la merci de ces goules, au point que les fumiers en feraient leur esclave.
Le pied pour les nabots du sexe !

Moi je dis à ces pauvres filles, méfiez-vous des Tontons tontine. I’ se contentent pas de s’être pourri la vie pendant quarante ans, il faut encore qu’ils pourrissent la vie des autres.
Et celles qui, par chance, astuce ou pipes variées, surmontent leur dégoût, acceptent d’enlever leur slip face aux martiens de la drague et arrivent au contrat devant l’Officier de l’Etat-civil… qu’elles se montrent pas reconnaissantes pour un sou.
Qu’elles se transforment pas en servante des Hauts du Hurlevent… qu’elles les saignent ces porcs comme ils le méritent et, après avoir pris un max, ou mieux avoir vidé la caisse, qu’elles se barrent avec le plombier ou le facteur, enfin avec n’importe qui.
Elles auront bien mérité de recevoir les honneurs des vrais voyous. Eux au moins ont de l’honneur et savent plaire aux dames.
Belles étrangères, je vous baise les mains et autre chose, si le cœur vous en dit, dans le regret où je suis, de ne pouvoir vous marier toutes et d’emmerder tous les officiers d’Etat-civil de ce foutu pays.

13 mai 2004

La démocratie à pied d’oeuvre.

Drôle de manière de célébrer la démocratie dans les prisons de Bagdad !
Revenant sur l’affaire des brutalités des Armées de laquelle j’en avais conclu que toutes les Armées se ressemblent en temps de guerre j’avais écrit à propos du IIIme Reich que les crimes l’étaient sur ordre de la Chancellerie et qu’il fallait mettre ce cas à part.
Aux dernières nouvelles, les exactions de l’Armée américaine en Irak relèveraient d’un ordre des Unités de renseignement initié par l’Etat-major, avec la bénédiction du Pentagone et la complicité implicite de la Maison Blanche.
Ça ne vaut pas la guerre totale d’Adolphe, mais c’est quand même plus grave que l’expression sadique de quelques GI.
Une lamentable affaire crapuleuse devient presque un crime d’Etat.
Si c’est cela la vérité, voilà les Etats Unis d’Amérique ravalés au rang peu glorieux d’Etat voyou, en symbiose avec l’ancien régime de Saddam Hussein et l’Israël de Sharon.
Les explications de Bush et ses regrets auraient dû se conforter de la démission de Donald Rumsfeld. C’est le Président lui-même qui n’a pas voulu que saute son fusible en espérant que les conclusions de la Commission blanchissent son Secrétaire à la défense. Si cette Commission indépendante de la Maison Blanche implique Rumsfeld, cela voudra dire que le Président devait être au courant de la manière dont son Armée obtient des renseignements à Bagdad.
Ne jouons pas les hypocrites. Tous les crimes ne sont pas commis sur ordre dans une Armée en guerre, mais le sort réservé aux prisonniers susceptibles d’informer des mouvements de troupe ou, dans ce cas, d’indiquer des caches d’armes et des nids de résistance, est celui que les photos prises dans les prisons de Bagdad nous montre.

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Les techniques d’intimidation, l’humiliation de la nudité, la cagoule, le chaud et le froid, l’entassement, l’isolement ont été pratiqués depuis des temps immémoriaux. Il existe des vade-mecum revus et corrigés par la Waffen SS, augmentés des addendum de l’Armée française en Algérie, des expériences vietnamiennes du Corps des Marines, peaufinés par Tshahal avec l’expert Sharon, sans compter les raffinements de l’autre côté de l’actuel conflit, les régimes de Hussein, de Kadhafi, de Bachar el Assad ne sont pas en reste.
C’est la réalité… une vérité éternelle.
Certains éléments des armées en campagne sont payés pour récolter des renseignements par tous les moyens. Comment peut-on tomber des nues dans les gazettes, comment peut-on dans les milieux politiques rompus au pouvoir, jouer l’indignation ?
Je ne sais pas quelles seront les suites de ce pot-aux-roses qui n’en est pas tout à fait un.
Tel qu’il est, je pense qu’il conviendrait aux gens honnêtes – y en a-t-il encore dans ces milieux de pouvoir ? - de dire à l’envi : « Oui, on savait. Cela a existé de tous temps, partout et dans toutes les armées. »
C’est cela aussi la démocratie : par ses côtés honteux, elle ressemble beaucoup à n’importe quelle dictature.
Si personne n’est tenté par ce langage de vérité, c’est que la gesticulation actuelle n’est donnée aux populations que pour l’exemple d’une démocratie formelle qui « reconnaît ses erreurs » et tente de les corriger. C’est considérer que l’information n’est qu’une sorte de divertissement dont il ne faut pas tenir compte à 100 % et surtout duquel il convient d’enlever ce qui est déprimant, non conforme, voire antipatriotique !
C’est-à-dire faire un mea-culpa qui ne serait suivi d’aucun effet.
Il y a peut-être pire encore que ces menteurs sans vergogne, mais envahis d’une certaine honte. Il y a la phalange des patriotes pour qui la torture et les mauvais traitements de l’ennemi sont des hymnes à la patrie.
Ce sont les plus dangereux, des Eichmann en puissance vivent parmi eux.
C’est souvent le langage des colonies de peuplement en Cisjordanie et des vétérans de toutes les armées du monde.
Ça devrait nous rappeler tellement de mauvais souvenirs qu’il devrait y avoir autant d’amoureux de la vérité pour remettre les choses en place, qu’il y a d’honnêtes gens pour condamner l’antisémitisme.
Ce n’est pas le cas.

12 mai 2004

Les smarts au pince-fesse !

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L’honnête homme – dans la conception du mot de l’Ancien Régime – aurait bien de la peine à se reconnaître dans le monde extraverti des médias d’aujourd’hui.
Sans l’exagération d’une morale à la Monseigneur Lefèvre, étant fort éloignés de la pruderie qui transparaît sous un vernis épicurien, certains de nos contemporains éprouvent toujours le même malaise de l’honnête homme, devant les « vedettes » people.
Non seulement ces stars éphémères montrent leur cul, à tout propos et à tout le monde, mais encore elles s’en prévalent et en font des volumes que s’empressent de publier des éditeurs vidangeurs de bidet. C’est le cas, de Sarah Marshall et Alexandre Anthony qui viennent de sortir un livre, de Benjamin Castaldy, et d’une fille d’Anquetil qui en ont fait autant, sur des registres proches, mais différents, auxquels s’ajoutent quelques perles dans l’œuvre de la fille de Bernard-Henri Lévy en réponse à la sortie en levrette de Carla Bruni avec le beau Raphaël, sans oublier l’hystérie d’une Italienne délurée de dix-huit ans, Melissa P. qui publie « 100 coups de brosse avant d’aller dormir » chez Lattès.
Serait-ce que les gens connus ou inconnus, pour peu qu’ils veuillent se maintenir ou grimper dans la promotion paillettes, ont besoin de compenser leur inutilité sociale par la montre de l’effort qu’ils font à l’exercice quotidien d’une remise en forme par enculage ?
Ah ! qu’on est gâté avec le Serial-Fucker, le journal d’un barbacker, le guide du sexe gay, à tel point qu’on se demande ce qu’on attend sur les blogues pour baisser le pantalon ! Personnellement, j’hésite. Non pas que je ne puisse pas qualifier de « beau » mon derrière, mais je suis de ceux qui estiment encore, qu’à part « mes femmes et mes docteurs », je ne vois pas l’intérêt pour les autres à exhiber la chose.
Ces temps-ci une avalanche de confidences des filles et petites filles de stars, minets descendants de chanteurs, bateleurs à la chaîne télévisuelle, héritière de notre aristotélicien de service (dans Aristote, il y a aristot) nous accablent de l’étalage de leurs hémorroïdes bien sanguinolentes, de leurs dopes diverses et variées, de leurs cavales retentissantes dans les nuits parisiennes, avec cette impudeur incomparable de l’homme d’affaire qui sait que du moment que ça rapporte…
Car, ne peut montrer son sexe qui veut. Seuls sont autorisés ceux dont l’énormité du profit supplante la petitesse de l’organe. Pour les autres, la censure bourgeoise est là qui veille au grain. Et, ce qui est pour les uns une gloire, devient pour les anonymes qui sont au fond du trou - dans la pleine acceptation du terme - une honte.

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C’est ainsi que la génération en pointe du luxe tapageur dilapide allègrement le bas de laine des anciennes gloires familiales, avant de se prostituer sous les clameurs de la bronca des fidèles.
On ne parle de talent qu’à hauteur des tétons et l’art de les montrer ou en fonction d’une braguette dont tout Paris, nourrit dans le sérail, en connaît les détours.
Cette passion de la coucherie publique a, d’une certaine façon, sa justification dans la fascination qu’exerce l’homme de pouvoir sur les graines de star qui peuplent les garçonnières d’Auteuil, de Passy ou du Georges V, aussi bien que du côté du Zinneke, des enculoirs de l’avenue Louise, d’Uccle ou du Zout.
Les riches natures, même à la silicone, ont toujours eu du nez dans notre société marchande, pour débusquer celui qui peut payer leurs faveurs.
Ces machines à foutre ont probablement eu des rapports oedipiens avec leurs géniteurs. De là cette propension étonnante à faire jouir les vieux et les gueules pathétiques. Oh ! pas n’importe lesquels… Il ne viendrait jamais à la pensée d’une star de ce faire enculer par un vieux pauvre.
Aux remises des Oscars, des prix d’interprétation, des César et autres Lions d’or, le marché s’établit, les offres sont faites, les enchères sont ouvertes. Les festivals de la bite cannoise nous ont toujours convaincu que la starlette préfère l’émir fortuné, le nabab des souks, généralement fort défraîchis, au garçon de plage qui, pour baiser, doit s’astreindre à des situations périlleuses où il risque sa situation, pourtant modeste.

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Les bonimenteurs, ces Pygmalion de la cage aux folles, le savent bien que toutes les vedettes qui ont réussi sont belles et qu’une tronche « qui a de la présence » et un compte en banque, ne se compare pas à celle d’un terrassier éponyme dans sa tranchée sur la Croisette.
Les hardeuses vous le diront, les gens de petites conditions sont sales. Les metteurs, producteurs et émirs sont vicieux. Ce n’est pas la même chose.
Il leur revient à ces furies intrépides, l’honneur de sucer le beau monde malgré les embarras des appareillages antifuites..
Ces gens font ce qu’ils veulent apparemment avec la bénédiction du CSA.
Personnellement je m’en fous. Ils réussissent même à foutre le bordel dans leur propre camp. Ce qui me divertit fort.
Le tableau vivant de la réussite qu’ils représentent contrevient à tout ce qu’on raconte à la ligue des familles, aux anciens combattants, dans la bible, chez les Michel (Drucker et Louis), aux bonnes mœurs et même dans les bureaux de la police spécialisée.
Ils n’ont qu’un tort : ils encombrent !
Quand comprendront-ils qu’ils ne battront jamais les Sabata Casch, les Love Amor et les Brigitte Lahaye des belles années du hard, toutes ces professionnelles au mérite, travailleuses honnêtes et qualifiées ?
De « l’homme à la pipe » vendu 100.000.000 de dollars à un mystérieux jouisseurs des profondeurs, combien, un esthète pragmatique s’en serait-il taillé à ce prix-là ?
L’artisanat se perd. On en est à la mondialisation du cul. Tous les mystères sont bradés. Les émotions sont glandulaires. La branlette du lecteur est devenue nationale.
Le goût se dissout dans la pauvreté des sentiments et l’exubérance du geste.
C’est regrettable !

11 mai 2004

Pascal Lamy, utopiste de l’année.

Ce n’est pas moi qui le dis, mais pascal Lamy, Commissaire européen. Je cite : « Le système actuel des relations internationales permet-il de maîtriser la mondialisation ? Clairement non. » S’ensuit évidemment un bémol à cet excès de franchise : « Peut-on envisager d’y changer quelque chose ? heureusement, oui. »
C’est sur ce discours là que depuis pas mal de temps le personnel politique nous promène.
La mondialisation est non seulement immaîtrisable, mais elle ira jusqu’au bout de sa logique. Et ce sera sa perte !
Pourquoi ?
Parce qu’on n’a jamais vu dans le monde une situation produite par les égoïsmes et les différents pouvoirs de l’argent s’infléchir à plus de morale et d’équité.
Il n’y a pas d’exemple dans aucune société qu’un pouvoir se soit effacé de lui-même, par civisme et raisonnement. Or ici, il s’agit du plus influent de tous : le pouvoir de l’argent !
C’est clair, non ?
Cela signifie en gros que ni la démocratie, ni les dictatures d’aucune sorte, ni même l’action d’un despote éclairé ne changeront rien au lent cheminement d’un long processus qui ne se conclura que sur le mot FIN du système capitaliste. Quand il n’y aura plus qu’un maître de tous les moyens de production par continent, ils se disputeront la présidence mondiale dans le dernier Conseil d’Administration de la planète.
Et tandis qu’ils clôtureront la séance, la porte d’entrée de ce Conseil volera en éclat sous la pression de tous les crève-la-faim !
Pour infléchir le système, il faudrait pouvoir travailler en dehors de lui. On ne peut pas à la fois se servir des structures et les dénoncer.
S’il n’avait pas été si irrémédiablement incurable, le communisme aurait pu jouer ce rôle.
Sinon, vous entrez dans le virtuel. Un monde qui n’existe pas et qui dans son immatérialité ne peut dégager un consensus qu’à des types dans mon genre. C’est-à-dire à une infime minorité ne disposant d’aucun pouvoir, ni moyen de pression. Pour parler un autre langage, cette engeance comique que la démocratie tolère, mais qu’elle tolèrera de moins en moins, quand elle sera de plus en plus sous l’emprise du seul moteur résistant à tout : le profit, sera vers la fin assimilée au terrorisme et exterminée.

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L’acceptation passive du monde comme il va est le lot du plus grand nombre. Non pas que les gens soient convaincus que le marché est sacré et que là est leur salut. Mais, ils ne croient plus au poids de leur opinion et à la démocratie.
En réalité, les bénéficiaires des profits engendrés par la mondialisation et pour qui tout projet alternatif est une contrainte, disposent de tout, par persuasion médiatique et par effet d’une démoralisation collective à la suite des délocalisations et des diminutions massives des personnels.
La contraction mondiale des frais et dépenses de fonctionnement touche aussi les politiques qui gèrent dorénavant les entreprises publiques comme des sociétés anonymes. Cela a pour conséquence de montrer la vassalité du politique à l’économique.
La contradiction du discours de Lamy tient en quelques mots. Le commissaire européen dénonce d’abord les utopies et les comiques dans mon genre. On croirait qu’il a une alternative dans sa manche à mi-chemin entre mondialisation et altermondialisation.
Pas du tout… sa recette est toujours celle de l’économie de marché, mais dite d’une autre manière. Je le cite à nouveau : « …une volonté d’agir sur le capitalisme, mais aussi sur les logiques de puissance et de domination à l’œuvre dans le monde. Pour que la mondialisation, encadrée, gouvernée et maîtrisée, se fasse au bénéfice de tous. »
On se demande comment dans sa parfaite orthodoxie du capitalisme, cet activiste du grand capital va bien pouvoir agir sur les logiques de puissance et de domination ? On le voit mal persuader ses patrons d’agir au bénéfice de tous, quand tous les gens qu’il sert retirent tout leur pognon de l’état de fait actuel !
Ou alors, nous aurions dans ce fonctionnaire d’élite un Che Guevara qui s’ignore, un comique de mon espèce en quelque sorte…
Si tel avait été le cas, il y a longtemps qu’il aurait été dégommé des postes qu’il occupe et sa voix se serait perdue dans la multitude de ceux qui ont appris sur le tas à fermer leur gueule pour bouffer tous les jours.
Ceci est le plus bel exemple de tartuferie qui soit.
Pascal Lamy, utopiste de l’année ?
On se demande !

10 mai 2004

P2P - Joueb - Web sémantique - Forum : même combat !

Les gars du P2P causent des problèmes aux friqués.
Ne croyez pas ceux-ci quand ils se lamentent que la Toile est la cause de tous les malheurs qui s’abattent sur leurs chanteurs et leurs compositeurs.
C’est avant tout de leur compte en banque qu’ils parlent.
La musique a existé avant eux et se poursuivra après.
Mais d’abord pour les coryphées de la navigation :
P2P signifie littéralement poste à poste. C’est un moyen qui permet aux ordinateurs de se connecter sans avoir besoin d’un webmaster afin d’échanger des données. Inutile de vous dire que l’échange de vidéos, musique et images, va bon train. Le file sharing qui utilise les variantes sont Kazaa, eMule, Morpheus, Gnutella, entre autres.
A présent, vous en savez autant que moi.
Revenons au Mur des lamentations des grandes compagnies.
Ces vampires tombent nez à nez avec une pratique vieille comme le monde : le troc.
Du coup cette gratuité dans l’échange les épouvante, because les bénéfices exorbitants qu’ils tirent de leurs ténors et sopranos archi gonflés à coup de pub dans les médias.
Ils ont cru au départ de l’aventure P2P que des petits malins allaient pourrir l’échange et que tout recevoir sans rien donner clôturerait l’aventure vite fait.
C’était une erreur. Presque tout le monde joue plus ou moins correctement le jeu.

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C’est une véritable révolution.
Ça nous réjouit. Eux, ça les renfrogne. Une large part des utilisateurs de la Toile, bientôt 200 millions, aime donner… Et ça leur en bouche un coin, eux qui, même aux toilettes, hésitent à confier leurs étrons aux égouts…
Comme ces majors ont le bras long, surtout dans les milieux « officiels », qu’ils sont louangés et entretenus par la société de consommation, ils font courir le bruit que cette pratique devrait être sévèrement réglementée, sinon interdite, qu’il en va de la survie des petits métiers et des artistes. Ils brandissent les droits d’auteur menacés, comme si le P2P retirait le pain de la bouche des pauvres hères. Alors que voilà bien longtemps que la plupart des jeunes artistes vivent dans des mansardes et crèvent de faim, bien avant le P2P !
Les grassouillets marchands de nos tonitruantes musiques en sont à mettre au point des parades techniques, des protections aussitôt déjouées par les petits génies du gratuit. Ils iront jusqu’à faire pression sur le politique pour taxer le flux qui sort de l’ordi branché !
Ils se fichent le doigt dans l’œil.
Non seulement, le P2P a de l’avenir, mais encore, comme son contraire, le pognon, il est universel et ce qui est universel bénéficie d’une protection en chaîne qui se déplace et qui évolue en fonction des tentatives de lui clouer le bec. Les banquiers savent ça, avec les paradis financiers, les pavillons de complaisance et les blanchiments d’argent que nos mesurettes à l’européenne n’ont en aucune manière perturbés.
Alors pour une fois que c’est pour la bonne cause !
La création n’a jamais été affectée par des questions d’argent.
La majorité des créateurs n’a jamais retiré un sou de la passion qui l’anime.
La stagnation de certaines fortunes, bâties sur la création quasiment désintéressée, n’effraie personne. Qu’est-ce qu’on en a à foutre que Hallyday ou Aznavour – qui entre parenthèse planque son argent en Suisse – va perdre des royalties ?
Peut-être même que cette purge va décanter la chansonnette et qu’on va retrouver une certaine qualité que justement les majors nous ont fait perdre.
Et puis, c’est un terrain formidable pour les petits, les sans gloire de tous les arts qui pour gratos vont pouvoir montrer leur savoir faire. Car, qui pourrait empêcher une petite formation, un chanteur, un simple guitariste, de goupiller un CD à bon compte et le lancer sur le système P2P ?
Qui dans l’avenir empêcherait un écrivain d’en faire autant ?
Jusqu’à présent, c’est sur la pub faite autour du choix des médias et du top 50 que fonctionne le P2P. Peut-être demain, y aura-t-il un système de présentation d’inconnus qui remplacera la notoriété souvent surfaite et qui détermine le choix actuel ? Multiplié par la curiosité de millions d’utlisateurs, cela permettrait à de jeunes talents de se lancer.
Prenons les blogues. Celui qui m’aurait dit, il y a un an, que par semaine j’aurais au moins 500 lecteurs, je l’aurais traité de fou.
Ça ne rapporte pas un clou, et alors ?
Bien pauvre mentalité est le compositeur ou l’écrivain qui se met à sa table de travail et qui se dit : « je vais faire une page qui va me rapporter 1000 euros, quand j’en aurai trois cents je serai riche ». Bien sûr, il y en a qui fonctionnent ainsi, surtout ceux qui racontent qu’ils ont couché avec leur mère, ou qu’ils ont vu leur sœur se faire tirer par un prix Nobel. Mais, est-ce de la création ? Est-ce faire une œuvre ? Non, c’est ramasser du fric chez un marchand de papier – aujourd’hui les grands éditeurs le sont tous – c’est un travail de people.
Tout c’est con, tout c’est de la merde comme dirait le « Plat du Jour ».
La gratuité n’est donc pas le monstre aux cent bouches qui va détruire la fragile condition de l’artiste.
Par le passé, il y a toute une collection de rétrogrades qui l’ont ramené à mauvais escient sur les « progrès ». L’invention de l’électricité à tuer la profession d’allumeur de réverbère au gaz, comme l’invention de l’imprimerie a permis aux moines copistes de se branler de la main droite. Mais quand on voit les progrès que ces inventions ont permis, on peut se convaincre que la dynamo vaut bien la chandelle.
Les créateurs n’ont pas la place qu’ils méritent dans ce monde de profit.
Je crois pouvoir dire avec des milliers d’autres qu’ils soient jouebeurs ou P2P, que maintenant, nous le tenons par les couilles.
Certes, on étudie chez les politiques les moyens de tarir cette source de liberté. Peut-être y arriveront-ils avec l’aide des milieux friqués, les chiens couchants de la chose artistique vue des salons et la culture subventionnée. S’ils hésitent, c’est qu’ils craignent quelque chose et, pour une fois, ce quelque chose, c’est la multitude.

9 mai 2004

Kill Bill III en exclusivité mondiale !

- M’sieu Monfils, j’voudrais tourner un film, est-ce que j’aurai des subsides de la Région wallonne ?
- Faut voir. Pouvez-vous en dire quelques mots…
- J’sais pas bien raconter, moi…
- Faites un effort…
- Bien oui, quoi… j’ai pas fait l’école du cinéma… mon frère s’appelle pas Dardenne, ni Daerden, ni Hardenne… ni rien du tout, je suis fils unique...
- Essayez quand même…
- C’est la suite de Kill Bill II. C’est donc Kill Bill III… Uma a fini son travail des cinq. Mais Bill n’est pas mort. Elle l’apprend à ses dépens. A nouveau enceinte du producteur du film, le jour de son mariage avec un de Fontin, un commando des Vipères lubriques débarque à l’église d’Esneux et abat tout le monde. Uma survit, sauvée par un ancien saxophoniste de chez Popol, Andréas Raskinovitch…
- C’était pas déjà dans le Kill Bill I ?
- T’as vu Tarantino à Esneux ? Y a quelqu’un qui connaît Popol en Amérique ?
- Non…
- Elle passe deux jours au CHU au lieu des quatre ans en clinique à Los Angeles. Elle est violée par un passant au Service de réanimation – c’est normal, m’sieu Monfils, vous feriez pas la même chose avec Uma Thurman ? - elle apprend sur La Meuse que le chef des Vipères lubriques s’est réfugié dans la ferme de De Chavanne. Mais, il a demandé à Sébastien qui fait prendre des personnalités différentes aux fermiers de la Jet Set, de le déguiser en Arthur. Alors, on sait pas qui est qui ? Il y aura la famille Anquetil avec la fille d’Anquetil, mais que c’est tellement compliqué qu’elle sait plus elle-même d’où elle sort, si c’est de sa grand’mère ou de sa sœur ; Loanna en pute – un rôle de composition ; Hallyday avec son bateau, en cale sèche dans la cour et son hôtesse dedans pour le hard ; Belmondo, l’acteur à moins que ce ne soit le coureur automobile, avec la fille de sa femme ; Raphaël, la dernière passion de Carla Bruni et son ex-beau père Bernard-Henry Lévy ; enfin Benjamin Castaldi qui raconte partout que sa mère, la fille de Simone, a été la maîtresse de Montand. Sont-ils vrais, sont-ils faux ?... Elle barre des noms sur sa liste. D’abord De Chavanne au grand soulagement des spectateurs… Elle le provoque au sabre…

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… De Chavanne est découpé en quartiers, rangés dans une roue-carton géante de Maredsous. Avant cela Uma avait tué un inconnu, qui voulait lui dire qu’elle fasse attention de ne pas faire une fausse couche, car elle est toujours enceinte… Et elle regrette son crime gratuit.
- Comme dans Kill Bill I !...
- Exactement. Seulement le père n’est pas Tanrantino, ce n’est qu’à la fin qu’on révèle son identité…
- Aha ! C’est qui ?
- Le chef des Vipères lubriques, Bill lui-même déguisé en Arthur…
- C’est tout ?

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- Dix-sept meurtres, quatorze combats à l’arme blanche, huit de karaté, neuf courses poursuites en voiture et trente deux cascades sur les toits d’Esneux, vous trouvez que c’est pas assez ?
- Evidemment…
- Uma croira avoir tué Bill déguisé en Arthur. En réalité, c’est impossible, attendu qu’Arthur était interprété par Patrick Bruel, donc il n’est pas mort. Ce qui fait qu’il y aura un Kill Bill IV à la poursuite d’Arthur !
- Là, je vous arrête…
- Oui, M’sieu Monfils, arrêtez-moi si je dis une connerie.
- Non, ce n’est pas ça… Je veux dire que si vous voulez avoir une chance de passer à la commission, il faut une chute morale. En Belgique, c’est comme ça…. Je pensais que le mot de la fin reviendrait au sosie de Louis Michel, interprété par Galabru, au milieu des morts de la ferme… un grand discours moral sur la violence des banlieues…
- Je pourrais peut-être mettre la scène en finale de Kill Bill IV, quand on s’apercevra que Bill, chef des Vipères lubriques était en réalité le mari d’Uma dans Kill Bill I qui a mis en scène sa mort pour coucher avec Liu Su, mais qu’une fois celle-ci exécutée par Uma, il se serait repenti dans Kill Bill IV, Arthur étant redevenu Arthur qui aurait alors une liaison avec l’ex-belle fille de Johnny qui serait la fille que le chanteur aurait eue avec Françoise Hardy du temps de son ménage avec Sylvie !
- Ecoutez, monsieur ???
- Monsieur Despentes.
- Vous êtes le fils de Virginie…?
- Non. Je suis l’enfant de Depardieu et de Jean-Pierre Foucault.
- Je ne comprends pas…
- Si ma mère a changé de sexe dès qu’elle a compris qu’un présentateur masculin avait un plus gros salaire sur TF1.
- Et qu’est-ce Despentes vient faire là-dedans ?
- Mon père a changé de sexe quand il a compris qu’une femme était plus « vendeur » dans l’édition pour venger les femmes des hommes, surtout pour des livres de cul !
- Et Depardieu, alors, c’est qui ?
- C’est mon père naturel.
- Eh bien, voilà, cher Monsieur Despentes, je vais en toucher un mot à José Happart.
- Il n’est pas ministre de l’agriculture ?
- Si, mais quand il était fermier, il a vendu des pommes à un producteur de cinéma qui était horticulteur avant de connaître les Frères Dardenne.
- C’est une grande famille le cinéma !
- A qui le dites-vous et pas que le cinéma !

8 mai 2004

Twin Towers contre effets de serre : le match !

Ben Laden est un modeste artisan du crime qui a réussi à faire parler de lui. C’est sans doute ce qu’il voulait. Son prétexte, faire régner l’Islam sur le monde en commençant par tuer tout le monde, y compris des musulmans, est d’une absurdité totale.
Comme tout esprit corporatiste, il a regardé autour de lui par besoin d’être reconnu par ses pairs, afin de se comparer aux meilleurs du genre.
En se fixant sur l’Amérique, l’Oussama des mille et un cauchemars est tombé raide d’admiration : les USA sont les terroristes inégalés de l’écologie.
Sa jalousie pour meilleur que lui est sans limite. S’il se fait prendre un jour, ce sera à cause d’elle. Il ne se sera pas assez méfié de sa vanité.
Comment faire mieux que le terrorisme américain qui fin de ce siècle, s’il n’est pas combattu par le reste de la planète aura raison de la faune et de la flore et par conséquent de nous ?
Ben Laden réagit mal au réchauffement de la planète, aux dégâts irréversibles dus à la pollution, à la pénurie prochaine d’eau potable. Ses entreprises criminelles sont tellement insignifiantes à côté de celles que prépare l’Amérique dans ses « progrès » du PNB et sa détermination par la voix de son président de ne limiter en rien ses consommations, qu’il s’enfonce dans des ripostes ridicules, des attentats minables, secondé par des partisans peu fiables et illettrés.
Tandis que ce terroriste planétaire cherche les gaz rares, des bombes atomiques miniatures, des virus Ebola islamiques, les USA font des émules en Chine et en Inde, poussent à la montée des eaux par la déglaciation et la disparition des ours polaires comme premières victimes dans ce qui n’est qu’un beau début, renforcent leur armée si dispendieuse en carburant, si polluante en tout, bref snobe le pèlerin des montagnes afghanes qui de son PC tanière, assiste à son grand largage par plus fort que lui.

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C’est une course contre la montre. Si Ben Laden avant de mourir de sa belle mort, n’a pas trouvé le moyen de produire assez de mort-aux-rats pour tuer l’humanité, c’est l’autre qui sur deux ou trois générations aura fait le même travail ; mais dans quelle épouvantable condition : agonie atroce, écroulement des systèmes, disparition de toute structure sociale, retour aux cavernes.
Sans doute Ben Laden dans son nihilisme d’enfant gâté est-il aussi cruel que les USA. Il s’est attaché à la souffrance rédemptrice comme tout esprit religieux qui se respecte. Il croit que le martyr des autres le sacralise ; mais, last but, il veut comme n’importe quelle classe moyenne de chez nous, laisser des souvenirs impérissables. Gengis Kan, Alexandre, Napoléon, Adolphe, ses parrains le poussent à l’exploit. Comme les USA sont inégalables, peut-être fera-t-il une ultime tentative pour atteindre à la célébrité par quelques nouvelles inventions diaboliques que ces niais de la CIA ne pourraient prévoir ?

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Nous nous trouvons dans le domaine de l’irrationnel.
Délaissant les conseillers du genre bricoleur manière Dutroux, Ben Laden recherche un docteur Fol Amour en urgence. Il y a tant de savants dévissés, tant de chercheurs au profil d’assassin, les sciences ont tellement produit le sublime et son contraire, que si son offre d’emploi était satisfaite, peut-être aurait-il une chance de battre les USA sur le fil ?
Nous, populations résignées, cheptels parqués pour les abattoirs du futur, nous sommes comme tous les esclaves qui redoutent les passions soudaines des maîtres. Nous préférons le vice, lent et dissolvant de nos humeurs. Nous savons que nous sommes destinés à la mort. Nous ne souhaitons qu’une chose, qu’elle soit reportée, qu’elle soit lente ; car, comme les veaux destinés aux abattoirs, notre conscience de notre fin dernière se disperse dans les foins de la mangeoire.

7 mai 2004

La vocation militaire.

Le comble de l’hypocrisie a été atteint ces temps derniers avec les déclarations de la Croix Rouge Internationale et les propos « indignés » du Président Bush sur les sévices et tortures des militaires américains en Afghanistan et en Irak infligés aux opposants et aux populations de ces pays.
Hypocrisie, car il n’existe aucun doute sur les pratiques criminelles courantes des militaires de tous les pays en temps de guerre, sur les civils et les militaires du camp adverse et parfois de leur propre camp.
Tous ne sont pas des criminels, mais tous, non plus, ne sont pas en situation de le devenir.
Ce qui est affligeant, c’est qu’il a fallu attendre que des tortionnaires se soient photographiés à côté de leurs victimes et que ces photos soient publiées – peut-être ont-elles été négociées par les bourreaux auprès des médias – pour que le monde s’indigne.
Il n’y a pas plus bornée et dangereuse que la gent patriotarde. L’exaltation des mauvaises raisons qui poussent à la guerre, comme celles qui poussent à la résistance conduisent toujours à des excès.
On parle avec raison des tortionnaires nazis. Là, le crime a été officialisé, ordonné même par le sommet de l’Etat. Mais est-ce le seul pays à avoir commis des monstruosités au nom d’un idéal qui n’était qu’une effroyable machine raciste ? Non. Bien sûr. Et les Alliés en 45 lors de l’occupation de l’Allemagne ont commis individuellement ou par groupe des viols, des massacres et des tortures, alors que leurs victimes étaient en principe protégées par les accords internationaux sur les prisonniers de guerre.
Le crime d’un être humain serait-il plus ou moins horrible selon qu’il y en aurait des milliers, voire des millions ?
Sans entrer dans le crime crapuleux, croyez-vous que les femmes tondues à la Libération sur simple dénonciation, l’étaient parce qu’elles le méritaient ou parce qu’elles étaient les victimes d’abord d’une vengeance irrationnelle d’une population qui avait chié dans son froc devant les SS pendant quatre ans ?
Le problème est ailleurs.
On ne peut pas armer des jeunes gens pour aller combattre « des ennemis » en croyant pouvoir les arrêter pile à la fin de l’action « héroïque », juste comme l’adversaire jette les armes et lève les bras. On ne réveille pas impunément l’instinct de mort qui gît au fond de nous et le stopper en claquant des doigts. Il est illusoire de croire que dans la terreur soit de mourir ou de tuer, on sorte de la tourmente, apaisé, fort et juste. Si on vous dit que vous êtes un héros et que vous avez sauvé la patrie, vous ne serez pas quitte pour autant avec votre conscience, si vous avez tué. Vous ne vous sentirez pas indemne parce que votre cause était juste.
Que dire des « héros » qui sentent monter en eux à égalité avec leur patriotisme, l’instinct sadique de destruction ?
Nul n’est à l’abri d’une réaction de tortionnaire, quand il se voit attribuer une parcelle de l’autorité déléguée des chefs. Le pouvoir, même à l’échelon du bidasse 2me classe, peut rendre fou.

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Sottise de prétendre que les armées qui défendent la démocratie sont des armées de citoyens conscients de la noblesse de leur mission. On le voit bien partout, en Israël, comme aux USA, comme en Europe : un homme armé est bon à tout, a fortiori si les ordres qu’on lui donne, comme en Palestine, comme en Afghanistan, comme à la base américaine de Guantanamo, les couvrent tout en enfreignant les règles de la morale, avant qu’elles ne soient celles de la démocratie..
Dostoïevski pose la question de la justification de la torture dans son œuvre « Les Frères Karamazov ». Ivan demande à Aliocha, le mystique, s’il sacrifierait en torturant à mort un petit être sans défense – un seul – pour le bonheur éternel de l’humanité ?
La réponse est « non » évidemment.
L’écrivain russe par delà la fiction nous met en face de cette ambiguïté de la douleur des autres pour la rédemption de leurs fautes et des nôtres.
Comme les bonnes raisons ne manquent pas au nom d’un objectif supérieur – humaniste même ! C’est ainsi qu’on est à peu près certains que les soldats engagés en Irak qui ont commis des atrocités dans les prisons ne se considèrent pas comme des bourreaux, mais comme des justiciers, les gardiens incontournables de la paix et de la sécurité dans le monde. Ils se croient une mission qui les exonère de la Loi. Mieux, ils sont la justice immanente. Ils vengent les morts des Twin Towers. Ils sont le produit des sottises que l’on profère sur la question depuis 2001.
Si on laissait la parole aux gens, on serait surpris des réponses, malgré le « dégoût » exprimé par leur Président de ces actes répréhensibles. Le sentiment de vengeance est encore celui qui est le plus difficile à contenir.
Le pardon collectif n’est le plus souvent qu’un acte officiel qui ne correspond pas toujours à la réalité.
A-t-on oublié la guerre du Vietnam, pour ignorer ce dont est capable une armée ?
C’est pour cela qu’il est plus facile de faire la guerre que de faire la paix.
Reste une question à laquelle on devrait s’attacher à trouver une réponse. Elle est simple :
Si la haine répond à la haine, comment la haine finira-t-elle ?

6 mai 2004

Cette année, la campagne du 18 juin aura lieu le 13 !

- Coco, c’est de qui « la campagne du 18 juin aura lieu le 13 » ?
- Du gros… la nouvelle formule du MR pour impressionner l’électeur.
- L’appel du 18 juin, aura lieu le 13… Il se prend pour le général ?
- de Gaulle… absolument.
- Et le « à bras le cœur », ne me dit pas que c’est de lui aussi ?
- C’est sa traduction belge du « Je vous ai compris ! »
- Il est fort !...
- Dire qu’on lui avait proposé une affiche « Michel, Belge moyen de l’année ». Il ne l’a pas voulue.
- Il est en pétard avec Duquesne ?
- Paraît que depuis qu’il se prend pour de Gaulle il en fait trop. On voit plus que lui… Y a des jalousies… Il a appelé Didier : Pompidou !
- Didier ?
- Ouais !... Pompidou… et son fils, il ne l’appelle plus que l’amiral !
- Ils attendent beaucoup du retour en Belgique de Yasmine et Sara, ces deux petites retenues à l’ambassade belge de Téhéran… pour remonter le courant.
- Déjà qu’on a vu notre général du MR déguisé en Couve de Murville les chouchouter à l’ambassade. Il y aura du beau monde à leur arrivée.
- Oui, c’est porteur.
- Qu’elles reviennent aujourd’hui, c’est pas bon pour les libéraux…
- Pourquoi ?
- Trop loin des élections… Début juin ç’aurait été le pied…

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- T’as sonné au 13 du boulevard de l’Empereur ?
- Déjà qu’on en a un qui se prend pour de Gaulle, manquait plus que Charlemagne…
- Elio a quelqu’un pour sa campagne ?
- On sait pas.
- Un franc-mac ?
- On sait pas je te dis…
- Alors quand on sait pas, c’est un franc-mac…
- C’est quoi leur slogan ?
- D’après des bruits qui courent, ce serait « Sans nous, vous seriez où ?... »
- C’est tartignolle… Ces gars-là n’ont pas le sens de la litote.
- J’y crois pas à cette connerie. Monsignore est plus fin que ça…
- Et chez l’orange Joëlle Milquet ?
- C’est encore plus tarte : Le 13 juin votez pour vous. Ce sera tout de suite différent.
- Trop long… Ça veut dire qu’avant l’électeur votait pour un autre sans le savoir…
- Vu ainsi, l’électeur est un peu con..
- Avec ça, elle va se ramasser…
- Si on lui filait : « Avant t’avais Mickey, maintenant t’as Milquet » avec distribution de peluches, des posters de Disney et des comédiens habillés en Donald, Dingo et la suite…
- Tu peux pas, y a les droits… puis, i’ sont fauchés.
- Les généreux donateurs, ont foutu l’camp…
- Les banquiers, ça veut du rendement. Dans l’opposition et dans la dèche, i’ peuvent plus renvoyer l’ascenseur.

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- Note que c’est pas avec Fournaux qu’elle se serait fait du blé…
- C’est vrai, ce mec coûte plus à l’entretien que ce qu’il rapporte…
- Faudra qu’i’ soient forts au MR pour rentrer dans leurs frais pour une carrière du zigue à la Deprez.
- Nous, en attendant, si on trouve rien à vendre, on ferme la boîte.
- Qu’est-ce que tu dirais de « Si vous vendez rien à personne, on ferme l’Europe ».
- Pour qui ce truc ? Tu trouves pas que ça fait Office du Commerce Extérieur ?
- Et puis merde, je sens pas bien la campagne ! Les gens s’en foutent !...
- Coco, je vais te dire, on est dans de sales draps…
- Si on gambergeait sur « Faites propres, changez les draps » qu’on vendrait au CDH ?
- Rapport à quoi ?
- Question de revenir au Saint Suaire… montrer que les cathos ont encore un prie-dieu chez Joëlle…
- Tu sais combien ça coûte une pub quand on mouille l’Eglise ?... Rome marche à fifty fifty…
- J’en ai ma claque de ce métier à la con ! …à chercher des mots qui s’emboîtent…
- Le gros a toujours eu le sens de la formule.
- Il aurait dû faire publicité…
- Qu’est-ce que tu dis de « L’Europe, ça me connaît, je vais en Espagne chaque année… »
- Mais, nom de dieu ! le voilà le slogan…
- Quoi, tu te fous de moi… Je disais ça pour rigoler…
- Non, merde… « L’Europe, ça me connaît, je suis en Europe toute l’année… »
- Vu comme ça. A qui on refilerait l’affiche ?
- On la fait interchangeable au plus offrant !
- Et si de gaulle, Carlo et Claudine-Joëlle, à l’école bien sûr, veulent pas marcher ?
- Alors, on la donnerait gratos aux Ecolos !
- Pourquoi gratos ?
- T’as déjà vu Evelyne sortir son chéquier ?

5 mai 2004

L’Europe des enfoirés.

Plutôt minable « la fête » à Bruxelles pour l’adhésion des dix nouveaux pays membres.
Les lances de l’averse de Verlaine ne concouraient pas à exalter la poésie lyrique, mais encourageaient plutôt les has been de kermesse à faire la gueule.
Le premier ministre au micro masquait à peine le vide derrière lui, malgré un cadrage très rapproché. Il semblait même, le pauvre, avoir perdu une dent de plus dans l’aventure. La téloche est impitoyable pour les plus de 40 ans. On finira par se demander si les épaves qui nous gouvernent ont encore le droit de se montrer à cause du bourdon qui nous saisit à leur spectacle ! Votez Glamour serait le slogan parfait de l’abstention pour le 13 juin.
On sent bien que l’Europe qu’on nous fabrique à grands renforts de bureaux, de nouvelles créatures sur des tapis plain épais comme les poils du sexe de la femme à barbe, avec des salaires à faire loucher le travailleur honnête, est une Europe qui n’est pas fréquentable pour tout le monde.
Les gens de la télévision qui se sont promenés entre deux draches ont eu bien de la peine à céder le micro au pékin enthousiaste. Et quand le hasard le permettait, ô stupeur, c’était l’interview d’un con… Cela nous montre bien la vanité de ces sortes d’exercice.
L’esprit fancy fair a résisté une heure ou deux, avant de sombrer dans le néant des baraques à merguez vides et des vendeurs de ballons bleus désolés de ramener pleines et lourdes les bonbonnes de gaz.. C’était l’esprit des patronages et des réunions scoutes. La religion s’est décantée ou a fichu le camp, est restée la pâte molle des gaufres au sucre. L’Europe en a déjà fait une large consommation pour sa propagande. On peut le dire, on est en plein dans l’Europe des petits marchands ambulants, chers à Mené qui sait comment nous tirer des larmes à leur propos.
Les patriotes, qui résistaient à l’envie de s’abriter chez eux, avaient de ces tronches à béret et médailles à se faire cuire un œuf sur la flamme du soldat inconnu, rien que pour les emmerder.

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Alors ?
Ceux qui vivent au ras des pâquerettes, qui triment dur pour pas grand-chose, que peuvent-ils attendre de cette foutue Europe ?
Une seule bonne chose : l’assurance qu’on ne se tapera plus sur la gueule entre Européens et l’assurance qu’on ne nous emmerdera plus à la périphérie.
En effet, à part l’Amérique ou la Chine qui pourrait attaquer 450 millions d’habitants sans se retrouver KO ?

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Pour le reste, c’est plus inquiétant.
Les Allemands de l’Ouest paient encore la facture de la réunification avec les Allemands de l’Est ! La différence du niveau de vie, si elle s’atténue, n’en est pas moins toujours là, alors que voilà quinze ans que le mur de Berlin a été détruit.
Les nouveaux adhérents à l’Europe vivent avec 40 % du revenu moyen des Quinze. Ce ne sont pas les quelques années d’adaptation qui nivelleront les différences.
Ce n’est pas que je sois adversaire de partager les richesses, au contraire, mais déjà qu’ici il existe une partie appréciable de la population qui frôle le seuil de pauvreté, dire à un pensionné ou à un allocataire social qu’il se pourrait que ses « revenus » soient diminués à cause de l’Europe, alors que nos baveux disent le contraire dans les micros, j’aime autant ne pas être Elio Di Rupo le jour où il faudra qu’il s’explique sur l’Europe de la solidarité.
C’est, une fois de plus, une lourde responsabilité que prennent les gauches européennes en mordant à pleines dents dans le gâteau des Institutions des vingt-cinq, sans se préoccuper outre mesure de monter une société plus juste, si ce n’est par des évocations et des discours du genre de ceux que nous avons entendu au kiosque d’Avroy le premier mai.
Je veux bien que la collection de gogos qui gravitait autour des sopranos du soap-opéras au muguet n’a pas varié d’un pouce dans sa contemplation imbécile des idoles, mais, elle n’est pas la gauche, elle n’en est qu’une partie chloroformée et pathétique… un avatar.
S’il y a bien une urgence, c’est de construire une gauche en Europe, sinon les « A bras le cœur » d’en face pourraient bien nous le briser avant de nous les briser par la même occasion.

4 mai 2004

Inter faeces et urinam nescimur...

« Naître entre la pisse et la merde. »

On ne peut pas dire que nous ayons été gâté en littérature au siècle dernier.
Après les débuts prometteurs du roman au 18me, suivis du foisonnant 19me, voici l’ergotant et suffisant 20me.
Loin derrière le souffle Célinien, ce grandiose collabo qui sauve l’honneur du siècle, quelques éclairs, bribes, fulgurances subsistent dans un domaine où les marchands de papier, sous prétexte d’édition, apprivoisent à la médiocrité les prétendants à la postérité.
Quelques pages de Proust, une ou deux de Rémy de Gourmont, dix lignes de « Si le grain ne meurt » de Sa Sphincter le pape… rien de Romain Roland, les séries de Duhamel pour leur belle reliure, un peu de « Teste » de Valéry là où la bêtise n’est pas son fort, quelques pages de « La chronique maritale » de Marcel Jouhandeau… Le reste est plutôt pathétique : l’immense platitude de d’Ormesson, la lourdeur d’Aragon dès qu’il quitte sa poésie et l’ennui que dégage Sartre, sans sa philosophie, reste France, pour les classes de 6me… c’est à peu près tout, si l’on excepte ceux que je n’ai pas lus et sous réserve d’inventaire.
Vaticinations d’éditeurs dès 1920 à la « réclame », défaites des Marguerite, Bataille, Louys, Rachilde et autres cavernicoles des Nuits parisiennes et des couloirs du Mercure de France, pour finir au pinacle de l’insignifiance avec Paul-Loup, les bavardages de concierge d’Hadrien de Yourcenar, la clique des Bobin à la laisse chez Gallimard, les monuments surfaits de Sarraute, avant de finir dans les chiottes du dernier Houellebecq.
Ecoeuré par tant de flagorneries éditoriales, enculades d’esthètes, « Loti…ssement » de l’art bourgeois, héroïsme pseudo réaliste des Barbusse, Genevoix, écrivains pour « mettre » la Grosse Bertha, fielleuses collaborations des Farrère et Daudet (Léon fils d’Alphonse), on change de rayon de bibliothèque, avec le regret d’avoir omis Giono, parce que son Hussard rappelle Stendhal, ainsi que quelques autres qui méritaient de ma part moins de désinvolture.

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On traverse l’Atlantique, croyant trouver l’Eldorado. On repart sous les courbettes et les coups d’encensoir aux gloires rapportées. On a peine à lire une ligne en 2004 de Sinclair Lewis, Dos Passos, Hemingway, Faulkner – si l’on met « Sanctuaire » à part. Même le faunesque Bukowski (n’est pas Genêt qui veut) nous renverrait au bric-à-brac de la FNAC, si ce siècle n’avait été sauvé, là aussi, par les Tropiques du célinien Henry Miller, seul Blanc parmi des auteurs blacks de qualité dont les médias taisent les noms par pur racisme et lutte des classes.
Avec le recul, que de critiques sociales et dénonciations du rêve américain ramenées aux justes proportions, mais suffisantes pour que nos baveux se branlent sur « l’incontestable liberté et l’incroyable foisonnement » qui valent encore aujourd’hui aux States une réputation flatteuse dans notre bourgeoisie « d’avant-garde » franc-mac et socialiste. Toute une galerie qu’on apprend à vénérer par ouï-dire, plus parce qu’il faut vendre les encyclopédies de chez Larousse et parce que la critique est, de tous les genres, celui qui se renouvelle le moins..

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Le Noir ne se distingue pas par la couleur de sa peau mais par le fait que les Blancs ne le voient pas. Ralph Ellison, James Baldwin et quelques femmes : Alice Walker, Toni Morrisson. ouvrent un genre littéraire d’une cruelle réalité, certifié authentique, auprès duquel les oeuvrettes blanches de l’entre-deux guerres ont la valeur du couple, si admiré encore aujourd’hui par les Bobos de la Place des Vosges : Francis Scott et Zelda Fitzgerald en vadrouille friquée sur la Côte d’Azur et en panne d’émotion.
Parmi quelques diamants bruts, voici l’étonnant Iceberg Slim, ancien maquereau à la logique duquel on ne résiste pas : « L’énergie et le talent exigé pour devenir un délinquant de réelle envergure pourraient être utilisés de manière bien plus positive. Si un maquereau parvient à contrôler neuf femmes, il peut tout aussi bien réussir dans autre chose ».
Walter Mosley et Danzy Senna galopent à ses côtés. Ils disent l’Amérique raciste, et donnent une voix aux éternels exclus, dans une langue singulière, celle de la dissidence.
On entre directement dans une littérature de terrain où le vécu a plus d’importance que le papier sur lequel on imprime, comme on s’y torche. " L’écriture a été ma défense contre l’Amérique blanche ", affirme Chester Himes. Deux flics de Harlem dans le livre de Chester, sont des « anges gardiens », qui, en arpentant New York, passent constamment cette ligne de démarcation qui fixe le droit d’un côté, et de l’autre enferme les Afro-Américains dans un espace de non-droit, de violences et de misère.
Cette littérature remet sur le terrain ce racisme anti-noir du Blanc américain que l’on croyait, nous européens, en voie d’extinction.

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Danzy Senna, une jeune écrivaine de trente ans, décrit un monde dans lequel on est trop blanc pour les uns et trop noir pour les autres : un métissage invivable, dit à travers le destin d’une enfant de Boston élevée par des parents militants, et coincée entre le rêve d’identité affirmée et l’envie incurable d’anonymat qui fait aussi l’Amérique d’aujourd’hui. Le père et la mère militent dans des organisations différentes, et leurs divergences sur les formes de l’engagement auront raison de leur couple. Le père parle de " l’histoire d’amour entre l’Amérique et les Noirs castrés, aveugles ou estropiés ", explique comment les Blancs fondent leur pouvoir sur l’invisibilité. " J’ai disparu dans l’Amérique, où rien n’est plus facile. Effacée, sans nom, sans identité. Avec seulement ce corps dans lequel je voyageais. Et le souvenir de quelque chose de perdu. " Symbole d’une place introuvable dans une Amérique introuvable...» C’est simple, c’est beau et c’est diantrement bien traduit.
Socrate le héros d’un roman de Walter Mosley vit dans un des ghettos noirs de Los Angeles. Il gagne sa vie en rapportant les canettes et les bouteilles vides au supermarché. Proche de la soixantaine, cela fait dix ans qu’il est un " homme libre ", après avoir fait 17 ans de taule pour un double meurtre. L’adresse de Mosley est de faire le croquis d’un homme qui cherche à se placer du côté du Bien, mais qui échoue à gérer les contradictions ; qui veut la paix, mais aiguise son couteau avant d’aller réclamer un boulot ; qui tente de faire éviter la rue et les gangs au jeune Darryl, un assassin de douze ans, mais qui part en chasse pour régler son compte à un criminel noir... " Tant qu’il y a de la douleur, il y a de la vie. " Héros tragique, Socrate met sa vie en jeu, à force de veiller sur son prochain, incapable d’échapper à la tentation de la rédemption. Le récit s’encanaille entre rêve et réalité, car Socrate veut prendre le temps de rêver. Et la nuit, il voit " sous la pluie et la lumière dorée de la lune, un cimetière s’étendant à perte de vue. (...) C’était là que reposaient tous les Noirs morts de chagrin. "
La vitalité de cette littérature tient en une inlassable quête d’un sens moral, véritable résistance contre une société qui s’échine à vous enlever votre âme tout en vous exhibant des tables de la loi impraticables, hypocrisie autour de la cruauté. Ce que disait ainsi un autre grand écrivain noir, Ralph Ellison : " La vie (...), cette bonne vieille nom de Dieu de partie de billard (...). Faut pas jouer la mauvaise boule. Faut pas jouer la noire. "
Quand on a lu ces livres, on s’interroge sur la vacuité de notre littérature, si intégrée, si molle dans sa feinte désignation de notre ennemi depuis des temps immémoriaux : nous mêmes. On se dit, mais quel bon Dieu de Jean-foutre sommes nous donc, qui nous associons à tous ces guignols friands de Prix Goncourt, de tirages exceptionnels, de critiques « intelligentes » et incapables de ressentir vraiment ce qu’est une douleur, ce qu’est une grandeur, ce qu’est un sacrifice, ce qu’est – finalement – cette inégalité, ce racisme que nous croyons avoir anéanti sous nos lois de censure, comme si nous ne savions pas que presque tous les blancs sont racistes, jusque dans leurs gênes.

3 mai 2004

Une passe romantique...

- Quel âge as-tu, mon chouquet ?
- 42 ans, Madame.
- Et c’est la première fois que tu…
- Eh bien !... oui !
- Détends-toi. Tu as une demie heure.
- Merci.
- Non. Merci de m’avoir choisie… Attends, c’est moi ça…
- Je sais quand même bien me la laver tout seul.
- Je sais. Mais ça fait partie du travail.
- Pourquoi ?
- Parce que ça aide. Ça t’excite ?
- Oui, un peu.
- Comment ça, un peu ?
- Comme c’est la première fois, je suis perturbé.
- Ne t’en fais pas. Tu veux que je me déshabille ?
- Oui, s’il vous plaît.

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- Comment tu me trouves ?
- Un peu forte…
- Tu sais les hommes aiment ça.
- C’est quand même beau à voir…
- Merci.
- Oui. Les mamelons, les poils en bas… tout quoi !
- Tu peux toucher, mais pince pas !
- Merci.
- Non. Je n’embrasse pas…
- Comme c’est curieux.
- Je me mets en-dessous ?
- Je ne sais pas. Comme vous faites d’habitude.
- Tu sais, mon chouquet, ici, il n’y a pas d’habitude. J’en vois de toutes les sortes.
- Bon. Alors si vous voulez, c’est moi qui…
- Tu permets que je te pose une question ?
- Je vous en prie, Madame.
- Comment se fait-il qu’à 42 ans tu n’aies jamais fait ça ?
- Rien qu’à imaginer toutes les emmerdes qui vous tombe dessus dès qu’à 15, 16 ans on regarde une femme, j’ai réfléchi aux inconvénients de l’entreprise sexuelle. D’abord comme je ne suis pas riche, aux dépenses en sorties, restaurants, cadeaux, sans compter quelques refus humiliants. Viennent enfin les idées que l’on se fait des maladies vénériennes, le Sida en tête. Enfin quand ça y est, qu’on n’est plus seul, viennent l’application à ne jamais rentrer trop tard, à avoir un boulot rémunérateur et à éviter de se faire foutre à la porte parce qu’on a des responsabilités, les parents de sa compagne qu’il faut supporter en plus des siens qui ne sont pas commodes, au divorce qui vous pend sous le nez, les statistiques le prouvent, à la pension qu’il faudra payer sa vie durant, au rôle ingrat de cocu ou au rôle méprisable de l’amant, à la lente dégringolade dans des enfers auprès desquels ceux de Dante, c’est de la rigolade.
Alors, j’ai hésité.
Ces choses-là pour y plonger, faut pas réfléchir. Si vous réfléchissez aux vicissitudes du temps, aux rides, à l’appétit sexuel qui fout le camp, à vos infirmités ajoutées aux infirmités de l’autre, les tuiles qui sont multipliées par deux, les concessions constantes, un est pour la mer, l’autre pour la montagne, un qui a trop chaud, l’autre trop froid, un pour ARTE, l’autre pour « La ferme » et les attentions, comme de remonter la fenêtre de la voiture de votre côté pour ne pas qu’elle ait un courant d’air attendu que du sien, elle a baissé sa vitre, alors qu’on crève de chaud… pour finir par des responsabilités majeures, comme d’émigrer aux Etats-Unis ou acheter une maison dont on n’a pas le premier sou… une trouille bleue vous saisit et ne vous lâche plus.
- Tu parles du couple, chouquet, mais une histoire de baise où quand c’est fini chacun rentre chez soi et ne pense plus à l’autre, c’est plus cool, non ?
- C’est pire. Parce qu’une liaison vous oblige à l’exploit, à l’exceptionnel. Les couples mariés qui se trompent le savent bien que si on pantoufle des deux côtés, ça vaut pas la peine. Et puis, une liaison se clôt plus facilement qu’un mariage. On est en sursis. On force pour être drôle et on n’est que lugubre. On veut être meilleur que celui qu’on remplace. L’effort se voit. On se sent moche et lamentable ! On bande tout le chemin en pensant à elle. Arrivé au nid d’amour, on ne sait pas pourquoi, c’est retombé comme un soufflé. On jure ses grands dieux qu’on n’y comprend rien. Elle vous console, mais vous voyez bien qu’elle vous soupçonne d’avoir fait l’amour avec votre femme juste avant de venir. On se demande si la semaine prochaine on ne sera pas obligé de reprendre la tournée des adresses sur le NET. Combien de surfeuses on va faire, combien de restaurants, de guéridons de bistrot, d’attentes, de déceptions d’emblée ou des déceptions qui ne viennent qu’à la deuxième ou troisième rencontre.
On baisse les bras à l’avance. On est accablé de repasser une sempiternelle fois les examens de dépistage des MST, quand le médecin vous dit, goguenard, « Mais n’êtes vous pas déjà venu le mois dernier ? ».
Mais, passons… Je m’allonge et vous venez sur moi, je préfère…
- Pas de chance mon chouquet, la demie heure est passée. Rhabille-toi et sois gentil, mets les cinquante euros en dessous de la boîte de préservatif sur la table de nuit, à cause des courants d’air quand tu ouvriras la porte. Ce sera pour une autre fois. Tu as attendu 42 ans, tu patienteras bien une semaine. Oui. Je recommence mercredi en huit et Laurence, ma remplaçante, n’aime pas les bavards. Si tu veux tu peux prendre rendez-vous, mais c’est 10 de plus pour réserver. Allons, t’en fais pas. Cette fois-là, t’auras à pas trop discuter. Tu t’es déballonné, hein ? On fera ça à la romantique. Un déshabillé rose et porte-jarretelles noir, ça t’irait ?...

2 mai 2004

La classe moyenne cale au feu rouge.

- Monsieur Roger, que représente pour vous notre Théâtre lyrique dans le concert des Nations ?
- Les voyants sont allumés, mais je ne dirai pas que c’est une bonne chose. Pourquoi me parlez-vous du Théâtre royal ?
- Vous n’êtes pas le responsable de la culture, version trombone ?
- Je vis dans les coulisses, mais pas du trombone. Je suis contre les policiers de l’air qui voyageraient armés dans les avions.
- Pourquoi ?
- Si les policiers en question étaient infiltrés par Al Quaida, ce serait le comble…
- Vous êtes donc chargé de la sécurité dans les aéroports.
- Pas du tout. Pourquoi me parlez-vous de cela ?
- Mais vous me parliez il y a dix secondes des policiers de l’air qui voyageraient armés !
- Vous veniez bien de me parler du Théâtre lyrique impliqué dans je ne sais quel concert des nations ! Que diable feraient les Nations dans Werther ou le Lac des cygnes ?
- Vous n’êtes pas Roger Mené des Classes moyennes ?
- Pas du tout, je suis du Soir et j’attends Roger Mené pour l’interviewer à sa sortie du ministère.
- Et moi, je viens d’Arte pour la même chose !
- ARTE s’intéresse à Roger Mené ?
- Vous paraissez surpris ?
- Je ne vois pas en quoi Roger Mené intéresserait ARTE ?
- C’est un promoteur des classes moyennes.
- Oui.
- Il est moyen en tout.
- Oui.
- Il est donc a égale distance entre la droite et la gauche.
- Il est centriste. Oui.
- C’est un conciliateur conciliant, un modéré modérément, un prudent moyen…
- Oui, et alors ?
- Donc c’est un casse-cou raisonnable, un engagé parcimonieux, un volontariste involontaire…
- Je n’y avais pas pensé…
- C’est aussi un considéré inconsidéré, un pétomane constipé, un bavard taciturne, un verre à moitié vide ou à moitié plein, un frontalier du centre ville, bref, c’est un oxymore vivant.
- Je ne le voyais pas ainsi.
- Nous allons sortir une série « Nos phénomènes » et j’aurais bien aimé prendre celui-ci dans notre émission.
- Vous allez être déçu. Monsieur Mené n’a rien d’un phénomène.

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- Mais si. Il est très représentatif du bon sens/non sens de notre société. Celle dont toute personne à l’entendement moyen se dit qu’elle est la meilleure et que pour rien au monde elle n’aimerait changer. Cet homme est extraordinaire, au contraire. Il met d’accord tout le monde sur une sagesse de laquelle découle un grand bon sens. C’est sans réplique ! Tout prend et garde sa place dans le développement harmonieux d’un monde qui progresse vers la perfection dans sa stabilité.
- Où est l’oxymore là-dedans ?
- Si justement. A raisonner de la sorte, à ne vouloir rien que la place de chacun dans un ordre de choses immuables, de respect, de devoir et de culture, à n’aspirer qu’à la propriété par le travail et par l’effort…
- Eh bien ?
- Nous allons tous nous casser la gueule un jour ou l’autre ! Voilà l’oxymore…

1 mai 2004

Qui veut mon muguet ?

Le Premier Mai est l’occasion des grandes envolées revendicatives.
Je préviens le lecteur que cette chronique a été écrite avant les discours au kiosque d’Avroy.
Sans avoir atteint le Nirvâna d’onze heures (comme le bouillon) au rassemblement traditionnel, on pourrait dévoiler à l’avance tous les ressorts qui feront vibrer les apparatchiks du Parti socialiste, les gamelles des guichets de la Place Saint-Paul et les quelques pigeons, dont je suis, dits « de gauche » qui vont s’emmêler les pinceaux avec les traditions et les vieilles gardes, au muguet des lendemains soirs qui déchantent.
L’année dernière, c’était le chaud aux fesses d’ARCELOR et la présentation d’une petite militante à l’hérédité socialiste chargée qui fait sa trouée place Sainte-Véronique. Cette année, nous aurons droit aux moutonnements d’une foule en période préélectorale.
Comme on n’a pas grand-chose à se mettre sous la dent, on grossira « la menace » libérale. On parlera de résistance en matière de chômage, d’assurance maladie et du statut des Services publics, genre : Touche pas à mes rails…
Il est à remarquer qu’à un mois et demi des élections, l’attitude de l’élite « ouvrière » sera plus ferme, plus combative que jamais… Plus la voix est mâle et décidée, plus les accents de sincérité percent à travers une élocution déjà chargée de quelques verres de bière, plus il n’y a rien à dire, sinon qu’on a joué la partie de jacquet habituelle en collaboration avec la droite, qu’on a fait exactement tout comme avant et que si on a avancé ce sera grâce à personne et reculé ce sera à cause des autres.

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C’est seulement dans l’expression attendrie ou angoissée de l’orateur, dans son tonitruant « Camarade » au début du discours et à la fin, qu’on saura si l’alliance avec les libéraux aura des chances d’être reconduite aux prochaines législatives, bien après le 14 juin..
A ce propos, rappelons à certains journalistes impatients que la vasectomie des élections générales anticipées, avec la démission prématurée des casquettes fédérales, c’est foutu. On peut penser que c’est la trouille du Vlaams Blok qui a infléchi la manœuvre.
A y réfléchir, les Socialistes attendent l’après juin pour se faire une idée des progrès en voix qu’ils entendent réaliser, pour plus tard, non pas pour négocier dans l’avenir immédiat une alliance secrète avec le CDh au cas où… mais uniquement pour alourdir de quelques points le cahier de revendications quand sonnera l’heure de dialoguer avec le MR, entre amis, pour la législation suivante. Car, main au feu, ils renoueront avec le MR, même si le CDh serait en mesure de faire l’appoint des voix au fédéral.
Et vous savez pourquoi ?
La tendance sous l’impulsion de Joëlle Milquet au CDh est dorénavant carrément sociale. Mine de rien, cette bonne femme a réussi à éliminer les vieilles barbes droitières de la direction. Elle veut développer un programme de gauche. Vous voyez ça d’ici ? Deux partis de gauche au pouvoir en Wallonie et donc au Fédéral ?
De cette dérive-là le PS n’en veut pas.
Les gens en attendraient trop de bouleversements. Ce qui effraie le stratège montois qui n’a pas encore fini de « caser » sa famille.
Le MR est un gage de stabilité dans le système belgique. Le PS a horreur de l’aventure qui remettrait en cause toute sa hiérarchie et tout ce qui attenterait à l’ordre actuel.
Cela ne veut pas dire que Joëlle Milquet est une sorte de « Che » en jupon, non. Cela veut dire que même un frémissement à gauche, le PS n’en veut pas.
Seule incertitude au kiosque d’Avroy, aurons-nous droit à l’excellent jazz-band de l’année dernière ? C’est que les standards américains conjugués au poing tendu de nos grands leaders accompagnant une vibrante Internationale, ça la fout mal.
Ce serait dommage qu’on abandonne Glenn Miller sous prétexte de la guerre d’Irak. Un guitariste asexué interprétant du Léo ferré et du Montéhus, serait le pire de tout !
Si Jean-Marie Peterkenne reste au PS pour la partie musicale, alors on aura du bon…
C’est même la seule valeur sûre de la place Sainte-Véronique, siège local des têtes pensantes de la révolution à date ultérieure non précisée.
Au moins lui, quand il parle de jazz, c’est pas du pipo.