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31 août 2009

Bernard Clerfayt repart fort…

Ils sont incorrigibles ! Dès qu’on a le dos tourné, ils plongent les doigts dans le pot de confiture. A peine a-t-on entendu parler de la taxe carbone initié en France par « une mission » du président de la République à MM. Rocard et Jupé, cela fait « tilt » dans la cervelle de Bernard Clerfayt, secrétaire d’Etat à la fiscalité environnementale (le seul qui pouvait prolonger ses vacances et qui ne l’a pas fait).
Personne ne conteste qu’il faille diminuer la pollution de l’air et que le meilleur moyen est de le faire comprendre en alourdissant les coûts de ce qui pollue ; mais, sauter sur tout ce qui peut rapporter de l’argent et le faire sans discernement, à seule fin de remplir des caisses vides, n’est pas un bon moyen, à la limite, il est malhonnête.
L’énoncé des intentions de Clerfayt « opérer un transfert de la fiscalité du travail vers la fiscalité de l’énergie, et ce à fiscalité constante et sans conséquences sociales » est parfaitement illusoire, parce qu’impossible pratiquement dans un esprit de neutralité.
Tout qui consomme de l’énergie « polluante » serait sanctionné au profit d’une catégorie socioprofessionnelle en l’occurrence le patronat, signifie en clair que le citoyen va cotiser une remise à l’industrie. Et même si cela devait engendrer 60.000 emplois, ce qui est loin d’être prouvé pour la raison que la réduction de la TVA dans les restaurants n’a pas produit une diminution des tarifs, ni un accroissement du personnel, de même, il n’est pas dit que l’industrie engagera des travailleurs à la diminution de ses charges. Seule certitude, l’industrie ne sera ni gagnante, ni perdante dans l’affaire. Par contre, le particulier va trinquer, comme d’habitude.
Les Ecolos seront aux anges. Qu’ils se détrompent. Cela pourrait leur nuire. Les partis traditionnels sauront le cas échéant se débiner devant leur responsabilité si l’opinion publique grogne. Dupont et Javaux pourraient s’en mordre les doigts, comme lors de leur mésaventure au sujet des taxes sur les bouteilles plastiques qui n’ont jamais remis en vogue les bouteilles en verre récupérables.
Ce que Clerfayt appelle une opération neutre va obérer les plus modestes revenus, surtout les travailleurs du bas de l’échelle qui ont besoin de leur voiture, celle-ci étant souvent leur seul moyen de transport, compte tenu de la carence des transports en communs dans certaines communes et banlieues, sans compter les pensionnés et les chômeurs déjà à la limite des ressources.
C’est tellement flagrant que Clerfayt, se reprenant, penserait déjà à des compensations sous la forme de chèques aux plus démunis.

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Il faut dénoncer une fois pour toute cette façon de procéder comme étant parfaitement injuste. En effet, cette mesure s’arrête à des plafonds de rémunération, c’est-à-dire soulage une petite partie des citoyens, tout en pénalisant la catégorie juste à la frange qui par cet effet produit un tassement de la pauvreté en augmentant le nombre de pauvres, les non-assistés rejoignant les assistés.
Il est inconcevable que cette mesure de détaxation du travail bénéficie à l’industrie automobile qui n’a rien fait pour promouvoir la voiture électrique au cours de ces dix dernières années, laissant aller le goût des 4X4 et les voitures de luxe en plein boum.
C’est toute une philosophie écologique qui est à revoir, si on ne veut pas que ce soient les écolos qui en partant d’intentions louables aggravent le sort des populations déjà fortement touchées par la crise.
On oublie trop facilement que la plupart des pensionnés restent autonomes grâce à l’automobile qui leur permet d’accomplir des petits transports nécessaires en économisant leurs forces et en ménageant leurs jambes.
On a voulu maintenir à tout prix le circuit de Francorchamps symbole parfait de la voiture polluante, chère et inutile. Comment voulez-vous agir par pression sur les grosses cylindrées ? En augmentant le prix des carburants ! Ce qui est une peccadille pour les gros pollueurs, est un drame pour les petites gens.
Une autre catégorie de citoyens, ceux qui se chauffent au mazout et probablement ceux qui utilisent le gaz naturel, par souci d’égalité fiscale, seront pénalisés injustement et de façon inégalitaire comme tout le reste, par cette proposition de Clerfayt.
Là aussi, s’établirait un système de chèques compensatoires ? Décidément, on n’est pas sorti de la ristourne, sauf que le pensionné vivant seul et avec une pension de 900 euros le mois, en plus payant sa cote part dans un chauffage collectif, ne bénéficiera de rien. Pourquoi pas distribuer des pull-overs à cette catégorie à la frange du subside ?
Comme on le voit, le gouvernement à besoin d’argent et tout argument est bon pour remplir le tiroir-caisse.
Ultime question : qui sera habilité pour vérifier que l’argent récolté de la dernière invention fiscale ne va pas boucher des trous un peu partout avant d’orienter ce qui reste vers les postes justificatifs de cette nouvelle ponction ?
On les connaît, les lascars, dispendieux pour eux, parcimonieux pour les autres.
Dès la rentrée, les socialistes vont être dans leurs petits souliers. Convertis depuis longtemps au système économique libéral, nouvellement adeptes de l’écologie, comment vont-ils s’arranger pour nous faire croire que l’augmentation des taxes et accises est une juste mesure « neutre » pour tout le monde ?
Monsignore Di Rupo va avoir besoin de reprendre sa rhétorique sur l’art de faire prendre des vessies pour des lanternes.
Il y aurait pourtant une belle mesure écologique à prendre, ce serait celle qui plafonnerait les revenus et salaires les plus élevés, y compris ceux des hauts fonctionnaires et parlementaires, limiter les revenus des mandats publics et sabrer dans les dépenses de prestiges de l’Etat. On économiserait ainsi des milliards et surtout, on limiterait la vente et la circulation des voitures de grosses cylindrées, y compris le charroi du gouvernement et des représentants de la Nation.
J’avance le chiffre de 5.000 euros par mois maximum. Ce n’est pas du tout courant ce salaire dans le privé. Qu’en pensent Di Rupo, Javaux, Milquet et Dupont ?
On pourrait le leur demander. Je l’ai déjà fait. On ne m’a jamais répondu.

30 août 2009

Rallye moto au PS…

…pourtant le gros cube est à Jodoigne.

Finie la gaudriole, il faudra bien songer à la rentrée politique.
Je ne suis pas le seul à y penser. Les brillantissimes s’y préparent aussi, qui déjà dans la coulisse, qui encore en Toscane à réparer le toit de la villa, tout en vendangeant les quelques hectares de piquette autour. Vont-ils frapper en octobre ou vont-ils attendre de présenter leurs condoléances à la mi-janvier quand la pandémie aura, comme la crise, vomit son pic de croissance ?
Les Français de gauche, eux, n’attendent pas qu’ils pleuvent des grenouilles pour attaquer le plat de résistance à Sarko, foi de Martine Aubry qui passe de la douche froide à la douche bouillante à l’université d’été du PS.
On se demande si Titine n’a pas profité des vacances pour se faire lifter, tant elle semble moins moche qu’en juillet, concurrence physique avec Ségolène, sans doute. Et puis, cette idée de faire voter tout le monde pour connaître le nom de l’éléphant dominant, lui a probablement soufflé à l’oreille que si elle veut avoir une chance, c’est de passer plus souvent chez le coiffeur.
Ce n’est pas comme le PS belge. Cela pourrait faire une émission « avis de recherche » rubrique « que sont-ils devenus ». Je sais bien que Laurette Onkelinx cocoone en famille internationale, mais quand même, elle ferait bien d’imiter l’exemple français si elle veut réapparaître comme pratiquement indispensable tant du côté d’Elio que du côté de Van Rompuy, pas encore revenu de son tour d’Australie à bouffer des kangourous ; mais en liaison permanente par satellite avec son frère, premier ministre par intérim familial.
Il y a bien eu les gesticulations habituelles autour de la tour de l’Yser, mais bon, les hurlements au son des tambours, le tournoiement des drapeaux d’or à gueule de lion, les pennes des étudiants de Leuven au-dessus de visages haineux, à la longue, ça tourne à la rigolade. On peut même se poser la question, si en 33, le vieux chancelier Hindenburg n’avait pas pris l’Adolphe au sérieux, est-ce que Hitler aurait enflammé les foules en 36 ? Aurions-nous eu la deuxième guerre mondiale ?
Qui va dire non aux sottises flamingantes en 2009 ?
C’est la question de la rentrée, à laquelle il est prématuré de répondre.
Il y a aussi le match Didier contre Louis qui n’a pas débuté au sein du MR, sur la capacité de son président à conduire les affamés de mandats à la mangeoire.
Dans le cas de ce parti, la nouvelle cure d’opposition en Région et la perspective qu’il pourrait en être ainsi bientôt au gouvernement fédéral, assombrissent les jours de Didier Reynders.
Pour un qui se voyait déjà, et qui se retrouve ailleurs, son ego a dû prendre un coup. Or, quoi qu’il arrive, un président de parti doit se montrer sûr de lui et négliger les petites imperfections sur la route qu’il s’est tracée. Quand ces imperfections deviennent des nids de poule, ce sont les suspensions du parti qui prennent.
L’exemple de Di Rupo « humble » et souriant, affrontant les déferlantes carolorégiennes et les aigreurs de l’ex bourgmestre hutoise, comme s’il n’était pas responsable du chaos des sections, est un numéro de voltige, une leçon de culot pour Didier Reynders.
Ce samedi, des militants rosés ont relié en moto les sections en Région de Charleroi, le temps de pleurer sur les Maisons du Peuple « Qui ne sont plus ce qu’elles étaient ». On a quand même bu le verre de l’amitié dans les arrières salles, jadis plus fréquentées.

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Les Ecolos s’universalisent et botanisent en Ardenne. Milquet mobilise ses troupes à Chevetogne.
Les MR traînent la patte. Reynders hésite à mettre les militants sous chapiteau à Jodoigne, fief de ses rivaux..
Evidemment le « c’est pas moi, c’est l’autre » dans le cadre d’un MR avec les Michel frustrés, ce n’est pas gagné. C’est évidemment plus facile au PS, où il n’y a plus de grands leaders, évincés par l’habileté de monsignore. C’est formidable quand même d’avoir mis tout le monde à son gabarit, c’est-à-dire franchement neutre et nul.
Reste à jouer avec les noms des illustrissimes du gouvernement dont on ignore tout, même jusqu’à se demander s’ils sont encore en vie ?
Par exemple, Annemie Turtelboom, ministre de l’intérieur. Ce nom qui sonne comme une légende des Marolles - on la croirait au mariage de mademoiselle Beulemans - recouvre une personne de qualité parlant un français supérieur à la moyenne des ministres francophones.
Il y a un autre pas mal non plus, Van Quickenborne, malheureusement gâché par un prénom classique, Vincent, ministre pour l’Entreprise et la Simplification ! Son ministère, qu’est-ce que ça peut bien être ? Dans le creux des vacances, voilà quand même un sujet que la presse aurait pu aborder. Comme sur la plage, on ne regarde que les images et profitant du décès de Jackson, cela aurait pu faire deux colonnes, passées totalement inaperçues, mais qui auraient bouclé la page politique quand même.
Le plus navrant, c’est qu’on n’a pratiquement pas eu la moindre clownerie de Michel Daerden, ministre des pensions, pour remplacer avantageusement « Fou Rire », dont la disparition reste inconsolée de Knokke-le- Zoute à La Panne. Vivement que le Standard renoue avec le succès, afin de revivre les soirées inoubliables du ministre qui ont fait le tour de la planète.
Il paraît qu’on va déguster une autre version de la taxe carbone à la française, mais qui aura la même destination : nous taxer un peu plus.
Avant qu’on ne passe à la caisse afin d’y dégueuler notre connerie, profitons des derniers beaux jours et méfions-nous des gens qui toussent.

29 août 2009

Et si Dieu était Anglais ?

A propos de la Bible, on peut se demander si Dieu avait guidé la main de ou des auteurs, cela aurait une autre allure ? On ne peut imaginer que Dieu soit un mauvais auteur, un Paul Lou Sulitzer qui a mal choisi ses nègres.
Et pourtant, son œuvre pseudo historique n’a pas la documentation d’Alexandre Dumas du règne de Louis XIII, le souffle épique de Stendhal quand il entraîne Fabrice sur un champ de bataille, et la rage de Moravagine imaginée par Blaise Cendrars.
Il n’y a pas vraiment une suite logique. On sait que Ponson du Terrail avait l’art de terminer le feuilleton du jour de telle sorte que le suspense obligeât le lecteur d’acheter le numéro suivant, avide d'en savoir la suite.
Dans la Bible, tout est prévisible et pourtant tout est tellement embrouillé que voilà des siècles que des exégèses tentent d’expliquer à des ouailles une histoire dont le fil se perd, se rattrape, pour mieux se perdre à nouveau.
Tout est tellement invraisemblable qu’il est inutile que le lecteur, comme dans un roman compliqué d’Agatha Christie, saute à la dernière page pour avoir la clé des mystères. Ah ! si le bouquin avait été au moins traduit par les traducteurs de l’américain d'un roman noir de Chandler, on saurait vraiment qui a assassiné JC !
Il y avait tous les ingrédients pour un best seller. Des intrigues à n’en plus finir, du sang des larmes, des crimes et pas d’explication, ou plutôt une seule bien commode : Dieu qui tire les ficelles. Point d’autre responsable. C’est Lui. On s’en doutait. C’est trop facile, tout de même.
On est frustré.
On ne comprend même plus pourquoi il s’est fait autant de tort à lui-même. Tous les auteurs sont masochistes, mais à ce point !
Puisqu’Il a tout voulu, tout prévu, tout fait, pourquoi tant de haine ?
Pour punir le lecteur ? Ah ! bon… C’est bien la première fois qu’on publie le manuscrit d’un auteur qui en veut à tout le monde !
Et pourtant, c’est parmi les livres les plus vendus, celui qui a battu des records. Les critiques sont pratiquement inexistantes. Mieux les autres maisons d’édition qui ont publié des versions différentes de la même histoire, le Talmud, le Coran, la Bhagavad Gita, ou le Mahabharata ne se font pas la guerre des tirages et n’essaient pas de rafler les rééditions à la concurrence.
Très différents sont les lecteurs.
Chaque version à ses partisans acharnés. Certains parmi les plus exaltés récusent les autres versions. D’autres vont jusqu’à nier que le tout vienne d’un seul auteur, comme l’Iliade d’Homère, ils pensent que JC est un nom d’emprunt. Le plus curieux, c‘est que celui-ci laisse dire.
Depuis le temps que l’on attend comme Roman Kacew, alias Romain Gary et Emile Ajar, que l’auteur de la Bible avoue qu’il nous fait le coup lui aussi de trois auteurs en un, sa confession se saurait !
Moralité, des lecteurs frustrés de l’histoire bâclée ont trouvé intelligent de la raconter à leur manière. Spoliés des droits d’auteur les éditeurs associés ont condamné les hérésies.
C’est ainsi qu’on a vu dès la parution du best seller des clubs de pensée se former où les supputations vont encore bon train en 2009.

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A la première édition sur palimpsestes, on a vu des Modalistes réfuter la double nature de l’auteur, celui-ci n’ayant été qu’une modalité de l’action de Dieu dans le monde.
Des Monophysites lors de l’édition de Calcédoine en 451 ont affirmé que vrai Dieu et vrai homme, JC est une seule personne en deux natures. Les Nestoriens affirmant autre chose, il y eut autant de bruit au temple du bien dire, alors que Jack Lang n’était pas encore né, qu’à la première d’Hernani.
Depuis lors, cela n’a jamais cessé. Nous vîmes des Hattémistes ébaubis, des Infralapsaires résolus, il y eut même un illuminé, le père Alfred Loisy qui écrivit en 1900 « Jésus annonçait le royaume et c’est l’Eglise qui est venue. ». C’est comme si on accusait Gaston Gallimard d’avoir écrit le « Voyage au bout de la nuit » !
A l’heure présente, on ne s’y retrouve plus.
Le récit assez frustre, mal agencé, avec plus de personnages qu’un roman de Dostoïevski, s’est gonflé de cent épisodes nouveaux, mille ajouts qu’on aurait retrouvés au fond d’une grotte dans des jarres en plein désert du Néguev !
C’est dommage.
Ah ! si l’auteur avait eu le talent de William Shakespeare ! Pour cela, il eût fallu que Dieu fût Anglais.
Richard III eût été Ponce Pilate, et la Reine Elisabeth, la douce Madeleine. Ce qui aurait été préjudiciable à la Livre Sterling.

28 août 2009

Talk-show de la rentrée

. -C’est quoi, l’Amour dans le pré ?
-C’est une émission de RTL avec Julie Taton en guest-star.
-Le gagnant fait l’amour dans le pré avec Julie Taton ?
-On ne sait pas. De toute façon, elle fait ce qu’elle veut. Le but n’est pas là.
-Je ne vois pas ce qu’on foutrait dans un pré tout seul ?
-Miss Taton rencontre dix agriculteurs qui ne trouvent aucune femme pour vivre avec eux dans leur bled. Alors Julie se pointe, rameute des candidates à la bague au doigt, fait l’intéressante, montre un peu ses nichons. Tout le monde est bluffé. On croit que c’est elle qui s’offre…
-Elle fait marieuse pour cas difficiles, quoi ! Je sais, j’y ai posé ma candidature. C’était dans une autre émission qui s’appelait « Prendre son sexe en main », je crois…
-Elle permet de trouver l’âme sœur à des gars qui sans elle resteraient célibataires.
-Non, la mienne c’était un truc sur la masturbation… Ils ne savent pas draguer tout seuls dans les prés ! Ils l’ont grave…
-Ils sont timides, isolés, trop occupés… puis, devenir femme de fermier, c’est pas Julie Taton en talons aiguilles qui pourrait…
-Je veux. Faut pas charrier. Ces gars-là ne sont pas des cas trop difficiles. Ils sont sanguins, entre deux âges et propriétaires à la campagne. RTL sait pas ce qu’est un cas difficile.
-Toi, tu sais ?
-Être nain, par exemple, c’est un cas difficile. En dessous du mètre quarante, bonsoir pour aller en discothèque. Tu dois demander ton chemin pour sortir de la piste de danse. Joséphine est déjà prise, reste plus qu’à consulter les statistiques. T’as combien de naines pour mille naissances ?
-T’es nain, toi ?
-J’te cause des cas vraiment difficiles. Mais miss Taton ne s’est-elle pas embarquée dans l’amour pour venir en aide aux branleurs désespérés ? Est-ce que c’est plus facile de convoler quand on est cultivateur à Virton, ou quand on est nain à Bouillon ?
-Je suis ni l’un, ni l’autre.
-Alors, tu peux pas savoir. Ce serait chouette si après quelques émissions, aucune charmante ne se décidait d’écosser les petits pois à Paliseul et que Miss Taton serait dans l’obligation d’aller y traire les vaches au laissé pour compte, avant de finir la nuit dans la chambre tapissée de boutons de rose, pour pas trop décevoir son public.
-Ouais, on appellerait la chose la Reine des prés à tâtons ! T’as raison les fermiers sont pas les plus malheureux… Il y a les nains.
-Pas qu’eux. Les vieux, encore un autre exemple, quand t’as quatre-vingts balais et que tu veux épouser, tu peux toujours aller dans les discothèques traquer de la gueuse ! Tu te ferais sortir comme pédophile pour attentat aux mœurs, rien qu’en invitant à danser une personne de trente-six ans.
-Pourquoi pédophile ? Trente-six ans, c’est déjà un âge.
-Justement à cause de la différence…
-Attends un peu que je t’observe ?
-Vas-y !
-T’as quel âge, mon pote ?
-Bientôt soixante-dix neuf diraient les fransquillons.
-T’es un candidat potentiel !
-Penses-tu. J’ai écrit à Miss Taton, pour l’émission « Prendre son sexe en main » des fois qu’elle aurait pris le mien. D’abord je croyais que c’était elle qui cherchait un gars de la campagne, comme j’habite en dehors du village de Sainte Cécile - c’est au bord de la Semois - je me suis dit, Miss Taton, j’te la culbuterais bien dans la bruyère, pour sa nouvelle émission et plus si affinité, en tout bien tout honneur… foi de Rappaport.
-T’es trop vieux, mon pote, pourtant tu remplis la condition, t’es de la campagne.
-J’y avais pourtant souligné que j’étais raisonnable dans mes prétentions… que j’épousais une candidate qui aurait jusqu’à cinquante ans, pas plus.
-Elle les a pas encore… Et alors ?
-L’amour dans le pré, ce n’est pas pour ma gueule, trop vieux !...
-C’est dégueulasse !
-Comme tu dis.
-Attends un peu, descends du tabouret, tu veux ?... Mais, tu fais pas un mètre quarante !
-Tu l’as dit bouffi.
-T’es un nain !
-Oui, et alors ?

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-En plus t’es vieux…
-Exactement.
-Et t’habites la campagne !
-Tu vois l’émission grandiose que ça ferait ! Miss Taton au sommet du hit parade… Un nain de la campagne, vieux avec ça, qui convolerait avec une jeunesse de moins de cinquante ans, Miss Taton soi-même ! La gloire à jamais…
-Elle a répondu ?
-…que son directeur est dans mon cas et que ce n’est pas les occasions qui lui manquent !

27 août 2009

Remise en ordre et révolution dans l’impasse !

A la suite de l’article d’hier sur la difficulté qu’éprouve le grand public d’être au fait de la situation économique réelle en Belgique et avec lui le public de l’Europe de l’Union, une des raisons cachées est de toute évidence l’exposition des faits qui remettrait en cause dans l’opinion le système générateur de tant de dégâts .
Voyez-vous qu’un histrion conduise les peuples en colère à renverser le pouvoir libéral ?
Il suffit de réfléchir une seconde. La propagande capitaliste a réussi à nous donner l’illusion que la crise actuelle n’est pas méchante, une sorte de cancer colorectal dépeint par la pub quasiment l’ami de l’homme. Pour inverser la tendance, il faudrait une poussée tout aussi considérable qui nous ferait croire à un socialisme capable de guérir ce cancer sans chimio, c’est-à-dire que nous conserverions un niveau de vie moyen comparable à l’ancien. Cela ne se peut, bien évidemment. Et si une révolution n’est qu’un ordre qui se fonde sur un ordre qui s’effondre, aucune révolution n’est capable de le garantir.
Déclenchée dans l’un ou l’autre Etat, tous les autres se ligueraient contre lui.
Une révolte simultanée de tous les pays, est une utopie inenvisageable.
Qu’adviendrait-il si excédés par la droite et la social-démocratie de plus en plus veule, les Français votaient Besancenot au point que celui-ci se verrait à la tête d’une majorité absolue ?
Le premier emmerdé, ce serait lui.
La fuite massive des hommes et des capitaux, l’hostilité ouverte des Etats riverains, le poids de la maffia internationale du commerce, feraient payer aux Français une facture qui en jetterait plus d’un dans la rue, afin de rectifier leur vote et venir à Bruxelles, comme jadis à Calais, en chemise et la corde au cou..
Le capitalisme occidental a gagné la planète entière. Est-ce pour cela qu’il est juste, bon et progressiste ? Hé non ! c’est même tout le contraire.
Cependant, même les derniers pays communistes y viennent.
Inutile d’en discuter les principes, il n’y en a pas. C’est pour cela qu’il a encore de l’avenir. En effet, les prévisions faisant état d’un resserrement des grosses fortunes et des pouvoirs autour d’un ultime noyau de possédants, n’est pas pour tout de suite. Par conséquent le seul moteur de l’économie : l’égoïsme à l’état pur a encore du carburant à consommer dans ses moteurs.
C’est probablement le seul moyen de faire travailler les gens que de leur promettre une meilleure existence s’ils travaillent davantage ou s’ils s’avèrent plus malin en faisant travailler les autres.
Ce n’est jamais qu’une représentation du chacun pour soi que le capitalisme véhicule.
Bien entendu, ce système a des limites physiques, sans parler de morale, celle-ci n’ayant jamais eu grand chose à voir dans le libéralisme depuis Locke.
Les limites sont d’ordre matériel. Les riches gavés et les pauvres démunis ne sont pas encore antagonistes ; cependant ce sont les pauvres qui produisent afin d’entretenir les riches et ça, c’est explosif. Car sans croissance, quand le système marche encore très bien pour certains, il marche mal pour les autres. Et ceux pour qui cela marche mal finissent par être socialement exclus. Jusqu’à présent, ils restaient solidaires par la force d’un égoïsme atavique et hors saison.
Du plus petit socialiste au dernier des réactionnaires engagés, tous usent de leur force de conviction pour convaincre les exclus, qu’ils ne le sont que momentanément.
Reste qu’ils ne sont plus consommateurs et comme la raison même du système c’est la croissance, à qui et comment vendre les productions ?

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Toute l’astuce du libéralisme n’aura plus de sens le jour où les populations seront convaincues que le système nous vendait une liberté qui n’était en définitive qu’un égoïsme.
Dans ces conditions, voter, n’a plus de sens. Les partis de pouvoir conduiront l’Etat à la catastrophe sans faire une seule proposition qui sorte l’homme de ses égoïsmes. Certes, il y a des baumes accompagnateurs, la sécurité sociale, les pensions, les indemnités de toutes sortes. On peut se demander s'ils ne sont pas le moyen de prolonger le système et si leur suppression étant impossible sans émeutes, le pouvoir économique les concède-t-il non sans rechigner à ce manquement de la ligne libérale.
En attendant que ça coince et que le moteur se grippe définitivement, nous ne pouvons faire mieux que rester sceptique devant les bonimenteurs de l’économie libérale. Egoïsme contre égoïsme, le nôtre à ceci d’avantageux que même victime du système nous le sommes moins que d’autres dont la malchance initiale a été d’être né planteur de bananes, ou pêcheur au long des côtes somaliennes.
N’en tirons aucune fatuité de cet avantage. Il ne durera pas.
Espérons quand même un Pic de la Mirandole des temps moderne qui découvrirait le moyen de mettre par terre cette honte de l’humanité qu’est le système capitaliste sans faire trop de dégâts, en douceur pourrait-on dire, et sans que nous perdions trop en vraie liberté et en gadgets du confortable.
Il ne faut pas trop y rêver, sans doute à cause de l’antagonisme entre le vice et la vertu. Personne n’a encore vu le vice se mettre au service de la vertu pour la paix et le bonheur des hommes.
Si seulement nous avions en Belgique des économistes du calibre d’Elie Cohen ! Au moins n’entrerions-nous pas dans le gâtisme en buvant les paroles de Nicolas Sarkozy « qui met les banques françaises au pas ». Nous saurions que sans l’accord des places de Londres et de NY, Nicolas Sarkozy ne pourra pas diminuer les prétentions de ses traders.
Or, les deux plus grande places du capitalisme ne sont pas les moteurs de l’industrie, ils ne sont que les organisateurs des jeux d’ordres qui brassent des tonnes de papiers monnaies contre lesquelles personne ne peut rien.
Mais les banquiers énervent les contribuables, d’où la gesticulation de Sarkozy.
Quand donc le grand public sera-t-il conscient de ce qui se passe ?
Quand donc la presse osera-t-elle aborder le problème du capitalisme lui-même ?

26 août 2009

Mister Doom

Nouriel Roubini est un docteur en économie Turc issu d’une famille de Juifs iraniens, enseignant dans une université américaine (Yale), cosmopolite à souhait pour lier la sauce et faire un chef-d’œuvre du bien comprendre de la situation mondiale en matière d’économie ; sauf que Roubini est un pessimiste, genre dont les médias, les politiques et les industriels ont le plus horreur.
Car, c’est un pessimiste qui a souvent raison
Au début des années 2000, il a été surnommé Dr. Doom ou « Dr. Catastrophe » à cause de ses prédictions économiques plus alarmistes que la plupart de ses collègues. En 2005, selon Fortune, Roubini a affirmé que le « prix des maisons surfait sur une vague spéculative qui coulerait bientôt l'économie. À cette époque, il a été qualifié de Cassandre. Maintenant, il est un sage. » Sauf que c’est un sage dont on redoute les déclarations.
En effet, depuis le début de l’année 2009, on essaie de nous faire croire que les affaires reprennent. Pas plus tard que ce midi, une informatrice d’Europe 1, sans doute qualifiée, nous regonflait le moral à coups de bonnes paroles sur l’immobilier. On sentait son désir de nous faire partager son enthousiasme. Y a-t-il un politicien au pouvoir qui tiendrait un discours contraire ?
Donc, on nous ment, même partiellement je veux bien l’admettre, mais on nous ment sur l’état de santé du système économique, foi de Roubini.
Ce qu’il dit est quand même frappé du coin du bon sens, à propos de la situation économique aux Etats-Unis et à présent certains pays d’Europe : les pays qui financent la balance courante par des prêts effectués à l'étranger, sont menacés de faillite, pure et simple. Les États-Unis seront probablement les prochains à subir un tel choc. Cet endettement est en partie dû aux prêts sans condition que les Etats ont accordé aux banques. Il aurait cent fois mieux valu nationaliser quelques unes d’entre elles. Elles auraient joué le rôle de pilote en assainissement.
En septembre 2006, Roubini lors d’une audience de spécialistes, sceptiques, du FMI, présidé par le prédécesseur de DSK, prévint qu'une crise économique était en gestation : « Dans les mois et les années à venir, les États-Unis vont probablement vivre une dépréciation immobilière qui ne se voit qu'une fois dans une vie, un choc pétrolier, une diminution prononcée de la confiance des consommateurs et, ultimement, une grave récession.»
On a ri de lui une fois de plus, parce que le monde a besoin d’un discours rassurant. La vérité ne l’intéresse pas. En 2009, rien n’a changé.
Les économistes n’avaient pas prévu la crise, dit-on, ce n’est pas tout à fait exact. Ils avaient au contraire estimé qu’elle n’aurait pas lieu !
La RTB et RTL vont bientôt reprendre leurs émissions dominicales qui traiteront des grands sujets d’économie. Je parie tout ce qu’on veut que le panel des invités sera le même à peu de choses près que celui de l’an dernier.

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Les politiques vont nous dire que grâce à eux on a évité le pire et que l’on peut être modérément optimiste pour les années qui viennent. Les économistes qui depuis dix ans nous promènent d’erreur de jugement en mauvaise estimation, auront des mots élogieux pour qualifier les efforts qui ont été entrepris pour redresser l’économie. Enfin le public, trié sur le volet, aura comme d’habitude aussi peu à dire et toujours aussi mal.
Aujourd’hui, Roubini, s’il est devenu un intervenant majeur dans les débats économiques se déroulant aux États-Unis et sur la scène internationale, même si le New York Times affirme qu'il est « le sage qui a vu venir » et que le Prospect Magazine l'a mis en 2e place sur une liste des 100 intellectuels vivants les plus influents, n’en demeure pas moins pour tout le monde un sacré emmerdeur.
Ses prévisions font état que les États-Unis ont un marché financier de piètre qualité, que l'économie américaine se contractera, ce qui causera un deuxième palier – double creux en terme d’économie - d’une récession mondiale. En Europe, au Canada, au Japon et dans les autres économies avancées, elle sera sévère. Les économies émergentes qui font affaire avec les pays développées ne seront pas épargnées.
Rappelons que les banques américaines, malgré l’effort d’Obama, sont toujours en faillite technique, de même que le système bancaire européen par un effet de vases communicants.
On n’a pas tort d’être indignés des primes offertes ces temps-ci aux traders.
Les banquiers, le monde de la finance en général, n’ont rien compris, au point qu’ils sont capables de nous refaire le coup des subprimes.
Ce qui est beaucoup plus grave, nos politiciens et nos hommes d’information continuent à diffuser des bilans tronqués, de fausses statistiques et des comptes-rendus bidons. Comme si la falsification de la situation réelle allait avoir une importance bénéfique, quand bien même elle euphorise les populations.
Cela empêche, évidemment, de se former une opinion basée sur des réalités et donc de réagir comme il convient.
Quand la montée du chômage, les dépôts de bilan et la baisse du pouvoir d’achat, feront-ils changer le discours de la pluie et du beau temps ?

25 août 2009

Un catalogue remis à jour..

A différentes époques, des esprits brillants ont été estimés par les Académies, et popularisés par quelques écrits.
On ne sait pourquoi, peu de temps après leur mort, si l’on excepte des érudits et des spécialistes de la période au cours de laquelle ils ont vécu, plus personne ne les connaît.
Ils se sont dissous dans l’intelligentsia de leur temps. Certains ont formé des disciples, eux-mêmes disparus ou, devenus plus célèbres que leurs maîtres, ils se sont empressés de les oublier.
Qui connaît encore aujourd’hui René Le Senne (1882-1954) auteur d’un « Traité de Caractérologie », publié en 1945, il n’y a pas 65 ans ?
Métaphysicien et psychologue, il appartient au courant spiritualiste et à la philosophie des valeurs. Il a été célèbré pour avoir fondé la caractérologie française. Il est fondateur avec Louis Lavelle de la collection « Philosophie de l'Esprit ».
Gaston Berger, son disciple, a-t-il fait de l’ombre à notre auteur ? Sans doute Le Senne doit-il beaucoup à son tour à Heymans et Wiersma, passés du côté obscur avant lui, et avec eux des dizaines de philosophes ayant vécu pour la plupart, dans ce siècle foisonnant et prodige que fut le XIXme s. dont on n’a retenu que la littérature romantique et la naissance du socialisme.
Il est vrai que l’on pourrait dire la même chose de Berger : Qui le connaît encore ?
De tous les érudits et les chercheurs, se sont encore les philosophes qui passent le plus vite à la trappe. Sans doute comme les idées, l’une chassant l’autre, dire l’éthique et la finalité des choses est un thème aussi vite remplacé que la mode. Le socle naturel dans lequel elles sont puisées est, lui aussi, en constant mouvement, puisqu’il s’agit de nous.
Le Senne avait pourtant tout pour survivre dans la mémoire des gens.
Définissant le caractère comme « l'ensemble des dispositions congénitales qui forme le squelette mental d'un homme. », ce La Bruyère scientifique des temps modernes, reste d’un grand intérêt pour les psychiatres, les psychologues et les graphologues .
Ou Le Senne date un peu, c’est lorsqu’il aborde l’étude « des sentimentaux » (page 265).

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L’appréhension de l’avenir doit se monnayer dans celle des futurs, écrit-il, pour décrire le « sanguin » qui pourrait être « avancé, libéral, progressiste, colérique, révolutionnaire », selon les circonstances. Types d’individus auxquels il oppose le sentimental prudent et misonéiste : « Presque aussi attaché que le passionné aux vieux souvenirs ».
Nos hommes politiques seraient donc presque tous des sanguins ?
Les sanguins progressistes, confrontés à des changements politiques apparaissant comme éminents « seraient plutôt inspirés par la crainte des troubles par lesquels il faudra passer, que par l’impatience des biens qui peuvent éventuellement en résulter ».
La voilà donc cette explication de l’avancée à reculons de la social démocratie dans le progrès et le changement : la peur ! mais une peur raisonnée, faite autant d’une crainte de perdre un statut social, que de déclencher une guerre civile.
Abordant le thème suivant « L’ennui » Le Senne se fige en caricature d’un XXme s à ses débuts., lorsqu’il s’abandonne à sa propre réflexion « retrouvant dans la conscience de lui-même, la source de l’existence des autres confondues à la sienne propre », ce que le philosophe appelle « L’homme fait moi » dont il accable Kierkegaard, Sénancour et Rousseau, mais qu’il ferait bien aussi d’appliquer à lui-même.
Le voilà bien le savant démasqué par son propre raisonnement !
Le reste de ce chapitre consacré à l’ennui marque les débuts confirmés du triomphalisme libéral. Pour Le Senne et cela pourrait tout aussi bien convenir à notre foufou national, Louis Michel tel qu’en lui même… « …l’inactivité doit être la condition principale de l’ennui. Pour l’expliquer, ce qui n’est pas si simple, nous admettrons que l’ennui est l’incapacité d’accoucher le désir c’est-à-dire de le faire passer de la velléité à l’activité, de le faire, de virtuel, actuel. »
N’importe quel philosophe de bon sens aujourd’hui, dirait que ce que Le Senne décrit là est justement l’inverse. La principale source de l’ennui pour la plupart d’entre nous est l’obligation de prester un travail sans intérêt, sans avenir, sans reconnaissance et d’où l’initiative du travailleur est exclue.
On a là, tous les ingrédients de l’ennui dans l’exercice d’une activité. L’ennui de l’esclave, du numéro, de la quantité négligeable et pourtant, l’homme rêve, a des idées, une forme d’activité manuelle ou intellectuelle qu’il voudrait exercer et qu’il ne peut pas.
Le dégoût de Vigny le désoeuvré, le travailleur qui s’ennuie le connaît « le dégoût de la vie urbaine et l’espoir dans ses géorgiques perpétuelles. Les années ont passé : il n’a plus un désir assez fort de rien. Il doit bien désirer, car on ne s’écarte pas entièrement le désir d’aucune vie. »
On pourrait terminer ici, mais si l’on remplace «l’ inactivité » mot qui va suivre par son contraire « l’activité », on aura remis le texte de Le Senne en 2009. « Mais l’[in]activité domine et il ne peut rien faire pour nourrir ce désir en commençant à le satisfaire ».

24 août 2009

Rentrée des classes.

-C’est la rentrée. Merde. Encore un an à tèje avec les fous, esgourder leurs mitos..
-T’as qu’à plus y aller, hé con.
-Le prof de français, dis donc, il a des veuch tout chelous, mais il est sympa. Le reste, c’est des bouffons… J’en ai ma claque avant de reprendre…
-Sa race !... Et les allocs, la gueule de ta vieille ? Les petits soldats dans le morlingue ?
- Trop chanmé! C’est décidé, je te laisse mes pschitt et je pars avec Marie-Jeanne.
-Tu fumes toujours ?
-Non. Ma go Marie-Jeanne. Te mets plus près des Baffles, Charly.
-T’es en main ? C’est une d’ici ? Une qu’on a sauté en assoce ?
-Elle est du downtown, mon pote !... Sérieux, j'kiffe trop son cul. C’est un truc de ouf…
-Pour tes pschits, j’en ai rien à foutre. Je tague plus, j’y ai gâché un jan.
-Tu tagues plus ? T’es tébé ?
-Au dernier volet d’un garage, en plus c’est le garage d’un cousin, j’ai pris 35 heures de hard labour. La honte en salopette orange à manier le karcher devant les bourges rigolards. Rien que pour avoir écrit « A ton cul la banane ».
-T’étais en pleine inspiration du beau style ! Qu’est-ce que tu vas foutre ?
-Si je rentre à l’école, je vais poursuivre ce que j’avais commencé l’année dernière, du nimp. Je démontais les interrupteurs du rez de la chose. Kevin me les fourgue à un euro pièce. C’est de la balle.
-Tu peux rien foutre avec un euro.
-Tu peux bien causer, toi, avec ta Marie-Jeanne, terminus Lantin.
-J’ai un plan. Elle va vider la tirelire de ses vieux et on se tire dans le Tarn, au Rozier, où son dab retape une baraque pendant les vacances. Ça sera auch…
-Tu flippes complet ! C’est la première planque que les flics visiteront. Tu sais ça marche le portable entre poulets. Puis, dans les villages, c’est des sournois et des sanguins pour ta meuf.
-Alors, on ira ailleurs. Je sais on va bad-triper…
-C’est pas au Rozier que tu vas la checker. Parce que la Marie-Jeanne la première chose qu’elle leur dira au poulet, c’est qu’elle était pas la seule à dévaliser ses vieux, elle avait son branleur.
-La vie, c’est dégueulasse.
-Te lamente pas trop. On est des jeunes. Quand on aura leur âge, ils seront tous crevés.
-C’est pas faux. En attendant, c’est eux qu’ont le blé.
-Faudra bien qu’ça change de mains ! Y a bien le travail honnête.
-T’as vu la gueule des gens qui travaillent honnêtes ? Nos parents déjà…
-Toi t’as pas 18 ans. Moi si, alors pour moi c’est plus lourd quand on quitte le droit chemin pour l’aventure, et qu’on se fait courser par les guignols.
-T’as raison. Faudrait faire quelque chose, mais quoi ?

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-Gérard s’est bien démerdé.
-Son père était déjà dans le bisness à charrier de la récente des pays de l’Est…
-Et si on lui fournissait du bibelot à refondre ?
-Où on le trouverait ?
-On carotte les riches, pardi.
-C’est bourré de caméras. Tu ferais pas un pas sur la pelouse d’un riche que t’aurais déjà les bâtards au cul. Et dans le quartier, t’as que des mancheux, des rigolos, un dentier pour six...
-A les faire transpirer, t’as quand même quelques gouttes de jonc au milieu de la résine !
-Chaque fois que je joue avec l’haricot de tante Louise, je veux, elle me file 20 euros !
-C’est un boulot à fondre dans ses skets. Puis, avec la réserve en yaourt qu’on a, on a beau être jeunes, dans les 40 par jour au max qu’on se ferait, et encore faudrait d’autres tantes Louise.
-La cité abonde de volailles seules. On se spécialise dans la veuve au bord de la crise de nerfs ?
-Non. Je suis pas preneur. T’as plus frais dans les cages d’escalier. En plus, après ta joie, tu tombes parfois sur des biftons au fond de leurs poches…
-Alors, on n’a plus qu’une solution.
-Quoi ?
-Fermer nos grandes gueules et terminer nos études.
-Tu rigoles ? T’appelle ça des études ?
-Oui, je rigole. Mais, ça me donne une idée.
-Tout arrive !
-Ta gueule. Plutôt qu’en reprendre pour douze mois de bourrage de crâne, si on demandait à Joukov de nous diplômer ?
-C’est un as, faut reconnaître, du faux vrai !...
-Il en a de toutes les sortes, même de l’unif de Téhéran, pour les intégristes branchés. On se rencarde ce qu’il faut – Rien qu’à les voir nos FBI, ça va pas chercher lourd en papier timbré - et on entre à la police. Paraît que ça manque de jeunes ! Bien sûr, tu demandes pas les mêmes fafs qu’à la Simonet, un condé « moyenne technique », t’as bon.
-C’est hallucinant, t’irais chez ce foncedé de Joukov. Tu les débectes pas les chanmés !
-Une fois qu’on est créché, ils peuvent plus nous chercher . On fait ce qu’on veut, quoi… ça caillera. En plus on a un gun à la ceinture.
-C’est ça qui t’excite !
-Non. T’as raison, j’oserais plus passer dans le quartier.
-Moi, c’est pareil, mes frères me tueraient. La paix sur l’Islam.
-Chiez ! Demain, Marie-Jeanne, zyva !, caissière dans un grand mag…et moi, Michel le peintre, j’y vais taffer sur ses échelles à partir de lundi et toi ?
-Je m’attaque aux interrupteurs du premier étage du collège du Bon Pasteur...
-Don Bosco, quoi !
-C’est pas glorieux, l’ami des jeunes !
-C’est notre destin, putain de mauvais sort !

23 août 2009

Un vieux dragueur.

-Mais que vois-je ?
-Mais que voit-il ?
-Mais vous ! Vous !... dans cette grande librairie…
-J’y suis deux jours par semaine. Le mardi et le samedi…
-Mais c’est qu’elle m’indique ses jours, la coquine. C’est une invitation ?
-L’entrée est libre. Qui puis-je ? Vais-je dire ne venez pas !
-Comme vous devez souffrir !
-Moi, pas du tout. Qu’est-ce qui vous fait penser ça ?
-Mariée à un cultivateur polonais, un rustre, vous si cultivée…
-Vous divaguez. C’est Martial qui vous a raconté. Attendez, je l’appelle.
-Non. Souffrez que je vous aie dit ce que j’avais à vous dire.
-Je souffrirai donc deux fois…
-Sauvez-vous, sauvez-vous donc de cet homme !
-Mais fichez-moi la paix sur mon pseudo cultivateur polonais.
-Je serai votre sauveur !
-Vous avez bu !
-De l’eau, je n’ai bu que de l’eau…
-Premièrement, il ne peut être Polonais.
-Pourquoi ne pourrait-il l’être ?
-Pas plus que cultivateur.
-Un autre rude métier de la terre, alors ?
-Pour la bonne raison qu’il n’existe pas.
-Comment ça, qu’il n’existe pas ?
-Non. Si vous voulez tout savoir, ce qui vous met dans un état pareil n’existe pas !
-C’est plus terrible que je ne pensais. Il vous bat et vous n’êtes même pas son épouse !
-Pourquoi ? Les femmes mariées auraient seules le privilège d’être battues ?
-Je sens votre drame. Ce n’est déjà plus que du passé. J’arrive !
-Combien de fois faudra-t-il dire, Monsieur Schnol, que ce que vous dites est de l’invention.
-Comment saurais-je ces détails affreux ?... l’eau que vous puisez à la fontaine, le crasset pour tout éclairage… ce monstre qui boit et qui vous laisse seule à manier les bottes de paille…

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-Pure invention. Prodige, je vous dis !...
-Pourquoi, mais pourquoi ? Ah ! je comprends vous jouez avec mes nerfs !
-Pas du tout. J’ai inventé cette histoire de femme mariée pour décourager Martial, votre ami.
-Que vous a-t-il fait ?
-Que croyez-vous qu’il me fît ?
-Martial, cet être si peu doué pour parler aux femmes…
-Justement, il ne parle pas. C’est qu’il entreprend.
-Pourquoi ?
-Je n’aime pas ce collègue, ses manières m’importunent ! C’est mon droit d’user d’un stratagème.
-Merci de la confiance que vous me témoignez…
-Je n’aurais pas dû vous dire cela. Mais comment aussi vous détrompez au sujet du Polonais ?
-Ainsi Martial… mon ami… Il est vrai qu’il est marié et que sa femme est Polonaise.
-Voilà. J’espérais éveiller en lui un sentiment de culpabilité patriotique pour qu’il me laisse tranquille.
-Vous avez réussi ?
-Hélas ! Savoir que mon mari est Polonais l’échauffe, au contraire.
-Mais alors, puisque c’est un mensonge, vous êtes une femme libre !
-Je crois, oui, à moins que vous ne fassiez comme votre ami et que je m’invente un mari hongrois.
-Vous passez de la Pologne aux Balkans. C’est curieux cet attrait des pays de l’Est !
-Et puis, je ne sais pas pourquoi je vous raconte cela.
-Je pourrais dire que c’est parce que je vous plais, mais je n’irai pas jusque là…
-Oui, n’y allez pas. Vous faites bien.
-Car vous, vous me plaisez. Vous le savez !
-Je ne le sais que trop.
-Oui, Nathalie, vous me plaisez. Tenez si je pouvais… (Il chante « la Place Rouge était vide… »)
-Monsieur Schnol, vous allez vous faire mal. Il faudra encore vous asseoir sur une chaise…
-Oui, oui, comme l’autre fois.
-…et après, on vous a ramené à la maison de repos des Mésanges !... dans un piteux état.
-Donnez-moi plutôt le tome troisième des mémoires de Saint-Simon que je le feuillette.
-Vous ne voulez pas feuilleter Amélie Nothomb ?
-Pourquoi cette question ?
-Parce qu’elle, vous n’avez qu’à tendre le bras…
-Je le tendrais plutôt dans votre direction…
-Monsieur Schnol, les clients nous regardent.
-Nous sommes seuls ! Martial est dans la réserve. Embrassez-moi…
-Vous me promettez d’abandonner le tome troisième de Saint-Simon ?
-Tout ce que vous voudrez…
-Alors revenez demain…
-Mais demain ce n’est pas votre jour.
-Justement. Vous parlerez de mon mari polonais à Martial.
-Dites-moi, mon ange, pourquoi ne voulez-vous pas me donner Saint-Simon ?
-Parce que vous savez bien que je dois monter à l’échelle.
-Et alors ?
-Et que vous levez les yeux. !
-J’ai peur que vous ne tombiez !
-Vous êtes incorrigible, monsieur Schnol ! Voulez-vous que je téléphone aux Mésanges ?
-Oui, demandez Maryse… Elle sait y faire avec les vieux…

22 août 2009

Une arnaque équitable.

Comme n’importe qui avec du cœur, on peut être touché par l’idée généreuse du commerce équitable, payer les producteurs des pays pauvres au-dessus des cours des marchés mondiaux, c’est reconnaître l’injustice qui les frappe.
Oui, mais comment organiser un marché équitable ?
Des Associations caritatives ont retroussé leurs manches et volé au secours des victimes du système de l’offre et de la demande. Mais la chose n’est pas si simple que cela. On ne bouleverse pas les règles du commerce du jour au lendemain.
Néanmoins, tant bien que mal, cette idée en faisant son chemin a fini par intéresser une frange de consommateurs si significative qu’elle commence à compter dans l’opinion. Cela n’a pas échappé au grand circuit de la distribution.
C’est à partir des récents événements sur le prix du lait en Europe acculant les petits exploitants à la faillite, justement par la pression exercée sur eux par les grandes surfaces, que je me suis demandé pour Carrefour, Delhaize, Ldl, Aldi et quelques autres, si le commerce équitable n’était pas une opération commerciale parmi d’autres.
Le commerce équitable s’arrêterait-il à nos frontières laissant sur la paille nos petits producteurs ?
Revenons à la banane, au café africain et au sucre des Antilles. Avec de la patience, on peut remonter la filière des grandes surfaces, voir comment elles opèrent et on reste confondu !
Pour ces entreprises, une marchandise équitable est un produit comme tous les autres. C’est-à-dire qu’il doit dégager les mêmes marges bénéficiaires que celles d’un produit européen.
Pour eux, le petit logo « commerce équitable » est une publicité qui apporte le soutien et la confiance de la clientèle. En échange de cette publicité gratuite, le consommateur pourra avoir bonne conscience en s’efforçant de manger ou de boire un produit avec le sentiment que sa bonne action compensera une différence de qualité (pas toujours), comme par exemple le « café équitable ».
Il se pourrait même que la grande distribution mette en concurrence les produits équitables avec les produits ordinaires à seule fin de faire baisser les prix de ces derniers, non pas pour que le consommateur voie son addition allégée, mais uniquement dans le but d’augmenter les marges.
Si les grands magasins se montrent « humains » à bon compte, il faut maintenant remonter jusqu’au producteur. Qui sont-ils et comment sont-ils sélectionnés ?
Est-ce que la production valorisée, rémunérera davantage les travailleurs sur le terrain, ceux qui à la machette ou à mains nues, sont à la base des exploitations ?
Et là, on est moins sûr que le commerce équitable améliorera leur misérable vie ; tant on connaît ce que signifie pour les petites gens au bas de la chaîne du travail une meilleure vente.
C’est un peu à une autre échelle la même situation que les travailleurs européens vivent, quand l’entreprise engrange des millions de bénéfice, ils n’en voient pas la couleur.
A la limite, le succès d’une plantation verra l’accroissement d’une main d’œuvre recrutée dans des conditions souvent contradictoires avec l’esprit de cette généreuse idée, et valoir au bas de l’échelle un excès de fatigue et une exploitation accrue.
La case de la famille n’aura pas pour autant un toit de tôle nouveau, l’ordinaire sera toujours le même et les enfants iront ou n’iront pas à l’école suivant les besoins nouveaux de la plantation.

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Jusqu’à ce qu’on me prouve le contraire autrement que par une propagande des sociétés caritatives sur le terrain, je pense que le péon, l’indien, le broussard « socialisé » ne sauront même pas que le « patron » est parvenu à intégrer sa production dans la chaîne du commerce équitable.
On ne peut pas nier certains côtés positifs, ne serait-ce que la prise de conscience des consommateurs occidentaux qui peuvent ainsi toucher du doigt la distorsion qui existe entre le Nord et le Sud et partant reconsidérer que la chance qu’ils ont d’être du bon côté, les place aussi dans une complicité involontaire du système économique mondial à l’immoralité complète ; mais sans illusion que cette manière de restituer aux exploités un peu de leur dignité avec le fruit de leur travail, résolve un jour proche les inégalités de cette fichue planète.
L’idéal serait de changer les règles du commerce international.
A voir nos représentants du peuple, de gauche comme de droite, de plus en plus passifs du point de vue économique, c’est jouer avec une utopie de plus.
Comme tout indique qu’il n’en sera rien et ce tant que nos sociétés libérales auront le culot de justifier l’injustifiable, mangeons des bananes équitables et si possible, achetons-les ailleurs que dans les grands magasins. Nous ne serons pas mécontents de nous-mêmes. C’est toujours ça.

21 août 2009

La démocratie bidonnée.

Elections en Afghanistan.
Cela n’aurait aucun sens pour nous Européens, si nous ne nous y étions pas fourrés derrière les Américains, pour des raisons assez vagues, comme faire de ce pays un pays démocratique, chasser sur les terres des confins afghans et pakistanais un Oussama Ben Laden toujours aussi insaisissable, transformer cette partie du monde en un havre de paix…
Les résultats après cinq années d’occupation sont plutôt minces, sinon catastrophiques pour certaines Régions particulièrement exposées aux Talibans que l’on dit aux portes de Kaboul.
Selon les observateurs, la participation des électeurs s’annonce bien inférieure aux 75 % recensés lors de la première élection présidentielle de 2004, tenue « dans un contexte de sécurité bien meilleur », c’est un journaliste du Soir qui le note.
Cela signifierait qu’en cinq années, malgré les efforts en hommes, matériels et dotation financière au Régime de Kaboul, au lieu de faire progresser la démocratie, celle-ci serait en passe de n’être qu’un épouvantail soutenu par des chars lourds et l’aviation de guerre !
Que voilà bien un mauvais bilan !
En clair, l’occupation alliée a renforcé la guérilla des Talibans. Elle aurait donc produit un effet inverse de ce que les Etats-majors espéraient !
Au lieu de tirer les conclusions qui s’imposent, les Américains et nous à leur suite tenons un discours belliciste ! Comme si des renforts conséquents n’allaient pas braquer la population tout entière et faire de l’Afghanistan un nouveau Vietnam !
Les correspondants occidentaux font état de la ville de Kaboul en état de siège, avec une publicité effrénée des candidats aux élections et des pick-up neufs de chez Ford pilotés par des policiers afghans (on résout la crise comme on peut aux USA) et cela sans vraiment une prise d’assaut des électeurs aux endroits où voter.
Au contraire à une nouvelle grande victoire de la démocratie – il y en a déjà eu tellement de bidonnées – ces élections pourraient être les préludes à un chaos indescriptible qui déboucherait sur une prise de pouvoir politique et militaire des Alliés assiégés dans Kaboul par les Talibans.
Cela rappelle les derniers jours des Américains au Vietnam et l’abandon des collaborateurs du Sud, victimes expiatoires des règlements de compte des troupes nordistes du général Giap.
Au cours d’un entretien, Haroun Mir, ancien aide de camp du commandant Massoud, directeur du principal think tank afghan, s'interroge sur la pertinence de l'élection présidentielle dans un tel climat d'instabilité.

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En outre, l’hebdomadaire Marianne a recueilli d’une autre source des propos du même politologue : « Ce n’est pas vraiment l’Otan qui a renversé les Talibans, c’est la population qui les a chassés avec l’aide des anciens moudjahidin et l’appui des Occidentaux. Mais tout de suite après la libération, l’Otan a exigé que tout le monde soit désarmé et les Etats-Unis ont installé un pouvoir centralisé. La conséquence, c’est qu’il y a eu un vide dans les provinces : personne pour remplacer les Talibans et assurer la sécurité. Du coup, alors qu’ils avaient fui ou déposé les armes, ceux-ci ont commencé à revenir vers 2005. Les Américains s’en sont rendus compte, mais complètement accaparés par l’Irak, ils n’ont rien fait ».
Nous voilà bien mal embarqués avec les Alliés dans une aventure dont l’issue ne fait presque plus aucun doute, sinon employer des moyens gigantesques pour contrôler une population de plus en plus hostile. Et ce qui est impensable, maintenir cette pression pendant des années, finalement autant de temps que les populations d’Afrique ou d’Asie ont attendu le départ des puissances coloniales qui campaient sur leur sol depuis le XIXme siècle.
Il me semble en avoir déjà fait l’objet d’un blog, l’Afghanistan n’est pas une nation. Cette région est constituée d’une grande constellation de clans avec ses chefs et ses lois. Hamid Karzaï est, outre le postulant à sa propre succession comme chef de l’Etat, un homme d’affaire redoutable, avec ses deux frères dont l’un possède une chaîne de restaurants aux Etats-Unis. La corruption, s’ils ne l’ont pas inventée, s’est considérablement développée sous Karzaï et ses frères.
Comme porte étendard de la démocratie, on peut faire mieux.
Outre les prébendes qu’il se taille dans tout ce qui commerce en Afghanistan, il a fait ses ministres des bandits qui ont contribué à la guerre civiles, tous au plus incompétents.
Avec lui ou sans lui, le désastre est annoncé.
Reste que puisque nous y avons des troupes, nous y risquons d’y perdre des soldats, sans compter que cette guerre nous coûte assez cher. Il devrait y avoir une recette en démocratie, au nom de laquelle une majorité de la population qui souhaiterait retirer nos troupes d’Afghanistan, puisse l’exiger par voie de référendum.
Hélas ! sur ce point là, comme tant d’autres, nous ne sommes plus en état de gérer nos affaires, sans passer par l’OTAN, par l’Europe et par « l’intérêt supérieur » d’une démocratie qui est devenue une sorte de religion qui n’a plus rien à voir avec le citoyen.
Comment établir une démocratie en Afghanistan, alors que nous en avons perdu le sens en Belgique ?

20 août 2009

Des bons et des beaux !

Chacun peut accomplir l’exercice à chaque élection : je garde quelques mois les feuilles de propagande des partis que j’ai recueillies dans ma boîte à lettres. Je les passe en lecture rapide, et je m’en débarrasse.
Battus ou victorieux, les candidats à nos suffrages ont un point commun, leur politique n’est pas à la mesure de leurs programmes, non pas qu’ils ne le veulent pas, mais ils ne le peuvent pas.
Ils ne le peuvent pas parce que la politique non seulement en Belgique, mais encore en Europe, s’est abstraite du pouvoir économique.
En cause, l’idéal libéral du « moins il y a d’Etat, mieux on se porte » qui continue à faire des ravages depuis la crise morale que traversent les milieux financier.
Le prospectus de Christine Defraigne (MR) est en lui-même un condensé du non-sens général.
L’avocate libérale par tradition familiale et conviction intime est très représentative du mouvement libéral « prêt des gens » et pourtant si loin d’eux quand il faut passer de la théorie à la pratique. Elle veut augmenter les places dans les crèches, remédier au décrochage scolaire par des emplois nouveaux d’enseignants, lutter contre la violence à l’école grâce à un personnel de surveillance, créer des logements décents pour de plus en plus de gens qui vivent actuellement dans des taudis, sauver nos transports en commun et remédier à la qualité de nos routes, respecter l’environnement, baisser les charges sociales, former des jeunes aux techniques de pointe.
Je m’arrête ici et j’abandonne à la poubelle les trémolos sur les libertés nécessaires, dont la liberté d’entreprendre, etc.
C’est à peu près le programme du PS et du CDh et probablement des Ecolos.
Madame Defraigne n’espère pas sincèrement parvenir à cet état de grâce dans le marasme actuel, le chômage massif et la dilapidation des bénéfices bancaires par l’octroi de primes mirobolantes aux traders ?
C’est bel et bien dans un système à l’opposé de son « laisser faire » libéral que nous avons une petite chance de voir se réaliser une partie de ce que Christine Defraigne croit possible avec une économie qui privatise les bénéfices et est parvenue à socialiser ses pertes par les prêts des Etats aux banques !
Si je comprends bien, tout le personnel politique de la droite à la gauche est sentimentalement socialiste, mais libéral d’attitude, converti à l’économie de marché !

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Les gouvernements depuis la catastrophe ont démontré qu’ils ne pouvaient plus rien devant le pouvoir économique omniprésent, même en crise. Les gouvernements se déclarent incompétents en matière financière. On tremble alors de la façon dont ils gèrent ce qu’il leur reste à gérer ! Les Etats ont placé de fait, la sphère financière en-dehors de leur compétence et cela par l’entraînement de tous les partis de pouvoir vers un libéralisme incontrôlé et par nature incontrôlable.
Avec la social-démocratie, même la gauche s’est convertie et ce depuis plus de trente ans à l’idéologie des marchés autorégulateurs, plus efficaces, paraît-il. Or, c’est l’inverse qui s’est produit. C’est l’esbroufe d’un Madoff et le culte de l’argent facile qui triomphent de l’économie branchée sur la production et le travail.
Des domaines de décision sont passés progressivement de l’Etat, aux banquiers. On aurait même pu assortir ces passations de pouvoir par des paroles rassurantes du genre « si un jour vous faites faillite, ne vous tracassez pas, nous mettrons vos dettes à charge du public. »
On voit les dégâts ! Tant qu’un ministre libéral comme Reynders sera aux finances, on augmentera l’incompétence de l’Etat à la proportion de la compétence du particulier, qui n’est ni vous, ni moi, bien entendu.
L’Europe est au diapason qui n’a de cesse de privatiser Poste, Chemin de fer, Prison et demain l’école, quand c’est déjà fait ou presque partout pour l’énergie et l’eau.
L’Etat livre notre avenir à des gens qu’il ne contrôle pas !
C’est proprement de l’inconscience, de la haute trahison !
Las ! les pouvoirs de décision ont ainsi disparu des compétences des Services publics confiées à des Institutions autonomes dont on perd les traces dans les méandres de la mondialisation, pour ressortir parfois dans les théories d’un anarcho-capitalisme très en vogue aux Etats-Unis, depuis l’Ecole de Chicago.
Résultat le pouvoir en Europe, ce n’est plus le Parlement de Strasbourg qui le partage avec les Etats de l’Union, mais la FED et la banque Centrale européenne.
Pour en revenir aux prospectus électoraux, force est de comparer les têtes des postulants à défaut de leurs programmes.
Les photos sont retouchées, toutes datent un peu, le candidat n’aime pas vieillir. Par exemple Christine Defraigne fait encore illusion de face. De trois-quarts elle marque le coup de la cinquantaine bien entamée. Anne Delvaux (CDh) s’arrondit avec l’âge venant. Moins maquillée qu’à la Télé, elle prend des allures de fermière bien nourries. Milquet porte son masque habituel de rimmel et de fard. Bien malin qui saurait dire ce qu’elle cache en-dessous. Maggy Yerna, PS, se porte de mieux en mieux, merci. Elle puise largement dans son stock de photos des années 80. Il viendra bien un jour, où elle devra puiser dans celui des années 90, si elle veut que les citoyens la reconnaissent encore dans les meetings. La Simonet a de beaux restes. A 20 ans elle devait être craquante, vaquant dans les couloirs de la Place du Vingt-Août, reluquant les braguettes, s’interrogeant sur son avenir, à l’angoisse de valoriser son futur diplôme, s’essayant à se forger l’image d’une femme de décision, rêvant d’un statut à valeur ajoutée au compte en banque..
Quant aux hommes, Marcourt a le visage carré de Monsieur Madeleine, le forçat honnête de Victor Hugo. Xavier Delcoucq, vaste inconnu et tête de liste de « Wallonie d’abord, » aussitôt apparu, aussitôt au fond de l’eau, à la tête du rigolard qui s’en fout. Et il a bien raison, quand on voit son score.
Et puis tous les autres, véritables caricature d’eux-mêmes, vraiment, de ce point de vue, de Demotte à Di Rupo, en passant par les incontournables Michel, Reynders et Cie, en n’oubliant pas le triomphal Daerden, on ne pourrait les citer tous, comment ne pas voir que nous ne sommes pas dirigés par ce qu’une charmante de mon passé composé appelait « les beaux »? Le pompon n’est-il pas notre Premier, Van Rompuy ?
Tant qu’à faire, puisqu’on dégringole, autant que ce soit avec les Belles et les Beaux ! Souhait modeste d’un esthète… C’est clair, on ne veut satisfaire le citoyen de base en rien ! Ils pourraient quand même faire un effort, passer par la chirurgie esthétique, faire de la liposuccion, se raboter le nez, se botoxer le sourire ! Ou alors, ils l’ont fait, et c’est raté… Tous bêtes de concours, avocats, surdiplômés (surdoués c’est autre chose), mais moches, moches à fuir les concours de beauté, à s’exclure de Gala et à me dégoûter de la politique…
La politique refuge des laids ? La revanche de Quasimodo !

19 août 2009

Omerta en Haut Lieu.

Passer à travers tout sans jamais montrer la moindre faiblesse, ni la moindre responsabilité, voilà bien l’impératif des hommes politiques au pouvoir ou rêvant d’y être.
N’importe quel lecteur de journaux, curieux des affaires publiques, s’en tenant aux faits et aux personnages impliqués, peut arriver à démontrer que ce cynisme attribué aux hommes politiques n’est pas usurpé.
Le FORTISGATE est très éclairant à ce propos.
Les nouveaux scandales dans la haute magistrature et au Tribunal de Commerce de Bruxelles ont réveillé l’intérêt pour le procès FORTIS et la juge Christine Schurmans soupçonnée d’avoir vendu la mèche sur l’issue du procès, au gouvernement.
Ces deux affaires ont un point commun qui saute aux yeux.
Rayon de la présidence de la Chambre de Commerce, Francine De Tandt, soupçonnée de corruption, la dame a déposé plainte à l’encontre du directeur de la police judiciaire de Bruxelles, Glenn Audenaert. La juge reproche à M. Audenaert d’avoir fait des déclarations concernant l’enquête ouverte contre elle et a de ce fait brisé le secret professionnel.
Rayon Cour de cassation (Affaire Fortis), les avocats du gouvernement avaient été informés de la teneur de l’arrêt négatif de la cour d’appel de Bruxelles. Un journal révèle ce mardi une nouvelle ligne directe entre l’entourage de la juge Christine Schurmans et l’entourage du gouvernement.
Celle-ci, mal à l’aise de la tournure prise par les événements, avait informé son mari Jan De Groof, proche du CD&V qui aurait alors informé les cabinets d’Yves Leterme, alors Premier ministre, et de Jo Vandeurzen, alors ministre de la Justice, tous deux CD&V.
Mais ce n’est pas tout.
Cette impénitente bavarde aurait fait part de ses doléances à Ivan Verougstraete, président de la chambre flamande de la Cour de cassation, qui aurait transmis l’information à un avocat de Fortis. En vaine de confidence, la même aurait informé une amie, juge pensionnée et ancienne vice-présidente du tribunal de commerce de Bruxelles, Nicole Diamant, qui aurait informé directement l’avocat du gouvernement, Christian Van Buggenhout, de la teneur de l’arrêt.
Le voilà beau, ce fameux secret professionnel, si malmené qu’on se croirait dans un ballet de commères d’un Vaudeville d’Eugène Labiche.

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C’est ici que l’incipit de ce récit prend tout son sens.
Didier Reynders aurait dû démissionner comme Leterme et Vandeurzen, puisqu’il devait être nécessairement au courant, attendu que l’avocat du gouvernement l’était et selon un député au Fédéral, Renaat Landuyt, « Un avocat ne demande jamais la réouverture des débats sans l’accord de son client » ! Ce qui paraît aller sous le sens commun.
« Passer à travers tout sans jamais montrer la moindre faiblesse, ni la moindre responsabilité, voilà bien l’impératif des hommes politiques au pouvoir ou rêvant d’y être. »
Pas exact non plus, puisque Leterme et son ministre de la Justice ont démissionné, alors qu’ils pouvaient tout aussi bien nier, ou pire prétendre qu’ils avaient été informés par l’avocat du Gouvernement via Didier Reynders, après coup.
On en est là !
Tout le monde sait à présent que la Justice n’a jamais eu vraiment de secrets vis-à-vis du gouvernement, pour cette affaire-là. Quant à soupçonner que pour les autres ayant une certaine importance politique c’était pareil, il n’y a qu’un pas que des esprits malins et malveillants ont déjà franchi. Qui leur donnerait tort ?
Reynders nie avec vigueur, force est bien de constater que la conviction intime du lecteur n’est pas suffisante. Reste les témoins, cette chaîne du bouche à oreille qui a complètement mis par terre les pouvoirs séparés de l’Etat et de la Justice.
Il y a dans les instances supérieures de ce royaume un code identique à celui de Corleone, ce petit village de Sicile qui eut le triste privilège de voir naître un des grands de la maffia sicilienne, c’est l’Omerta, une sorte de convention non écrite entre les membres du clan selon laquelle, quoi qu’il arrive, il est interdit de témoigner contre ou de dénoncer quiconque du clan.
Voilà pourquoi votre fille est muette, dirait le Médecin de Molière.
Voilà pourquoi, dirais-je sur le même ton, que je me marre quand j’entends l’Haut-lieu parler d’éthique dans des essais quotidiens à nous remuer le cœur.
Quelle que soit l’issue de ce procès, présumé ceci, convaincu de cela, je m’en fous.
Ces gens ne sont plus crédibles.
Que Reynders démissionne ou ne démissionne pas, c’est la même chose. C’est de toute façon beaucoup trop tard. On ne laisse pas partir un premier ministre et un ministre de la justice sans réagir quand on a toutes les bonnes raisons de se savoir coupable au même titre.
Parti la tête haute en claquant la porte, Reynders avait une chance de revenir comme Leterme est revenu.
De quoi aurait-il l’air si des scrupules l’envahissaient à présent ?
Quand on s’engage sur la voie de la probité et de l’intégrité morale, on ne peut revenir en arrière sans risques. Les aveux tardifs sont toujours mal interprétés.
Reynders l’a compris.
Le voilà engagé au ministère des finances à toujours mentir, comme sur un wharf : la caque y sentira toujours le hareng.

18 août 2009

Putain d’époque !

-Tel que tu me vois, depuis l’affaire avec Tonton, j’ai décroché…
-T’as fait combien ?…
-Trois, même pas.
-T’es toujours avec la grande Josée ?
-C’est une vaillante. Elle m’a attendu… Je l’ai fait décrocher aussi… On vit peinard dans un pavillon sur les hauteurs. De temps en temps, elle fait une turlute au Turc qui ristourne sur les légumes… pour pas perdre la main, quoi…
-La gagneuse que c’était !
-Elle le serait toujours, si j’y avais pas dit d’arrêter, rapport au milieu qu’a changé, puis à 63 piges, elle prenait une heure tous les matins pour en paraître vingt de moins à midi sur le boulevard. Ça se voyait dans la comptée. Sa spécialité, la brouette tonkinoise, elle pouvait plus à cause des rhumatismes… Deux, trois clilles, d’anciens amateurs, c’était un max… elle les travaillait au souvenir… Josée aurait pu remonter aux cachetons chez Léon, la danse des poids clipsés au bord des lèvres. Y a des mordus. Dix euros les 50 grammes, enfin tu sais… J’ai pas voulu. Jenny-la-cuite a fini au kilo 5, pleine déchéance !
-Elle se serait fait arracher le cul pour toi… C’est le cas de le dire.
-Tu te rappelles le record de Bè-Kwèr ?
-Si je me souviens ! Dix-sept l’après-midi à éponger, trente-deux après la pose !
- M’en parle pas. Les bonnes affaires, c’est fini. Les Beurs, les Rastas et les Roumains nous laissent plus rien. La semaine dernière, Suzy est revenue avec un coquard. J’y ai dit « qui t’a fait ça ? » Tu vois l’homme que je suis ? Je mettais déjà mes bagues dans le tiroir… je cherchais mon coup-de-poing américain…
-Et alors ?
-Tu m’connais, j’ai toujours respecté le travail des autres ; faut pas endommager les travailleuses. J’suis un sanguin, parole. Elle a craché le morceau. C’est un certain Rostoff ou Roskoff qui lui a mis une beigne, on le connaît pas bien. il est en assoce avec Ali-le-flingueur. J’étais en chemin pour lui mettre une bastos, puis j’ai réfléchi, plonger à mon âge…
-J’ai fait préau avec Ali, l’année dernière. C’est un méchant.
-C’est une génération qu’a le goût de l’horrible. Rien ne les arrête…
-Les cons, ça n’a peur de rien… C’est même à ça qu’on les reconnaît…
-Puis, ils font pas du blé comme tout le monde. Ils pratiquent la politique en mosquée intégriste… ils veulent pas de business avec les gens au pouvoir.
- Dans un sens, ça évite des morts célèbres. Mais, ils perdent du blé. Avec les politiques on est cool. Ils font leurs petites affaires. On fait les nôtres. C’est deux mondes parallèles, personne se touche, tout le monde se voit !... C’est nous qui prenons les risques, eux jamais !...
-En tôle, Ali pouvait pas être trop cruel avec les autres sans se faire épingler par les matons qui le suivaient sur sa réputation. Alors, Ali-le-flingueur s’est passé un anneau dans le nez. Il s’était fait le trou avec une fourchette !... Il projetait un piercing sur la langue, quand on n’en a plus voulu.
-Et Rostoff, t’as connu ?
-Boris ? Ton Russe est Serbe. Il a fait la guerre, là-bas, un peu dans tous les camps… On raconte qu’il a le goût du défendu, de l’exploit, du génocide…. Tu sais, nous autres les hommes, on a des principes, un code, enfin on a su ce que valait Boris-le-fondu, c’est ton Rostoff ou Roskoff. Y a pas mieux que cette pourriture pour saloper les bons coups… Revanchard sur les principes. C’est un émotif actif, un peu tantouze, un peu sniffeur, pédophile, ancien snipeur par goût, c’est le révolutionnaire du crime. Les flics en ont peur, c’est eux qui changent de trottoir !
-Je vais calmer Suzy qui veut remonter au turf, sans rien lâcher en commission à Boris ! Moi, j’en suis plus si sûr. C’est une nature à l’ancienne, Suzy, : tout à son homme… Je vais pas pourtant caner ! Où qu’elle serait ma réputation ?
-Donne lui quinze jours de bon. C’est une vaillante.
-Je crois que je vais décrocher aussi.
-Avant l’afflux des grossiers et des vils, on a pris du bon temps.
-On gagnait bien aux campagnes électorales. Aux vacances, on visitait les riches…
-On était apprécié à la belote…
-Faut dire qu’on avait une autre gueule que celle qu’on a maintenant.
-J’avais été jusqu’à payer une Jaguar type E à Dolorès, ma première... Elle en jetait terrible quand elle sortait de la rue du Champion où elle avait fait ses dix sacs, et moi qui l’attendais avec son Yorkshire en laisse, mes souliers vernis, ma gourmette qui sortait de la manche de mon blaser. On aurait dit un président du Rotary !...
-T’as plus eu de ses nouvelles ?
-Elle valait son prix. Elle a épousé un marchand de vin qui est devenu député ou sénateur… J’y ai pas perdu. Encore aujourd’hui, j’ai qu’à téléphoner, son mari arrive tout de suite… Il mangerait dans ma main, ce type…

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-Qu’est-ce que les jeunes vont devenir, si le métier fout le camp ?
-Les jeunes qu’ont perdu le code ! Les jeunes qui te troueraient pour dix euros ! Mais qu’ils aillent se faire foutre.
-Tout fout le camp, quand y a plus de morale… Mais quand même, l’artisanat est sans bras… plus personne pour transmettre… Les brutaux n’ont pas de cervelle.
-Y a plus que la religion pour sauver le monde. Tu te rappelles, quand tout le claque, Madame et Monsieur en tête, puis les filles bien propres et en chapeau qui suivaient derrière, direct aux chaises réservées à l’église Saint-Nicolas pour la grand’messe ! Merde, c’est vrai tu te rappelles pas. T’étais trop jeune… Même que les affaires se traitaient avec les gris de la Wehrmacht, dans les travées, tout ça correct, à voix basse, au respect…
-Mon père m’a dit. Nos plus belles années ont été les années de guerre…
-Avec l’Europe, la fête, ça risque plus…
-Y a plus qu’à chialer sur les deux Luger du Vieux qui restent en souvenir…

17 août 2009

Le cul à la fenêtre.

Nous n’en savons pas trop encore, il paraît que nous n’avons plus de vie privée !... que nos petits secrets, aussi bien cachés soient-ils, vont directement au Ministère de l’intérieur !... lorsque nous abandonnons la position du missionnaire dans nos stupres nocturnes, la brigade des mœurs du coin de la rue est tout de suite au courant !...
Seule, la démocratie cache encore quelque chose. On se doutait, qu’elle n’en était plus une vraiment.
J’exagère ?...à peine.
L’intensification des moyens de contrôle, la commercialisation de nos données personnelles, les technologies diverses de surveillance sont un déni à notre vie privé.
Le premier triste con qui a ouvert sa braguette en disant enthousiaste qu’il n’avait rien à cacher, serait bien surpris d’apprendre qu’on pourrait savoir, au soupir près, la moindre imbécillité proférée sur son portable à l’encontre d’un client, d’une tante ou d’une voisine sexy.
Oh ! que si, il a des choses à cacher, à commencer par sa conversation inepte, son manque de ceci et son trop de cela, bref… qu’il est un imbécile complet.
Vous trouvez que c’est gai de faire savoir à tout le monde qu’on est con ? Sauf, si vous en êtes un vous-même.
Les technologies qui nous facilitent la vie, ces petits boîtiers de la taille d’un poudrier dont on manipule les petits boutons d’un geste sûr et machinal, caméra, portables divers, raccordement Internet, vidéosurveillance, RFID, GPS, téléphone mobile, biométrie, ces joujoux dont les jeunes raffolent, empiètent sur nos libertés individuelles.
Electroniquement, nous sommes pratiquement tous fichés, via nos déclarations d’impôts, les plaques d’immatriculation de nos véhicules, jusqu’à la taille du soutien-gorge que madame achète pour ses friponneries privées, tout, on sait tout…
Mais puisque l’autre con n’a rien à cacher… Sauf qu’il ne veut pas qu’on sache ce qu’il gagne, qu’il rougirait de honte si parmi les écolos qu’il fréquente dans son quartier, on savait qu’il ne ramasse jamais les crottes de son chien au cours de sa dernière promenade nocturne, etc.
Pas que dans le fond d’un commissariat que l’Hercule Poirot de service se marre en apprenant que sa voisine de palier fait du 98 C, mais encore dans les officines du prêt à porter, parmi les commis VRP et dans le commerce d’aspirateurs, on n’ignore pas que vous êtes célibataire, divorcé en 2004 à quarante ans et que vous avez une bouteille de Pernod dans votre placard !
Alors, bonsoir, les coups de fil pour assister à des vernissages où vous aurez droit à la perceuse sans fil, si vous êtes acquéreur potentiel du super matelas multi spires et cela susurrés au téléphone d’une voix aux accents des îles à faire bander un mort.
Pourquoi – comme l’autre con de tout à l’heure - sommes-nous indifférents à ce qui nous arrive ? Pourquoi ne réagissons-nous pas au législateur qui est en train de nous fliquer à tour de bras avec ses lois soi-disant protectrices du citoyen ?
On peut penser que le fourbi électronique qui nous facilite la vie, nous l’a pourrie aussi sans que nous ne nous en apercevions. Le citoyen consommateur avide des technologies a le don de réchauffer des serpents sur son sein.
La montée de la délinquance est un fait statistique. Personne ne s’est jamais demandé si l’appareillage sophistiqué pour nous prémunir des violences avait un sens, était efficace, bref servait à autre chose qu’à nous faire dépenser de l’argent ? Car, avec tout ce qu’on nous fourgue, soit collectivement, soit individuellement, en plus des lois Onkelinx, Moureaux et consort, la délinquance devrait baisser !
Il y a là quelque chose qui est facile à comprendre, l’électronique aura beau y faire, c’est la société qui devient de plus en plus violente, parce que les règles qu’elle détermine sont violentes pour les petites gens.

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Parce que nos dirigeants sont des copieurs, nous nous dirigeons vers une Société sous contrôle, comme en Grande-Bretagne, avec ses 4,2 millions de caméras de surveillance soit une caméra pour 14 personnes, la Grande-Bretagne, elle même croupion des Etats-Unis, générateurs de toutes nos lubies, manipulateurs de toutes nos illusions.
Le décor est planté, la technique est d’attaque, nous voilà entrés dans un climat de suspicion, propice à pourrir la vie de tous dans une méfiance généralisée allant des différences de couleur de la peau, à la différence de statut social.
Est-ce ainsi que les hommes vivent soupirait Aragon ?
Eh oui ! c’est ainsi.
Heureusement que les bonnes âmes ne verront que subliminalement mon cul, s’il ne tenait qu’à moi et pour les emmerder, je le mettrais volontiers à la fenêtre… Moi aussi, je n’ai plus rien à cacher !

16 août 2009

Le bâtonnier met des bâtons dans les roues…

Il ne restait plus grand chose d’honnête dans ce pays. Tout fichait le camp. Plus une seule figure de proue osait regarder le public droit dans les yeux.
Sauf la Justice !
Elle se dressait en dernier rempart de la vertu démocratique et du bon fonctionnement des Institutions.
C’est fait, ce Corps a rejoint les cadavres exquis de nos placards délétères.
Certes, des petites broutilles, de légers manquements apparaissaient parfois. On la disait surchargée et nos magistrats inquiets. Mais elle envoyait au trou l’engeance du Royaume avec vigueur et célérité. Le public voyait en elle le dernier bastion traquant les maffiosi des autres pouvoirs. Le bourgeois s’endormait la fenêtre ouverte.
Le politique célébrait aussi souvent qu’il le pouvait la séparation volontaire du législatif et du pénal. C’était notre garantie absolue qu’on ne tripotait pas les jugements selon que vous étiez puissant ou misérable, quoique la sévérité et les peines lourdes tombassent souvent sur le misérable et jamais sur le puissant. Mais, bah ! on se disait que cela servirait d’exemple à la banlieue, tandis que le puisant depuis longtemps par philosophie au-dessus des principes, faisait tout de même gaffe à éviter la faute.
Et voilà les journaux pourtant si dévoués à la Patrie, si attentifs à ne pas gâcher la moindre chance de réconciliation des banques et l’Etat, les voilà obligés d’informer les lecteurs que la friponnerie a gagné les membres les plus éminents de l’appareil judiciaire !
Décidément, comment croire encore à autre chose que le gain facile tel qu’on nous l’enseigne dans la moindre école de commerce ?
Sous la plume des éditorialistes, des chroniqueurs judiciaires et même du pigiste appelé en renfort, les grands noms circulent, la tourmente s’envole emportant des réputations.
Béatrice Delvaux du Soir titre « Corruption de magistrats : l'avocat Robert Peeters au centre du scandale » et de déplier son histoire de l’arroseur arrosé, à partir de la désormais fameuse lettre de Ghislain Londers, premier président de la Cour de cassation, au président de la Chambre, dénonçant des indices d'intervention du gouvernement auprès de magistrats dans l'affaire Fortis, après laquelle rien ne fut plus comme avant !
Ah ! cette nouvelle Sévigné, bien qu’homme sous la robe, n’aurait pas dû !
La police judiciaire porte des accusations qualifiées de gravissimes, selon dame Delvaux. La corruption règnerait en maîtresse sur les estrades des Cours, remplirait des prétoires, bruisserait dans les couloirs des Maisons de justice !
Et la presse découvre ce que le bon peuple savait depuis longtemps, à savoir que l’on peut être grassement payé et serviteur à vie de Thémis sans pour cela renoncer aux ambitions temporelles à une époque où l’argent est comme la Rolex de Séguéla, INDISPENSABLE !

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Cette chère Béatrice s’émeut façon « vieille époque » en mêlant à la notion de gravissime des personnages importants qui peut-être un jour – ce n’est pas certain – en seront accablés.
Impossible, dit-elle, de faire le tri dans une affaire jetant l'infamie sur une grande partie de la magistrature…
Et justement, retenons notre souffle. Il suffit d’avoir assisté une seule fois à un procès en qualité de curieux pour en sortir avec la certitude qu’en n’avouant jamais, le prévenu embarrasse la justice.
Les magistrats prévenus à leur tour ne sont pas plus bêtes que leurs victimes. Ils nient tout en bloc, évidemment.
Ah ! s’il n’y avait les faits, plus têtus que le Lord Maire, comme la pourpre et l’éclat, tels jadis les cardinaux, prendraient notre questionnement de haut ! Hélas ! ils en sont à faire la bête, ils en arrivent à la perte de mémoire, ils ne savent plus, bref, ils sont innocents par principe ; si tant est qu’il leur en reste un, ce sera celui-là !…
Comme ce serait drôle et jouissif de voir un inspecteur questionner rondement des illustrissimes dans l’arrière salle d’un Commissariat crade de quartier.
-Où étais-tu, De Tandt Francine, présidente du tribunal du commerce, dans la journée du 17 juin 2007 ? Ah ! tu ne sais pas ! J’ai ici un document qui…
Mais qu’on se rassure. Personne, au plus haut des crimes, n’est jamais allé en prison réfléchir à l’état de scélératesse à la suite de son interrogatoire de VIP, surtout quand on a été en position d’y envoyer les autres. C’est comme ça.
Nous sommes dans une démocratie du tapis plain, rewritée par l’Ancien Régime toute en parquets, ne l’oublions pas. Les nobles ont disparu, le Gotha ne s’est pas refermé pour autant. Les ducs et pairs ne sont plus nobiliaires, ils sont judiciaires, parlementaires, professeurs d’université. C’est moins voyant, donc plus sûr et par conséquent préférable. La moquette est restée, la démarche souple, le pas feutré, les belles manières, à part l’honneur, tout est resté…
La visite à corps à Lantin, c’est pas pour les hémorroïdes distinguées.
Seul le gorille de Brassens peut se prévaloir de s’être farci un juge en passant par la porte étroite d’André Gide.
Qui dit la Loi a toujours été au-dessus des vilénies, c’est bien connu.
Comme Chéri-Bibi, ils sont tous innocents.
Fatalitas !

15 août 2009

Le doute est permis.

On peut s’interroger sur la relative passivité de la population après deux ans de crise.
Serait-ce que la couverture sociale, aussi ténue soit-elle, a été suffisante pour empêcher la montée du mécontentement ?
On pourrait s’en réjouir, s’il n’entrait pas dans cette passivité l’étrange pouvoir des sirènes du capitalisme. Les diffusions à longueur d’année des délices d’une nouvelle Capoue à laquelle démocratiquement nous aurions tous accès, plus tard, seraient toujours en train de faire de l’effet ?
Même pas !
Les ménagères de moins de cinquante ans poursuivent leur rêve dans les séries de TF1, sans l’illusion que le héros du loft sorte du poste, afin de les trousser en lieu et place des maris en plein stress de licenciement probable.
Plus personne ne croit vraiment que le libéralisme et le capitalisme intimement liés puissent résoudre la faim dans le monde, tout en procurant « l’aisance » aux sociétés avancées.
Pourtant, nous sommes loin des dégâts perceptibles dans la rue de la crise de 29, secouant toute l’Europe depuis le détonateur franco-américain, et se poursuivant au fil des années 30.
La Grande dépression actuelle qui, comme l’autre, vient des Etats-Unis, fauche tout autant les ménages dans leur relative prospérité, les scandales sont tout aussi éclatants, Madoff aujourd’hui, la pyramide de Ponzi et Stavisky, hier.
Les effectifs des extrêmes en Europe ne se gonflent pas pour autant des déçus du capitalisme !

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La désillusion a frappé tous les systèmes afin d’établir la paix, la justice et si possible la prospérité. L’illusion en 33 n’était-elle pas dans l’espoir d’un communisme mondial à venir ? L’illusion en 2009, n’est-elle pas dans la sortie de la crise, le retour à la croissance et la fin de la misère de centaines de millions de gens ?
Obama se heurte à une partie de ses concitoyens sur sa proposition d’établir une couverture sociale en faveur des Américains les plus pauvres. Le désastre de l’absence de soins pour 30 millions d’Américains est le résultat d’un siècle de capitalisme monstrueux, ne faisant appel qu’à ce que l’homme a de plus ordurier en lui. Nous ne sommes guère touchés par cette information révélatrice d’un comportement si étranger à l’humanisme classique, parce que les médias n’en ont guère fait état en Europe. Par contre, si Obama échoue, nous serons sans doute inondés des « bonnes raisons » que le Sénat américain a de rejeter la proposition de Loi.
En Europe, les succès de Besancenot et de Mélenchon n’induisent pas un rassemblement général dans le « ras le bol », ils n’indiquent qu’un affaissement du PS de Martine Aubry.
Il faut donc qu’il y ait des modifications dans ce que René Lesenne dans son Traité de caractérologie appelle « l’homme moyen », pour qu’à situation identique d’une époque à l’autre, la population réagisse différemment, abstraction faite des conditions de vie, quoiqu’il existe peu de différences entre ceux qui ont tout perdu en 1933 et en 2009.
Si pour les statistiques l’homme moyen et la ménagère de moins de 50 ans existent bel et bien, dans la réalité ils n’existent pas. C’est une abstraction réduite à quelques propriétés générales. En dehors d’elles, le « sujet » possède bien d’autres traits de caractère. La diversité indéfinie des natures individuelles défend d’identifier un « sujet », à nous-même, ni à aucun de ceux que nous côtoyons au cours de nos journées de travail.
C’est un des travers des démocraties que de traduire tout en « sujet » moyen, au risque évident de ne pas rencontrer les légitimes spécificités de chacun et de mécontenter tout le monde.
Il est donc prématuré de dire que les statistiques ont raison de voir dans l’homme moyen de 2009 plus de retenue que dans celui de 33, comme le sociologue de conclure à l’évolution pacifique de la rue à l’expérience de la crise.
Des attitudes d’alors subsistent dans la société moderne de l’an 9. L'antiparlementarisme alimenté par une succession de scandales politico-financiers de 33 perdure. Pour la France : l’affaire Hanau (Marthe Hanau avait utilisé ses appuis politiques pour attirer, grâce à son journal La Gazette du franc, les économies des petits épargnants), l’affaire Oustric (la faillite frauduleuse du banquier Oustric précipita en 1930 la chute du gouvernement d'André Tardieu, dont le Garde des Sceaux était mêlé à l’affaire), et enfin, cause directe des événements du 6 février 33, l’affaire Stavisky, le scandale, impliquant le Crédit municipal de Bayonne. Alexandre Stavisky était cet escroc lié à plusieurs parlementaires radicaux, dont un ministre du gouvernement du radical Camille Chautemps. La presse révéla qu'Alexandre Stavisky avait bénéficié de dix-neuf remises de son procès, alors que le Parquet était dirigé par le beau-frère de Camille Chautemps.
En Belgique, les crises à la même époque se succédèrent au point que le trublion Léon Degrelle dénonçant des scandales (certains sortant de sa pure imagination) obtint en 36, 271.491 suffrages (les femmes n’avaient pas encore le droit de vote. Il se fera en 1948), le parti rexiste s’adjugea 11,5 % des voix, 21 députés et douze sénateurs.
De 1950 à nos jours, les scandales politiques n’ont jamais cessé : depuis l’assassinat de Julien Lahaut resté impuni, à celui d’André Cools en Belgique, l’affaire des hélicoptères Agusta, les abus de biens sociaux à Charleroi, jusqu’aux scandales de 2009 de la justice, après l’affaire FORTIS, etc.
Jusqu’à présent les Autorités ont réussi à tenir le citoyen en laisse.
Nul, ne saurait dire quand le « sujet » sortira de son assoupissement. Mais, tout comme le Vésuve, on sait que le « sujet » a tout ce qu’il faut pour exploser.
Les parcours des politiques, des médias et des sociologues sont minés. Exagérer dans l’optimisme peut devenir aussi ravageur que l’exagération contraire. Je me demande si des banquiers, au gouvernement, en passant par les personnels de la justice et de la haute administration, il y a conscience que le pouvoir marche sur des œufs ?

14 août 2009

Trompettes de la renommée…

-Minou, tu prends ton thé maintenant ?
-Oui, mais alors tout de suite. Je t’ai demandé de souffler dessus, pas de cracher dedans !
-Voilà.
-Ce matin, je passe aux éditions de l’Arquebuse…
-Pour ta nouvelle plaquette ?
-Ça t’écorcherait le museau de dire recueil ?
-C’est « Le dépeceur d’eau » ?
-J’avais pensé lui montrer « Parc privé », mais quelques petites retouches sont nécessaires…
-Tu rentres à midi ?
-Non, je déjeune avec Roche-Pontoise.
-Le peintre ?
-Qui veux-tu que ce soit d’autre ?
-… et garagiste !
-Voilà dix ans qu’il est critique à la radio !
-C’est drôle un peintre garagiste, critique à la radio !
-Mon pauvre ami, tu n’y connais rien. En plus, ce que tu peux être bête ! Je serai accompagnée de Jacinthe, ma complice des « Jeudis de l’écriture ».
-Si je te pose la question, c’est pas pour t’ennuyer, mais pour savoir si tu manges ?
-Ce que tu es vulgaire ! On ne dit pas « c’est pas » mais « ce n’est pas ». Tu as la liste des choses à acheter ?
-Oui.
-Alors, que veux-tu savoir de plus ?
-Pour ce soir, alors ?
-Après Roche-Pontoise, j’enregistre l’émission « l’artiste chez soi ».
-Alors, tu rentres à la maison ?
-Non. L’émission pour la télé se fait en studio.
-Ah ! bon… ils reconstituent ton bureau ?
-Ce que tu es agaçant avec tes questions ! Pilou a un contrat avec Rosaline d’Auvalon, la designer de la ligne des Meubles Duc père & fils.
-Ton amie Rosaline, la designer, celle qui est la maîtresse du père et du fils ?
-Et tu te crois spirituel, parce qu’un jour j’ai eu le malheur de te le dire !
-Ça me fait toujours rire. Il y a encore le Saint Esprit !
-Ris bien ! A l’instant, tu parlais de maison pour notre villa. Tu es incorrigible ! Voilà cent fois que je te le dis : nous n’habitons pas une maison. Nous habitons une villa.
-Oui, les Alyscamps.
-N’ajoute rien. Tu allais encore t’étonner que nous habitions un cimetière romain près d’Arles, alors que notre villa est sur les hauteurs de Liège.
-Eh bien oui !
-Tu manques vraiment d’imagination et de poésie, mon cher Charles. Je me demande pourquoi je t’ai épousé…
-Donc tu ne rentres pas l’après-midi. Peut-être, ce soir ?
-Ne m’attends pas. Tu vas dormir quand tu veux. Nous avons un dîner de femmes. Qu’est-ce qui pourrait rimer avec Langouste ?
-Prouste !
-Mon pauvre ami… As-tu jamais été drôle un jour ? Je me débrouillerai seule, comme toujours.
-Elles vont enfin t’élire présidente du prix Collembole ?
-Tu t’intéresses à moi, c’est nouveau, ça ! Justement, j’ai besoin de la voix de Dominique d’Ombreuse.
-La lesbienne ?
-Et alors ? En a-t-elle eu des chagrins avec les hommes avant d’y renoncer…
-Tu ne vas tout de même pas…
-J’irai bavarder dans son boudoir, pourquoi pas ?
-Ce qui fait que tu ne rentreras pas avant demain matin ?

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-Là, j’aurai besoin d’un bon petit déjeuner.
-Pour te remonter ?
-Tu n’es jamais arrivé à rien, mon pauvre Charles, parce que tu manques d’ambition. Et tu manques d’ambition, parce que tu n’as pas de volonté. Aurais-tu l’ambition et la volonté que tu n’arriverais à rien quand même, parce que tu manques de talent.
-Fauche de Vieille a téléphoné. Tu pars faire des conférences en Turquie la semaine prochaine.
-Enfin quelque chose d’intéressant qui sort de ta bouche. Mais, c’est formidable !
-N’est-ce pas le vieux beau, membre de l’Académie de Langue et de littérature qui t’a frôlé les genoux à la soirée Mallarmé ? Belle idée de l’asseoir à côté de toi.
-Il est adorable.
-Il t’accompagne ?
-Comment veux-tu que je me débrouille en turc sans lui ?
-Il parle le turc ?
-Non, mais il a ses aises.
-Qu’est-ce qu’avoir ses aises peut t’arranger, s’il ne sait pas le turc ?
-Tu m’embêtes à la fin. C’est un fin érudit. Un homme aimable. Il a quarante ans de plus que moi et il a ses aises.
-Je me demande quand tu trouves le temps d’écrire ?
-Je vais te faire un nouveau papier pour les courses. Demain, j’inaugure la Maison Magritte avec Clotaire d’Orvigne et je ne sais pas à quelle heure je serai de retour, peut-être même dormirai-je à Bruxelles. Pour répondre à ta question, c’est encore à l’hôtel que j’écris le mieux…

13 août 2009

Une lecture de Pierre Bayle.

Pierre Bayle (1647-1706) fut un esprit curieux dont nous avons encore à apprendre beaucoup de son Dictionnaire historique. Son œuvre qui avait l’ambition de relever les erreurs des Dictionnaires précédents, pourrait très bien encore relever les nôtres..
Protestant, puis converti au catholicisme pour retourner à sa religion initiale, Bayle n’est pas une girouette, ni un apostat, c’est avant tout une vaste intelligence scrupuleuse. On dit qu’il préfigure Diderot et d’Alembert, et que Voltaire fit plusieurs fois son éloge.
Faussement errante, la pensée de Bayle nous met en garde contre une vision manichéenne du monde. Elle nous représente nos opinions et les opinions d’autrui souvent en contradiction, en même temps, elle nous suggère un dialogue d’échange des points de vue.
Ce ne serait pas suffisant pour vous tenir par la manche avec ce qui précède, s’il n’y avait la critique d’un esprit répandu en 2009, qui vise à oublier trop vite l’histoire de nos abominations, qui colle aussi bien au siècle de Louis XIV, qu’à celui du XXIme siècle.
Cette permanence d’une époque à l’autre, c’est Bayle qui la détermine « Il n’y a presque point de vice qui ait plus régné dans le genre humain que la haine que les hommes se portent les uns aux autres ».
Notre système économique n’illustre-t-il pas les propos du Dictionnaire par l’absolue guerre qu’il suscite entre les hommes, qu’ils soient au travail ou en train de jouir du travail des autres ?
Débattant de l’éternelle question de Dieu (1), l’homme y abandonne sa nature inquiète et curieuse, mais Bayle et Pascal ne s’entendent pas sur le chemin qu’il prend.
Pascal pense que l’homme est seul responsable de sa déchéance. Bayle remet Dieu en question.
La philosophie réfute la chute originelle dans les faits, quand bien même elle accréditerait le mythe pour des raisons d’ouverture sur un doute supérieur, je pense à celui de Malebranche. Partant de là, il s’avère qu’un être aussi manifestement voué à l’erreur et au mal que l’homme constitue la preuve permanente de la réfutation de l’intelligence et de la bonté de son créateur.
Si Dieu nous a créés tels que nous sommes, il est lui-même complètement détraqué ; ou bien, si malgré ses efforts, nous sommes restés tels que le monde moderne peut nous voir encore, la toute puissance divine n’est qu’une supercherie inventée par les prêtres.
Voilà le rationalisme d’un Descartes retourné contre lui-même, préfigurant l’irrationnel blasphématoire d’Ainsi parlait Zarathoustra, de Nietzsche.
En réalité le rationalisme est un glaive, il tranche à deux morfils : le rationalisme scientifique méthodologique, et le rationalisme métaphysique, comptant sur la raison humaine et sur une hypothèse à établir entre Dieu et les hommes.
Avec l’ordre scientifique et l’ordre religieux, la philosophie survit entre les deux de manière équivoque. Servant de propédeutique vis-à-vis de la religion, sa mission ne consiste pas d’atteindre aux « vérités » surnaturelles, tout en reconnaissant la possibilité d’une « inspiration » que Pascal appelle la grâce.

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Bayle ne l’écrit nulle part, mais le Protestantisme qui le força à l’exil en Hollande et qui tint sa plume lorsqu’il réalisa son Dictionnaire penche singulièrement vers le doute et le rationalisme scientifique.
La protestation existentielle de Pascal et la protestation morale de Bayle traduisent le dilemme majeur de l’homme qui essaye de faire taire une nature qui est en lui et « qui l’effraie » en cherchant et en trouvant parfois la grâce ou en se construisant dans le raisonnement qu’on appellera plus tard le matérialisme dialectique.
La grâce, simple vue de l’esprit, n’est ni un fait, ni une réponse scientifique aux problèmes du vivant et de la conscience. Elle n’est qu’un voile jeté sur un brasier et qui l’étouffe, sans pour autant éteindre la braise que le moindre souffle de vent peut attiser.
Bayle eut le mérite sous le règne d’un Louis qui révoqua l’Edit de Nantes, de préférer l’exil et la réflexion, plutôt qu’une citoyenneté sous la contrainte d’une foi qu’il ne partageait pas.
Le débat restant permanent, en son temps, Bayle choisit la liberté d’expression. C’était la seule rationalité qu’il pût prendre sans créer de préjudice à lui-même.
C’est pourquoi il mériterait qu’on le lise encore aujourd’hui.

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1.Pour ce qui Le concerne, il entrait dans cette astéisme [genre d’ironie] que la question fût aussi éternelle,

12 août 2009

Cherche Traders, bonus assurés…

Alan Greenspan (Né le 6 mars 1926 à New York) est un économiste de réputation puisqu’on l’a surnommé « le maestro ». On le connaît surtout en Europe pour avoir été le président de la Réserve fédérale (la banque centrale des Etats-Unis) nommé par Reagan, dont il était un fervent supporter au parti républicain.

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Nous avons aussi le nôtre à droite, en la personne de Guy Quaden, gouverneur de la Banque nationale.
L’Américain est probablement un des pères de la crise mondiale en ayant prêché un taux d’intérêt insignifiant du dollar, ce qui a permis toutes les dérives et ouvert la brèche des subprimes et de la peste qui submergea Wall Street, au point que l’on crut que la Bourse allait s’y engloutir..
Le nôtre de Gouverneur est intarissable sur les « dérives » de l’Etat en dépenses sociales, pensions, etc., tandis qu’il applaudissait au sauvetage des banques par un apport massif des fonds publics.
Où le libéralisme reaganien de l’un, rejoint le dévouement à Reynders de l’autre, c’est qu’ils pensent que la crise est sur le point de se terminer… la crise bancaire, bien entendu. L’autre, celle qui fait fermer les usines et qui transforme les travailleurs en quilles de bowling, ils s’en fichent superbement, qu’elle se poursuive de plus belle, puisque ça tombe bien pour accréditer les décentralisations, les fermetures et les rationalisations des zonings.
Seize Etats américains ne sont plus en mesure de payer des allocations sociales, fin d’année, ils seront sans doute trente-deux !
En Belgique, on n’en est pas là, mais les libéraux réfléchissent à la stabilisation des Finances publiques sur le dos des citoyens les plus pauvres.
Un des traits communs de tous les gouverneurs des banques centrales des pays riches, c’est d’être guidé par une pensée rigide et orthodoxe sortie du droit fil libéral. Non pas celle des chefs d’Etat du G20 –qui est une certaine pose devant l’opinion afin de montrer leur bonne volonté à rafraîchir le capitalisme - mais la déraisonnable supposition qu’il faut laisser le système se régénérer tout seul, reprendre des forces à la treille libérale.
Aujourd’hui, les Gouverneurs des banques centrales confondent volontairement les intérêts privés des banques avec l’intérêt des citoyens qu’ils sont censés représenter.
Notre libéral inconditionnel, Guy Quaden, a rendu en pleine crise son rapport sur le vieillissement, dans l’ambiance délétère des finances de l’exercice 2008, mieux même, puisque ce type a le front de s’aider du désastre où l’obstination obscène de ses pareils nous a conduits en 2009 "devant nos responsabilités".
Quaden nous met presque en demeure de sortir de notre poche10 milliards d’euros supplémentaires entre 2008 et 2014, pas la sienne, bien entendu, ni celle de ses pairs, pour financer le système des retraites. Sarkozyste sans avoir consulté le voisin, comme les gens du MR, sans consulter l’UMP, il propose d’amener les prépensionnés-chômeurs entre 55 et 65 ans à recommencer à travailler afin qu’ils cotisent à nouveau, plutôt que coûter des ronds. Dans une ambiance où les seuls effectifs en hausse sont ceux du chômage, on voit la provocation qu’une telle proposition suppose.
Dans le cadre des bonnes idées, il en poursuit une autre tout aussi séduisante qui consiste à réduire les pensions réelles versées en ne les adaptant plus à l’évolution du coût de la vie. Là, même les libéraux, pourtant secrètement d’accord, ont eu la frousse de l’émeute !
En somme, les petites gens paieraient le sauvetage des banques grâce à ces quelques modifications, attendu que la dette augmente, et ce n’est pas le club de nos 54 ministres qui dira le contraire.
Le gouvernement aurait trouvé plus de 20 milliards pour sauver les banques, mais n’a pas la moindre idée où pouvoir en trouver 10 pour sauver le cinquième de la population !
Mais tout cela est déjà dépassé. Puisqu’aux dernières nouvelles les déficits cumulés avec le prêt aux amis de Quaden prennent des allures de pré-faillite.
On s’attend à des déclarations solennelles de Herman Van Rompuy à la rentrée.
Les traders, eux, n’ont pas attendu septembre pour se voir promettre de gros bonus pour la fin de l’année, signe de la reprise des affaires,. Il paraît qu’on en manque dans les banques. Malgré ceux qui se sont retrouvés à la rue dès 2008, la profession est demandée ! On peut redouter les prochains dérapages
Tout le monde est scandalisé de la façon de faire des banquiers et des libéraux pur jus, c’est la liberté, ma chère, dira Louis Michel.
Les conditions des prêts aux banques – en moyenne à 8 % d’intérêt – n’ont été assorties d’aucune disposition concernant l’éthique. Les banques remboursent. L’Etat n’a rien à dire. Certes des promesses orales ont été faites. Mais que peut encore valoir la parole d’un banquier ?
Guy Quaden en sait quelque chose.

11 août 2009

Les Lois et le citoyen.

Voilà plus de trente ans qu’on promène la population à travers le lacis des Lois nouvelles, à défaut d’avoir une politique économique convenable.
On légifère sur tout et sur rien avec ardeur et persévérance. Les loustics du porte-plume législatif atteignent à des sommets quand ils peuvent laisser leur nom à une Loi. C’est une consécration, un peu comme on appelle un nouveau square Jacques Brel ou Machin Chose.
Il y a la Loi Moureaux à propos du racisme, comme il doit bien y avoir la Loi Onkelinx à propos des dimensions des pâtés de sable que font les enfants sur la plage.
Les Institutions européennes ne sont pas en reste. Elles sont productrices d’une quantité non négligeable de textes juridiques qui, eux-mêmes, procurent un sacré boulot aux personnels des Etats membres.
C’est si abondant, complexe et sort de sources si diverses que plus personne ne maîtrise l’ensemble.
Quand on pense qu’un sentencieux imbécile avait écrit à l’orée de la forêt « Nul n’est censé ignorer la Loi. », à croire qu’à cause de cette injonction, nous sommes dix millions d’ignorants.
Car nous ignorons les Lois et comment faire autrement ? Même les avocats se spécialisent. Parfois Delpérée en perd son râtelier le dimanche matin à la RTBf.
Car, en plus d’être pléthoriques, les Lois sont complexes.
Elles poussent comme des champignons dans le rapport de force des groupes de pression auprès des parlementaires, relayées aux échelons inférieurs par des Arrêtés régionaux et communaux.
Les Lois se superposent, les strates anciens recevant des couches plus modernes, les modifiant au point que la lecture du Moniteur passe par la pierre de Rosette et les hiéroglyphes de Champollion, du genre Loi du 6 vendémiaire, remplacée par celle du 12 avril 1884, en son alinéa quatre ter paragraphe 2, concernant la Répression de l’Ivresse, parue au Moniteur le 27 avril 1936, lire « sur les trottoirs à plus de 40 centimètres de l’établissement au lieu de 17 centimètres et demi. »
L’apparition d’un magma informe des Lois et modifications n’en restera pas là. Les papiers bouillonnent, les écrits s’amoncellent, l’avocat exulte et le justiciable n’y comprend plus rien.
Le tout apparaît dans un jargon judiciaire qui servit à Racine dans sa pièce les plaideurs au 17me siècle.
Si on ajoute que les dizaines de modifications pour un seul article n’apparaissent nulle part coordonnées, expliquées dans des textes débarrassés de ce qui a été supprimé, on se rend tout de suite compte que là aussi, le législateur se moque du monde.
On pourrait écrire un fort volume des erreurs que cette complexité perpétue d’une législation à l’autre.
La sécurité juridique est mise à mal, l’institution judiciaire est en péril et le citoyen qui est sensible au problème voit les libertés qui fichent le camp à cadence accélérée.
Bien entendu, tout profite. Des mariolles se frottent les mains. Plus c’est difficile d‘accès, plus les orfèvres du non-dit et du non-droit tirent leur épingle du jeu. Croit alors une clientèle de fraudeurs et de magouilleurs que c’en est une bénédiction pour la gent avocatière et procédurière.
Les juges eux-mêmes transpirent sous leurs robes. Leur honnêteté et leur scrupule font la joie des crapules. Les erreurs de procédure lorsqu’elles libèrent des endurcis du crime font le régal des gazettes.
Les jugements sont imprévisibles. Une même affaire plaidée à Dinant ou à Liège peut avoir des conclusions différentes.
C’est à la sensibilité et au bon sens que la plupart des juges fonctionnent à défaut d’un socle de Lois clair et sans ambiguïté.
Enfin, les Lois lorsqu’elles sont abondantes, confuses, contradictoires, produisent un effet de mépris, plutôt qu’un effet de dissuasion.

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La difficulté allonge les débats et augmente l’arriéré judiciaire. Comme on flanque en tôle assez facilement en préventive dans ce fichu pays (enfin les petites gens et les immatures, les gens à influence et les riches étant plutôt épargnés) la Belgique se fait régulièrement attrapé par les Droits de l’Homme pour procédure trop longue entre les faits et les jugements.
Je n’en jette plus pour ce soir, la coupe est pleine.

10 août 2009

Je suis un con !

Le Dossier Fortis est un cas d’école du comportement de nos élites. Quand une affaire tourne mal et puisqu’il y a faute, surtout quand cette faute est un délit, il convient dans les premiers temps de montrer une fermeté qui ne laisse pas douter l’opinion de l’exemplarité des milieux de pouvoir.
Les nouvelles s’amalgament, se confondent, les rouages du système économico-politique sont complexes, ennuyeux, en un mot. C’est la deuxième phase, celle des oublis, du relâchement, de la désinvolture, c’est la mise en scène de la fatalité. Les nouvelles financières disparaissent plus vite que les autres. Les banquiers et les escrocs le savent bien, nos politiques aussi.
Ce qu’on nous apprend de la voix de castrat de Bambi Jackson et avant qu’on ne dise que les trois enfants du chanteur sont de moi, devient l’affaire du jour. L’affaire dans laquelle des voleurs de grand chemin ont détroussé le peuple belge a dépassé le coin de la rue et changé de quartier, disparue en fumée. C’était une illusion.
In memoriam : le pitch du dossier Fortis.
1. Les actionnaires de Fortis s’estiment lésés et demandent au tribunal de suspendre l’accord noué avec la BNP PARIBAS.
2. Enervement du Premier ministre Yves Leterme qui menace de retirer les "billes" de l’Etat si l’opération montée sous sa responsabilité venait à échouer.
3. Cette déclaration met le feu chez les actionnaires qui parlent de pressions intolérables du pouvoir exécutif sur le pouvoir judiciaire.
4. La juge Christine Schurmans se désiste juste avant l'arrêt de la cour d'appel. Le mari de Mme Schurmans a été soupçonné d'avoir prévenu le gouvernement Leterme de l'imminence d'une décision.
5. Le conseiller du parquet général de Gand chargé de l'instruction, Henri Heimans, pourrait bien étendre l'enquête à d'autres pistes. L'information pourrait en effet avoir été amenée aux oreilles de l'ancien premier ministre par d'autres canaux. Les magistrats Delvoie, Blondeel et Salmon auraient été définitivement mis hors cause, lors de la prospection de cette nouvelle piste..
6. On apprend qu’Ivan Verougstraete, président de la chambre flamande de la Cour de Cassation, aurait été à l'origine de fuites concernant l'arrêt Fortis du 12 décembre. Il nie les faits.
7. Un SMS d’Ivan Verougstraete, confirme les fuites de la Cour de Cassation
…..
La question est la suivante : « Qui, en décembre 2008, a informé le chef de cabinet du Premier ministre Leterme de ce que l’arrêt de la 18e chambre de la cour d’appel de Bruxelles appelée à statuer (elle le fit le 12) dans le dossier Fortis allait probablement être défavorable aux thèses gouvernementales ? »
Eh bien ! ami lecteur, mon frère, vous ne le saurez jamais et moi non plus.
C’est toujours ainsi que ça se passe.
Quand le haut lieu dérape, enfin quand il dérape de sorte que cela se sait dans le Royaume et qu’il n’y a pas moyen de faire autrement que d’entrer dans une procédure d’instruction judiciaire, même s’il y a des inculpations, personne ne va en cabane, c’est clair. On n’est pas ici dans le vol d’un voyou du sac d’une vieille dame et qui va au trou aussi sec. Lui est qualifié d’ignoble individu par l’opinion publique qui félicite les autorités.
Dans une magouille complexe qui a précipité des milliers de petits épargnants dans l’angoisse, Il paraît que c’est moins grave. « Qui vole un œuf, vole un bœuf » est le proverbe le plus faux du monde. Qui vole un œuf ne volera jamais un bœuf et qui vole un bœuf ne volera jamais un œuf. Les genres ne se mélangent jamais. Un petit reste un petit.
On pourrait se demander pourquoi le gouvernement était si pressé de liquider FORTIS ? On sait aujourd’hui que cette banque dans les mains de BNP PARIBAS a renoué avec les bénéfices (dans les 600 millions d’euros !). Certes, si ce n’est pas la vocation des politiques de gérer une banque, pourquoi parachute-t-on à de hauts emplois dans le privé, un vieux routard comme Jean-Luc Dehaene ?
Qu’est-ce que le pouvoir judiciaire rétorque pour envoyer au trou les petites gens, même si ceux-ci sont en principe « innocents » jusqu’au procès ? Il dit que c’est nécessaire de les avoir sous la main dans la crainte que les prévenus ne se fassent la malle. Comme si un pauvre n’avait pas plus difficile qu’un riche de disparaître pour des vacances prolongées dans un pays qui n’extradent pas ?
Quand, par hasard, un notable fait un court séjour en prison, il a droit à une cellule VIP. On ne peut associer le malfrat de la rue aux personnalités. Il y a discrimination de traitement.
Dans le cas de FORTIS, la complexité sauve la crapule de haut vol. Cela a toujours été ainsi. Les carrières à la rigueur sont à peine entachée d’un blâme, tout le monde nie en bloc, rejoignant la crapule d’en bas (n’avouez jamais).
L’instruction est une véritable patinoire, chacun fait son petit axel et personne ne tombe jamais. Si par hasard, dans le groupe des stars, il y avait un gardien de nuit, une technicienne de service ou un concierge égaré dans les hauts parages, on pourrait être certain que tous les péchés du monde seraient pour son grade.
J’ai entendu quelque part que la police à force de fréquenter les malfrats en prenait parfois les manières, on pourrait y adjoindre une certaine partie du personnel de Justice.
C’est quoi, ce sentiment bizarre d’admiration qui nous prend pour les gens du dessus ? Comment s’appelle la crainte irraisonnée qu’un honnête homme a lorsqu’il à affaire à la justice et à la police ? Avant, il y avait de grands escaliers, une Thémis juchée sur le toit du palais à 50 mètres du sol. La mascarade a disparu. Le sentiment d’écrasement demeure. La crainte persiste. Le chétif s’aplatit devant les pointures en représentation soit de la justice, soit des citoyens, les roulements de tambour annonçant l’Autorité font frémir.
Comment se fait-il que nous soyons si bêtes ? Notre destin de bête de somme n’est inscrit nulle part dans nos gênes.
Sans doute, est-il convenu quelque part que nous sommes depuis la nuit des temps une belle bande de cons ? C’est probablement la raison fondamentale de notre société. Elle tient parce que nous sommes des cons !

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9 août 2009

Le Club des 54 !

Si vous ne savez quoi faire comme métier, un qui a de l’avenir et où on embauche, c’est celui de ministre en Belgique.
On ne sait pas qui les a comptés. C’est une sorte de record dont nos finances auraient pu se passer. Ils sont beaucoup. Pour un petit pays, c’est le record absolu et je crois que pour un grand comme la France, qui en compte 38, nous leur en imposons avec nos 54 ministres !
La vie politique nourrit son homme en Belgique. Tout qui monte sur une estrade avec deux idées en tête, il y en a au moins une qui pousse à postuler un ministère.
Ah ! l’être au moins une fois ! « J’en suis » a dû rugir de bonheur l’ancien du Patro, Jean-Mi Javaux, quand il est revenu ce soir-là à la maison. Il en est même tellement que les jeunes socialistes (je croyais qu’il n’y en avait plus !) ont dénoncé ce nouveau cumulard, surtout dans un parti qui s’était fait une vertu de détruire l’instinct de cumul chez nos bêtes politiques.
Nos 54 ministres ont la javauxite depuis toujours.
Le Belge est épargnant. C’est une fourmi qui a horreur des cigales. Une raison qui rend la vie d’artiste quasiment impossible, mais prépare le terrain des cumulards, dans l’esprit de « on ne sait jamais ». Et c’est vrai que ces bougres qui ont traversé si facilement la crise qu’ils croient que nous en sommes sortis, sont à la merci d’une disgrâce d’apparatchik, d’une affaire qui tourne à l’inculpation, d’un désintérêt des foules, etc… tant de facteurs perturbants qu’ils ont le cumul plus en réflexe qu’en réflexion…
Et dire que Di Rupo, toujours en toute modestie, se vantait d’avoir œuvré à la diminution des effectifs par l’intégration des mêmes majorités régionales et communautaires dans l’organisation nouvelle ! Ce qui frappe justement, malgré les dégraissages claironnés, c'est la quantité de maroquins attribuée à nos excellences !
Vingt-trois ministres et secrétaires d'Etats au fédéral. Huit à la Région wallonne, huit à la Région bruxelloise, sept à la Communauté française (avec cinq ministres émargeant déjà aux entités régionales), neuf à la Région flamande et quatre à la communauté germanophone.
Le total est donc arithmétiquement de 54 ministres et secrétaires d'Etat.
C’est une sorte de triste record que d’aucuns trouveront indispensable pour assurer un semblant de pacification entre les Communautés, même si les compétences finiront pas se chevaucher et qu’il y a déjà sous roche cent et une manières de se faire la gueule entre ministres sur la répartition des pouvoirs.
Il y a étoffe pour monter un club d’anciens et de nouveaux ministres et, avec ceux qui y sont passés et qui n’y songent plus, il y aurait de quoi remplir la grande serre de Laeken pour une réception aux anciennes gloire du royaume. On voit d’ici les fils d’Albert circuler parmi les groupes comme des ouvreuses avec leur petit panier et crier « qui en veut ? » en montrant les décorations en vrac, les ordres de ceci, les léopoldineries de cela, agitant les rubans, épinglant et congratulant qui en souhaite ! Car, et de bien entendu, les congratulations, les médailles et les cordons, ça se passe toujours entre eux et jamais entre nous… Qu’en ferions-nous ?
Pourtant le Belge n’est pas particulièrement ardent patriote. Il serait plutôt échaudé par les forts en gueule qui veulent à eux seuls le petit bout de patrie sur lequel ils sont nés. Par contre, avoir un boulot de ministre…

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Revenons à Javaux, 42 ans : « une légende est née ». C’est fou comme il a changé depuis le Patro des culottes courtes et des messes dominicales. La plus radicale transformation, elle se vit au présent. Javaux n’est plus le même homme depuis que l’électeur l’a consacré, d’abord roi d’Amay, puis roi de Béotie avec l’écologie porteuse du songe (creux diront les sceptiques) de modeler le capitalisme en parc naturel, avec moulin à vent et enclos pour les biches. Son œil de pétillant est devenu brillant de ruse. Son argumentaire s’est enrichi de son assurance. Il a lâché son meilleur ami Reynders (qui se ressemblent s’assemblent) pour des raisons de fine politique, afin de constituer une majorité tout aussi libérale que celle que son choix a évincée, mais qui offre l’avantage de l’illusion que celle-ci va œuvrer plus étroitement avec le peuple !
On entre de plein pied dans la realpolitik du campionissimo du genre : Elio Di Rupo, lui aussi « homme de gauche » et partie prenante d’une organisation tricéphale dirigeant une armée mexicaine de caballeros prête à tout pour passer l’été à l’ombre de ses grands chapeaux.
Ce qui est tragique pour l’électeur qui a cru en changeant d’hommes qu’on va changer les mauvais principes contre les bons, c’est de s’apercevoir que le système économique avec ses énormes inégalités, les fantasmes des richissimes et l’absence de scrupule généralisé, est lui toujours bien en place, avec ou sans Reynders, Michel et consort, et cela que l’on ait fait du droit ou de l’économie politique, que l’on soit sorti d’Harvard ou d’« aux buses » des hauteurs d’Amay.
Les Verts succèdent aux Rosés dans la manipulation de l’opinion.
Capitalistes résignés ou capitalistes convaincus qu’importe, les voilà entrés dans la ronde des soutiens aux banques, des marchés mondiaux et de la loi de l’offre et de la demande, passant pareillement de l’ampoule classique à 50 cents à l’ampoule « économique » à 5 euros cinquante pour bientôt. Cela ne va pas bouleverser le monde, cela va seulement bouleverser le pouvoir d’achat des petites gens. On voit bien l’insignifiance de la critique résiduelle d’une infime partie de la population…
Au nom du club des 54, merci.

8 août 2009

Un café de l’amour à Liège ?

-Comment les civilisations se débandent-elles ? Hein ! l’artiste… Ce qu’on a souffert sur la question et pourquoi ce ne sont pas les Amérindiens qui ont inventé le fusil, la caravelle et conquis l’Europe ? On se demande. C’est le concept holiste du temps qui fait qu’on cherche encore.
-C’est comme ça le café philo, on se les gratte à longueur de soirée. Tout le monde y va de son savoir. Tel joue de la clarinette, c’est du côté de la fugue qu’il faut chercher. La plupart ne joue de rien, donc c’est du côté de l’être qui n’est pas…
-Parménide en a de bonnes…
-Anaximandre ne dit ni oui, ni non. Les autres savent pas qu’ils ne sont pas.
-S’ils le savaient, ça ne les empêcherait pas de causer.
-Sauf qu’au café philo on ne fait pas l’amour… Le mot fait psy et pas phi !
-Il y a bien par ci, par là quelques anguilles aciculaires…
-…mais elles restent sous roche…
-Et les tréfonds de l’âme, Gustave ?.
-T’as vu les départs en couple, Eugène ?
-Où c’est-y qu’elle va, l’engeance ?
-Quelques femmes y ont quand même interdit l’accès à leurs maris !
-On ne se méfie pas assez !
-C’est louche la philosophie. T’as connu le vieil Augustin ?…
-Ouais, celui qu’on nommait Saint-Augustin… qui s’est fait prendre devant le lycée avec sa boîte de cachou !
-C’était une belle époque. On reconnaissait Saint Augustin à l’odeur indéfinissable de pisse et de chlore qui imprégnait son imperméable.
-Il y avait beaucoup d’édicules publics à l’époque.
-Aujourd’hui, il n’y en a plus qu’un…
-Les traditions se perdent. Aristote employait entéléchie quand il parlait de perfection. En 2009, ça fait rougir les femmes.
-On ne sait plus vivre…
-Après le café philo, on a hanté le café psy !...
-Toutes les douleurs du monde… J’ai un cor qui me fait souffrir. Personne croit que c’est au pied…
-L’altérité implique une relation… Tu penses pas débuter par les pieds ?
-Là ce n’est même plus l’être qui est… c’est l’assemblée « qui n’est pas »…
-La vérité que l’homme reçoit le plus volontiers, c’est celle qu’il désire… comme il n’est pas, il ne désire rien.
-Amen.
-Les cafés de la chose atteignent la phase centrale, dite de régression, une sorte d’état de retrait, une incapacité à se maintenir… position du foetus…
-Un deuil pathologique.
-Fini les cafés philo, les cafés psycho, voici les cafés de l’amour.

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-T’es inscrit au cours de drague ?
-Il y a quelque part une personne qui est faite pour moi. Je me la sens.
-Albert, on se calme…
-C’est rageant, on s’emmerde chacun de son côté. Ce serait mieux de s’emmerder ensemble ! Au moins on ne s’emmerderait plus.
-J’ai essayé Internet. C’est trop imaginaire.
-T’as difficile d’avoir ta troisième dimension dans un monde qui n’en a que deux…
-Sauf, si t’es voyeur…
-L’imagination, ça ne s’apprend pas…
-On fait des rencontres sexuelles au café de l’amour !
-Tout dépend de la rencontre. Tu l’imagines au coin d’un bois. Si t’as une frayeur, t’insistes pas !
-Qui suis-je? Je suis celui qui dit «qui suis-je?» et fait dire «qui suis-je?» aux autres. Il est impossible de faire cela tout seul.
-Socrate avait raison. Heureusement qu’il avait Alcibiade. En sa mémoire, il paraît qu’en philo tous les animateurs sont gay !
- Au café de l’amour, c’est plus branché. On dit « Qui je suis ? Qu’est-ce que tu veux ? On va chez toi ou chez moi ? « Y a du feu dans ton ergastule ?» qu’elle s’inquiète, l’Héra de service…
-Au moins en philo, pour une panne d’érection tu disais « Excuse-moi, j’ai une ischémie ! ».
-Ça avait de l’allure…
-On a fermé les maisons, c’était pour ouvrir les cafés.
-On change l’animateur en animatrice…
-C’est une nouvelle manière… Les animateurs, même rasés, ce n’est pas la même chose.
-On aura accès aux outils de la psychologie ainsi qu’à d’autres concepts techniques pour mieux s’aimer.
-Même Kierkegaard jeune aurait pas osé !
-Avec Durex …Dura lex sed lex, la loi est dure, heureusement, mais c'est la loi.
-Il paraît que les animatrices sont pourvues d’une volonté à toutes épreuves et d’une énergie stimulante.
-Il s’agit de s’intéresser exclusivement à l’amour et aux sentiments amoureux, à mi-chemin entre le salon littéraire, le café philo et l’atelier du développement personnel.
-Un lieu où il faut s’impliquer. A dix euros, ça passe…
-Plus les passions sont violentes, plus les commodités sont nécessaires…
-Nous aurons des lits pleins d’odeurs légères et des divans profonds comme des tombeaux.
-Sale temps pour la philosophie !

7 août 2009

Un méchant.

Lorsque Pierre Débuligne quitta la rédaction de « L’Universale », il y avait tout fait. Le public n’avait commencé à le connaître qu’à la cinquantaine comme chroniqueur judiciaire.
Sa réputation croissant, il réfléchit sur quoi elle était fondée. Il mettait toujours deux « r » à carotte et ne savait pas un mot d’anglais.
Débuligne en fréquentant les palais de justice, les magistrats et les avocats était devenu méchant.
Pas de cette méchanceté un peu bête qui fusille tout le monde et dispersée ne laisse que des blessures superficielles ; mais de cette méchanceté qui s’acharne sur quelques uns qui ne sont pas en état de répliquer et que l’opinion publique finit par détester aussi.
Son succès sortit des salles de rédaction. Il s’acquit un public. Et le lecteur par son assiduité à lire le chroniqueur produisit un effet bénéfique sur les tirages.
On lui fit remarquer qu’il était mûr pour la critique littéraire ; car on y condamnait à mort, contrairement aux Assises.
Débuligne refusa dans un premier temps. Il aimait qu’on l’en priât…
Dans sa jeunesse, il avait soumis un roman à quelques éditeurs qui l’avaient refusé, sur le temps qu’était publié « L’hygiène de l’assassin » qui ne valait guère mieux.
Il en avait conçu du dépit et s’était bien juré de ne faire le métier de critique que s’il était édité. Il s’en ouvrit à Alain Mix. Celui-ci vit en cette circonstance une habile façon d’éliminer un concurrent et l’encouragea à une nouvelle tentative auprès des éditeurs, persuadé que Débuligne courait à un nouvel échec.
Quelques semaines plus tard, le livre soudain au goût du moment engoua les Editions Babillard & Taupin.
Sur la promesse qu’il serait tiré tout de suite à cinq mile exemplaires, Débuligne accepta la critique littéraire du journal.
Quelques années plus tard, il était une sorte de juge littéraire à la mode, à la fois redouté et courtisé. Cependant, son style n’avait pas évolué. Ses phrases étaient trop longues. L’atticisme qu’il reprochait aux autres aurait plombé ses critiques, si elles n’avaient été émaillées d’une grande méchanceté. Son succès, il le devait à la plume qui avait applaudi à quelques verdicts controversés. Il exécutait les auteurs comme il applaudissait jadis à l’exécution des arrêts de Justice.

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Il quitta le journal et l’édition auréolé de gloire. Parlant vaguement d’une œuvre à venir. Il avait 62 ans.
En réalité, il s’agissait de bien autre chose.
Débuligne réalisait que l’aspiration à la retraite procédait plutôt d’une remise en question de lui-même. Son imagination était à sec. En avait-il jamais eue ?
Sa méchanceté jusque là avait pu passer comme la juste censure de l’honnête homme à la dissipation et au crime. S’il pouvait convenir qu’un assassin n’a que ce qu’il mérite, un pauvre type qui remplit page après page de son écriture dans l’intention d’en tirer de l’argent avait quand même plus de mérite qu’un gangster ou un violeur.
Sur la fin, dans ses critiques littéraires, lorsqu’il ne se surveillait pas, il était moins méchant. Parfois, il ne l’était pas du tout. Débuligne semblait s’être brûlé aux feux des anciens bûchers.
Sans méchanceté, il était aussi anodin que son presque homonyme Assouline.
Il fallut à Débuligne au moins trois mois après sa retraite pour s’oser regarder dans une glace.
Comme il n’avait plus besoin d’être méchant pour assurer sa pitance, envahi par une étrange bienveillance, il refit les procès auxquels il avait assistés, comme les auteurs qu’il avait assassinés et arriva à la conclusion que tous les hommes sont des monstres, sinon personne ne l’est.
Or, si tous les hommes sont des monstres, la normalité serait de l’être.
Comme ce n’était manifestement pas le cas : personne ne l’était !
Il s’était trompé sur toute la ligne.
Une seule idée le hanta. Il ne pouvait comprendre la raison du succès qui fut le sien.
Il avait tant de fois orchestré des jeux de massacre en librairie, qu’il avait longtemps pensé que la notoriété était à ce prix.
Quand il découvrit que ce qu’il avait pris pour une méchanceté naturelle, n’était que le produit d’un ennui profond, il fut saisi de l’horreur d’avoir été le méchant par désoeuvrement auprès de ses lecteurs.
Il voulut en avoir le cœur net. A sa demande, on le réembaucha à l’Universale. On le revit dans les tribunaux. Il parla avec humanité des condamnés. Ses chroniques littéraires furent des litanies d’excuses en faveur de ceux qui n’ont pas de talent au goût du jour, et même ceux qui en sont dépourvus.
Un mois plus tard, on le pria de prendre définitivement sa retraite.

6 août 2009

Weber, trompe-l’œil parisien de Flaubert

S’il y a bien quelque chose d’affligeant dans le parisianisme, c’est la tentation du microcosme à se faire peur en abordant les êtres et les choses, par le biais de la représentation fausse qu’il en a. Ainsi, sans risquer gros, il passe pour hardi.
Il y a sur la place quelques comédiens qui traduisent cette peur « délicieuse » en collectant des textes dénonciateurs, qu’il est agréable d’apprécier dans un fauteuil au parterre en sentant courir sur l’échine ce petit frisson de tentation-répulsion des choses interdites dans la réalité, seulement permise dans l’imaginaire.
Ce fut le cas des lectures de Céline par Lucchini.
Céline est cet affreux Jojo qui dit d’effroyables choses que l’on réprouve sur les Juifs, mais que l’on est bien aise d’entendre, même si Lucchini ne les dit pas, mais les suggère en surfant sur « Mort à crédit » au lieu de « Bagatelles pour un massacre ». Il n’était pas question d’aller au fond de la rhétorique célinienne et encore moins d’en voir le côté vengeur et faubourien, mais d’y faire connaissance du nécessiteux sortant du cabinet du docteur Destouches.
Voici pour enrichir la collection, Weber aujourd’hui dans la peau de Flaubert.
L’acteur est déguisé en anarchiste de salon, proférant « les choses abominables » de l’écrivain qui fit de la culture en pot pour Pécuchet, ne travailla jamais, et commit des ronds de jambe dans l’intimité de la princesse Mathilde, cousine de Napoléon III, afin de s’y faire pardonner sa Bovary ; mais dont la conscience angoissée voyait la bourgeoisie à travers son propre bourgeoisisme, c’est-à-dire impitoyablement.
C’est assez commode de vivre en Sarkozye, une société qui s’effraie de tout et n’ose plus aucune transgression, quand elle s’encanaille sans risque deux heures en soirée dans un théâtre.
La mode est à la réincarnation. Weber dont toute similitude avec Flaubert se borne au quintal commun de graisse, incarne le grand écrivain qu’il vêt à sa fantaisie d’artiste : de ses pantalons à grosses côtes qu’il affectionne, dans lesquels on le voit depuis vingt ans, affublé de ses chemises sans col dans du coton épais comme les voiles d’une chaloupe, affirmant dans cet accoutrement son « désir » de gauche.
Non, Gustave Flaubert n'est pas que ce moustachu ventripotent, incarnation d'Emma, dévoué à une Junon dénommée Louise Colet, femme de flûtiste et hétaïre un moment à la mode.
En réalité, Gustave était un provincial attaché à ses pantoufles qui dut se faire violence pour baguenauder deux années à la recherche d’un orientalisme qu’il ne trouva pas en compagnie d’un autre déluré d’occasion : Maxime Du Camp, fils comme lui, d’un médecin fortuné. Pour ensuite organiser sa vie en navettes Croisset-Paris quand il fallait apaiser sa fringale des femmes.
Maxime et lui avaient compris toute l’horreur et en même temps tous les délices de leur condition de fils à papa. On est loin d’un Rimbaud s’exilant en Afrique par dégoût d’un système social et y trafiquant des armes par nécessité et provocation.

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C’est lui tout craché disent les critiques en parlant du comédien, sans avoir lu grand chose de l’ermite de Croisset, en félicitant Weber jouant la traditionnelle modestie du socialiste pratiquant, que Flaubert n’était pas.
Le vide en 1871du courrier de Gustave, au sujet du bain de sang dans lequel finit la Commune de Paris, en atteste ; comme son manque de cœur à l’égard de son ancienne maîtresse Louise qu’il laissa se terrer misérable dans une cave pendant la répression des prolétaires parisiens et qu’il n’aida pas, pendant les cinq années qu’il restait à vivre à la malheureuse.
Les décors plantés, on assiste sur scène à la métamorphose de Weber-Cyrano, en Spendius agressif, déclarant, sans ambages, que "l'artiste doit s'arranger de façon à faire croire à la postérité qu'il n'a pas vécu" ; ce qui était sans doute vérité « intermédiaire » pour Flaubert, mais que le teint fleuri et le sourire « amusé » du comédien démentent catégoriquement.
Flaubert a connu le milieu parisien du bel esprit, les frères Goncourt, Sainte-Beuve, Guy de Maupassant. Certains avaient été les amants de Louise Colet, de onze ans l’aînée de Gustave, tous lettrés, écrivant leurs amours en vers, comme « la Muse » usant de l’alexandrin de plus ou moins douze pieds….
C’est Georges Sand qui connut le mieux Flaubert « garçon », l’appelant « Mon chéri cruchard », tout attendrie qu’elle était par les efforts qu’il fit sa vie durant pour s’extraire d’un milieu qu’il n’aimait pas, mais dans la facilité duquel il ne put jamais sortir, même s’il eut un geste « héroïque » en vendant des biens afin de sauver sa nièce Commanville de la faillite.
Le spectacle de Weber montre un Flaubert bravant les conventions, mais découpé de façon conventionnelle par le choix des textes exhumés de la correspondance.
Il ne reste plus qu’à gloser sur le « modernisme » de Flaubert. Comme Weber, on aura passé à côté d’un grand écrivain dont il conviendrait plutôt de lire sa correspondance et sa Bovary, plutôt que son Saint-Antoine et son Education sentimentale, quoiqu’il s’y trouve dans l’un comme dans l’autre de ces derniers, des pages d’une rare acuité, qui font que l’œuvre de Gustave défiera le temps.
Il ne lui aura manqué que l’endurance d’un Balzac qui vécut huit années de moins que lui, mais, put développer sa pensée dans la comédie humaine, d’une étendue bien plus vaste, par la seule raison qu’Honoré avait une facilité naturelle d’écriture, ce dont Flaubert manquait.
Il entrait dans le droit fil des festivals que ce spectacle fût aussi de Ramatuelle.
Peut-être aurez-vous l’occasion de juger de la pertinence ou de la mauvaise foi insigne de cette critique sur France 2, un de ces soirs ?

5 août 2009

Stratégie A H1-N1 !.

-T’as pris du poids Phiphi…
-…Suis trop longtemps derrière ma table de travail !
-Toujours aussi belle Rèrette… ceci dit en toute modestie.
-Ah ! président… tu es flatteur…
-Tu es magnifique Polo… mon chou !... Tu as changé de coiffure ?
-On fait ce qu’on peut, président…
-Si je vous ai fait venir avant le Bureau, c’est pour échapper aux emmerdeurs… Rudy, Jean-Claude, Lili et même Maria qui m’a déplu… Vous savez bien !
Tous – On est bien d’accord !
-Van Rompuy a dit que pour remettre l’Etat sur pied, on en aurait pour dix années à se serrer la ceinture. Ça signifie qu’il va falloir lever des taxes, augmenter les TVA, sabrer dans les salaires du privé… Les choix vont être difficiles.
-Zapatero a des déficits abyssaux. Angela ne sait comment faire avec les Lands…
-Sarko, jure qu’il n’augmentera pas l’impôt, puis il commande à Rocard un plan de taxe carbone…
-Bien vu. Il faudra qu’on y passe aussi. La situation est simple. On ne touche pas aux classes supérieures, pour éviter la fuite des capitaux et de grosses fermetures, reste la classe moyenne. Or, il se fait que la classe moyenne c’est l’avenir de notre parti…
-Et la classe populaire, président !
-Aux dernières élections, ils ont foutu le camp aux écolos et chez les libéraux, alors qu’on ne me parle plus de ces gens-là !
-C’est pourtant notre fonds de commerce !
-Oui, mais il a évolué, grâce à vous tous, mes amis… Fringués comme vous l’êtes, avec le langage fleuri qui est le vôtre, vos solides études, comment voulez-vous encore être crédibles chez ces ratés, même sans cravate ? Regardez le beau Polo ? (bas) c’est vrai que tu es beau, mon chou, tu portes une gaine ?… (haut) Et puis, ils se feront avoir par le biais des augmentations. Quand les prix augmentent de 10 unités, nous en récupérons au moins 2 de TVA. Et qui paie la TVA, mes chéris ?
-Le plus grand nombre président !
-Tu veux dire quoi Phiphi ?
-On sait bien que les pauvres, on ne peut les avoir qu’avec la TVA, le président a raison.
-Diminuer leurs revenus directement, on risque l’émeute… Je veux bien… on fait des efforts à la police et les prisons, mais il arrive un moment où nos dispositifs sont débordés. Et ça je ne le veux à aucun prix…
-Pourquoi ?
-Pourquoi, Rèrette ? Avec Marc, ça gaze ?...Un sachet de snus ?
-Non, ça jaunit l’émail des dents. Merci.
-… Mais, quand il y a émeute vers qui tout le monde se tourne ? Vers nous pardi. On est coincé. Tu nous vois faire savoir qu’on est d’accord d’affamer les petites gens et désavouer les efforts de notre brave police ? Non. Notre problème, c’est la classe moyenne.
-Mais président, les libéraux ont toujours su y faire pour nous mal placer dans les réformes qui font mal à nos électeurs, pourquoi ne pas rendre la monnaie de leur pièce ?
-Oui, clouer le bec à la marchande de poisson…
-Mais parce que Polo, mon chou, c’est notre ultime réservoir de voix, les classes moyennes, c’est notre challenge. Il faut battre Laruelle sur son terrain !....
-Qu’est-ce qu’on peut faire ?
-C’est assez difficile de présenter l’avenir comme une catastrophe, alors que ce qui fait tendance, c’est justement de dire qu’on sort de la crise ! Heureusement, on a un allié précieux !
-Qui ?
-La grippe A H1-N1. Elle accapare l’attention des gens. Et si, à la rentrée quelques dizaines de contaminés restaient sur le carreau… on éviterait des questions gênantes sur le budget ! Qui sait on ne penserait plus à la reprise de la querelle sur BHV… la couronne sauvée, le bilan désastreux oublié, le plan Marshall aux chiottes… le bonheur en quelque sorte…
(ils rient)

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-On voit l’effet qu’un virus peut faire !..
-Rien que la perspective, ça ragaillardit…
-Ce clown de Michel a trouvé la formule… « On va s’en sortir grâce à plus de libéralisme ! » Tu crois qu’il n’a pas prévu l’effet A H1-N1, lui aussi ?
-Il est trop con !
-Alors que c’est déjà largement suffisant ce qu’on en a dégusté du libéralisme, pour plonger les ploucs plus profond dans la merde…
-Rudy aurait dit kââkââ !
(rires)
-Vous me faites toujours confiance ?
Tous en chœur – Oh ! président, comment peux-tu en douter ?
-Bon. Les grosses fortunes, c’est le statu quo, ce n’est pas l’augmentation des taxes sur l’essence et quelques babioles dans le genre qui vont toucher les gros porte-monnaie. On demande aux classes moyennes de faire un effort en réengageant quelques bas salaires et on leur fait des ristournes.
-Mais nous président, on est classe moyenne « passive » vu qu’on ne produit rien, donc on va morfler !
-On adaptera les traitements de l’Etat, au pire on inventera des postes dans de nouvelles commissions compensatoires.
-Qui paiera ?
-Les professions libérales ! Vous avez vu comment mon dentiste a arrangé mon bridge ?
Tous -Quelle horreur !
-1200 euros de forfait, j’attends de payer le reste à la facture… Et puis les professions libérales répercuteront sur leurs clients.
-C’est génial.
-Vous croyez qu’avec ça, le Bureau m’ovationnera ?

4 août 2009

Et si c’était toujours « non » ?

Dans l’effervescence jouisseuse des vacances, il y a très peu de place pour l’information « sérieuse ». Ça tombe bien, on laisse ainsi dans l’obscurité propice un retour aux urnes pour raison d’Etat : le second référendum sur le traité de Lisbonne que le gouvernement irlandais organise le 2 octobre.
Si on comprend bien la nouvelle logique de l’Europe, quand un peuple dit non, c’est oui !
Tant pis si l’électeur s’obstine et dise non, on refera marcher les urnes jusqu’à ce qu’il ait changé d’avis ! Ce serait plus simple de ne plus demander d’avis du tout, comme en Belgique, par exemple ?
En Irlande, selon les gazettes, « les partisans du "oui" ont commencé à se mobiliser en force. » En réalité, la rue n’a jamais été aussi calme et aussi peu fréquentée des partisans de l’Europe, pour la bonne raison qu’à part les affairistes attachés à la politique gouvernementale, l’Irlande est partagée en deux camps : celui qui part en vacances et celui qui ne le peut pas à cause de la crise.
Le traité de Lisbonne vaut-il l’adhésion de tout Dublin, au point que ceux qui avaient voté « non » mangent leur chapeau ?
Ainsi la construction européenne est présentée depuis plus de vingt ans comme à prendre ou à laisser, sachant que si on la laisse on va exercer sur nous un chantage et une pression.
Chantage : ceux qui votent non, sont des incultes antédiluviens de la CECA, bref d’anciens Cocos nostalgiques ; pression : nous allons perdre de notre pouvoir d’achat dans l’anarchie ancienne, du temps où les Etats étaient concurrents et nous ne l’aurons pas volé !
Parmi les slogans qui nous farcissent la tête, retenons que « L’Union s’est imposée comme une Loi de la Nature dans le droit fil de l’Histoire ».
On ne va quand même pas désavouer Charlemagne et Jean-Luc Dehaene ! Verhofstadt n’est pas un imbécile quand même, comme tous les autres !
D’année en annéee, des lieux communs se sont accumulés faisant de l’Europe un nouveau sacré et une transcendance retrouvée.
Le ministre irlandais des Affaires européennes, Dick Roche, a reconnu que la campagne du « oui » de l’année dernière avait dégénéré en une prise de bec politique entre les principaux partis. Cela ne peut être permis à nouveau, a-t-il souligné. Si on comprend le raisonnement, le « oui » à l’Europe n’est pas l’affaire des partis ! Comment ce pays envoie-t-il des parlementaires à l’Europe, sans le jeu des partis et des prises de bec ?
L’eurodéputé polonais et ancien premier ministre Jerzy Buzek, presque certain de devenir le prochain président du Parlement européen, a indiqué que s’il était élu, il irait en Irlande pour dire aux gens à quoi sert le traité et ce qu’on y trouve. Il ferait ben de faire un crochet par la Belgique pour les mêmes raisons.
Des sondages récents ont montré que l’opinion publique se dirige vers un vote positif, d’autres sondages prédisent un schéma similaire à l’an dernier (« non » à 53 %, « oui » à 47 %), selon que la clientèle des Instituts de sondages soit pour ou contre.

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Dans une conférence prémonitoire en 1946 (1), Bernanos voyait l’Europe future n’être que l’élément qui manquait à la décomposition de la civilisation européenne. Alain Minc y pressent au contraire « l’affaissement des Etats nations pour le plus grand bien des peuples ».
En réalité, Alain Minc pense le contraire : une voie de contournement des peuples, si l’on suit la dialectique « Mincienne » qui consiste à masquer son intention en disant le contraire de ce qu’on souhaite.(2)
A la vue de tout Européen ayant encore l’usage de son esprit critique, les intérêts des peuples européens ne sont pas pris en compte. La démocratie y reste en décalage dans un mode mineur par rapport à celle de ses États membres. Les aspirations populaires soucieuses du progrès social, pacifique, démocratique et écologique sont ignorées.
Une technique éprouvée de la droite dans des pays comme la France est en train de circonvenir aussi l’Europe. Elle consiste à détricoter tout le corps social existant des pays ayant une longue tradition syndicale de partenariat, par l’abandon des accords locaux possibles au profit des directives européennes ! On les vote en Commission, pour s’en dire les victimes après !
On peut se demander si l’objectif des « bâtisseurs de l’Europe » n’est pas d’en finir avec les turbulences des mécontentements populaires, dans la poursuite d’une construction tout à fait orthodoxe de l’économie mondialiste.
L’Europe ou comment s’en débarrasser finira par être un objectif mobilisateur pour une gauche non-conformiste. Et pour cause, il n’existe plus parmi les parlementaires élus en Wallonie de gauche comme de droite, un seul capable de soutenir le « non » du référendum d’octobre en Irlande. C’est dire comme l’unanimité de nos représentants reflète mal une partie de ceux qu’elle représente !
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1. L’esprit européen et le monde des machines.
2. Alain Minc sans doute en fonction de son impopularité, n’a qu’à dire une chose pour qu’aussitôt une majorité pense le contraire.

3 août 2009

Embauche.

-T’es là pourquoi ?
-Des bricoles.
-T’en a pris pour combien ?
-Huit ans !
-C’est déjà des grosses bricoles…
-Au départ je voulais pas. Je l’ai secoué un peu…
-Il est mort ?
-Non. Autrement j’y coupais pas… Juste en fauteuil à vie…
-T’as planqué le magot ?
-Quinze euros ! Tu parles d’un paquet. Le fumier avait deux caisses, celle bien en vue et l’autre sous le comptoir…
-T’es parti avec celle en vue !
-J’aurais dû le savoir…
-C’est con !
-La procureure m’a pas lâché. Entre deux couplets signalant que j’étais une belle ordure, elle avait de ces ramponneaux… j’excitais son ulcère… Le juge en a tenu compte. Avec un Alka-Seltzer, j’en sortais à moins de cinq !
-Qu’est-ce que tu foutais jusque là ?
-Je suis pas un violent. Je voulais juste la gourmette, la belle qui fait son poids avec mon nom dessus, puis une voiture pour aller en disco fumer un joint à l’occasion…
-T’as pas pensé à travailler ?
-Qu’est-ce que tu crois ? J’ai bossé jusqu’à l’année dernière comme un malade. Quand j’ai vu que j’en sortais pas, mieux quand l’Etat m’a réclamé un petit supplément à ses hold-up de fin de mois, je me suis dit que bosser honnête, c’est pas la bonne formule.
-T’as des métiers qui rapportent.
-Y en a plein. T’en vois défiler de ces gavés à la télé que tu te dis, c’est pas possible, je passe à côté d’un truc… Comment ils font ?
-Tel que tu me vois, j’en ai croqué vite fait bien fait. Je te dis ça, parce que moi j’étais dans la politique… Si tu me remets pas, c’est pas grave. Je suis bien placé pour le savoir, si tu te tiens à carreau, tu ramasses sans faire grand chose. Mais c’est l’appétit qui te vient à force. Tu te crois tout permis et tu finis par plonger. Tu tombes dans l’excès, mais pas le grand excès, le petit… C’est le plus dangereux. Le grand, t’es intouchable quand ça dépasse l’entendement des ploucs. T’es sauvé par les zéros qui courent derrière. Tu deviens un secret d’Etat. Et même si tu tombes quand même, tu fais même pas de la préventive. T’es condamné pour l’exemple à un symbole… Inéligible, certes, en tôle, jamais !... Tu vois mon cas est différent, c’était pas rien que pour moi, j’aidais les sportifs, les sociétés, l’environnement… J’avais bon cœur avec l’argent des autres. En même temps, c’était de l’argent investi pour ma popularité…En un sens, je faisais ce qu’ils font tous, mais sans la règle, c’est ça qui m’a perdu…
-Attends, je te remets… T’es de Charleroi ?
-Tout juste mon salaud…

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-Comment t’es pas dans le quartier des VIP ?
-C’est complet. Le drame des engorgements…
-Tu crois qu’ils sont tous dans l’excès, ceux qu’on admire sur les affiches ?
-Je te dis pas. T’as des curés partout, encore que c’est un mauvais exemple. Beaucoup ont eu des parents qu’étaient déjà familiers avec les directeurs de banque. Les riches qu’ont été aidés parce qu’on a volé beaucoup avant eux dans la famille, n’ont plus à faire le sale travail.
-Les débutants sont les pires, alors ?
-En un sens. Ils sont affamés. Ils ont besoin de tout. Ils craignent d’être oubliés l’année suivante. C’est la notoriété qui apaise !...
-J’aurais pas dû serrer pour quinze euros !
-Les pauvres, c’est comme ça. Ils font dans le commerce de détail… T’as manqué d’ambition…
-T’en as pris pour combien, toi ?
-J’en ai pris pour rien. La préventive, ce sera suffisant. Mon avocat s’affaire partout. Peut-être demain que je serai dehors.
-Tu peux faire quelque chose pour moi ?
-Tu te tiens peinard. Avec les remises, l’encombrement et la bonne conduite, d’ici trois ans, tu sors. T’es jeune, t’as une belle gueule, t’es pas con… il t’a manqué un parti. Je te laisse mes coordonnées, on a toujours besoin d’hommes décidés. Tu feras comme tu le sens. N’oublie pas les quinze euros, plonger pour une aumône, c’est pas de veine, moi je le dis, c’est pas de veine.

2 août 2009

Proudhon criait déjà au meurtre !

Le capitalisme qui s’est peu à peu emparé de toutes les lois et procédures d’exploitation et de commerce dans le monde, n’a pas pour seul modèle le système anglo-saxon. .
Aux Etats-Unis et en Angleterre, les réactions des entreprises en cas de récession, le fonctionnement du marché du travail, la structure des patrimoines, les niveaux d’endettement, l’absence de socialisation par l’État des risques individuels, n’ont pas encore tout à fait aspirer les pratiques européennes dans ce domaine. Quoique de plus en plus réduite, la différence entre capitalisme Anglo-Saxon et capitalisme européen perdure. Les européens continentaux ont beaucoup plus d’aversion pour le risque, ce qui explique le rejet des comportements et types d’organisation du capitalisme anglo-saxon.
Le développement des mouvements anti-mondialisation, les résistances à l’ouverture des marchés et aux privatisations, le refus de la directive européenne sur les OPA en Allemagne, les conflits sociaux en Italie, la résistance aux modifications de la sécurité sociale couvrant moins bien le travailleur, le chômeur et le malade sont des signes de rejet du capitalisme anglo-saxon dans beaucoup de pays d’Europe.
Il n’existe aucun modèle satisfaisant, comme la crise nous le démontre amplement.
Le modèle anglo-saxon a été mis en place depuis plus d’un siècle sous les auspices d’un protestantisme glorifiant l’obligation de l’homme à un acharnement au travail, avec l’appui d’économistes réputés.
Si dans la foi protestante, anglicane ou méthodiste est affirmée l’obligation du travail, c’est incontestablement perçu par les Eglises comme un travail élevant les qualités de l’homme, faisant appel à son intelligence, à son inventivité, bref, à une sorte d’artisanat.
Or, avec l’avènement des techniques de production, les systèmes Parker et Taylor,la parcellisation des tâches, leur codification dans des lois de l’économie par des gens encore réputés aujourd’hui, les tables d’ergonomie réduisant l’homme à un complément de la machine, l’ensemble de tout ce que le monde industriel tient en haute estime, tout cela est entré en contradiction avec les impératifs moraux dont se targuaient et se targuent encore les églises dont le capitalisme anglo-saxon est issu, bientôt imité dans beaucoup de domaines par le capitalisme européen.

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Marx et Lénine ont toujours été désignés comme les inventeurs d’une économie communiste excluant toute autre alternative au nom d’un progrès de l’humain fortement contesté en Occident et non sans raison, puisqu’il a conduit l’économie soviétique à des aberrations dont la République de Poutine souffre encore aujourd’hui, au détriment de presque toute la population, si on excepte la nomenklatura. Ce qu’on ne sait pas, c’est la reproduction quasi à l’identique de ces aberrations aggravées par l’hypocrisie d’une référence au sacré dont se rend coupable l’économie anglo-saxonne.
On y redécouvre les inégalités dans les hiérarchies établies non plus sur des critères de parti, mais sur des critères fondés sur la propriété et l’argent, sans que le prétexte de la démocratie y ait pu faire quelque chose.
La notion de matérialisme est une notion métaphysique.
A l’époque du mécanisme triomphant, c’est toute l’histoire du couple matière-esprit dont on a retranché l’esprit à une part considérable des acteurs de l’économie cette fois européens et anglo-saxons.
Cette antithèse, c’est le vieux système platonicien et plotinien en vertu duquel le monde est une lutte perpétuelle entre l’esprit et la matière dans chacun d’entre nous.
En condamnant une immense partie de l’humanité à ne plus être que la matière, le système anglo-saxon confine l’esprit dans des limites qui le rétrécissent, en même temps qu’il se moque de ce pourquoi les Eglises réformées l’avaient promu.
C’est toute la philosophie capitaliste qui est en jeu, en même temps que son éthique.
L’homme-machine est un homme privé de son « âme ».
L’amputation de milliards d’hommes de « l’esprit », dénature la dualité esprit-matière, circonvient une série de jugements de valeur qui, par l’immaturité nouvelle fait réagir par les lois dichotomes du bien et du mal, en oubliant au passage les différentes formes d’esprit, dont celle de la critique.
L’harmonie préalable est cassée entre l’esprit et le corps.
On le vérifiera sans doute bien plus tard qu’en 2009, mais le capitalisme, dans sa phase actuelle d’accélération anglo-saxonne, est encore plus nuisible à l’humanité que le marxisme-léninisme des années du parti unique des Soviets, puisqu’il attente à l’intégrité physique d’un plus grand nombre d’hommes !
Les hommes de gauche feraient bien d’y réfléchir.

1 août 2009

Les dégâts collatéraux de l’amour.

-Mon père a une Porsche !
-Le mien, une église !
-T’habites dans une église ?
-Non, c’est là qu’il travaille.
-Qu’est-ce qu’il fait ?
-Ma mère m’a demandé de ne pas le dire.
-Pourquoi ?
-Si je te le dis, tu ne diras rien à personne ?
-Promis !
-Il est curé. Mais je ne le vois pas souvent.
-C’est comme le mien. Il va, il vient.
-T’as demandé à ta mère pourquoi ?
-Oui, c’est un homme important, qu’elle m’a dit.
-Les hommes importants ne sont jamais là ?
-En tous cas, c’est vrai pour Langue de velours.
-C’est qui, Langue de velours ?
-Mon père. Ma mère l’appelle comme ça.
-Il a une langue en tissu ?
-Non, mais elle ne l’appelle pas toujours Langue de velours.
-Il a plusieurs noms !
-Quand elle est fâchée, elle l’appelle l’enfoiré.
-C’est pas comme chez moi, mon père et ma mère s’entendent bien.
-Naturel. On ne sait pas se disputer avec un curé.
-Pourtant, elle n’aime pas quand il met sa robe.
-Il s’habille en femme ?
-Parfois. Il est intégriste.
-C’est quoi ?
-C’est des curés qui vivent à l’ancienne mode.
-J’aime mieux être le fils de Langue de velours que d’un curé !
-Et moi, j’aime mieux être le fils d’un curé que celui d’un enfoiré.
-…puis, il a une Porsche… Le tien, je parie qu’il n’a qu’un vélo.
-Une moto, qu’il a le mien.
-Une grosse ?
-Non, une qu’on se salit pas avec.
-Le mien, me prend dans sa voiture. L’autre jour, il roulait trop vite. On nous a arrêtés. « T’inquiète, qu’il m’a dit, mes PV je les fais sauter ».
-Je vais jamais sur sa moto. Ma mère dit que c’est trop dangereux.
-Dis plutôt que ton père est gêné d’avoir un fils, quand on est curé.
-Tu parles ! Et le tien, pourquoi il est jamais chez toi ?
-C’est un secret de famille.

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-Comme moi, ma grand’mère sait pas qu’elle va à confesse chez mon père !
-Ils doivent rigoler, le soir, quand il raconte ce que la vieille a dit !
-Le soir, il reste pas. Sa servante est très jalouse. Elle l’attend au presbytère.
-C’est pareil pour le mien, avec son autre famille, sauf qu’il reste quelques jours, puis on ne le voit plus pendant une quinzaine.
-Qu’est-ce qu’il peut bien faire ?
-Pendant qu’ils étaient au lit, j’ai ouvert sa serviette. Il y avait des tas de billets attachés par paquets.
-Des liasses qu’on dit.
-Je crois qu’il fait gangster.
-Non, puisqu’il s’arrange pour ne pas payer ses amendes. Le mien fait plutôt dans la petite monnaie. Ma mère est gênée quand elle sort ses cents à la caissière du Delhaize.
-C’est un faux-monnayeur !
-Ils sont vraiment différents !
-Heureusement qu’on les voit pas tous les jours !
-Mon père, tout curé qu’il est, a dit à ma mère qu’il ne croyait pas en dieu !
-Langue de velours va à la messe tous les dimanches !
-…Mon père est socialiste !
-Ma mère dit que le mien est comme Reynders, il vote libéral, mais pour avoir un euro de lui, tu peux toujours courir…
-Parfois, quand elle a le cafard, ma mère dit qu’elle va aller le dénoncer à l’évêché !
-La mienne, depuis quelques temps, est plus heureuse quand mon père ne vient pas. Elle se maquille et revient tard toute gaie.
-J’en ai marre que tous les gens l’appellent « mon père », alors que c’est le mien.
-Qu’est-ce qu’on peut faire, nous ?
-Les grandes personnes appellent ça l’amour.
-Je te jure bien qu’on ne me verra jamais amoureux.
-Je te comprends…